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 Date: 20120120


Dossier: IMM-2963-11

Référence: 2012 CF 84

Montréal, Québec, le 20 janvier 2012

En présence de monsieur le juge Shore

 

 

ENTRE:

 

MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

SIU KWAN HONG

 

 

 

défenderesse

 

 

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

Au préalable

[1]               Le refus par le commissaire de l’admission en preuve des documents qui démontrent clairement que le garant avait été trouvé coupable, en qualité de propriétaire d’un local, d’avoir permis sciemment que ce local ou une partie du local, soit loué ou employé aux fins de maison de débauche (paragraphe 210(2)c) du Code criminel).

 

[2]               Selon la jurisprudence, une évaluation erronée de la capacité et des qualités d’un garant proposé mène à une erreur fatale.

M.S.P.P.C. et Sankar, 2009 CF 934, par 11,

M.S.P.P.C. et Al Achkar, 2010 CF 744, par 43 et suivants.

 

Procédure judiciaire

[3]               Malgré que la défenderesse est repartie dans son pays d’origine, le cas s’est poursuivi en Cour pour des raisons d’intérêt public et de l’interprétation de la loi [Borowski c Canada (procureur général), [1989] 1 RCS 342]. Il s’agit d’une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire déposée par le Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile aux termes du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (ci-après la Loi) à l’encontre de la décision du commissaire Otto Nupponen de la Section de l’immigration de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (ci-après le tribunal ou la Section de l’immigration) rendue le 4 mai 2011, ordonnant la remise en liberté de la défenderesse.

 

Les faits

[4]               Le 6 mars 2007, la défenderesse a tenté d’entrer au Canada à titre de visiteur, mais a retiré sa demande devant les doutes de l’agent à l’égard de la bonne foi de la défenderesse. Cette dernière est partie le 7 mars 2007.

 

[5]               Le 13 juin 2010, la défenderesse a, à nouveau, demandé le statut de visiteur qui lui fut accordé jusqu’au 24 juin 2010, date à laquelle elle devait quitter le Canada, ce qu’elle n’a pas fait.

 

[6]               Le 19 avril 2011, la défenderesse fut arrêtée par la police de Laval, dans un salon de massage et fut remise à l’Agence des services frontaliers du Canada (ci-après l’ASFC) compte tenu qu’elle était sans statut légal au Canada en vertu de l’article 55 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (la Loi).

 

[7]               Le 20 avril 2011, la demanderesse a demandé l’asile au Canada.

 

[8]               Le 21 avril 2011 et le 28 avril 2011, la défenderesse a bénéficié d’une première et d’une deuxième révision de détention, conformément aux paragraphes 57(1) et 57(2), respectivement, de la Loi.

Procès-verbal de l’audience du 21 avril 2011, pièce A de l’affidavit de Susan Bradley : dossier du demandeur,

Ordonnance du juge Shore, 2011 CF 532, par 6 : dossier du demandeur.

 

[9]               Le commissaire, suite à l’audience, a ordonné la mise en liberté de la défenderesse, moyennant certaines conditions.

 

[10]           La procureure de la défenderesse a avisé la Section de l’immigration que madame Sin Fu ne pourra pas remplir les conditions nécessaires pour la remise en liberté de madame Hong.

 

[11]           Lors de son témoignage sous serment, monsieur Wong, un garant proposé, a admis avoir été propriétaire d’un salon de massage; et, avoir été trouvé coupable, en qualité de propriétaire d’un local, d’avoir permis sciemment que ce local, ou une partie du local, soit loué ou employé aux fins de maison de débauche (paragraphe 210(2)c) du Code criminel).

 

[12]           Suite au témoignage de monsieur Wong, la représentante du Ministre a voulu déposer le rapport de police concernant les événements ayant mené à la condamnation de monsieur Wong.

 

[13]           Le commissaire a refusé le dépôt du rapport de police au motif que le rapport n’avait pas été traduit en mandarin, alors que l’obligation est de déposer les documents dans la mesure du possible dans la langue de l’audience, soit l’une des deux langues officielles canadiennes.

 

[14]           Le Ministre s’opposait à la libération de la défenderesse au motif que monsieur Wong n’avait pas les qualités recherchées chez un garant.

 

[15]           Le commissaire, néanmoins, a accepté le garant.

 

[16]           En conséquence, le commissaire a ordonné la remise en liberté de la défenderesse, moyennant le paiement par le garant , monsieur Wong, d’une somme de 1 500 $ payable en argent comptant.

 

Point en litige

[17]           Est-ce que le commissaire a erré en fait et en droit?

 

Analyse

[18]           Le commissaire a commis des erreurs de fait et de droit en refusant le dépôt du rapport de police. L’examen du rapport lui aurait permis de vérifier que monsieur Wong n’avait pas les qualités requises pour être garant et qu’il ne représentait pas une alternative raisonnable à la détention.

 

[19]           Le mandarin n’est pas une des deux langues officielles. Le commissaire aurait pu, néanmoins, exiger que l’interprète présent à l’audience, traduise le document en mandarin.

 

[20]           À ce sujet, les Règles de la Section de l’immigration se lisent :

Langue des documents

 

25. (1) Tout document utilisé dans une procédure doit être rédigé en français ou en anglais ou, s’il est rédigé dans une autre langue, être accompagné d’une traduction française ou anglaise et de la déclaration du traducteur.

 

Documents transmis par le ministre

 

(2) Si le ministre transmet un document qui n’est pas dans la langue des procédures, il l’accompagne d’une traduction dans cette langue et de la déclaration du traducteur.

Language of documents

 

25. (1) All documents used at a proceeding must be in English or French or, if in another language, be provided with an English or French translation and a translator’s declaration.

 

 

 

Language of Minister’s documents

 

(2) If the Minister provides a document that is not in the language of the proceedings, the Minister must provide a translation and a translator’s declaration.

 

 

[21]           Le commissaire a erré en droit en refusant d’admettre en preuve, un document rédigé dans la langue des procédures devant lui.

 

 

Conclusion

[22]           Le tribunal a commis des erreurs de fait déraisonnables (conclusion de fait erronée, tirée de façon absurde ou arbitraire, alinéa 18.1(4)d) de la Loi sur les Cours fédérales) en concluant que le refus de l’admission en preuve du rapport policier et du procès-verbal du 4 mai 2011, qui démontrent que le garant avait été trouvé coupable, en qualité de propriétaire d’un local, d’avoir permis sciemment que ce local ou une partie du local soit loué ou employé aux fins de maison de débauche (paragraphe 210(2)c) du Code criminel).

 

[23]           Malgré une preuve claire, nette et précise démontrant le contraire de la constatation du commissaire, ce dernier a jugé le garant crédible et a rendu une décision à l’encontre des prescriptions de l’alinéa 47(2)b) du Règlement.

 

[24]           Selon la jurisprudence, une évaluation erronée de la capacité et des qualités d’un garant proposé mène à une erreur fatale.

 

[25]           Compte tenu du raisonnement entrepris, la décision du commissaire est mise de côté et la demande de contrôle judiciaire du demandeur est accueillie.


 

JUGEMENT

 

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire soit accueillie. Aucune question d’importance générale à certifier.

 

 

« Michel M.J. Shore »

Juge

 


 


 

COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-2963-11

 

INTITULÉ :                                       LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE  et  SIU KWAN HONG

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               le 19 janvier 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE SHORE

 

DATE DES MOTIFS :                      le 20 janvier 2012

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Michèle Joubert

 

POUR LE DEMANDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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