Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date: 20111128


Dossier : IMM-2248-11

Référence : 2011 CF 1374

Vancouver (Colombie-Britannique), le 28 novembre 2011

En présence de monsieur le juge Harrington

 

ENTRE :

 

ANA LUZ ANAYA ALONSO

CARLOS ANDRES VILLANUEVA VILLALPANDO

 

 

 

demandeurs

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

           MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               La demanderesse principale fonde sa revendication du statut de réfugié sur l’allégation selon laquelle elle aurait fait l’objet de menaces de mort de la part du sénateur Suarez Tomborrel lorsqu’elle était étudiante au Mexique. Ayant des intérêts dans l’industrie de la brique, et comme il utilisait des combustibles toxiques, celui-ci aurait voulu la tuer en raison de sa thèse universitaire portant sur la pollution engendrée par cette industrie au Mexique.

 

[2]               Le tribunal a rejeté, en l’absence de crédibilité et d’une crainte subjective, la demande d’asile des demandeurs.  Il s’agit en l’espèce d’une demande de contrôle judicaire à l’encontre de cette décision. La question est de déterminer si la décision du membre de la Section de la protection des réfugiés est raisonnable.

 

[3]               Le membre est d’avis qu’il est invraisemblable que le sénateur a voulu tuer la demanderesse principale puisque la pollution liée à cette industrie est un fait déjà bien connu et fait déjà l’objet de plusieurs publications.

 

[4]               Il n’est pas déraisonnable de la part du membre de mettre en doute le témoignage de la demanderesse. Bien qu’il est soumis que le membre a mal saisi les prétentions de la demanderesse selon lesquelles il n’y a jamais réellement eu d’analyse portant sur la toxicité et la provenance des combustibles utilisés par les paysans, je ne suis pas convaincu par l’argument.

 

[5]               Il faut se demander jusqu’à quel point la pollution engendrée par l’industrie de la brique au Mexique demeure un sujet inexploré. Contrairement à ce que prétend la demanderesse, la preuve démontre que les effets de ces combustibles ont été documentés dans divers publications par différentes organisations. Dans un article de presse déposé en preuve, il est fait mention de ceci :

Elles ont affirmé que les manufactures de briques produisent des indices élevés de contamination en utilisant du combustible de mauvaise qualité et que les émissions de ce combustible constituent un risqué élevé à la santé, car elles sont inductrices de cancer à longue échéance.

 

[6]               Un autre facteur à tenir compte est l’allégation selon laquelle la demanderesse aurait été enlevée et séquestrée pendant deux jours. Durant cette période, elle aurait été droguée et se serait retrouvée nue. Malgré cela, elle ne serait pas allée chez le médecin au motif qu’il aurait appelé la police, qui, selon elle, serait corrompue et sous l’influence du sénateur.

 

[7]               Il n’est pas non plus déraisonnable de la part du membre de croire qu’une personne serait portée à consulter un médecin après avoir été droguée et s’être réveillée nue.

 

[8]               Le membre a eu l’avantage de rencontrer le témoin, un avantage qui ne doit pas être pris à la légère. Tel que mentionné par monsieur le juge Richie dans l’arrêt Stein c Kathy K (Le), [1976] 2 RCS 802, 6 NR 359, au paragraphe 7 :

Sous ce rapport, reportons-nous aux propos de lord Sumner dans S.S. Honestroom (Owners) v. S.S. Sagaporack (Owners), aux p. 47 et 48:

 

[TRADUCTION] ... le fait de ne pas avoir vu les témoins place les juges d'une cour d'appel dans une situation qui reste désavantageuse par rapport à celle du juge de première instance et, à moins que l'on ne démontre que ce dernier a omis de profiter de cet avantage, ou qu'il s'en est clairement servi a mauvais escient, la cour d'instance supérieure ne doit pas prendre la responsabilité d'infirmer des conclusions ainsi tirées, lorsqu'elle ne se base que sur le résultat de ses propres comparaisons et critiques des témoins et de sa propre opinion sur les probabilités de l'affaire. […]

 

Voir aussi l’arrêt N.V. Bocimar S.A. c Century Insurance Co, [1987] 1 RCS 1247, [1987] ACS No 39 (QL).

 

[9]               La décision du membre figure parmi celles qui lui étaient raisonnablement loisibles de rendre, tel qu’expliqué dans l’arrêt Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 RCS 190, au paragraphe 47 :

La norme déférente du caractère raisonnable procède du principe à l’origine des deux normes antérieures de raisonnabilité : certaines questions soumises aux tribunaux administratifs n’appellent pas une seule solution précise, mais peuvent plutôt donner lieu à un certain nombre de conclusions raisonnables.  Il est loisible au tribunal administratif d’opter pour l’une ou l’autre des différentes solutions rationnelles acceptables.  La cour de révision se demande dès lors si la décision et sa justification possèdent les attributs de la raisonnabilité.  Le caractère raisonnable tient principalement à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit.

 

[10]           De plus, j’estime que les prétentions selon lesquelles le membre a fait preuve de partialité sont sans fondement.


ORDONNANCE

 

PAR LES MOTIFS ÉNONCÉS CI-DESSUS;

LA COUR ORDONNE que :

1.                  La demande de contrôle judiciaire soit rejetée.

2.                  Il n’y a aucune question grave de portée générale à certifier.

 

 

 

« Sean Harrington »

Juge


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-2248-11

 

INTITULÉ :                                       ANAYA ALONSO ET AL c MCI

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 MONTRÉAL (QUÉBEC)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               LE 24 NOVEMBRE 2011

 

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                       LE JUGE HARRINGTON

 

DATE DES MOTIFS :                      LE 28 NOVEMBRE 2011

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Me Anthony Karkar

 

POUR LES DEMANDEURS

 

Me Catherine Brisebois

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Chantal Ianniciello

Avocate

Montréal (Québec)

 

POUR LES DEMANDEURS

 

 

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.