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 Date : 20111122


Dossier : T-152-10

Référence : 2011 CF 1345

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 22 novembre 2011

En présence de monsieur le juge de Montigny

 

ENTRE :

 

L'ASSOCIATION CANADIENNE DU MÉDICAMENT GÉNÉRIQUE

 

 

 

demanderesse

 

et

 

 

 

LA MINISTRE DE LA SANTÉ ET GLAXOSMITHKLINE INC.

 

 

 

défenderesses

 

 

 

 

 

           MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               Le 15 avril 2011, j’ai rejeté intégralement l’appel interjeté par l’Association canadienne du médicament générique (l'ACMG) à l’encontre de l’ordonnance du protonotaire Lafrenière, qui avait rejeté la demande de l’ACMG en raison de son absence de qualité pour agir. J’ai également adjugé les dépens à GlaxoSmithKline Inc. (GSK) et à la ministre de la Santé.

 

[2]               GSK sollicite une ordonnance d’attribution forfaitaire des dépens sur une base d’indemnisation substantielle, étant donné que les parties n’ont pas réussi à s’entendre sur la façon dont les dépens devaient être répartis. Elle demande que les dépens soient fixés à 20 000 $ (soit environ 75 pour 100 des frais réels qu’elle dit avoir engagés) et qu’on lui accorde le recouvrement complet de ses débours, d’un montant de 2 554,43 $, pour un total de 22 554,43 $.

 

[3]               La ministre de la Santé, quant à elle, n’a pas réclamé de dépens relativement à la requête présentée au protonotaire. Elle sollicite maintenant des dépens d’un montant de 2 656,50 $, calculés en conformité avec la colonne III du tarif B des Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106 [Règles], au motif que l’appel était inutile.

 

[4]               Le paragraphe 400(1) des Règles confère à la Cour le pouvoir de trancher la question des dépens selon son appréciation. Le paragraphe 400(3) des Règles établit une liste non exhaustive de facteurs dont la Cour peut tenir compte pour fixer les dépens. La règle 407 énonce qu’à défaut d’une ordonnance contraire de la Cour, les dépens partie‑partie sont taxés en conformité avec la colonne III du tarif B. Le tarif repose sur le principe voulant que l’adjudication des dépens ne vise pas à dédommager entièrement la partie qui obtient gain de cause pour les frais engagés dans une instance. Ce tarif se veut un compromis entre l’indemnisation de la partie qui a gain de cause et la non-imposition d’une charge excessive à la partie qui succombe (Apotex Inc c Wellcome Foundation Ltd. (1998), 159 FTR 233 (CF 1re inst.), conf. par (2001) 199 FTR 320 (CAF)).

 

[5]               Il est bien établi en droit que le pouvoir de la Cour d’accorder des montants dépassant ceux du tarif constitue une exception et ne doit pas être exercé à la légère. L’octroi de dépens avocat‑client est chose rare et, même dans les cas exceptionnels, ces dépens ne doivent être ni punitifs ni extravagants. 

 

[6]               L’avocat de GSK soutient que la demande de l’ACMG était sans fondement aucun puisqu’il a été jugé, tant en première instance qu’en appel, que l’AMCG n’était pas directement touchée et que, d’après la preuve produite, ni l’AMCG ni aucun des fabricants de médicaments génériques qui en sont membres n’avaient l’intention de déposer de présentation de drogue relativement à la drogue dont elle contestait l’inscription (au registre des drogues innovantes). Il a également souligné que les deux parties étaient représentées par des avocats chevronnés, car les questions en litige étaient complexes et nécessitaient l’examen de dispositions légales peu étudiées par les tribunaux. Enfin, GSK a fait valoir qu’elle avait obtenu gain de cause tant devant le protonotaire que dans le cadre de la nouvelle audience tenue devant moi.

 

[7]               Ces raisons sont nettement insuffisantes pour justifier l’octroi de dépens supérieurs à ceux prévus au tarif. Des dépens d’indemnisation substantielle ne sont normalement ordonnés qu’en cas de conduite répréhensible, scandaleuse ou outrageante. Fait intéressant, dans la décision Air Canada c Toronto Port Authority, 2010 FC 1335 [Air Canada], que GSK invoque à l’appui de ses prétentions, la Cour a conclu que l’avocat de la demanderesse avait mené une lutte âpre, menaçant de recourir à une procédure d’injonction interlocutoire jusqu’à ce qu’une date d’audience puisse être fixée par préférence. En outre, la demanderesse était consciente que la Cour n’avait pas compétence pour statuer sur l’affaire, comme en faisait foi la formulation changeante des questions qu’elle avait soulevées au fil de l’évolution du dossier, et notamment à l’audience. Enfin, la Cour a aussi tenu compte du fait que la demanderesse avait formulé des allégations essentiellement dénuées de toute pertinence concernant des actes répréhensibles et une activité anticoncurrentielle de la part des défenderesses.

 

[8]               Aucun des facteurs qui ont motivé la Cour à majorer les dépens dans l’affaire Air Canada, précitée, ne vaut en l’espèce. Les avocats représentant l’ACMG se sont comportés de manière responsable et irréprochable. Loin d’être vexatoire ou motivée par la mauvaise foi, la procédure engagée par l’ACMG ne peut être considérée comme n’ayant absolument aucun fondement et, de fait, GSK a reconnu que les questions soulevées dans la requête et en appel étaient complexes et que les tribunaux ne s’étaient jamais prononcés définitivement à leur sujet. Enfin, l’ACMG avait un intérêt réel à intenter ce recours, car la preuve donnait à penser que, selon toute probabilité, aucun fabricant de médicaments génériques ne le ferait à titre individuel. Même si la Cour a rejeté l’argument, il n’était certes pas injustifié de le lui soumettre.

 

[9]               À la lumière de ce qui précède, je ne suis pas disposé à m’écarter du tarif et en particulier, de ce qui est prévu à la colonne III. Nous ne sommes pas en présence d’un cas où la conduite d’une partie ou de son avocat mérite d’être sanctionnée. Lorsque, dans mes premiers motifs, j’ai adjugé les dépens aux défenderesses sans élaborer davantage, il était implicite que ceux-ci devaient être calculés selon la formule habituelle, en conformité avec la colonne III du tarif B. Aucun des arguments avancés par GSK ne m’a convaincu qu’il me fallait modifier ma décision sur ce point. 

 

[10]           Par conséquent, je fixe le montant des dépens et débours à 5 999,43 $ (3 445 $ au titre des dépens et 2 554,43 $ au titre des débours) pour GSK et à 2 656,50 $ (2 600 $ au titre des dépens et 56,50 $ au titre des débours) pour la ministre. 


ORDONNANCE

 

LA COUR ADJUGE des dépens de 5 999,43 $ à GSK et de 2 656,50 $ à la ministre.

 

 

« Yves de Montigny »

Juge

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Jacques Deschênes, LL.B.

 

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        T-152-10

 

INTITULÉ :                                       ASSOCIATION CANADIENNE DU MÉDICAMENT GÉNÉRIQUE c. MINISTRE DE LA SANTÉ ET GLAXOSMITHKLINE INC.

                                                           

 

OBSERVATIONS ÉCRITES ÉTUDIÉES À OTTAWA (ONTARIO)

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                       le juge de Montigny

 

DATE DES MOTIFS :                      le 22 novembre 2011

 

 

COMPARUTIONS :

 

Jonathan Stainsby

Mark Edward Davis

Julian Worsley

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Eric Peterson

 

Jason Markwell

Amy E. Grenon

POUR LA DÉFENDERESSE LA MINISTRE DE LA SANTÉ

 

POUR LA DÉFENDERESSE GSK INC.

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Heenan Blaikie s.r.l.

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

Norton Rose OR S.E.N.C.R.L., s.r.l.

Toronto (Ontario)

POUR LA DÉFENDERESSE LA MINISTRE DE LA SANTÉ

 

 

 

POUR LA DÉFENDERESSE GSK INC.

 

 

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