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Date : 20120124


Dossier : T-589-11

Référence : 2012 CF 93

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 24 janvier 2012

En présence de monsieur le juge Near

 

 

ENTRE :

 

RICHARD CARNEGIE

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

           MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Le demandeur, Richard Carnegie, sollicite le contrôle judiciaire d’une décision rendue par le Tribunal des anciens combattants (révision et appel) (le Tribunal) en date du 10 février 2011. Le Tribunal a alors conclu que le demandeur n’avait pas droit à une pension parce que la maladie dont il souffrait – l’alopécie circonscrite menant à l’alopécie universelle – n’était pas survenue au cours de son service dans une zone de service spécial (Chypre) ou n’était pas attribuable à celui‑ci en vertu du paragraphe 21(1) de la Loi sur les pensions, LRC 1985, c P‑6.

 

[2]               Pour les motifs exposés ci-après, la demande est accueillie.

 

I.          Le contexte

 

[3]               Le demandeur est un ancien combattant des Forces armées canadiennes âgé de 58 ans. Il a fait partie du Régiment aéroporté du Canada du 16 novembre 1971 jusqu’à sa retraite, alors qu’il détenait le grade de caporal, le 3 avril 2000.

 

[4]               Le demandeur faisait partie d’une force de secours qui a été déployée à Nicosie, à Chypre (une zone de service spécial), de juillet au 11 décembre 1974. Il dit que les conditions sanitaires laissaient à désirer pendant l’invasion par la Turquie. Alors qu’il patrouillait la [traduction] « zone verte » qui séparait les deux camps, il a parfois été exposé à des tirs indirects. Les militaires déployés avec lui ont aussi affirmé avoir été exposés à de la [traduction] « fumée orange » ou à une [traduction] « étrange fumée ». Après ce déploiement, le demandeur a été basé à la Base des Forces canadiennes (BFC) Edmonton.

 

[5]               Le demandeur était en bonne santé avant de se joindre aux Forces armées. Il a toutefois appris en avril 1976, après son retour de Chypre, qu’il souffrait d’alopécie circonscrite, qui s’est ensuite transformée en alopécie universelle. Cette maladie entraîne la chute de tous les cheveux et poils. Selon les dermatologues qui ont traité le demandeur, le problème était [traduction] « probablement d’origine auto‑immune » et il n’existait aucun traitement capable de changer la situation qui avait fait ses preuves.

 

[6]               Le 25 avril 1988, le demandeur a présenté une demande de pension dans laquelle il alléguait que la maladie dont il souffrait était attribuable aux mauvaises conditions sanitaires qui existaient pendant son service dans la zone de service spécial à Chypre. La Commission canadienne des pensions (la Commission) a rejeté sa demande. Le demandeur n’a pas présenté de preuve médicale confirmant que la maladie était apparue pendant qu’il était à Chypre. En outre, la cause de la maladie était inconnue et celle‑ci était probablement d’origine auto‑immune.

 

[7]               Le comité d’examen de l’admissibilité du Tribunal a confirmé la décision de la Commission le 29 mars 2000, malgré les nouveaux éléments de preuve produits par le demandeur. La maladie du demandeur a été diagnostiquée seulement après le retour de celui‑ci de Chypre et sa cause était inconnue. Aucune preuve médicale objective ne démontrait que la maladie découlait du service militaire du demandeur.

 

[8]               Le 13 juillet 2000, un comité d’appel du Tribunal a été incapable à son tour de conclure que la maladie du demandeur avait commencé pendant son service militaire. Malgré l’obligation de trancher toute incertitude en faveur du demandeur, la preuve médicale indiquait que la cause de sa maladie était inconnue.

 

[9]               Le 31 décembre 2010, le demandeur a demandé le réexamen de la décision du comité d’appel et a produit de nouveaux éléments de preuve à l’appui de sa demande. Le Tribunal a confirmé les conclusions du comité d’appel. La Cour est maintenant chargée de contrôler cette décision.

 

II.         La décision faisant l’objet du contrôle

 

[10]           Le Tribunal a examiné les nouveaux éléments de preuve produits par le demandeur. Il s’agissait de quatre déclarations d’anciens membres du Régiment aéroporté déployé à Chypre en 1974 avec le demandeur et d’un nouvel extrait du Merck Manual, 18e édition.

 

[11]           Cette preuve a été appréciée à la lumière des critères établis dans MacKay c Canada (Procureur général), [1997] ACF no 495, à savoir s’il est dans l’intérêt de la justice de rouvrir l’affaire compte tenu des nouveaux éléments de preuve (diligence raisonnable); la crédibilité; la pertinence; l’effet de la preuve sur l’affaire. Le Tribunal a conclu que la preuve satisfaisait aux trois premiers critères, mais a refusé de modifier la décision rendue.  

 

[12]           Les quatre déclarations n’étaient pas été contestées, mais elles n’établissaient pas que la maladie dont souffrait le demandeur était apparue à Chypre. Selon le Merck Manual, 18e édition, des troubles émotionnels sont l’une des nombreuses causes de cette maladie. Toutefois, aucune preuve, médicale ou autre, démontrant que le demandeur avait effectivement souffert de troubles émotionnels qui auraient causé sa maladie n’a été produite. On a fait état de troubles émotionnels plus récemment seulement.

 

[13]           De plus, aucune preuve corroborant le fait que la maladie alléguée par le demandeur était apparue pendant qu’il se trouvait dans la zone de service spécial à Chypre, soit entre le 1er juillet 1974 et le 1er décembre 1974, n’a été présentée. Le demandeur a commencé à se plaindre de symptômes liés à la maladie qu’il allègue après son retour de Chypre et non avant son déploiement ou pendant celui‑ci. Le premier traitement dont il est fait état dans le dossier remontait à mars 1976. La preuve semblait indiquer que la maladie était apparue en 1975 et elle était insuffisante pour étayer la prétention selon laquelle elle était survenue au cours du déploiement de cinq mois.

 

[14]           Le Tribunal a résumé ainsi sa décision :

[traduction] En conclusion, le Tribunal ne conteste pas les quatre déclarations des collègues du demandeur ni l’extrait tiré du Merck Manual, 18e édition. Cependant, l’ensemble de la preuve est insuffisant pour établir un lien causal entre la maladie alléguée et les facteurs associés au service qui sont décrits au paragraphe 21(1) de la Loi sur les pensions. De plus, la preuve ne démontre pas que la maladie alléguée est apparue ou est survenue par suite du service du demandeur dans une zone de service spécial (Chypre). Selon la preuve médicale qui a été produite, la maladie dont souffre le demandeur est liée à une maladie auto‑immune et il n’est indiqué nulle part qu’elle est causée notamment par des troubles émotionnels. Pour ces motifs, la décision rendue par le comité d’appel en date du 13 juillet 2000 est confirmée.

 

III.       Les dispositions pertinentes

 

[15]           Le droit du demandeur à une pension doit être déterminé en vertu de l’alinéa 21(1)a) de la Loi sur les pensions :

21. (1) Pour le service accompli pendant la Première Guerre mondiale ou la Seconde Guerre mondiale, sauf dans la milice active non permanente ou dans l’armée de réserve, le service accompli pendant la guerre de Corée, le service accompli à titre de membre du contingent spécial et le service spécial :

 

a) des pensions sont, sur demande, accordées aux membres des forces ou à leur égard, conformément aux taux prévus à l’annexe I pour les pensions de base ou supplémentaires, en cas d’invalidité causée par une blessure ou maladie — ou son aggravation — survenue au cours du service militaire ou attribuable à celui-ci;

 

21. (1) In respect of service rendered during World War I, service rendered during World War II other than in the non-permanent active militia or the reserve army, service in the Korean War, service as a member of the special force, and special duty service,

 

 

 

(a) where a member of the forces suffers disability resulting from an injury or disease or an aggravation thereof that was attributable to or was incurred during such military service, a pension shall, on application, be awarded to or in respect of the member in accordance with the rates for basic and additional pension set out in Schedule I;

 

[16]           L’article 2 de la Loi sur les pensions prévoit que cette disposition doit s’interpréter d’une façon libérale afin de donner effet à l’obligation des Canadiens d’indemniser les militaires qui sont devenus invalides pendant leur service :

2. Les dispositions de la présente loi s’interprètent d’une façon libérale afin de donner effet à l’obligation reconnue du peuple canadien et du gouvernement du Canada d’indemniser les membres des forces qui sont devenus invalides ou sont décédés par suite de leur service militaire, ainsi que les personnes à leur charge.

2. The provisions of this Act shall be liberally construed and interpreted to the end that the recognized obligation of the people and Government of Canada to provide compensation to those members of the forces who have been disabled or have died as a result of military service, and to their dependants, may be fulfilled.

 

 

[17]           L’article 3 de la Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel), LC 1995, c 18 (la Loi sur le TACRA), énonce les mêmes principes :

3. Les dispositions de la présente loi et de toute autre loi fédérale, ainsi que de leurs règlements, qui établissent la compétence du Tribunal ou lui confèrent des pouvoirs et fonctions doivent s’interpréter de façon large, compte tenu des obligations que le peuple et le gouvernement du Canada reconnaissent avoir à l’égard de ceux qui ont si bien servi leur pays et des personnes à leur charge.

 

3. The provisions of this Act and of any other Act of Parliament or of any regulations made under this or any other Act of Parliament conferring or imposing jurisdiction, powers, duties or functions on the Board shall be liberally construed and interpreted to the end that the recognized obligation of the people and Government of Canada to those who have served their country so well and to their dependants may be fulfilled.

 

[18]           Lorsqu’il détermine le droit à une pension, le Tribunal doit également appliquer des règles de preuve particulières qui sont prévues à l’article 39 de la Loi sur le TACRA :

39. Le Tribunal applique, à l’égard du demandeur ou de l’appelant, les règles suivantes en matière de preuve :

 

a) il tire des circonstances et des éléments de preuve qui lui sont présentés les conclusions les plus favorables possible à celui‑ci;

 

 

b) il accepte tout élément de preuve non contredit que lui présente celui-ci et qui lui semble vraisemblable en l’occurrence;

 

 

c) il tranche en sa faveur toute incertitude quant au bien-fondé de la demande.

39. In all proceedings under this Act, the Board shall

 

 

 

(a) draw from all the circumstances of the case and all the evidence presented to it every reasonable inference in favour of the applicant or appellant;

 

(b) accept any uncontradicted evidence presented to it by the applicant or appellant that it considers to be credible in the circumstances; and

 

(c) resolve in favour of the applicant or appellant any doubt, in the weighing of evidence, as to whether the applicant or appellant has established a case.

 

IV.       La question en litige

 

[19]           La présente demande soulève la question suivante :

a)         Le Tribunal a–t‑il commis une erreur lorsqu’il a déterminé que le demandeur n’avait pas droit à une pension en vertu de l’alinéa 21(1)a)?

 

V.        La norme de contrôle

 

[20]           La Cour a confirmé, à la suite de Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 RCS 190, que la norme de contrôle qui s’applique aux décisions du Tribunal est celle de la raisonnabilité parce que l’appréciation du droit à une pension soulève des questions mixtes de fait et de droit (voir Bullock c Canada (Procureur général), 2008 CF 1117, [2008] ACF no 1529, aux paragraphes 11 à 13; Boisvert c Canada (Procureur général), 2009 CF 735, [2009] ACF no 1377, aux paragraphes 33 à 36; Zeilke c Canada (Procureur général), 2009 CF 1183, [2009] ACF no 1481, aux paragraphes 38 à 40).

 

[21]           Je ne puis accepter l’argument du demandeur voulant que, conformément à Rivard c Canada (Procureur général), 2001 CFPI 704, [2001] ACF n1072, aux paragraphes 42 à 44, le rejet d’une preuve médicale visée à l’article 39 de la Loi sur le TACRA constitue une erreur de compétence qui requiert l’application de la norme de la décision correcte. Cet argument n’a pas été retenu par la jurisprudence ultérieure.

 

[22]           La Cour d’appel fédérale a clarifié, dans Wannamaker c Canada (Procureur général), 2007 CAF 126, [2007] ACF no 466, au paragraphe 13, que « [l]’application appropriée de l’article 39 suppose une décision sur une question mixte de fait et de droit » qui commande d’être examinée selon la norme de la raisonnabilité. Dans une affaire plus récente, la Cour a réitéré que « l’interprétation de la preuve médicale et l’estimation de l’invalidité d’un demandeur constituaient des décisions qui relevaient de la compétence spécialisée du Tribunal et qui commandaient la retenue judiciaire » (Beauchene c Canada (Procureur général), 2010 CF 980, [2010] ACF no 1222, au paragraphe 21).

 

[23]           Appliquant la norme de la raisonnabilité, la Cour doit déterminer si la décision du Tribunal est conforme aux principes de « la justification de la décision, [de] la transparence et [de] l’intelligibilité du processus décisionnel ». À moins que la décision n’appartienne pas « aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit », l’intervention de la Cour n’est pas justifiée (Dunsmuir, précité, au paragraphe 47).

 

VI.       Analyse

 

[24]           Je dois d’abord traiter des observations relatives à la norme de preuve exigée par le Tribunal à la lumière des articles 3 (l’obligation de donner une interprétation large aux dispositions) et 39 (les règles de preuve différentes qui favorisent le demandeur) de la Loi sur le TACRA.

 

[25]           Le demandeur se fonde sur Monsieur Untel c Canada (Procureur général), 2004 CF 451, [2004] ACF no 555, au paragraphe 36, dans ses observations écrites pour laisser entendre qu’une norme de preuve moins exigeante que la prépondérance des probabilités pouvait être appliquée. Il ne s’agit toutefois plus de l’opinion dominante. En effet, dans Wannamaker, précité, aux paragraphes 5 et 6, la Cour d’appel fédérale a déclaré que, si l’article 39 garantit que la preuve est « examinée sous le jour lui étant le plus favorable possible », il ne dispense pas le demandeur de la « charge d’établir par prépondérance de la preuve les faits nécessaires pour ouvrir droit à une pension ». En outre, le Tribunal n’a pas l’obligation d’accepter systématiquement tous les éléments de preuve présentés par le demandeur.

 

[26]           Compte tenu de ce qui précède, je déterminerai si la décision rendue par le Tribunal relativement au droit du demandeur à une pension était raisonnable au regard des deux éléments de la loi, notamment la conclusion selon laquelle la maladie du demandeur : (i) n’est pas survenue au cours de son service militaire ou (ii) n’est pas attribuable à son service militaire dans la zone de service spécial à Chypre.

 

(i)         Survenue au cours du service militaire

 

[27]           Le demandeur conteste la conclusion du Tribunal selon laquelle sa maladie n’est pas survenue au cours de son service militaire au motif qu’il n’a pas produit une preuve suffisante pour corroborer ses prétentions. Il insiste sur le fait que le Tribunal n’a pas appliqué la présomption prévue à l’alinéa 39a) en ne s’appuyant pas sur ses déclarations selon lesquelles il a constaté les premières zones dépourvues de cheveux ou de poils au cours de son déploiement et sur les lettres de quatre militaires attestant la perte importante de cheveux et de poils immédiatement après son retour à Chypre. Même s’il a jugé vraisemblables les dépositions de ces quatre personnes, le Tribunal n’a pas conclu en faveur du demandeur, contrairement à l’alinéa 39b), que ces éléments de preuve non contredits devaient être acceptés.

 

[28]           Le demandeur soutient également que le Tribunal n’a pas tranché toute incertitude en sa faveur ni apprécié la preuve concernant le moment auquel la maladie est apparue, malgré la progression de l’alopécie de 1974 à 1979. Selon divers rapports médicaux, le demandeur aurait commencé à souffrir de la maladie peu de temps après son retour de Chypre et son arrivée à la BFC Edmonton. Le paragraphe 21(1) n’implique pas un délai strict qui ferait en sorte qu’une différence de quelques semaines ne puisse pas être prise en compte en faveur du demandeur.

 

[29]           Le défendeur soutient que le demandeur n’a pas établi que, selon la prépondérance des probabilités, sa maladie était survenue au cours de son service militaire (voir Wannamaker, précité, aux paragraphes 5 et 6; Elliot c Canada (Procureur général), 2003 CAF 298, [2003] ACF no 1060, au paragraphe 46). Le Tribunal a conclu de manière raisonnable que les lettres des militaires et la preuve médicale indiquaient que le demandeur avait commencé à perdre ses cheveux et ses poils peu de temps après son retour en 1975 et non pendant qu’il était à Chypre. Il faut encore apprécier la preuve et déterminer si une conclusion raisonnable peut être tirée en faveur du demandeur. Malgré le fait que celui‑ci croit que la maladie a commencé pendant son déploiement, le Tribunal a apprécié des éléments de preuve contradictoires et a conclu que ce n’était pas le cas.

 

[30]           Bien que le demandeur ne soit pas dispensé de la charge d’établir le bien‑fondé de sa demande selon la prépondérance des probabilités, j’estime que la décision du Tribunal était déraisonnable dans la mesure où celui‑ci a indiqué qu’il ne disposait pas d’une preuve suffisante démontrant que, comme le demandeur le prétendait, sa maladie était apparue pendant qu’il était à Chypre. Le Tribunal a conclu que la preuve indiquait que [traduction] « la maladie alléguée était apparue en 1975 », mais cela semble contredire les rapports médicaux qui laissaient entendre que les premiers symptômes étaient apparus pendant la période allant de 1974 à 1976. L’importance de cette preuve au regard de la date à laquelle la maladie est apparue et le fait que cette date était proche du service militaire du demandeur à Chypre n’ont pas été pris en compte de manière appropriée par le Tribunal.

 

(ii)        Attribuable au service militaire

 

[31]           Le demandeur prétend également que le Tribunal a commis une erreur lorsqu’il a conclu que, selon la preuve, l’alopécie dont il souffre n’est pas attribuable à son service militaire à Chypre. Sa fiche d’enrôlement ne fait état d’aucun problème de santé préexistant. Le demandeur a exprimé ses préoccupations concernant les piètres conditions sanitaires et son exposition à des tirs indirects et à une sorte de fumée. La preuve médicale sur laquelle le Tribunal s’est appuyé date des années 1975 à 1979, alors qu’on savait peu de choses au sujet des causes de l’alopécie. Grâce à des progrès médicaux récents cependant, qui sont décrits dans le Merck Manual, 18édition, on sait maintenant que le [traduction] « stress émotionnel » peut être à l’origine de la maladie. Selon le demandeur, le Tribunal aurait dû trancher toute incertitude en sa faveur conformément à l’alinéa 39c).

 

[32]           Le défendeur soutient que la cause de la maladie du demandeur est inconnue. Le Tribunal a été incapable de conclure que les incidents survenus pendant le service du demandeur ont probablement causé la maladie. Malgré le fait que, selon Merck Manual, 18édition, des éléments déclencheurs comme le stress émotionnel peuvent causer l’alopécie circonscrite, le Tribunal a souligné que le demandeur n’avait jamais produit une preuve confirmant que de tels éléments étaient survenus. La conviction personnelle du demandeur est insuffisante pour établir, selon la prépondérance des probabilités, que sa maladie est attribuable à son service militaire.

 

[33]           Compte tenu de ma conclusion ci‑dessus selon laquelle il était déraisonnable que le Tribunal conclue, sur la foi de la preuve, que la maladie du demandeur n’était pas survenue au cours de son service militaire, il n’est pas nécessaire que je me prononce sur les arguments présentés relativement à l’autre élément de la loi régissant le droit à une pension et décide si le Tribunal a commis une erreur lorsqu’il a déterminé qu’il n’existait pas de lien causal entre la maladie du demandeur et son service militaire.

 

VII.      Conclusion

 

[34]           Compte tenu de la preuve, il était déraisonnable que le Tribunal détermine que la maladie du demandeur n’était pas survenue au cours de son service militaire dans la zone de service spécial à Chypre au sens de l’alinéa 21(1)a), qui régit le droit à une pension en vertu de la Loi sur les pensions.

 

[35]           Pour ce seul motif, la demande de contrôle judiciaire est accueillie et la décision rendue par le Tribunal par suite du réexamen de la décision du comité d’appel est annulée. L’affaire est renvoyée au Tribunal pour qu’il rende une nouvelle décision.

 


JUGEMENT

 

LA COUR STATUE que la présente demande de contrôle judiciaire est accueillie et que la décision rendue par le Tribunal par suite du réexamen de la décision du comité d’appel est annulée. L’affaire est renvoyée au Tribunal pour qu’il rende une nouvelle décision.

 

 

« D. G. Near »

Juge

 

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc, LL.B.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        T-589-11

 

INTITULÉ :                                       CARNEGIE c. PGC

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Ottawa

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 19 décembre 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE NEAR

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 24 janvier 2012

 

 

COMPARUTIONS :

 

Jack Hughes et Roberto Ghignone

 

                       POUR LE DEMANDEUR

Abigail Martinez

 

                        POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Jack Hughes et Roberto Ghignone

Borden Ladner Gervais LLP

Ottawa (Ontario)

 

                        POUR LE DEMANDEUR

Abigail Martinez

Ministère de la Justice

Ottawa (Ontario)

 

                       POUR LE DÉFENDEUR

 

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