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Date : 20111129

Dossier : T‑1684‑10

Référence : 2011 CF 1387

[traduction française certifiée, non révisée]

Ottawa (Ontario), le 29 novembre 2011

En présence de monsieur le juge O’Keefe

 

 

Entre ::

 

SHERRY LAVIN

 

 

 

demanderesse

 

et

 

 

 

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

           Motifs du jugement et jugement

 

 

[1]               Il s’agit d’une demande présentée en application de l’article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales, LRC 1985, c F‑7, sollicitant le contrôle judiciaire d’une décision de la Commission d’appel des Pensions (la Commission), datée du 15 septembre 2010, rejetant la demande de la demanderesse visant une prorogation de délai pour instituer un appel. Cette décision se fonde sur la conclusion de la Commission portant que la demanderesse n’avait pas satisfait au critère relatif à l’examen d’une demande de prorogation de délai.

 

[2]               La demanderesse demande que la Cour annule la décision de la Commission et renvoie l’affaire, avec instructions, à un tribunal de la Commission d’appel des Pensions différemment constitué.

 

Contexte

 

[3]               La demanderesse, Sherry Lavin, a travaillé comme réceptionniste et aide‑comptable de 1996 à 2005. En 2005, la demanderesse a cessé de travailler pour des raisons médicales. Elle souffre actuellement de déficience cognitive, de dépression et d’autres maladies.

 

[4]               Le 26 février 2007, la demanderesse a présenté une demande de pension d’invalidité en vertu du Régime de pensions du Canada (RPC). Sa demande a été rejetée parce qu’elle ne répondait pas entièrement aux exigences du RPC. Après un nouvel examen, sa demande a de nouveau été rejetée au motif qu’elle ne répondait pas à la définition d’invalidité au sens de l’alinéa 42(2)a) du RPC.

 

[5]               Le 3 mars 2008, la demanderesse a formé un appel devant le Bureau du Commissaire des tribunaux de révision (le tribunal). Une audience a été tenue pour entendre l’appel en mai 2009. Le 2 juillet 2009, le tribunal a communiqué sa décision à la demanderesse et celle‑ci en a accusé réception plus tard au cours du même mois. Dans sa décision, le tribunal a conclu que la demanderesse répondait à l’exigence en matière de participation jusqu’au 31 décembre 2006, soit la fin de la période minimale d’admissibilité (PMA). Le tribunal a cependant conclu que la demanderesse n’avait pas démontré, selon la prépondérance des probabilités, qu’elle était atteinte d’une invalidité grave au sens de l’alinéa 42(2)a) du RPC. L’appel a donc été rejeté.

 

[6]               Conformément au paragraphe 83(1) du RPC, la demanderesse disposait de 90 jours ou jusqu’au 30 septembre 2009 pour interjeter appel de la décision du tribunal devant la Commission.

 

[7]               Le 9 juin 2010, la demanderesse a déposé une demande de prorogation de délai, d’autorisation d’en appeler et un avis d’appel de la décision du tribunal. Dans cette demande, la demanderesse a expliqué qu’elle a eu de graves problèmes de santé dans la période qui a suivi la réception de la décision du tribunal. Bien qu’elle ait eu l’intention d’en appeler de la décision dès que possible, ses maladies l’ont empêchée de s’occuper de sa cause et de se chercher un avocat. Elle a donc dû demander l’aide de son mari qui lui aussi était malade. Malgré les démarches qu’il a effectuées, son mari aurait été incapable de trouver un avocat disposé à se charger d’un appel à la Commission. La demanderesse a finalement retenu les services d’un avocat après avoir été dirigée vers le Service de référence aux avocats de la Société du barreau du Haut‑Canada.

 

[8]               En réponse à la demande de la demanderesse, la Commission l’a informée que des renseignements supplémentaires seraient nécessaires, car la demande avait été reçue après le délai de 90 jours. En réponse, la demanderesse a présenté un affidavit et une lettre de son médecin datée du 26 juillet 2010 déclarant qu’il avait changé d’avis en ce qui concerne la conclusion à laquelle il était arrivé lors de son évaluation antérieure quant à la capacité de travailler de la demanderesse.

 

Décision de la Commission

 

[9]               Dans sa décision, la Commission a fait référence à la conclusion tirée dans Canada (Ministre du Développement des Ressources humaines) c Gattellaro, 2005 CF 883, [2005] ACF n1106, selon laquelle une décision de la Commission d’autoriser l’appel après l’expiration d’un délai de 90 jours est « hautement discrétionnaire » (au paragraphe 4). La Commission a également indiqué les facteurs qui doivent être pris en considération pour proroger le délai en vertu du paragraphe 83(1) du RPC (Gattellaro, précitée, au paragraphe 9) :

            1.         il y a intention persistante de poursuivre la demande ou l’appel;

            2.         la cause est défendable;

            3.         le retard a été expliqué raisonnablement;

            4.         la prorogation du délai ne cause pas de préjudice à l’autre partie.

 

[10]           Compte tenu de la preuve dont elle disposait, la Commission a estimé que les facteurs 1 et 3 avaient été satisfaits en l’espèce.

 

[11]           La Commission a indiqué avoir certaines réserves sur la question de savoir si le facteur 4 était respecté, car elle estimait que la mémoire des témoins et leur capacité de se souvenir des faits se seraient estompées étant donné que onze mois s’étaient écoulés depuis la tenue de l’audience. La Commission a en outre déclaré qu’elle ne savait pas si les dossiers du ministre étaient toujours existants, comme l’affirmait la demanderesse dans son affidavit.

 

[12]           Quoi qu’il en soit, la principale préoccupation de la Commission concernait le facteur 2. La Commission a conclu que le critère applicable en matière d’autorisation d’appel consiste à déterminer si la demande soulève une cause défendable, sans pour autant évaluer davantage le bien‑fondé de la demande. La Commission s’est appuyée sur Callihoo c Canada (Procureur général), 190 FTR 114, [2000] ACF no 612, pour déterminer ce qui constitue une cause défendable dans le contexte d’une demande d’autorisation en l’absence de nouveaux éléments de preuve importants. Elle a souligné que même si le médecin de la demanderesse semblait avoir modifié son opinion entre novembre 2007 et juillet 2010, que sa PMA prenait fin le 31 décembre 2006 et le tribunal s’était à bon droit concentré sur l’état de la demanderesse à ce moment‑là. La Commission a donc conclu que rien ne lui permettait de conclure que la cause de la demanderesse était défendable suivant les principes énoncés dans Callihoo, précitée, au paragraphe 22.

 

[13]           En conclusion, la Commission a conclu que le critère applicable à l’examen d’une demande de prorogation de délai est un critère faisant appel à des facteurs conjonctifs. Par conséquent, puisque la demanderesse avait omis de faire la preuve des quatre facteurs énumérés ci‑dessus, la Commission a rejeté la demande de prorogation de délai pour interjeter appel.

 

Questions en litige

 

[14]           Selon la demanderesse, il s’agit de répondre à la question suivante :

            1.         Elle soutient que la Commission a commis une erreur dans son examen des facteurs à prendre en compte pour accorder une prorogation de délai en vertu du paragraphe 83(1) du RPC.

 

[15]           Je reformulerais les questions comme suit :

            1.         Quelle est la norme de contrôle applicable?

            2.         La Commission a‑t‑elle commis une erreur en rejetant la demande de prorogation de délai de la demanderesse pour solliciter une autorisation d’interjeter appel?

 

Observations écrites de la demanderesse

 

[16]           La demanderesse soutient que la Commission est assujettie à la norme de contrôle de la décision correcte en ce qui concerne les questions de droit, et à la norme de la décision raisonnable en ce qui concerne les autres questions.

 

[17]           La demanderesse fait valoir que la Commission a perdu de vue le fait que sa décision doit être raisonnable eu égard aux faits de l’affaire lorsqu’elle a insisté sur l’aspect discrétionnaire de la décision concernant une demande de prorogation de délai.

 

[18]           La demanderesse prétend également que la Commission a commis des erreurs dans son examen de la question de savoir si la demanderesse avait une cause défendable (le facteur 2 exposé ci‑dessus). La demanderesse soutient que, contrairement aux principes juridiques énoncés dans la jurisprudence, rien dans la décision de la Commission ne permet de penser qu’elle a pris en compte le caractère peu exigeant du critère relatif à la cause défendable applicable à l’égard d’une demande de prorogation de délai. La demanderesse fait valoir que la Commission a omis de relever que le tribunal n’avait pas examiné la question de savoir si une personne est en mesure, dans les faits ou en théorie, de travailler au sens du sous‑alinéa 42(2)a)(i) du RPC. De plus, la demanderesse soutient que la Commission a omis d’examiner de façon appropriée la nouvelle preuve médicale importante datée de 2010, selon laquelle après le traitement des anévrismes l’état de santé de la demanderesse ne s’était pas amélioré comme son médecin l’avait initialement anticipé. La demanderesse soutient que ces omissions, prises isolément ou ensemble, répondent au critère peu rigoureux d’une cause défendable.

 

[19]           En résumé, la demanderesse prétend que la Commission n’a pas accordé suffisamment de poids à tous les éléments pertinents et a par conséquent commis une erreur dans sa décision.

 

Observations écrites du défendeur

 

[20]           Le défendeur soutient que le contrôle judiciaire des décisions discrétionnaires refusant une prorogation de délai soulève deux questions, assujetties à des normes de contrôle différentes : la question de savoir si le bon critère a été appliqué est assujettie à la norme de contrôle de la décision correcte, alors que l’application du critère par la Commission est assujettie à la norme de la raisonnabilité.

 

[21]           Le défendeur s’appuie sur de nombreuses décisions pour étayer sa prétention selon voulant que la demanderesse ne se soit pas acquittée du fardeau qui lui incombait de démontrer qu’elle souffrait d’une invalidité prolongée et grave avant la fin de la PMA et de façon continue par la suite.

 

[22]           Le défendeur donne également un aperçu général du régime législatif qui régit les prorogations de délai et les autorisations d’appel. Il fait valoir que le pouvoir discrétionnaire délégué à une commission à l’égard des demandes de prorogation de délai ne fait l’objet d’aucune limite légale.

 

[23]           Le défendeur soutient que la Commission a retenu le bon critère pour ce qui est de savoir s’il y a lieu d’accorder une demande de prorogation de délai. Il prétend toutefois que la Commission a commis une erreur en concluant que le critère relatif à la prorogation de délai est conjonctif. Le défendeur fait néanmoins valoir que la Commission a, de façon raisonnable, rejeté la demande au motif que la demanderesse n’avait pas démontré qu’elle avait une cause défendable.

 

[24]           Selon le défendeur, une cause est défendable s’il est démontré qu’elle a des chances raisonnables de succès sur le plan juridique. Cela peut être fait en soulevant une question de droit ou de fait pertinente que le tribunal n’a pas examinée de façon appropriée dans sa décision ou en présentant de nouveaux renseignements importants. En l’espèce, le défendeur soutient que la Commission a bien appliqué le critère relatif à la cause défendable et a fourni une explication raisonnable pour ne pas accepter la preuve médicale de 2010. Le défendeur renvoie également à de la jurisprudence qui, selon lui, établit qu’une nouvelle preuve médicale postérieure à la PMA ne peut donner lieu à une cause défendable.

 

[25]           Le défendeur soutient de plus que la Commission a le droit de faire des observations sur le bien‑fondé d’une demande lors de l’examen de la question de savoir si la cause est défendable. En conséquence, la Commission n’a pas commis d’erreur en faisant des observations sur la preuve médicale de 2010 pour expliquer sa conclusion concernant la question de la cause défendable.

 

[26]           Enfin, le défendeur prétend que la décision du tribunal ne comporte ni erreur de droit ni erreur de fait importante et manifeste.

 

Analyse et décision

 

[27]           Question no 1

            Quelle est la norme de contrôle applicable?

            Dans les cas où la jurisprudence antérieure a déjà arrêté la norme de contrôle devant s’appliquer à la question particulière dont la cour de révision est saisie, cette dernière peut adopter cette norme (voir Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 RCS 190, au paragraphe 57).

 

[28]           Le contrôle d’une décision de la Commission relative à l’octroi de l’autorisation d’en appeler soulève deux questions : celle de savoir si le bon critère a été appliqué et celle de savoir si la Commission a commis une erreur susceptible de contrôle en appliquant ce critère (voir Canada (Procureur général) c Graca, 2011 CF 615, [2011] ACF no 762, au paragraphe 9; Samson c Canada (Procureur général), 2008 FC 461, [2008] ACF no 588, au paragraphe 14).

 

[29]           La première question est une question de droit et est donc susceptible de contrôle selon la norme de la décision correcte (voir Vincent c Canada (Procureur général), 2007 CF 724, 315 FTR 114, au paragraphe 26; Graca, précitée, au paragraphe 10; Canada (Procureur général) c Landry, 2008 CF 810, [2008] ACF no 1034, au paragraphe 17).

 

[30]           La deuxième question exige que la Commission applique le critère aux faits et est par conséquent une question mixte de fait et de droit susceptible de contrôle selon la norme de la raisonnabilité (voir Handa c Canada (Procureur général), 2008 CAF 223, [2008] ACF no 1137, aux paragraphes 7 et 11; Leblanc c Canada (Ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences), 2010 CF 641, [2010] ACF no 784, au paragraphe 15; Graca, précitée, au paragraphe 10; Landry, précitée, au paragraphe 18).

 

[31]           Lors du contrôle de la décision de la Commission selon la norme de la décision raisonnable, la Cour ne devrait pas intervenir à moins que la Commission ne soit arrivée à une conclusion qui n’est pas transparente, justifiable et intelligible et qui n’appartient pas aux issues acceptables compte tenu de la preuve dont elle dispose (voir Dunsmuir, précité, au paragraphe 47; Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, [2009] ACS no 12, au paragraphe 59). Comme l’a statué la Cour suprême dans l’arrêt Khosa, précité, « la cour de révision ne peut […] substituer [à la solution retenue] l’issue qui serait à son avis préférable, pas plus qu’il ne rentre dans les attributions de la cour de révision de soupeser à nouveau les éléments de preuve » (au paragraphe 59).

 

[32]           Question no 2

            La Commission a‑t‑elle commis une erreur en rejetant la demande de prorogation de délai de la demanderesse pour solliciter une autorisation d’interjeter appel?

            En vertu du paragraphe 83(1) du RPC, la Commission dispose d’un large pouvoir discrétionnaire pour autoriser une partie à interjeter appel d’une décision du tribunal après l’expiration du délai habituel de 90 jours (voir Gattellaro, précitée, au paragraphe 4; Handa, précitée, au paragraphe 7). Toutefois, cette décision ne confère qu’un avantage; cela n’est pas un droit (voir Gattellaro, précitée, au paragraphe 7).

 

[33]           L’exercice du pouvoir discrétionnaire de la Commission prévu au paragraphe 83(1) du RPC s’articule autour des facteurs énoncés dans Gattellaro, précitée, au paragraphe 9, à savoir :

            1.         il y a intention persistante de poursuivre la demande ou l’appel;

            2.         la cause est défendable;

            3.         le retard a été expliqué raisonnablement;

            4.         la prorogation du délai ne cause pas de préjudice à l’autre partie.

 

[34]           La Commission doit soupeser et examiner ces facteurs pour prendre sa décision (voir Graca, précitée, au paragraphe 17). Le dossier devrait montrer clairement que le décideur a tenu compte de tous ces facteurs (voir Gattellaro, précitée, au paragraphe 10). Une prorogation peut cependant être accordée même si le demandeur ne satisfait pas à l’un des volets du critère (voir Canada (Procureur général) c Blondahl, 2009 CF 118, [2009] ACF no 178, au paragraphe 18; Canada (Ministre du Développement des ressources humaines) c Hogervorst, 2007 CAF 41, [2007] ACF no 37, au paragraphe 33).

 

[35]           À l’audience qui s’est déroulée devant moi, les parties ont convenu que le seul facteur en litige était la question de savoir s’il y avait une cause défendable. La question de savoir si les quatre facteurs étaient conjonctifs n’est pas non plus en litige.

 

[36]           En ce qui a trait à la cause défendable, le juge W. Andrew MacKay de la Cour a déclaré ce qui suit dans Callihoo, précitée, au paragraphe 22 :

En l’absence d’une nouvelle preuve importante qui n’aurait pas été examinée par le tribunal de révision, une demande d’autorisation a des chances sérieuses d’être accueillie lorsque le décideur conclut qu’il en ressort une question ou une erreur de droit, appréciée en vertu de la norme de la décision correcte, ou une erreur de fait importante commise de façon déraisonnable ou arbitraire à la lumière de la preuve. […]

 

 

[37]           Les nouveaux rapports médicaux qu’a fournis la demanderesse étaient rédigés en partie comme suit :

[traduction]

Le 28 avril 2009

 

À qui de droit,

 

Concernant :

 

Sherry Lavin

14, SILKWOOD CRES

MISSISSAUGA (ON)  L6X 4L1 CANADA

 

Date de naissance : 1960‑08‑03

 

Sherry souffre de façon continue de difficultés cognitives graves qui font qu’elle peut difficilement obtenir un emploi. D’un point de vue médical, elle a eu beaucoup de chance, mais à toutes fins pratiques, je ne crois pas qu’elle puisse obtenir un emploi, principalement en raison des difficultés cognitives qui, je l’espérais, se seraient améliorées avec le temps.

 

Michael Kates, MD

 

Et :

[traduction]

Michael Kates, MD

101, Queensway Ouest, 7e étage, Mississauga (Ontario)  L6B 2P7

 

À qui de droit,

 

Concernant :

 

Sherry Lavin

14, Silkwood Cres

Mississauga (Ontario)

L6X 4L1  Canada

Date de naissance : 1960‑08‑03

 

Le 26 juillet 2010

 

Depuis mon rapport de 2007, Sherry Lavin a continué à avoir des difficultés cognitives, plus précisément une déficience de la mémoire à court terme. Elle continue d’être surveillée pour l’hypertension. Le Dr Izukawa et le Dr Rosso la voient au moins une fois par an. Plus récemment, au printemps dernier, le Dr Sawa a indiqué qu’elle avait besoin d’une chirurgie pour les canaux carpiens. Pour le moment, il n’y a eu aucune progression de ses anévrismes intracrâniens. Malgré sa difficulté à perdre du poids, sa tension artérielle est surveillée de façon régulière.

 

Essentiellement, j’estimais qu’il y avait des événements dans la vie de Sherry en 2007, y compris sa dépression, qui une fois réglés lui auraient permis de chercher un emploi au moins à temps partiel. Au cours des dernières années, sa dépression a été résolue mais sa déficience cognitive ne s’est pas améliorée. Auparavant, Sherry aimait son travail administratif, mais elle craint maintenant de faire le même travail en raison des erreurs qu’elle ferait assurément à cause de ses difficultés cognitives. J’ai changé d’avis à propos de sa capacité de fonctionner en situation d’emploi parce que je crois qu’aucune personne pour qui elle serait susceptible de travailler n’accepterait les erreurs qu’elle ferait en raison de ses difficultés cognitives. Je ne crois pas qu’il serait juste pour elle de se trouver dans de telles situations. Elle vivra très vraisemblablement de la dépression à nouveau, de la gêne et peut‑être un préjudice irréparable découlant du fait de se trouver dans des situations où elle échouerait certainement. S’il était possible de la protéger et de prévenir une telle angoisse mentale, je serais comme auparavant plus favorable à l’idée qu’elle puisse travailler.

 

Je vous remercie de l’occasion fournie pour soutenir Sherry. Je lui souhaite une bonne santé. Elle a joui de beaucoup de chance compte tenu du fait qu’elle a fait face à une maladie parfois mortelle.

 

Veuillez agréer l’expression de mes sentiments les meilleurs.

 

Michael Kates, M.D., C.C.M.F.

 

 

[38]           La Commission a traité de la nouvelle preuve médicale au paragraphe 17 de la décision :

[traduction]

Je reconnais que le Dr Kates semble avoir changé d’avis dans la lettre du 26 juillet 2010, par rapport à l’avis qu’il émettait dans la lettre du 2 novembre 2007. Cependant, la fin de la période minimale d’admissibilité (la PMA) est le 31 décembre 2006 et le Tribunal de révision a à juste titre tenu compte de l’état de la demanderesse à ce moment‑là.

 

 

[39]           La demanderesse soutient que le Dr Kates, dans sa lettre du 26 juillet 2010, dit maintenant que la dépression et d’autres événements dans la vie de la demanderesse n’étaient pas la cause de ses problèmes, comme il l’avait cru au départ, puisqu’ils se sont maintenant améliorés et que la demanderesse souffre toujours des difficultés cognitives qui pensait‑il allaient s’améliorer avec l’amélioration des autres problèmes, ce qui ne s’est pas produit.

 

[40]           À mon avis, cette conclusion était susceptible d’avoir une incidence sur toute conclusion concernant l’état de santé de la demanderesse à la date de la fin de sa PMA. La Commission aurait dû traiter du fait que le Dr Kates semble dire qu’il s’est trompé dans sa lettre médicale de 2007 quant aux effets des difficultés cognitives de la demanderesse et l’étendue de celles‑ci. À mon avis, cet élément de preuve pouvait influer sur la décision relative à la question de savoir s’il existait ou non une cause défendable.

 

[41]           Pour les motifs qui précèdent, j’estime que la décision de la Commission est déraisonnable et doit être annulée. L’affaire devrait être renvoyée à un tribunal de la Commission différemment constitué pour nouvelle décision.

 

[42]           La demanderesse a demandé que les dépens de la demande lui soient accordés, et le défendeur prétend quant à lui qu’aucuns dépens ne devraient être adjugés ou que chaque partie devrait assumer ses propres dépens. D’après les documents que j’ai devant moi, je n’ai aucune raison de refuser à la demanderesse ses dépens à l’égard de la demande. La demanderesse a donc droit à ses dépens à l’égard de ladite demande.

 


JUGEMENT

LA COUR STATUE que :

            1.         La demande de contrôle judiciaire est accueillie et l’affaire est renvoyée à un tribunal de la Commission différemment constitué pour nouvelle décision.

            2.         La demanderesse a droit à ses dépens relativement à la demande.

 

 

« John A. O’Keefe »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Chantal DesRochers, LL.B., D.E.S.S. en trad.

 

 


ANNEXE

Dispositions législatives pertinentes

 

Loi sur les Cours fédérales, LRC 1985, c F‑7

 

18.1.(1) Une demande de contrôle judiciaire peut être présentée par le procureur général du Canada ou par quiconque est directement touché par l’objet de la demande.

 

. . .

 

 

(4) Les mesures prévues au paragraphe (3) sont prises si la Cour fédérale est convaincue que l’office fédéral, selon le cas :

 

a) a agi sans compétence, outrepassé celle‑ci ou refusé de l’exercer;

 

 

b) n’a pas observé un principe de justice naturelle ou d’équité procédurale ou toute autre procédure qu’il était légalement tenu de respecter;

 

c) a rendu une décision ou une ordonnance entachée d’une erreur de droit, que celle‑ci soit manifeste ou non au vu du dossier;

 

d) a rendu une décision ou une ordonnance fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont il dispose;

 

e) a agi ou omis d’agir en raison d’une fraude ou de faux témoignages;

 

f) a agi de toute autre façon contraire à la loi.

 

18.1.(1) An application for judicial review may be made by the Attorney General of Canada or by anyone directly affected by the matter in respect of which relief is sought.

 

. . .

 

 

(4) The Federal Court may grant relief under subsection (3) if it is satisfied that the federal board, commission or other tribunal

 

(a) acted without jurisdiction, acted beyond its jurisdiction or refused to exercise its jurisdiction;

 

(b) failed to observe a principle of natural justice, procedural fairness or other procedure that it was required by law to observe;

 

(c) erred in law in making a decision or an order, whether or not the error appears on the face of the record;

 

 

(d) based its decision or order on an erroneous finding of fact that it made in a perverse or capricious manner or without regard for the material before it;

 

(e) acted, or failed to act, by reason of fraud or perjured evidence; or

 

(f) acted in any other way that was contrary to law.

 

 

Régimes de pensions du Canada, LRC 1985, c C‑8

 

(2) Pour l’application de la présente loi :

 

a) une personne n’est considérée comme invalide que si elle est déclarée, de la manière prescrite, atteinte d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongée, et pour l’application du présent alinéa :

 

(i) une invalidité n’est grave que si elle rend la personne à laquelle se rapporte la déclaration régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice,

 

(ii) une invalidité n’est prolongée que si elle est déclarée, de la manière prescrite, devoir vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou devoir entraîner vraisemblablement le décès;

 

b) une personne est réputée être devenue ou avoir cessé d’être invalide à la date qui est déterminée, de la manière prescrite, être celle où elle est devenue ou a cessé d’être, selon le cas, invalide, mais en aucun cas une personne — notamment le cotisant visé au sous‑alinéa 44(1)b)(ii) — n’est réputée être devenue invalide à une date antérieure de plus de quinze mois à la date de la présentation d’une demande à l’égard de laquelle la détermination a été faite.

 

 

44. (1) Sous réserve des autres dispositions de la présente partie :

 

. . .

 

b) une pension d’invalidité doit être payée à un cotisant qui n’a pas atteint l’âge de soixante‑cinq ans, à qui aucune pension de retraite n’est payable, qui est invalide et qui :

 

(i) soit a versé des cotisations pendant au moins la période minimale d’admissibilité,

 

. . .

 

(2) Pour l’application des alinéas (1)b) et e) :

 

a) un cotisant n’est réputé avoir versé des cotisations pendant au moins la période minimale d’admissibilité que s’il a versé des cotisations sur des gains qui sont au moins égaux à son exemption de base, compte non tenu du paragraphe 20(2), selon le cas :

 

 

(i) soit, pendant au moins quatre des six dernières années civiles comprises, en tout ou en partie, dans sa période cotisable, soit, lorsqu’il y a moins de six années civiles entièrement ou partiellement comprises dans sa période cotisable, pendant au moins quatre années, . . .

 

 

83. (1) La personne qui se croit lésée par une décision du tribunal de révision rendue en application de l’article 82 — autre qu’une décision portant sur l’appel prévu au paragraphe 28(1) de la Loi sur la sécurité de la vieillesse — ou du paragraphe 84(2), ou, sous réserve des règlements, quiconque de sa part, de même que le ministre, peuvent présenter, soit dans les quatre‑vingt‑dix jours suivant le jour où la décision du tribunal de révision est transmise à la personne ou au ministre, soit dans tel délai plus long qu’autorise le président ou le vice‑président de la Commission d’appel des pensions avant ou après l’expiration de ces quatre‑vingt‑dix jours, une demande écrite au président ou au vice‑président de la Commission d’appel des pensions, afin d’obtenir la permission d’interjeter un appel de la décision du tribunal de révision auprès de la Commission.

 

(2) For the purposes of this Act,

 

(a) a person shall be considered to be disabled only if he is determined in prescribed manner to have a severe and prolonged mental or physical disability, and for the purposes of this paragraph,

 

 

(i) a disability is severe only if by reason thereof the person in respect of whom the determination is made is incapable regularly of pursuing any substantially gainful occupation, and

 

(ii) a disability is prolonged only if it is determined in prescribed manner that the disability is likely to be long continued and of indefinite duration or is likely to result in death; and

 

 

 

(b) a person is deemed to have become or to have ceased to be disabled at the time that is determined in the prescribed manner to be the time when the person became or ceased to be, as the case may be, disabled, but in no case shall a person — including a contributor referred to in subparagraph 44(1)(b)(ii) — be deemed to have become disabled earlier than fifteen months before the time of the making of any application in respect of which the determination is made.

 

44. (1) Subject to this Part,

 

 

 

. . .

 

(b) a disability pension shall be paid to a contributor who has not reached sixty‑five years of age, to whom no retirement pension is payable, who is disabled and who

 

(i) has made contributions for not less than the minimum qualifying period,

 

. . .

 

 

(2) For the purposes of paragraphs (1)(b) and (e),

 

(a) a contributor shall be considered to have made contributions for not less than the minimum qualifying period only if the contributor has made contributions on earnings that are not less than the basic exemption of that contributor, calculated without regard to subsection 20(2),

 

(i) for at least four of the last six calendar years included either wholly or partly in the contributor’s contributory period or, where there are fewer than six calendar years included either wholly or partly in the contributor’s contributory period, for at least four years,

. . .

 

83. (1) A party or, subject to the regulations, any person on behalf thereof, or the Minister, if dissatisfied with a decision of a Review Tribunal made under section 82, other than a decision made in respect of an appeal referred to in subsection 28(1) of the Old Age Security Act, or under subsection 84(2), may, within ninety days after the day on which that decision was communicated to the party or Minister, or within such longer period as the Chairman or Vice‑Chairman of the Pension Appeals Board may either before or after the expiration of those ninety days allow, apply in writing to the Chairman or Vice‑Chairman for leave to appeal that decision to the Pension Appeals Board.

 

 


cour fédérale

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                    T‑1684‑10

 

Intitulé :                                                   SHERRY LAVIN

 

                                                                        ‑ et ‑

 

                                                                        LE Procureur général du Canada

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           Le 1er novembre 2011

 

Motifs du jugement

et jugement :                                          le juge O’KEEFE

 

DATE DES MOTIFS :                                  Le 29 novembre 2011

 

 

Comparutions :

 

Yehuda Levinson

 

Pour la demanderesse

 

Carole Vary

Pour le défendeur

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Levinson & Associates

Toronto (Ontario)

 

Pour la demanderesse

Myles J. Kirvan

Sous‑procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

Pour le défendeur

 

 

 

 

 

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