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Cour fédérale

 

Federal Court

Date : 20120221


Dossier : T-1162-07

Référence : 2012 CF 234

ENTRE :

LIGUE DES DROITS DE LA PERSONNE DE B'NAI BRITH CANADA

demanderesse

et

SA MAJESTÉ LA REINE, LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA et WASYL ODYNSKY

 

défendeurs

MOTIFS DE LA TAXATION DES DÉPENS

 

BRUCE PRESTON, OFFICIER TAXATEUR

 

[1]               Le 19 juin 2009, la Cour a rejeté la demande avec dépens payables à M. Odynsky par B'nai Brith (la demanderesse) selon la colonne III.

 

[2]               L'audition de la taxation des dépens a eu lieu le 12 décembre 2011 par conférence téléphonique. L'avocat de la Couronne n'a pas participé à la taxation.

 

[3]               Au cours de la conférence téléphonique, l'avocat de la demanderesse a demandé que l'audition soit ajournée parce que l'avocate de M. Odynsky avait produit de la jurisprudence le matin de l'audition. Du consentement des deux parties, l'audition de la taxation a été ajournée pendant une heure.

 

[4]               À l'audition de la taxation des dépens, l'avocate de M. Odynsky a soutenu que la demanderesse réclamait que les dépens soient de 1 $. L'avocate a fait valoir que la Cour avait accordé les dépens selon la colonne III du tarif B des Règles des Cours fédérales et que, par conséquent, l'officier taxateur n'avait pas la compétence requise pour adjuger des dépens de seulement 1 $. À l'appui de son argument, l'avocate de M. Odynsky a cité l'arrêt Madell c. La Reine, 2011 FCA 105, au paragraphe 13, qui énonce ce qui suit :

[TRADUCTION]

La thèse de l'appelant, en me demandant en fait de radier une adjudication de dépens, révèle essentiellement une mauvaise compréhension du rôle de l'officier taxateur : voir le paragraphe 3 de la décision Marshall c. Canada, 2006 CF 1017, [2006] A.C.F. no 1282 (O.T.) (Marshall). Je n'ai pas la compétence d'annuler ou de modifier un jugement, car je ne suis pas la « Cour » au sens où ce terme est entendu dans les Règles des Cours fédérales : voir Marshall, précité, et Sander Holdings Ltd c. Canada (Ministre de l'Agriculture), 2009 FCA 199, [2009] F.C.J. no 720 (O.T.) (Sander Holdings). Avec égards, la Cour d'appel fédérale ayant rendu son jugement relatif aux dépens, je doute fort que le redressement demandé dans les documents versés par l'appelant au dossier que j'ai devant moi puisse être obtenu par voie interlocutoire.

 

[5]               L'avocate de M. Odynsky a soutenu que les dépens réclamés dans le mémoire de frais étaient tout à fait raisonnables et que la demanderesse n'avait produit aucune observation écrite concernant les articles particuliers réclamés. L'avocate a invoqué le paragraphe 14 de la décision Madell, précitée, au soutien de son argument selon lequel les Règles des Cours fédérales n'envisagent pas qu'un officier taxateur s'écarte d'une position neutre pour agir comme avocat d'une partie en contestant certains articles dans un mémoire de frais. L'avocate soutient également que les seuls honoraires réclamés étaient ceux liés à la préparation du mémoire des faits et du droit et à l'audition de la demande.

 

[6]               S'appuyant sur la décision Herbert c. Procureur général du Canada, 2011 FC 365, l'avocat de la demanderesse a admis qu'il n'était pas en mesure de plaider en faveur d'une adjudication de 1 $, car la Cour a adjugé les dépens selon la colonne III. Il a fait valoir que le pouvoir discrétionnaire que je possède en qualité d'officier taxateur me permettait d'établir le nombre d'unités, dans les limites de la fourchette de la colonne III, et que les articles réclamés devaient être attribués à l'échelon le plus bas de la fourchette.

 

[7]               Dans ses observations écrites, l'avocat de la demanderesse soutient que les facteurs énoncés dans le paragraphe 400(3) des Règles des Cours fédérales devraient être pris en compte dans la taxation des dépens à l'échelon inférieur de la colonne III du tarif B. À partir du paragraphe 23, l'avocat indique ce qui suit :

[TRADUCTION]

 

23.       En ce qui concerne le facteur du résultat de l'instance en vertu de l'alinéa 400(3)a) des Règles des Cours fédérales (les Règles), la demanderesse soutient que la Cour devrait tenir compte du résultat des requêtes présentées par le défendeur Odynsky et tranchées en faveur de la demanderesse. La Cour devrait aussi tenir compte du fait que, sur le fond, la demanderesse a eu gain de cause sur la question de la qualité pour agir.

 

24.       En ce qui concerne le facteur de l'importance et de la complexité des questions en litige en vertu de l'alinéa 400(3)c) des Règles, la Cour devrait tenir compte de la nécessité d'empêcher que le gouverneur en conseil ne jouisse d'une immunité à l'égard du contrôle judiciaire. Les dépens ne devraient pas devenir un obstacle qui favoriserait l'immunité.

 

25.       En ce qui concerne le facteur du partage de la responsabilité en vertu de l'alinéa 400(3)d) des Règles, la Cour devrait tenir compte du fait que le succès était partagé. Le défendeur Odynsky a eu gain de cause sur la question de l'interprétation de la loi, mais la demanderesse a eu gain de cause sur la question de la qualité pour agir.

 

26.       En ce qui concerne le facteur de la charge de travail en vertu de l'alinéa 400(3)g) des Règles, la Cour devrait tenir compte du fait que l'effort fourni par la demanderesse pour s'opposer aux requêtes présentées par le défendeur, pour lesquelles il n'a pas obtenu gain de cause, ainsi que pour présenter sa thèse sur la question de la qualité pour agir, pour laquelle elle a eu gain de cause, était aussi important, sinon plus, que le travail lié à la question de l'interprétation de la loi.

 

27.       Sur la question de savoir si l'intérêt public dans la résolution judiciaire de l'instance justifie une adjudication particulière des dépens en vertu de l'alinéa 400(3)h) des Règles, la Cour devrait tenir compte des remarques du juge Barnes au paragraphe 12 :

 

Il n'y a aucun doute que B'nai Brith a soulevé dans la présente instance une question sérieuse d'interprétation de la loi, et le procureur général n'a pas énergiquement soutenu le contraire. La juge Dawson était elle aussi d'avis qu'il y avait une question sérieuse qui méritait un examen plus approfondi et je ne vois aucune raison de remettre en question sa conclusion.

 

La Cour devrait également tenir compte de ces observations de la Cour d'appel fédérale :

 

[...] la Cour n'a jamais été directement saisie de la question soulevée par l'appelante quant à l'interprétation du paragraphe 10(1).

 

28.       En ce qui concerne le facteur de l'alinéa 400(3)i) des Règles, la Cour devrait tenir compte du fait que la requête en radiation et la demande de sursis présentées par le défendeur Odynsky ont eu pour effet de prolonger inutilement l'instance. La demande de sursis faisait suite à la requête en radiation.

 

29.       En ce qui concerne les facteurs des alinéas 400(3)i) et k) des Règles, la Cour devrait tenir compte du fait que le défendeur Odynsky n'a pas admis qu'on pouvait prétendre de façon raisonnable que la demanderesse avait qualité pour agir. La requête en radiation et la demande de sursis n'étaient pas nécessaires. Toute question soulevée lors de la requête en radiation qui a été rejetée aurait pu attendre l'examen de la demande principale.

 

30.       En ce qui concerne le facteur de l'alinéa 400(3)o) des Règles, la Cour devrait tenir compte du fait que :

 

a) la demanderesse représente des victimes de l'holocauste en général et des proches des victimes du lieu où se trouvait le camp de concentration où le défendeur Odynsky avait été gardien;

 

b) l'instance en révocation amorcée contre le défendeur Odynsky était fondée sur le fait que le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration avait conclu que le défendeur Odynsky était visé par des allégations fondées ou des éléments de preuve faisant état de sa participation directe à des crimes de guerre ou à des crimes contre l'humanité ou de sa complicité de tels crimes;

 

c) la Cour fédérale a conclu que le défendeur Odynsky avait acquis sa citoyenneté par fraude ou au moyen d'une fausse déclaration ou de la dissimulation intentionnelle de faits essentiels.

 

Il serait contraire à la justice d'ordonner à un représentant des proches des victimes qui ont péri au camp de concentration où le défendeur Odynsky était un gardien de payer des sommes importantes sous forme de dépens à une personne telle que le défendeur Odynsky.

 

[8]               À l'audition de la taxation, l'avocat de la demanderesse a également soutenu que la question d'intérêt public soulevée par la présente instance avait trait aux proches des victimes du camp de concentration. L'avocat a admis que l'instance ne soulevait pas de question d'intérêt public de portée large. L'avocat a fait valoir que la Cour avait reconnu à la demanderesse la qualité pour agir et que cela prouvait l'existence d'une question d'intérêt public. Enfin, l'avocat de la demanderesse a fait valoir que les questions mentionnées dans la demande dépassaient le cadre strict de l'holocauste et qu'elles avaient trait à la compétence du Cabinet.

 

[9]               En réplique, l'avocate de M. Odynsky a fait valoir que la question à trancher lors de la taxation était les dépens et non la qualité pour agir de la demanderesse. Sur la question de l'intérêt public, l'avocate a invoqué la décision Bow Valley Naturalists Society c. Ministre du Patrimoine canadien, 2002 CAF 515, au paragraphe 10, qui énonce ce qui suit :

Je pense que l'application des facteurs énumérés au paragraphe 400(3) des règles dans un sens opposé à l'intérêt des parties qui ont eu gain de cause exigerait l'exercice mûrement réfléchi du pouvoir discrétionnaire. L'article 409 des règles, étant habilitant, n'oblige pas l'officier taxateur à exercer son pouvoir discrétionnaire exactement de la façon dont l'aurait exercé la Cour et n'exige pas automatiquement qu'un facteur d'intérêt public ait préséance sur tous les autres facteurs pour que soit accordé le minimum ou le maximum. Dans la décision Early Recovered Resources Inc., précitée, j'ai tempéré le poids à accorder à l'intérêt public, du fait que, par sa nature, il avait une portée régionale. Je doute qu'en l'espèce, je puisse ignorer le rôle joué par les appelantes pour faire examiner la procédure suivie, mais il n'est pas contesté que l'intimée avait des responsabilités importantes, y compris l'obligation de respecter le droit des appelantes de saisir la justice. L'intimée, ayant reçu les dépens entre parties selon le barème normal, n'est pas tenue, en raison du facteur de l'intérêt public, de permettre aux appelantes d'échapper complètement aux conséquences de cette attribution de dépens, par exemple par l'attribution du minimum alors que le maximum pourrait autrement être justifié [...]

 

L'avocate a aussi soutenu que la question d'intérêt public se posait entre la demanderesse et le procureur général du Canada. L'avocate a invoqué le fait que M. Odynsky avait été entraîné dans la demande, car le différend qui opposait la demanderesse et le procureur général du Canada visait sa citoyenneté.

 

[10]           Je commencerai par traiter ce dernier point. Au paragraphe 24 de la décision Ligue des droits de la personne de B'nai Brith Canada c. Canada, 2008 FC 732, la Cour a conclu qu'une personne est directement touchée si la décision en cause a directement trait aux droits d'une partie, lui impose une obligation juridique ou lui porte directement préjudice. Sans caractériser la qualité pour agir de M. Odynsky comme étant celle d'une personne qui a été entraînée dans la demande, il est clair qu'il est directement touché par la décision faisant l'objet du contrôle judiciaire. La question est de savoir si cela devrait avoir une incidence sur les dépens. Je suis d'avis que oui. Ni la Couronne ni M. Odynsky, qui ont tous deux une qualité pour agir directe, n'ont demandé la révision de la décision. Cette contestation a été amorcée par une tierce partie dont la qualité pour agir directe n'a pas été reconnue, mais qui possédait une qualité pour agir dans l'intérêt public. Lorsque la demanderesse a déposé une demande de contrôle judiciaire de la décision du gouverneur en conseil, M. Odynsky a dû faire face à une remise en cause de sa citoyenneté par une tierce partie. Confronté à cette remise en cause, M. Odynsky a pris des mesures pour protéger ses droits, ce qui devrait avoir une incidence sur la taxation des dépens.

 

[11]           Il convient aussi de résoudre une deuxième question préliminaire, soit celle de l'incidence des requêtes de M. Odynsky visant à radier la demande de contrôle judiciaire et de surseoir au contrôle judiciaire. La demanderesse aborde les requêtes de M. Odynsky plusieurs fois dans ses observations sur les dépens. L'avocat de la demanderesse a soutenu qu'il faut tenir compte du succès obtenu par la demanderesse et de l'effort qu'elle a déployé pour contester ces requêtes. L'avocat a fait valoir que ces requêtes ont prolongé indûment l'instance. Comme la demande de sursis a été présentée à la Cour d'appel fédérale et qu'elle n'a aucune incidence sur la présente taxation, je m'attacherai à examiner la requête en radiation de M. Odynsky.

 

[12]           En règle générale, les requêtes qui n'ont pas fait l'objet d'une adjudication de dépens n'ont pas d'incidence importante sur les dépens d'une instance. Cependant, l'avocat de la demanderesse affirme que l'alinéa 400(3)i) des Règles devrait être un facteur à considérer dans la présente taxation. Pour prendre une décision sur la question de savoir si la requête en radiation présentée par M. Odynsky avait prolongé inutilement l'instance, j'ai examiné les décisions des cours sur les requêtes. Comme la décision du protonotaire du 4 février 2008 a été infirmée, je me concentrerai sur la décision en appel de celle du protonotaire. Au paragraphe 2 de la décision précitée, la juge Dawson a conclu ce qui suit :

[TRADUCTION]

Saisie de l'appel de l'ordonnance du protonotaire, j'exerce mon pouvoir discrétionnaire de novo. J'accueille l'appel parce que je conclus qu'en l'espèce, la question de la qualité pour agir dans l'intérêt public ne devrait pas être décidée lors d'une procédure préliminaire ou interlocutoire. J'estime plutôt que la question devrait être tranchée par le juge qui entend la demande de contrôle judiciaire.

 

De plus, j'ai examiné la décision de la Cour d'appel fédérale relative à l'appel de M. Odynsky de l'ordonnance de la juge Dawson. À partir du paragraphe 5 de la décision Ligue des droits de la personne de B'nai Brith Canada c. Odynsky, 2009 CAF 82, la Cour a conclu ce qui suit :

5          Dans l'arrêt David Bull Laboratories (Canada) Inc. c. Pharmacia Inc. (C.A.), [1995] 1 C.F. 588, la Cour a jugé que l'on ne devrait recourir aux requêtes en radiation d'une demande de contrôle judiciaire que dans les circonstances les plus exceptionnelles, c.‑à‑d. lorsque la demande est dénuée de toute possibilité de succès.

 

6          La justification de cette décision était que les procédures de contrôle judiciaire sont censées procéder avec célérité et les requêtes en radiation peuvent retarder indûment et inutilement leur dénouement. En d'autres mots, conformément à l'arrêt Bull, la justice est mieux servie si l'on permet au juge qui entend la demande de traiter de toutes les questions soulevées par la demande de contrôle judiciaire.

 

7          Le présent appel illustre le bien‑fondé et la sagesse du jugement antérieur de la Cour dans la cause précitée.

 

8          Il nous est demandé aujourd'hui, le [jeudi] 12 mars 2009, de trancher un appel relatif au rejet d'une requête en radiation alors que la demande de contrôle judiciaire doit être entendue sur le fond dans quatre jours, un fait dont nous n'étions pas au courant jusqu'à ce que nous parvenions au stade des observations formulées par l'avocat de la Ligue.

 

[Non souligné dans l'original]

 

[13]           Dans ces deux décisions, les Cours ont conclu que toute décision sur la requête en radiation devrait être tranchée par le juge qui entend la demande de contrôle judiciaire. Il est clair que la Cour d'appel fédérale a conclu que la requête en radiation de M. Odynsky avait retardé indûment et inutilement cette instance. Par conséquent, la présentation de la requête en radiation par M. Odynsky et l'appel subséquent sont des facteurs dont je dois tenir compte dans la présente taxation des dépens.

 

[14]           L'autre question préliminaire est celle de l'intérêt public. À l'examen de l'alinéa 300(3)h) des Règles, je suis d'accord avec la demanderesse que la nature de cette instance est telle que, pour une certaine partie de la population, l'intérêt public peut être très important. Toutefois, comme il a été décidé dans l'arrêt Bow Valley Naturalists Society, précité, le facteur de l'intérêt public ne devrait pas prévaloir sur tous les autres facteurs de façon à mener à une adjudication minimale ou maximale, et le poids à accorder à l'intérêt public peut être tempéré en fonction d'un intérêt régional. Bien que l'affaire dont je suis saisi ne comporte pas de limite régionale, je souscris à l'argument de l'avocat de la demanderesse selon lequel la portée de l'intérêt public ne devrait pas être indûment large et peut être limitée à ceux que la demanderesse représente. En revanche, je souscris à l'argument de l'avocate de M. Odynsky selon lequel, en l'espèce, l'intérêt public est principalement une question qui se pose entre la demanderesse et les défendeurs Sa Majesté la Reine et le procureur général du Canada. Le contrôle judiciaire de la décision du gouverneur en conseil a été demandé par la demanderesse et la décision est défendue par la Couronne. Comme je l'ai conclu au paragraphe 10 qui précède, M. Odynsky a dû faire face à une contestation de sa citoyenneté et a pris des mesures pour protéger ses droits, mais l'aspect du contrôle judiciaire qui avait un intérêt public provenait de la contestation de la demanderesse, et non de la participation de M. Odynsky. En résumé, même s'il y a un intérêt public évident, cet intérêt est limité en nature et il n'est pas lié aux mesures prises par M. Odynsky pour protéger ses droits. Par conséquent, j'estime que l'incidence de l'intérêt public lié à la présente instance ne devrait pas avoir une incidence sur la taxation des dépens de M. Odynsky.

 

[15]           La dernière question préliminaire a trait à l'influence que devrait avoir l'holocauste sur la taxation des dépens. Dans les observations de la demanderesse sur l'alinéa 400(3)o) des Règles (« toute autre question qu'elle juge pertinente »), il est indiqué que l'officier taxateur doit parfois taxer les dépens de parties aux prises avec des situations difficiles. Cependant, nonobstant la gravité de ces situations, la taxation doit être réalisée conformément aux articles et au tarif des Règles des Cours fédérales. Par conséquent, je conclus que le fait que la demanderesse représente des familles des victimes de l'holocauste n'est pas un facteur dont je peux tenir compte dans la présente taxation de dépens.

 

[16]           À la lumière de ces divers facteurs, j'aborde maintenant les articles de manière individuelle et les débours réclamés.

 

[17]           Comme il est mentionné précédemment, le seul argument concernant les services visés par la taxation que la demanderesse a fait valoir était que l'on devrait fixer les articles réclamés vers le bas de la fourchette de la colonne III. Dans la décision Starlight c. Canada, 2001 CFPI 999, on a déclaré que :

7          Le Tarif prévoit une indemnisation partielle en établissant une liste, non nécessairement exhaustive, de services distincts que les avocats rendent pendant un litige. Les Règles visent à faire ressortir les questions pertinentes et à écarter celles qui ne le sont pas. Par exemple, les étapes des actes de procédures et de la communication de la preuve peuvent impliquer des opérations complexes de définition et de synthèse, simplifiant ainsi les questions à instruire. Ainsi, chaque article est taxable en fonction de ses propres circonstances et il n'est pas nécessaire d'utiliser le même nombre d'unités pour chaque service rendu. Si les services s'évaluent en fonction d'un nombre d'heures, le même nombre d'unités ne doit pas nécessairement être accordé pour chaque heure, particulièrement si les caractéristiques de l'audience ont varié pendant sa durée. Dans le présent mémoire de frais, le nombre minimal d'unités pour l'article 5 et le nombre maximal d'unités pour l'article 6 sont des résultats possibles. Pour quelques articles à la fourchette peu étendue, comme l'article 14, il faut établir des distinctions générales relativement au choix de la position retenue dans la fourchette.

 

[Non souligné dans l'original]

 

Conformément aux conclusions de la Cour dans la décision Starlight, je taxerai chaque article réclamé en fonction des circonstances propres de l'article considéré.

 

[18]           L'avocate de M. Odynsky a réclamé 5 unités pour l'article 2 (préparation et dépôt de toutes les défenses, réponses, demandes reconventionnelles ou dossiers et documents des intimés). Je considère que cela se situe au milieu de la fourchette de la colonne III. Ayant examiné le dossier de l'instance et conclu que l'avocate de M. Odynsky avait déposé un dossier de demande, je conclus que le montant réclamé sous l'article 2 est raisonnable. Par conséquent, conformément à mes conclusions susmentionnées, j'accorde l'article 2 tel qu'il est demandé.

 

[19]           Pour les articles 13a) et 13b) (préparation de l'instruction ou de l'audience), on demande un nombre d'unités près du maximum de la fourchette de la colonne III. Étant donné que l'appel interjeté par M. Odynsky de la décision de la juge Dawson n'a été entendu que quatre jours avant l'audition du contrôle judiciaire, et étant donné les conclusions de la Cour d'appel fédérale que j'ai citées au paragraphe 12 ci‑dessus, j'estime que ces réclamations au titre des articles 13a) et 13b) sont excessives. J'accorde pour l'article 13a) deux unités et pour l'article 13b) deux unités par jour pour le second jour de l'audition.

 

[20]           En ce qui concerne l'article 14a) (pour le premier avocat, pour chaque heure de présence à la Cour), M. Odynsky a demandé trois unités par heure pour 10 heures. L'examen du procès‑verbal de l'audition confirme que l'audition du contrôle judiciaire a duré 10 heures sur deux jours. De plus, outre mes conclusions au paragraphe 10 qui précède, j'estime que, comme M. Odynsky a dû faire face à une contestation de sa citoyenneté par une tierce partie, il était dans une position unique qui mérite une adjudication à un niveau plus élevé pour le temps passé en cour par les avocats. Comme l'article 14 a une fourchette de 2 ou 3 unités, j'accorde trois unités pour les 10 heures comme demandé.

 

[21]           L'avocate de M. Odynsky a réclamé sept unités sous l'article 15 (préparation et dépôt d'un plaidoyer écrit, à la demande ou avec la permission de la Cour). L'examen du dossier révèle que la réclamation présentée sous l'article 15 a trait à la signification et au dépôt du mémoire des faits et du droit. Si tel est bien le cas, la réclamation ne peut être accueillie, car les réclamations visant le mémoire des faits et du droit ne sont accordées que sous l'article 2, au titre du dossier de l'intimé. De plus, même si j'ai été en mesure de retrouver deux directives du protonotaire demandant un plaidoyer écrit, ces deux directives ont trait à la requête en radiation de M. Odynsky, pour laquelle aucuns dépens n'ont été adjugés par la Cour. Même s'il existe une troisième directive du 8 août 2007 exigeant une réponse à la lettre de la demanderesse du 31 juillet 2007, je n'estime pas qu'il s'agisse d'une demande de plaidoyer écrit visée par l'article 15 du tarif B. Il n'y a au dossier aucune autre directive demandant un plaidoyer écrit. J'ai décidé à de nombreuses occasions qu'en l'absence d'une directive ou d'une demande de la Cour, l'article 15 ne peut pas être accordé. (Voir Moglica c. Procureur général du Canada, 2011 FC 466, Laboucan c. Loonskin, 2009 FC 194, Bartkus c. Société canadienne des postes, 2009 FC 404, et Moodie c. La Reine, 2009 FC 608.) Par conséquent, comme il n'existe au dossier aucune demande de la Cour pour un plaidoyer écrit qui donnerait droit à des dépens en faveur de M. Odynsky, la réclamation sous l'article 15 n'est pas accordée.

 

[22]           Comme la demanderesse n'a pas fourni d'observations concernant les débours réclamés, et ayant examiné les réclamations liées à la photocopie ainsi qu'à la livraison et à la signification des documents, j'estime que les montants réclamés sont raisonnables et nécessaires étant donné les circonstances de la présente instance. Par conséquent, comme M. Odynsky a été en mesure de justifier ces débours, je les accorde tels qu'ils sont réclamés pour la somme totale de 612,29 $.

 

[23]           Pour les motifs énoncés précédemment, le mémoire de frais de M. Odynsky est taxé et j'accorde 6 341,39 $. Un certificat de taxation sera délivré pour ce montant.

 

« Bruce Preston »

Officier taxateur

 

Toronto (Ontario)

21 février 2012

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :

T-1162-07

 

 

INTITULÉ :

LIGUE DES DROITS DE LA PERSONNE DE B'NAI BRITH CANADA c. SA MAJESTÉ LA REINE, LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA et WASYL ODYNSKY

 

 

TAXATION DES DÉPENS AVEC COMPARUTION DES PARTIES

 

 

LIEU DE LA TAXATION :

TORONTO (ONTARIO)

 

 

MOTIFS DE LA TAXATION DES DÉPENS :

BRUCE PRESTON

 

 

DATE DES MOTIFS :

LE 21 FÉVRIER 2012

 

COMPARUTIONS :

 

David Matas

POUR LA DEMANDERESSE

 

Barbara Jackman

POUR LE DÉFENDEUR

(WASYL ODYNSKY)

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

David Matas

Winnipeg (Manitoba)

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Jackman and Associates

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

(WASYL ODYNSKY)

 

 

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