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Date : 20110620

Dossier : T‑330‑11

Référence : 2011 CF 732

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 20 juin 2011

En présence de monsieur le juge de Montigny

 

ENTRE :

 

FRED MUSKEGO

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

LE COMITÉ D’APPEL DE LA NATION CRIE DE NORWAY HOUSE

ET ERIC ROSS, BETSY DEAFFIE ET ELEANOR MONIAS

 

 

 

défendeurs

 

 

et

 

 

ANDREW SIMPSON

 

 

intervenant

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision rendue le 28 janvier 2011 par les défendeurs, le Comité d’appel de la Nation crie de Norway House (le « Comité d’appel ») et ses trois membres, Eric Ross, Betsy Deaffie et Eleanor Monias. Le demandeur, M. Fred Muskego, soutient qu’il y a lieu d’annuler la décision par laquelle le Comité d’appel a déclaré qu’il s’était rendu coupable de manœuvres corruptrices en rapport avec une élection parce que le Comité d’appel défendeur n’avait pas le pouvoir de rendre cette décision et que le processus décisionnel a été vicié en raison de manquements à l’équité procédurale et du recours à des éléments de preuve non admissibles.

 

[2]               Le 26 mai 2011, j’ai refusé de me prononcer sur une requête en sursis de la décision du Comité d’appel, présentée par le demandeur, et j’ai plutôt ordonné (avec le consentement des parties) que la demande de contrôle judiciaire soit autorisée et qu’elle soit entendue par téléconférence le 14 juin 2011. J’ai également accordé à M. Andrew Simpson l’autorisation d’intervenir.

 

[3]               Après avoir lu le dossier et les observations écrites de toutes les parties concernées, et après avoir pris en compte leurs plaidoiries, j’arrive à la conclusion que le Comité d’appel avait le pouvoir de se prononcer comme il l’a fait et qu’il n’y a pas eu violation de l’équité procédurale au cours du processus décisionnel.

 

I. Les faits

[4]               La nation crie de Norway House (« NCNH ») est une bande indienne agissant selon ses coutumes. En décembre 1997, la NCNH a adopté la NHCN la Elections Procedures Act et, le 23 janvier 1998, la bande a obtenu une dispense de l’application de l’article 74 (procédures électorales) de la Loi sur les Indiens, faisant en sorte qu’elle puisse appliquer une procédure électorale coutumière dans l’exercice de son autonomie gouvernementale. Le code électoral coutumier de la bande régit donc ses élections. Le 18 octobre 2005, la Norway House Cree Nation Elections Procedures Act modifiée (ci‑après l’« EPA ») a été adoptée et ratifiée par le chef et le conseil.

 

[5]               L’EPA prévoit la tenue d’élections générales tous les quatre ans. De telles élections ont eu lieu le 16 mars 2006, en vue d’élire le chef et les membres du conseil (l’« élection générale de 2006 »). Le demandeur s’est porté candidat au poste de chef au cours de cette élection, mais il n’a pas été élu.

 

[6]               L’EPA énumère les motifs qui permettent d’interjeter appel des résultats de l’élection et prévoit la constitution d’un comité, par le chef et le conseil avant l’élection, qui est chargé d’entendre ces appels. L’alinéa 7.1a) de l’EPA autorise tout candidat ou électeur qui a des motifs raisonnables de croire qu’[traduction] « il y a eu manœuvre corruptrice en rapport avec l’élection » à interjeter appel à l’égard de l’élection d’un candidat dans les 30 jours du scrutin. L’élection de trois candidats – les conseillers Eliza Clarke, Mike Muswagon et Langford Saunders – a fait l’objet d’un appel dans les 30 jours suivant l’élection générale de 2006 (l’« appel de Wilson »). Dans son appel, Wilson alléguait que ces personnes avaient de façon illégitime approuver l’attribution de logements, de roulottes et de sommes provenant du fonds pour besoins spéciaux, sans se conformer aux règles du conseil de bande, et ce, dans le but d’obtenir des votes à l’élection. Le demandeur dans la présente demande n’était pas visé par cet appel, puisqu’il n’avait pas été élu lors de l’élection de 2006.

 

[7]               Avant l’audition de l’appel de Wilson, un membre du Comité d’appel a démissionné. L’EPA ne précise pas la procédure à suivre lorsqu’un ou plusieurs membres du comité démissionnent ou n’est plus en mesure d’exercer ses fonctions une fois que l’élection générale pour laquelle le comité a été établi a eu lieu. Étant donné que le chef et le conseil de la NCNH n’ont pas été en mesure de nommer un cinquième membre, le président du Comité d’appel a présenté un renvoi à la Cour fédérale en vue de déterminer si le Comité composé de quatre membres avait le pouvoir d’exercer les fonctions du Comité d’appel. Le 9 novembre 2006, la juge Judith A. Snider a statué que le Comité d’appel avait, pourvu qu’il soit composé d’au moins trois membres, le pouvoir d’exercer ses fonctions en ce qui touche l’audition de l’appel interjeté devant lui au sujet de l’élection générale de 2006.

 

[8]               Le 10 mai 2007, le Comité d’appel défendeur a statué que les conseillers Clarke, Muswagon et Saunders n’étaient pas coupables de manœuvres corruptrices et a rejeté l’appel de Wilson. Les membres du Comité sont arrivés à cette conclusion parce que les appelants [traduction] « n’ont produit aucun témoin qui a prétendu qu’on lui avait promis des fonds pour besoins spéciaux ou un logement en échange de son vote ».

 

[9]               L’appelant, M. Wilson, a par la suite présenté devant la Cour fédérale une demande de contrôle judiciaire de la décision du Comité d’appel. Le 16 octobre 2008, la juge Eleanor R. Dawson (maintenant juge à la Cour d’appel fédérale) a conclu que le Comité d’appel avait commis une erreur de droit lorsqu’il a appliqué le critère servant à déterminer s’il y avait eu manœuvre corruptrice en rapport avec l’élection. Elle a estimé que le Comité d’appel était tenu, aux termes de l’EPA, de prendre en compte la nature cumulative de la conduite des candidats ainsi que leur intention pour déterminer s’il y avait eu « manœuvre corruptrice », plutôt que de limiter son analyse à la question étroite de savoir si l’on avait promis des avantages à des témoins en échange de leur vote. La décision du Comité a donc été annulée et a fait l’objet d’un renvoi pour qu’une nouvelle décision soit rendue : Wilson c. Comité d’appel de la Nation crie de Norway House, 2008 CF 1173.

 

[10]           Par la suite, le 18 janvier 2009, le Comité d’appel défendeur a déclaré les conseillers Clarke, Muswagon et Saunders coupables de manœuvres corruptrices aux termes de l’EPA. Par suite de cette décision les déclarant coupables de manœuvre corruptrice en rapport avec l’élection, les trois conseillers ont dû en application de l’al. 9.1f) de l’EPA cesser d’occuper leurs postes. Une élection partielle eu lieu le 17 mars 2009 pour combler les postes vacants. Le demandeur s’est porté candidat au poste de conseiller dans le cadre de cette élection partielle et il a été élu.

 

[11]           L’élection du demandeur lors de l’élection partielle de 2009 a fait l’objet d’un appel interjeté à la fin du mois de mars 2009 par M. Andrew Simpson et par M. Edward Gamblin, maintenant décédé (l’« appel de Simpson »). L’avis d’appel a été déposé sur le fondement de l’alinéa 7.1a) de l’EPA, et il y était allégué que le demandeur avait eu recours à des manœuvres corruptrices. Plus précisément, l’appel se fondait sur des allégations liées à des manœuvres corruptrices auxquelles se serait livré le demandeur à l’occasion de l’élection générale de 2006, et non à des événements ayant entouré l’élection partielle de 2009.

 

[12]           La question de savoir si le Comité d’appel défendeur avait compétence pour entendre l’appel de Simpson a été soulevée par M. Muskego. La compétence du Comité était contestée notamment au motif que seulement trois des cinq membres initialement nommés au Comité demeuraient en poste (un deuxième membre avait démissionné depuis l’élection générale de 2006), et que l’appel avait été interjeté plus de 30 jours après l’élection générale de 2006.

 

[13]           En réponse, le Comité d’appel défendeur a présenté un autre renvoi à la Cour, afin que soit précisée la procédure à suivre par le Comité pour l’examen de l’appel de Simpson. Le juge Paul S. Crampton a rendu une ordonnance motivée le 15 octobre 2010 (numéro de dossier T‑1780‑09). Dans cette ordonnance, le juge Crampton a statué que le Comité d’appel avait le pouvoir d’entendre l’appel de Simpson relatif à l’élection partielle de 2009, étant donné que cet appel était manifestement une [traduction] « procédure électorale additionnelle découlant d’un appel quelconque au sens de » l’article premier de l’EPA étant donné que le résultat contesté était celui d’une élection partielle découlant d’un appel relatif à l’élection générale de 2006. Le juge Crampton a jugé que le Comité, comme il était constitué, un aspect également contesté par le demandeur pour divers motifs, avait le pouvoir de se prononcer sur l’appel de Simpson. Dans son ordonnance, le juge Crampton a déclaré que le Comité, alors composé de trois membres, avait « tous les pouvoirs nécessaires pour exécuter la totalité des fonctions que l’EPA a établies, dans la mesure où ces fonctions se rapportent à l’audition de l’appel de Simpson ».

 

[14]           Le différend opposant les parties à la présente demande de contrôle judiciaire porte notamment sur l’interprétation à donner à l’ordonnance du juge Crampton. Le Comité d’appel défendeur a interprété l’ordonnance comme s’il lui reconnaissait pleine compétence pour entendre l’appel de Simpson au sujet de la conduite du demandeur, alors que celui‑ci soutient que la décision du juge Crampton répondait uniquement à la question de savoir si un comité composé de trois membres avait le pouvoir de le faire et non à la question de savoir si les événements de 2006 pouvaient être visés par l’appel. Le Comité d’appel défendeur, apparemment convaincu de ses compétences, a toutefois rendu une décision au sujet de l’appel de Simpson le 28 janvier 2011. La décision est décrite ci‑dessous.

 

II. La décision attaquée

[15]           Dans ses motifs, où figure notamment le passage suivant, le Comité d’appel défendeur s’appuie d’abord sur l’ordonnance du juge Crampton pour confirmer son pouvoir de rendre une décision :

 

[traduction]

3. Est également pertinente à l’appel relatif à l’élection, l’ordonnance de monsieur le juge Crampton, dossier de la CF T‑1780‑09, qui confirme que le Comité d’appel en matière d’élection, constitué des trois membres qui le composaient à l’origine, conserve compétence à l’égard de l’appel de Simpson portant sur l’élection partielle qui a eu lieu le 17 mars 2009. À son avis, l’appel découle d’une « procédure électorale additionnelle » faisant suite à l’élection du 16 mars 2006.

 

 

[16]           Le Comité d’appel défendeur expose ensuite les faits, sous‑jacents à l’appel de Wilson, qui concernent les résultats de l’élection générale de 2006 et qui ont entraîné la vacance des sièges des conseillers Clarke, Muswagon et Saunders en application de l’alinéa 9.1f) de l’EPA. L’élection partielle de 2009 qui visait à combler les postes en question. Cette élection partielle a débouché sur l’élection du demandeur M. Muskego, et ensuite, sur l’appel de Simpson contre l’élection de ce dernier.

 

[17]           Le Comité d’appel défendeur a ensuite décrit les preuves déposées par les parties, soulignant que, plutôt que de déposer de nouvelles preuves, l’avocat de M. Simpson (qui a formé l’appel), s’est fondé sur la transcription des audiences relatives à l’appel de Wilson (qui portait sur les événements ayant entouré l’élection générale de 2006).

 

[18]           Le Comité d’appel défendeur a résumé ainsi l’allégation de l’appelant Simpson voulant que M. Muskego soit coupable de manœuvre corruptrice par association à un groupe ayant eu recours à des manœuvres corruptrices, allégation qui reposait sur les preuves présentées à l’audition de l’appel de Wilson :

 

[traduction]

[14]    [Les appelants] soutiennent que M. Fred Muskego faisait partie du groupe dont la conduite a déclenché l’application de l’al. 9.1f) de la Elections Procedures Act, et qui a entraîné l’élection partielle qui a été tenue en mars 2009. La différence qui existe sur le plan des faits entre l’appel précédent et l’appel actuel est que le défendeur Fred Muskego n’a pas été élu lors de l’élection de 2006. Par conséquent, bien que le défendeur ait été nommé en tant que partie dans les appels précédents, il n’occupait plus un poste public et, dans le contexte de l’appel de Wilson, le Comité des appels en matière d’élection n’avait pas compétence à son égard et M. Muskego ne pouvait être soumis à l’application de l’al. 9(1)f) de la Elections Procedures Act.

 

 

[19]           Le Comité d’appel défendeur reprend le critère juridique appliqué par la juge Dawson pour déterminer s’il y a eu manœuvre corruptrice, suivant lequel le Comité devait prendre en compte « la nature cumulative de la conduite des […] candidats réélus » ainsi que les motivations ou l’intention sous‑jacentes à la manœuvre corruptrice alléguée pour décider si la manœuvre en question avait pour but d’influencer irrégulièrement le résultat de l’élection.

 

[20]           Le Comité d’appel défendeur a considéré l’appel de Simpson comme [traduction] « la continuation de l’élection du 16 mars 2006 ayant mené aux appels et à la conclusion qu’il y avait eu manœuvre corruptrice en rapport avec l’élection, et à la décision de tenir une élection partielle, sur laquelle porte la présente décision d’appel ».

 

[21]           Le Comité d’appel défendeur a fait sienne la conclusion du juge Crampton selon laquelle la preuve de M. Muskego ne l’avait pas convaincu « qu’il ne bénéficierait pas d’une audience complète et impartiale de la part du comité actuellement constitué ».

 

[22]           Le Comité d’appel défendeur a ensuite résumé les conclusions de l’appel de Wilson, dans lequel il a été jugé que les conseillers Clarke, Muswagon et Saunders :

 

a)   se sont réunis en secret;

 

b)   n’ont pas suivi la politique écrite approuvée par la NCNH portant sur l’attribution de logements;

 

c)   ont omis de prendre des décisions en se conformant aux exigences d’approbation et de ratification par le conseil;

 

d)   ont omis de fournir des renseignements à d’autres candidats;

 

e)   ont utilisé les renseignements dont ils disposaient à l’époque en qualité de conseillers pour en tirer un avantage indu;

 

f)    ont omis de suivre la politique de la NCNH à l’égard de l’utilisation du fonds pour besoins spéciaux en attribuant des sommes extraordinaires, prélevées sur les fonds pour besoins spéciaux, à des membres de la bande avant l’élection en question.

 

[23]           Le Comité d’appel a en outre souscrit aux conclusions du juge Crampton selon lesquelles l’appel de Simpson était fondé sur les mêmes faits que l’appel de Wilson. Il a conclu [traduction] « en se basant sur l’appel de Wilson, et considérant la conduite du défendeur dans son ensemble, que les actes qu’il a posés personnellement constituaient une manœuvre corruptrice au sens de la Elections Procedures Act » et a fait droit à l’appel. Le Comité d’appel a appliqué l’alinéa 9.1f) de l’EPA, et déclaré M. Muskego coupable de manœuvre corruptrice en rapport avec une élection, et donc, inhabile à se porter candidat pour une période de six ans.

 

III. Les questions en litige

[24]           La présente demande de contrôle judiciaire soulève principalement deux questions :

 

1.      Le Comité d’appel défendeur avait‑il compétence pour entendre l’appel de Simpson?

 

2.      Le Comité d’appel défendeur a‑t‑il manqué à l’équité procédurale en permettant à M. Simpson de présenter des éléments de preuve, antérieurement recueillis en ce qui concerne l’élection générale de 2006, dans le cadre de l’appel relatif à l’élection partielle de 2009? La défense présentée par le demandeur s’en est‑elle trouvée compromise?

 

 

IV. Analyse

[25]           Suivant l’arrêt Dunsmuir c. Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9 de la Cour suprême du Canada, la norme de contrôle applicable à la première question est celle de la décision raisonnable. Écrivant au nom de la majorité, les juges Michel Bastarache et Louis LeBel ont déclaré que la norme de la raisonnabilité s’applique lorsque la question touche l’interprétation de la loi constitutive d’un tribunal administratif ou « une loi étroitement liée à son mandat et dont il a une connaissance approfondie » (au par. 54). Étant donné que l’EPA est manifestement la loi « d’origine » du Comité d’appel, la retenue s’impose. Par conséquent, la Cour ne peut intervenir que si la décision ne fait pas partie des « issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit », ou si les motifs ne sont pas suffisamment justifiés, transparents ou intelligibles (au par. 47).

 

[26]           Pour ce qui est de la question relative à l’équité procédurale, il est bien établi que la norme de contrôle est celle de la décision correcte : voir, par exemple, Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP) c. Ontario (Ministre du Travail), 2003 CSC 29, [2003] 1 R.C.S. 539, au par. 100; PG du Canada c. Sketchley, 2005 CAF 404, au par. 53. Lorsque cette norme est appliquée, il n’y a pas lieu de faire preuve de retenue.

 

A. Le Comité d’appel défendeur avait‑il compétence pour entendre l’appel de Simpson?

 

[27]           M. Muskego soutient que le Comité d’appel défendeur a outrepassé sa compétence en entendant l’appel après l’expiration du délai de 30 jours suivant l’élection de 2006, estimant à tort que l’élection partielle de 2009 était en quelque sorte la « continuation » de l’élection de 2006; ce faisant, il s’est saisi d’un appel déposé peu après l’élection de 2009 et non celle de 2006. Si une élection partielle comme celle de 2009 était considérée comme la « continuation » d’une élection générale, cette dernière perdrait son caractère définitif et le délai de 30 jours serait privé de son effet.

 

[28]           M. Muskego souligne que l’article 7.1 de l’EPA prévoit que l’élection d’un candidat ne peut faire l’objet d’un appel que dans les 30 jours suivant l’élection en question. Il soutient que, contrairement à ce qu’affirme le Comité d’appel dans ses motifs, il n’a pas été désigné comme partie dans l’appel de Wilson relatif à l’élection générale de 2006. Parce qu’il n’a fait l’objet d’aucun appel déposé dans les 30 jours de l’élection de 2006, il soutient que sa conduite à l’égard de cette élection ne peut faire l’objet d’un appel, et qu’accepter qu’il en soit autrement priverait de sa raison d’être le délai de 30 jours prévu à l’article 7.1. Il soutient que le Comité d’appel n’a donc pas le pouvoir d’entendre l’appel de Simpson, qui concerne les événements ayant entouré l’élection générale de 2006 et qui a été déposé plus de 30 jours après l’élection.

 

[29]           En outre, le demandeur note que l’article 7.1 énonce clairement que le candidat ou l’électeur peut introduire un appel « dans les 30 jours » si cette personne estime qu’il y a eu une « manœuvre corruptrice en rapport avec l’élection », et non « en rapport avec UNE élection ». Selon le demandeur, cela signifie que l’électeur ne peut déposer un appel qu’à l’égard d’une manœuvre en rapport avec une élection tenue dans les 30 derniers jours et non à l’égard d’une manœuvre en rapport à une élection passée, quelle qu’elle soit.

 

[30]           Enfin, le demandeur fait valoir qu’une décision portant que l’élection partielle de 2009 est la « continuation » de l’élection générale de 2006 entraînerait le chaos dans les procédures électorales en prolongeant le délai d’appel indéfiniment et en ouvrant la porte à une myriade de situations et de questions hypothétiques qui ne sont pas envisagées par l’EPA. Par exemple, soutient‑il, l’incertitude persisterait pour les candidats non élus lors d’une élection parce que ces derniers pourraient toujours être visés par des appels concernant leur conduite au cours d’élections antérieures s’ils se portaient candidats dans une élection partielle.

 

[31]           Avant d’examiner ces arguments, il est utile de reproduire intégralement les dispositions pertinentes de l’EPA :

[traduction]

1.1 Dans la présente Loi :

 

a) Comité d’appel  Le comité composé de cinq (5) personnes nommées par le chef et les membres du conseil de la Nation crie de Norway House, qui ne participent d’aucune manière au processus électoral; sont donc exclus, notamment, les fonctionnaires électoraux, les agents électoraux, les candidats, et les personnes travaillant pour le compte d’un candidat entre le moment du déclenchement des élections et la date du scrutin. Le Comité d’appel est constitué quatre (4) mois avant la date de l’élection. Les cinq (5) membres du Comité d’appel sont des membres de la Nation crie de Norway House.

 

Les personnes ainsi nommées sont chargées d’examiner les appels touchant toutes questions reliées à l’élection tel que prévu dans la présente loi, y compris toute procédure d’élection additionnelle découlant d’un appel quelconque.

 

7.1 Dans les trente (30) jours suivant l’affichage de la déclaration du fonctionnaire électoral, aux termes de l’article 5.15, tout candidat ou électeur qui a des motifs raisonnables de croire, selon le cas :

 

a) qu’il y a eu une manœuvre corruptrice en rapport avec l’élection,

 

b) que les procédures prévues à la présente loi n’ont pas été respectées,

 

c) qu’une personne n’était pas habile à être candidate ou électeur en application de la présente loi,

 

peut interjeter appel à l’égard de l’élection d’un candidat ou de candidats en déposant un avis écrit auprès du fonctionnaire électoral exposant les motifs de l’appel.

 

7.2 Sur réception de l’avis d’appel ci‑dessus, le fonctionnaire électoral convoque immédiatement une réunion du Comité d’appel.

 

7.3 Le Comité d’appel entend l’appel dans les trente (30) jours suivant le dépôt de l’avis d’appel et rend sa décision dans les dix (10) jours suivant l’audience d’appel. Le Comité d’appel n’est pas lié par les règles relatives à la présentation de la preuve. La décision du Comité d’appel est définitive et exécutoire. Seule une question de droit peut faire l’objet d’un appel devant un tribunal judiciaire.

 

Lorsque le Comité d’appel statue qu’un candidat ou des candidats n’ont pas été élus conformément aux procédures prévues à la présente loi, le candidat concerné cesse d’occuper son poste, et le fonctionnaire électoral convoque une assemblée de mise en candidature et tient une élection pour combler le ou les postes vacants conformément à l’article 4 de la présente loi.

 

9.1 Le poste de chef ou de conseiller devient vacant lorsque la personne qui occupe ce poste :

 

[…]

 

f) est reconnu coupable de manœuvre corruptrice, d’avoir accepté un pot‑de‑vin, de malhonnêteté ou de méfait, en rapport avec une élection.

 

Une personne ayant cessé d’occuper un poste en application de l’alinéa 9.1f) ne peut pendant une période de six (6) ans se porter candidate à une élection.

 

 

[32]           Après avoir lu attentivement l’EPA, et plus particulièrement l’alinéa 1a) qui confère compétence au Comité d’appel, j’estime que l’argument de M. Muskego est mal fondé. Cette disposition accorde manifestement au Comité le pouvoir d’examiner « toute procédure électorale additionnelle découlant d’un appel ». L’élection partielle qui a été tenue le 17 mars 2009 était manifestement une « procédure électorale additionnelle » découlant de l’appel de Wilson et, à ce titre, constituait effectivement la continuation de l’élection générale du 16 mars 2006.

 

[33]           C’est effectivement la conclusion à laquelle est arrivé mon collègue le juge Crampton dans une ordonnance du 15 octobre 2010, dans laquelle il a déclaré :

 

Je suis persuadé que le comité a compétence pour entendre l’appel de Simpson à l’égard de l’élection spéciale qui a eu lieu le 17 mars 2009. À mon avis, cet appel est à l’évidence une [traduction] « procédure d’élection additionnelle découlant d’un appel quelconque », comme l’envisage l’article premier de l’EPA. Il s’agit d’une mesure consécutive à l’appel initial qui a été interjeté en rapport avec l’élection générale de 2006, à l’égard de laquelle le comité a été établi à juste titre, conformément à l’article premier de l’EPA.

 

Dossier de requête du demandeur, aux p. 106 et 107.

 

 

[34]           Il est vrai que cette ordonnance découlait d’une demande qui visait essentiellement à préciser si le Comité d’appel, qui comprenait à l’époque trois et non cinq membres, avait encore le pouvoir d’entendre l’appel de Simpson. J’estime néanmoins qu’il est raisonnable de penser que le juge Crampton était conscient de la question de la prescription. S’il avait estimé que le Comité n’avait plus le pouvoir d’entendre l’appel parce que celui‑ci n’avait pas été interjeté dans les 30 jours suivant l’élection de 2006, il n’aurait certainement pas déclaré que le Comité a « tous les pouvoirs nécessaires pour exécuter la totalité des fonctions que l’EPA a établies, dans la mesure où ces fonctions se rapportent à l’audition de l’appel de Simpson ». Il ressort à tout le moins de façon implicite de son ordonnance qu’il n’était pas interdit à M. Simpson d’introduire un appel après l’élection partielle de 2009 simplement parce que plus de 30 jours s’étaient écoulés depuis l’élection de 2006. En outre, l’ordonnance ne laisse aucunement entendre que le Comité d’appel n’avait pas le pouvoir d’examiner les événements de 2006 dans le cadre de l’appel de Simpson; en fait, étant donné que l’élection partielle de 2009 visée par l’appel était étroitement liée à l’élection générale de 2006, il n’est pas surprenant que les événements de 2006 soient pris en compte dans l’appel de 2009.

 

[35]           Étant donné que M. Muskego n’a pas contesté l’ordonnance du juge Crampton par voie de demande de contrôle judiciaire, il ne peut maintenant l’attaquer de façon indirecte en utilisant un moyen détourné.

 

[36]           Pour ce qui est de la décision du juge Michael L. Kelen dans Kootenhayoo c. Première nation Alexis (Conseil), 2003 CF 1128, qu’invoque le demandeur, je conviens avec le défendeur et l’intervenant qu’on peut sans difficulté distinguer cette décision de la présente espèce parce que dans l’affaire Kootenhayoo le libellé de l’EPA était très différent de l’EPA en jeu en l’espèce. Dans l’affaire Kootenhayoo, la disposition pertinente prévoyait qu’un électeur [traduction] « peut faire appel du résultat des élections, des élections partielles ou du deuxième tour du scrutin », à l’intérieur d’un délai de cinq jours consécutifs. Le juge Kelen a interprété cette disposition et statué que les rédacteurs avaient de toute évidence considéré que chacune de ces élections constituait une circonstance distincte et avait envisagé la possibilité qu’il puisse y avoir appel dans l’un ou l’autre cas. Il en est manifestement autrement de l’al. 1a) de l’EPA applicable dans la présente espèce, qui ne fait mention ni des élections partielles ni des deuxièmes tours de scrutin, mais uniquement de « toute procédure d’élection additionnelle découlant d’un appel quelconque ». Pour ce motif, le raisonnement qu’a tenu le juge Kelen dans Kootenhayoo n’est pas applicable dans le contexte de la présente affaire.

 

[37]           Enfin, je ne pense pas que l’on puisse soutenir sérieusement qu’autoriser le Comité à trancher l’appel de Simpson entraînerait le chaos dans les procédures électorales, rendrait sans effet le délai de 30 jours et ferait en sorte que les candidats défaits courraient indéfiniment le risque de faire l’objet d’une procédure d’appel. S’il est vrai, comme l’a noté mon collègue, le juge Crampton, que l’EPA n’expose pas clairement la procédure à suivre dans le cas où un ou plusieurs membres du Comité démissionnent, l’al. 1a) précise très clairement que le Comité d’appel ne peut entendre que les appels interjetés dans les 30 jours suivant une élection ou une autre procédure électorale découlant d’un appel. Cela signifie selon moi que le Comité d’appel n’a pas compétence à l’égard des appels relatifs à une élection partielle tenue avant la dernière élection générale, puisque la personne élue au cours de cette élection partielle n’occuperait son poste que jusqu’à la prochaine élection générale.

 

[38]           Pour tous les motifs qui précèdent, je conclus que le Comité d’appel pouvait raisonnablement statuer qu’il avait compétence pour entendre l’appel en cause en l’espèce.

 

B. Le Comité d’appel défendeur a‑t‑il manqué à l’équité procédurale en permettant à M. Simpson de présenter des éléments de preuve, antérieurement recueillis en ce qui concerne l’élection générale de 2006, dans le cadre de l’appel relatif à l’élection partielle de 2009? La défense présentée par le demandeur s’en est‑elle trouvée compromise?

 

 

[39]           Le demandeur soutient que le Comité d’appel a enfreint les règles d’équité procédurale en acceptant en preuve les transcriptions de l’ensemble de l’appel de Wilson relatif à l’élection générale de 2006. Il indique que ces transcriptions comprennent le témoignage de M. Balfour, qui était le chef à l’époque, et du conseiller M. Apetagon, également en poste à l’époque, qui ont été contre‑interrogés par les trois anciens conseillers (Clarke, Muswagon et Saunders). À la différence des anciens conseillers, le demandeur n’a jamais eu la possibilité de contre‑interroger les témoins Balfour et Apetagon, dont les témoignages semblent l’inculper. Le demandeur prétend également que les dépositions de ces deux témoins constituent une preuve par ouï‑dire étant donné qu’ils n’ont pas assisté à l’audience.

 

[40]           Enfin, le demandeur soutient que sa défense a été compromise, étant donné que trois années se sont écoulées depuis qu’il a perdu l’élection générale de 2006; s’il avait su que son comportement lui serait reproché, il aurait réuni des éléments de preuve et des documents, et se serait assuré de pouvoir compter sur des témoins. Après tout ce temps, il dit ne plus être en mesure de préparer une défense appropriée.

 

[41]           Pour qu’ils puissent paraître convaincants à première vue, les arguments du demandeur doivent être rejetés. Tout d’abord, et surtout, il semble bien que M. Muskego a eu la possibilité de s’opposer à l’utilisation de la preuve recueillie dans le cadre de l’appel de Wilson, mais qu’il s’est abstenu de le faire, comme il s’est également abstenu de citer des témoins. Cela ressort de l’affidavit non contesté de M. Eric Ross, président du Comité d’appel :

 

[traduction]

21. L’avocat de M. Andrew Simpson a versé au dossier toute la preuve antérieurement recueillie dans le cadre de l’appel relatif à l’élection de 2006. Avant que le Comité d’appel en matière d’élection admette ces preuves dans le cadre de l’appel de Simpson dont il est actuellement saisi, j’ai donné à M. Muskego la possibilité de s’y opposer; il s’agit d’éléments de preuve ayant mené à la conclusion que ses anciens collègues étaient coupables de manœuvre corruptrice en rapport avec l’élection. M. Muskego n’a pas exprimé d’objection et a accepté que la preuve soit versée au dossier.

 

22. Au cours de l’audition de l’appel de Simpson, M. Muskego n’a fourni aucun élément de preuve permettant de conclure qu’il ne faisait pas partie du groupe de conseillers dont les actions ont débouché sur la décision antérieurement rendue dans l’appel concernant l’élection de 2006 interjeté aux termes de l’art. 7.1 de l’EPA. Aucun nouveau témoin n’a été convoqué et l’audience s’est terminée à 17 h, le 18 janvier 2011.

 

 

[42]           Il est bien établi que les questions d’équité procédurale doivent être soulevées à la première occasion par la partie concernée. L’omission de le faire constitue une renonciation tacite : voir, par exemple, la décision de la Cour dans Kamara c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 448 :

[26]   […] La jurisprudence de la Cour est claire : les questions de cette nature, qui portent sur l’équité procédurale, doivent être soulevées à la première occasion. Or, la demanderesse en l’espèce ne s’est plainte en aucun moment. Son défaut de formuler une objection au stade de l’audience équivaut à une renonciation tacite relativement à tout manquement perçu à l’équité procédurale ou à la justice naturelle. Voir Restrepo Benitez et al c. MCI, 2006 CF 461 (CanLII), 2006 CF 461 aux paragraphes 220 et 221, 232 et 236, et Shimokawa c. MCI, 2006 CF 445 (CanLII), 2006 CF 445 aux paragraphes 31 et 32 où la Cour cite l’arrêt Geza c. MCI2006 CAF 124 (CanLII), 2006 CAF 124 au par. 66.

 

La même règle a été confirmée dans Uppal c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 338, aux par. 51 et 52.

 

[43]           Même en tenant compte du fait que M. Muskego n’était pas représenté par un avocat devant le Comité d’appel, j’estime que c’est à ce moment qu’il aurait dû s’opposer à ce que les transcriptions de l’appel de Wilson soient versées en preuve. En fait, M. Muskego a vivement contesté la compétence du Comité d’appel, mais n’a rien dit au sujet de la nature des éléments de preuve devant le Comité – ce que M. Muskego ne dément pas, même dans son propre affidavit –, et il n’a pas tenté de contre‑interroger M. Ross au sujet de son affidavit. Il n’a pas non plus déposé d’autres affidavits dans le cadre de la présente demande de contrôle judiciaire, et ce, bien qu’il ait eu la possibilité de le faire. Par conséquent, j’estime qu’il est maintenant trop tard pour prétendre que le processus suivi par le Comité d’appel n’était pas équitable.

 

[44]           M. Muskego aurait pu fournir des preuves, documentaires ou testimoniales, pour établir qu’il ne faisait pas partie du groupe des conseillers dont les actions ont débouché sur la décision antérieure relative à l’appel concernant l’élection de 2006. Il aurait également pu décider d’appeler comme témoins MM. Balfour et Apetagon et de les interroger au sujet du témoignage qu’ils ont livré en 2006. Il était manifestement au courant du genre de manœuvre corruptrice qui lui était reprochée, puisque la décision du Comité relative à l’appel de Wilson faisait explicitement mention d’actions auxquelles il avait pris part (voir par exemple les par. 49 et 54 de la décision, dossier de requête du demandeur, aux p. 73 et 74). Il a pourtant choisi d’axer son argumentation sur la compétence du Comité d’appel, et il n’a pas présenté l’ombre d’un élément de preuve susceptible de réfuter les conclusions du Comité dans l’appel de Wilson.

 

[45]           Par ailleurs, on peut facilement comprendre pourquoi M. Muskego n’était partie à aucun des appels concernant l’élection générale. Il ressort très clairement de l’article 7.3 de l’EPA que le Comité avait uniquement compétence pour entendre un appel contre un candidat élu. Si M. Muskego avait été élu, il aurait très probablement été désigné comme partie à l’appel initial de Wilson en 2006 (voir l’affidavit non contesté d’Eric Ross, au par. 13).

 

[46]           De plus, il existe sans doute d’autres raisons d’accepter la preuve en question, en plus du fait que le demandeur  y a consenti au moment de l’audition de l’appel. Le demandeur soutient que les transcriptions sont inadmissibles parce qu’elles constituent du ouï‑dire, mais il est possible qu’elles aient de toute façon été admissibles à titre d’exception à l’exclusion du ouï‑dire. Dans les arrêts R c. Starr, 2000 CSC 40, R c. Khelawon, 2006 CSC 57 et R c. Mapara, 2005 CSC 23, la Cour suprême du Canada a jugé que des déclarations extrajudiciaires sont admissibles lorsqu’il est démontré qu’elles sont fiables et nécessaires. En l’espèce, les transcriptions répondent manifestement au critère de la fiabilité, étant donné que les témoins qui ont témoigné dans l’appel de 2006 ont déposé au sujet d’événements pratiquement identiques à ceux qui ont été examinés dans l’appel de 2009 et ils ont été contre‑interrogés à ce moment‑là par les ex‑conseillers Clarke, Muswagon et Saunders, qui étaient, en 2006, accusés d’avoir eu le même comportement que celui qui est aujourd’hui reproché au demandeur. Je ne dispose pas de suffisamment de renseignements pour déterminer si le critère de la nécessité est également rempli, parce qu’il est difficile de savoir si les témoins auraient pu témoigner à nouveau, mais, quoi qu’il en soit, il n’est pas nécessaire que je me prononce sur la question du ouï‑dire, étant donné que l’article 7.3 de l’EPA énonce que le Comité d’appel n’est pas lié par les règles relatives à la présentation de la preuve et qu’il peut donc à sa discrétion accepter des éléments de preuve comme les transcriptions.

 

[47]           Je conclus donc que le Comité d’appel n’a pas manqué à l’équité procédurale, et que M. Muskego n’a pas été empêché de présenter une défense pleine et entière contre les allégations de manœuvre corruptrice.

 

[48]           Avant de conclure, il importe de traiter brièvement de la réparation subsidiaire sollicitée par le demandeur. Comme il a déjà été mentionné, le demandeur sollicite de la Cour une déclaration établissant, dans le cas où la décision du Comité d’appel défendeur serait confirmée et qu’il serait déclaré inhabile, que la période d’inhabilité prendra fin en 2012 (c.‑à‑d., six ans après les événements de 2006) et non pas en 2017 (c.‑à‑d., six ans après la date de la décision du Comité d’appel). Il serait, à mon avis, peu judicieux et peu approprié que la Cour se prononce sur cette question.

 

[49]           Dans sa décision, le Comité d’appel a déclaré que le demandeur serait inhabile pour une période de six ans, sans autre précision. Cette sanction reflète le libellé de l’article 9.1 de l’EPA, selon lequel [traduction] « [t]oute personne qui cesse d’occuper un poste aux termes de l’alinéa 9.1f) ne peut pendant une période de six (6) ans se porter candidate à une élection. »

 

[50]           Comme l’a noté à juste titre l’intervenant, cette demande de réparation subsidiaire ne figurait pas dans l’avis de demande du demandeur et elle a été soulevée pour la première fois dans ses observations écrites. En outre, à ce stade, la question est théorique, puisque nous ne savons pas si le fonctionnaire électoral estimera que la période d’inhabilité expire en 2012 ou en 2017. Si jamais le demandeur était empêché de poser sa candidature à une élection tenue en 2012, il pourrait demander l’avis du fonctionnaire électoral aux termes de l’article 5.3 de l’EPA. C’est uniquement une fois cette étape franchie que M. Muskego pourra présenter une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire, aux termes de l’article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales. Il serait donc prématuré que la Cour se prononce sur cette question.

 

[51]           La présente demande de contrôle judiciaire est par conséquent rejetée, avec dépens.

 


ORDONNNANCE

 

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est rejetée avec dépens.

 

« Yves de Montigny »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Chantal DesRochers, LL.B., D.E.S.S. en trad.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                    T‑330‑11

 

INTITULÉ :                                                   FRED MUSKEGO c.
COMITÉ D’APPEL DE LA NATION CRIE DE NORWAY HOUSE ET AL.

           

LIEU DE L’AUDIENCE :                             Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           Le 14 juin 2011

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                                   LE JUGE DE MONTIGNY

 

DATE DES MOTIFS :                                  Le 20 juin 2011

 

 

COMPARUTIONS :

 

Fred Muskego

 

POUR LE DEMANDEUR

(POUR SON PROPRE COMPTE)

 

Leah Ballantyne

 

POUR LES DÉFENDEURS

 

Wayne M. Onchulenko

 

POUR L’INTERVENANT

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Fred Muskego

 

POUR LE DEMANDEUR

(POUR SON PROPRE COMPTE)

 

Leah Ballantyne Law Corporation

Barrister, Solicitor, Notary Public

Winnipeg (Manitoba)

 

POUR LES DÉFENDEURS

 

 

Levene Tadman Golub Law Corporation

Winnipeg (Manitoba)

POUR L’INTERVENANT

 

 

 

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