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Cour fédérale

 

Federal Court

 Date : 20120228


Dossier : T-1700-11

Référence : 2012 CF 271

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 28 février 2012

En présence de monsieur le juge Russell

 

ENTRE :

 

DAVID SIVAK, LUCI BAJZOVA, MONIKA SIVAK, LUCIE BAJZOVA, MIROSLAV SARKOZI, ANDREJ BALOG, ZANETA BALOGOVA, GALINA BALOGOVA, VIKTOR SARKOZI, ANDREJ BALOG, ANDREJ BALOG, MARIE BALOGOVA, LUKAS BALOG, MILAN LASAB, MILADA LASABOYA et ELVIS KULASIC

 

 

 

demandeurs

et

 

 

 

SA MAJESTÉ LA REINE et LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeurs

 

 

 

 

  MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

LA REQUÊTE

 

  • [1] Les demandeurs ont demandé que les groupes suivants soient autorisés à former un recours collectif en vertu de la partie 5.1 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106 :

    1. Tous les demandeurs roms de la République tchèque en attente d’une décision de la Section de la protection des réfugiés (SPR) dont l’audience n’avait pas encore commencé avant la publication de l’« Exposé, Rapport de la mission d’enquête sur la protection de l’État en République tchèque, juin 2009 » (rapport de 2009);

 

  1. Tous les demandeurs roms de la République tchèque dont l’audience a débuté avant le rapport de 2009, mais dont la décision n’a été rendue qu’après la publication du rapport de 2009;

 

  1. Tous les demandeurs roms de la République tchèque à l’égard desquels la SPR a rendu une décision défavorable en se fondant sur le rapport de 2009, en tout ou en partie, et dont l’affaire soit :

  • (i) fait l’objet d’un contrôle judiciaire devant la Cour fédérale;

(ii)  ne fait pas l’objet d’un contrôle judiciaire;

mais, en tous les cas, les demandeurs attendent un examen des risques avant le renvoi (ERAR);

 

  1. Tous les demandeurs roms de la République tchèque dont la demande a été refusée par la SPR en raison du rapport de 2009 et qui ont soit :

  • (i) déposé une demande d’ERAR et sont en attente d’une décision;

    • (ii) déposé aucune demande d’ERAR, mais sont en attente d’une mesure de renvoi;

mais, en tous les cas, n’ont pas encore été renvoyés;

 

  1. Tous les demandeurs roms de la République tchèque dont la demande a été refusée par la SPR en raison du rapport de 2009, qui sont « prêts pour le renvoi » et qui peuvent être légalement renvoyés;

  2. Tous les demandeurs roms de la République tchèque dont la demande a été refusée par la SPR en raison du rapport de 2009 et qui ont été renvoyés.

 

  • [2] Cette requête a été instruite en même temps que la requête des défendeurs visant à faire annuler des parties de la déclaration modifiée des demandeurs et, dans une certaine mesure, les deux requêtes sont intimement liées, car la portée des actes de procédure pourrait avoir des répercussions sur la capacité des demandeurs à satisfaire aux critères de certification et sur l’opinion de la Cour concernant la question de savoir si un recours collectif est le meilleur moyen de trancher de manière juste et efficace les questions communes de droit et de fait.

 

LE CADRE

 

  • [3] Par souci de commodité, les dispositions de la partie 5.1 des Règles ayant une importance particulière pour la présente requête sont les suivantes :

334.16 (1) Sous réserve du paragraphe (3), le juge autorise une instance comme recours collectif si les conditions suivantes sont réunies :

 

  • * a) les actes de procédure révèlent une cause d’action valable;

  • *  

  • * b) il existe un groupe identifiable formé d’au moins deux personnes;

  • *  

  • * c) les réclamations des membres du groupe soulèvent des points de droit ou de fait communs, que ceux-ci prédominent ou non sur ceux qui ne concernent qu’un membre;

  • *  

  • * d) le recours collectif est le meilleur moyen de régler, de façon juste et efficace, les points de droit ou de fait communs;

  • *  

  • * e) il existe un représentant demandeur qui:

 

 

  • * (i) représenterait de façon équitable et adéquate les intérêts du groupe,

  • *  

  • * (ii) a élaboré un plan qui propose une méthode efficace pour poursuivre l’instance au nom du groupe et tenir les membres du groupe informés de son déroulement,

 

 

 

  • * (iii) n’a pas de conflit d’intérêts avec d’autres membres du groupe en ce qui concerne les points de droit ou de fait communs,

 

 

  • * (iv) communique un sommaire des conventions relatives aux honoraires et débours qui sont intervenues entre lui et l’avocat inscrit au dossier.

 

 

Facteurs pris en compte

 

(2) Pour décider si le recours collectif est le meilleur moyen de régler les points de droit ou de fait communs de façon juste et efficace, tous les facteurs pertinents sont pris en compte, notamment les suivants :

 

 

  • * a) la prédominance des points de droit ou de fait communs sur ceux qui ne concernent que certains membres;

  • *  

  • * b) la proportion de membres du groupe qui ont un intérêt légitime à poursuivre des instances séparées;

 

 

 

  • * c) le fait que le recours collectif porte ou non sur des réclamations qui ont fait ou qui font l’objet d’autres instances;

  • *  

  • * d) l’aspect pratique ou l’efficacité moindres des autres moyens de régler les réclamations;

  • *  

  • * e) les difficultés accrues engendrées par la gestion du recours collectif par rapport à celles associées à la gestion d’autres mesures de redressement.

  • *  

Sous-groupe

 

(3) Si le juge constate qu’il existe au sein du groupe un sous-groupe de membres dont les réclamations soulèvent des points de droit ou de fait communs que ne partagent pas tous les membres du groupe de sorte que la protection des intérêts des membres du sous-groupe exige qu’ils aient un représentant distinct, il n’autorise l’instance comme recours collectif que s’il existe un représentant demandeur qui :

 

  • * a) représenterait de façon équitable et adéquate les intérêts du sous-groupe;

  • *  

  • * b) a élaboré un plan qui propose une méthode efficace pour poursuivre l’instance au nom du sous-groupe et tenir les membres de celui-ci informés de son déroulement;

 

 

 

  • * c) n’a pas de conflit d’intérêts avec d’autres membres du sous-groupe en ce qui concerne les points de droit ou de fait communs;

 

 

  • * d) communique un sommaire des conventions relatives aux honoraires et débours qui sont intervenues entre lui et l’avocat inscrit au dossier.

  • * ...

 

334.18 Le juge ne peut invoquer uniquement un ou plusieurs des motifs ci-après pour refuser d’autoriser une instance comme recours collectif :

 

  • * a) les réparations demandées comprennent une réclamation de dommages-intérêts qui exigerait, une fois les points de droit ou de fait communs tranchés, une évaluation individuelle;

  • *  

  • * b) les réparations demandées portent sur des contrats distincts concernant différents membres du groupe;

  • *  

  • * c) les réparations demandées ne sont pas les mêmes pour tous les membres du groupe;

  • *  

  • * d) le nombre exact de membres du groupe ou l’identité de chacun est inconnu;

  • *  

  • * e) il existe au sein du groupe un sous-groupe dont les réclamations soulèvent des points de droit ou de fait communs que ne partagent pas tous les membres du groupe.

 

334.16 (1) Subject to subsection (3), a judge shall, by order, certify a proceeding as a class proceeding if

 

 

  • * (a) the pleadings disclose a reasonable cause of action;

 

  • * (b) there is an identifiable class of two or more persons;

  • *  

  • * (c) the claims of the class members raise common questions of law or fact, whether or not those common questions predominate over questions affecting only individual members;

  • *  

  • * (d) a class proceeding is the preferable procedure for the just and efficient resolution of the common questions of law or fact; and

  • *  

  • * (e) there is a representative plaintiff or applicant who

  • *  

    • * (i) would fairly and adequately represent the interests of the class,

 

 

  • * (ii) has prepared a plan for the proceeding that sets out a workable method of advancing the proceeding on behalf of the class and of notifying class members as to how the proceeding is progressing,

  • *  

  • * (iii) does not have, on the common questions of law or fact, an interest that is in conflict with the interests of other class members, and

  • *  

  • * (iv) provides a summary of any agreements respecting fees and disbursements between the representative plaintiff or applicant and the solicitor of record.

  • *  

Matters to be considered

 

(2) All relevant matters shall be considered in a determination of whether a class proceeding is the preferable procedure for the just and efficient resolution of the common questions of law or fact, including whether

 

  • * (a) the questions of law or fact common to the class members predominate over any questions affecting only individual members;

  • *  

  • * (b) a significant number of the members of the class have a valid interest in individually controlling the prosecution of separate proceedings;

  • *  

  • * (c) the class proceeding would involve claims that are or have been the subject of any other proceeding;

  • *  

  • * (d) other means of resolving the claims are less practical or less efficient; and

 

 

  • * (e) the administration of the class proceeding would create greater difficulties than those likely to be experienced if relief were sought by other means.

  • *  

Subclasses

 

(3) If the judge determines that a class includes a subclass whose members have claims that raise common questions of law or fact that are not shared by all of the class members so that the protection of the interests of the subclass members requires that they be separately represented, the judge shall not certify the proceeding as a class proceeding unless there is a representative plaintiff or applicant who

 

  • * (a) would fairly and adequately represent the interests of the subclass;

  • *  

  • * (b) has prepared a plan for the proceeding that sets out a workable method of advancing the proceeding on behalf of the subclass and of notifying subclass members as to how the proceeding is progressing;

  • *  

  • * (c) does not have, on the common questions of law or fact for the subclass, an interest that is in conflict with the interests of other subclass members; and

  • *  

  • * (d) provides a summary of any agreements respecting fees and disbursements between the representative plaintiff or applicant and the solicitor of record.

...

 

334.18 A judge shall not refuse to certify a proceeding as a class proceeding solely on one or more of the following grounds:

 

 

  • * (a) the relief claimed includes a claim for damages that would require an individual assessment after a determination of the common questions of law or fact;

 

 

  • * (b) the relief claimed relates to separate contracts involving different class members;

  • *  

  • * (c) different remedies are sought for different class members;

 

 

  • * (d) the precise number of class members or the identity of each class member is not known; or

  • *  

  • * (e) the class includes a subclass whose members have claims that raise common questions of law or fact not shared by all of the class members.

 

 

  • [4] Selon la jurisprudence, il incombe aux demandeurs d’établir un certain fondement factuel pour chacune des exigences de la certification, autre que l’exigence voulant que l’acte de procédure révèle une cause d’action raisonnable. La liste qui se trouve au paragraphe 334.16(1) doit être traitée de manière conjonctive de sorte que, si l’un des cinq critères énumérés n’est pas rempli, la requête en autorisation d’un recours collectif doit être rejetée. Les questions communes n’ont pas à déterminer la question de responsabilité pour tous les membres du recours collectif ou autrement sceller l’issue du litige, mais elles doivent être suffisamment importantes par rapport à la réclamation pour que leur résolution permette de faire évoluer le litige de manière significative. En outre, bien qu’il n’y ait pas d’exigence fixe pour le plan de litige mentionné au sous-alinéa 334.16(1)e)(ii), la jurisprudence a établi une liste non exhaustive des éléments à aborder. Voir Buffalo c. Première nation Samson, [2009] 4 RCF 3, 2008 CF 1308; conf. [2010] ACF no 814 (CAF).

 

  • [5] Il est également clair que le libellé impératif de l’article 334.16 exclut un pouvoir discrétionnaire absolu de refuser d’autoriser un recours collectif si les conditions de l’autorisation sont remplies. De plus, la question de l’accès à la justice est un facteur important à prendre en considération. Lorsqu’il n’est pas économique pour un seul justiciable de déposer un recours et que la Couronne n’a pas montré sa volonté d’indemniser quiconque des frais à engager pour soumettre aux tribunaux une cause type qui aura force obligatoire, alors l’idée d’un recours collectif a d’autant plus de force. Voir Manuge c. Canada 2008 CF 624, [2009] 1 RCF 416; inf. 2009 CAF 29, [2009] 4 RCF 478; rétablie 2010 CSC 67, [2010] ACS no 67.

 

QUESTIONS EN LITIGE

 

  • [6] En l’espèce, les défendeurs concèdent ce qui suit :

    1. Les actes de procédure révèlent une cause d’action raisonnable, à condition qu’ils se limitent à la question de la crainte raisonnable de partialité découlant du rapport de 2009;

    2. Un groupe viable peut être identifié, bien qu’il ne puisse pas être aussi général que les demandeurs le décrivent;

    3. Il existe une question factuelle et juridique commune – la crainte raisonnable de partialité découlant du rapport de 2009 –, mais il s’agit de la seule question commune.

 

  • [7] Cependant, les défendeurs affirment que les demandeurs n’ont pas satisfait aux critères conjonctifs établis au paragraphe 334.16(1) car :

    1. selon l’alinéa 334.16(1)d), un recours collectif n’est pas le meilleur moyen de régler, de façon juste et efficace, la question commune de fait et de droit en l’espèce. Le meilleur moyen de régler l’affaire de façon juste et efficace est d’avoir recours à l’article 220;

    2. Les demandeurs n’ont pas satisfait au critère en quatre volets établi à l’alinéa 334.16(1)e) pour être des représentants demandeurs car :

  • - Les demandeurs n’ont présenté aucun élément de preuve indiquant qu’ils sont au courant de leurs obligations et de leurs responsabilités en tant que « représentants demandeurs » et qu’ils sont en mesure de représenter de façon équitable et adéquate les intérêts du groupe proposé;

  • - Les demandeurs n’ont fourni aucun plan de litige à la Cour, plan qui devrait couvrir les éléments suivants :

  • (i) les mesures qui seront prises pour déterminer l’identité des témoins nécessaires, les trouver et recueillir leur preuve;

  • (ii) la collecte des documents pertinents auprès des membres du groupe et d’autres personnes;

  • (iii) l’échange et la gestion des documents produits par toutes les parties;

  • (iv) la remise d’un rapport régulier aux membres du groupe;

  • (v) les mécanismes permettant de répondre aux questions des membres du groupe;

  • (vi) la probabilité qu’un interrogatoire préalable soit tenu auprès de certains membres du groupe et, dans l’affirmative, la procédure envisagée à cette fin;

  • (vii) la nécessité de recourir à des experts et, dans l’ affirmative, les mesures à prendre pour les trouver et retenir leurs services;

  • (viii) les mesures envisagées pour résoudre les questions individuelles qui demeureront encore en litige après le règlement des questions communes, le cas échéant;

  • (ix) la façon dont les indemnités et autres formes de réparation seront évaluées ou déterminées une fois que les questions communes auront été tranchées.

  • - Les demandeurs ont un intérêt qui est en conflit avec celui d’autres membres du groupe proposé, car ils ont été jugés non crédibles par la SPR et, par conséquent, ne peuvent pas faire évoluer le recours collectif proposé de manière efficace au nom des membres du groupe qui pourraient avoir été jugés crédibles par la SPR;

  • - Les demandeurs ont omis de fournir un sommaire des conventions relatives aux honoraires et débours qui sont intervenues entre eux et l’avocat inscrit au dossier.

 

ANALYSE

 

  • [8] Je ne dispose vraiment pas d’un affidavit approprié des demandeurs pour appuyer la requête en autorisation d’un recours collectif et pour désigner un représentant demandeur adéquat. Les avocats m’ont demandé de lire les affidavits soumis dans chaque dossier aux étapes précédentes de ce litige et de prendre en considération le fait que les autres éléments énumérés à l’alinéa 334.16(1)e) peuvent facilement être rassemblés, ne nécessitent pas de preuve par affidavit et peuvent être satisfaits par l’engagement des avocats.

 

  • [9] Je crois toutefois que je dois être conscient de l’avertissement donné par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Buffalo, précité, aux paragraphes 13-14 :

C’est aux personnes qui demandent l’autorisation qu’il incombe de remplir les conditions d’autorisation, et le juge saisi de la requête en autorisation doit rester un arbitre neutre lorsqu’il détermine si ces conditions ont été remplies.

 

[...]

 

C’est aux personnes qui demandent l’autorisation visée à la règle 334.16, et non au juge saisi de la requête en autorisation, de se débattre avec le problème et de remplir les conditions d’autorisation fondamentales prévues à la règle 334.16 [...].

 

D’après la preuve dont je dispose, je crois que je ne pourrais plus être qualifié d’arbitre neutre si j’entreprenais le type d’exercice que les demandeurs attendent de moi. En réalité, j’éplucherais les documents antérieurs pour y trouver des éléments de preuve utiles à leur cause et je me débattrais avec le problème en leur nom, sans donner à l’avocat des défendeurs une occasion complète de répondre. L’avocat des demandeurs aurait dû faire cela à l’audience, de manière à ce que l’avocat des défendeurs puisse fournir une réponse valable. Par ailleurs, je ne dispose pas d’un portrait clair des engagements de l’avocat des demandeurs selon lesquels il y a un représentant demandeur qui a, à l’heure actuelle, satisfait aux exigences de l’alinéa 334.16(1)e). Comme la juge Mactavish l’a précisé dans Nation crie de Samson Cree Nation c. Nation crie de Samson (Chef et conseil) 2008 CF 1308, [2009] 4 RCF 3, au paragraphe 35 :

Les parties conviennent que le test énoncé au paragraphe 334.16(1) est conjonctif. Par conséquent, si l’un ou l’autre des cinq critères énumérés n’est pas établi, la requête devra être rejetée : voir Sander Holdings Ltd. c. Canada (Ministre de l’Agriculture), [2006] A.C.F. no 451, 2006 CF 327, au paragraphe 38.

 

  • [10] De plus, étant donné la situation actuelle et d’après la façon dont les actes de procédure sont constitués, il me semble que les demandeurs n’ont pas démontré qu’un recours collectif était le meilleur moyen de régler de façon juste et efficace ce qui semble être une question commune de droit et de fait, soit celle de savoir si l’utilisation du rapport de 2009 entraîne une crainte raisonnable de partialité. En conséquence, la requête doit être rejetée. Les demandeurs n’ont pas soutenu que l’article 220 ne peut être utilisé dans les circonstances. Ils ont plutôt fait valoir qu’un recours collectif était le meilleur moyen de régler la question. La position des demandeurs n’est en aucun cas évidente.

  • [11] Comme les défendeurs le soulignent, maintenant que l’affaire des demandeurs est traitée comme une action, les demandeurs se verront divulguer des documents et l’interrogatoire préalable oral conformément aux règles applicables à leurs actions. Lorsque ces éléments de preuve auront été fournis aux demandeurs et mis à la disposition de la Cour, il me semble que cette dernière sera en mesure de décider ce qui constitue à l’heure actuelle la seule question commune et étroite de droit et de fait soulevée par les demandeurs en rendant une décision préliminaire sur un point de droit en vertu de l’article 220.

 

  • [12] Si cette question est tranchée en faveur des demandeurs, ils peuvent, au moment approprié, renouveler leur demande d’autorisation d’un recours collectif au nom des demandeurs roms de la République tchèque déboutés qui avaient produit en preuve le rapport de 2009. Si la question est tranchée en faveur des défendeurs, alors les demandeurs et toute autre personne, comme les demandeurs déboutés qui ont intenté une action pour contester leurs décisions défavorables conformément à la LIPR, peuvent demander le contrôle judiciaire de ces décisions pour tout motif découlant de leur affaire individuelle.

 

  • [13] D’après le dossier qui est devant moi, il me semble que le recours à l’article 220 soit le meilleur moyen pour régler de manière pratique et efficace la question conformément à l’esprit de l’alinéa 334.16(2)d). Le fait d’autoriser un recours collectif engendrerait des « difficultés accrues » pour la Cour et les parties au sens de l’alinéa 334.16(2)e).

 

  • [14] En outre, un recours collectif retarderait considérablement le règlement de plusieurs contestations judiciaires en suspens de décisions visant chaque réfugié. Il y a lieu d’éviter une telle situation, car le régime législatif de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001 ch. 27, prévoit un règlement et un examen efficaces et opportuns des demandes d’asile.

  • [15] En l’espèce, l’approche proposée par les défendeurs est la plus censée, à mon avis : la question commune peut et devrait être tranchée par la Cour en vertu de l’article 220 (après que tous les éléments de preuve pertinents pour la question commune ont été rendus accessibles par une communication des documents et de l’interrogatoire préalable oral), puis les demandeurs roms de la République tchèque déboutés peuvent continuer leurs contestations juridiques individuelles pour d’autres motifs propres à leurs demandes.

 

  • [16] Aucune requête ne m’a été présentée en vue d’invoquer l’article 220. Il s’agit d’une question que l’avocat devrait aborder lorsqu’il informera la Cour des prochaines étapes et des calendriers. Toutefois, pour l’instant, il me semble que peu importe ce qui pourrait ultérieurement se retrouver dans les actes de procédure des demandeurs, la question de la crainte raisonnable de partialité demeure centrale et déterminante. À mon avis, aborder et trancher cette question rapidement permettrait grandement de régler ce litige et de déterminer si d’autres questions pourraient nécessiter un recours collectif.

 

  • [17] Je suis également en accord avec les défendeurs sur le fait que tout groupe de demandeurs roms de la République tchèque déboutés devrait exclure ceux qui n’ont pas encore présenté de demande d’autorisation en vertu de l’article 72 de la Loi, car, comme la Cour suprême du Canada l’a conclu dans Bisaillon c. Université Concordia 2006 CSC 19, [2006] 1 RCS 666, aux paragraphes 17 à 22, un recours collectif ne peut pas conférer de nouveaux droits d’intenter une action en justice à ceux qui autrement n’en ont pas. Le recours collectif est un véhicule procédural qui ne crée pas de nouveaux droits substantiels. Toutefois, pour l’instant, la portée du recours proposé ne nécessite pas d’examen pour les motifs déjà mentionnés.

 


ORDONNANCE

 

LA COUR ORDONNE :

 

  1. La requête est rejetée.

  2. Aucune ordonnance n’est rendue quant aux dépens.

 

 

« James Russell »

Juge


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :  T-1700-11

 

INTITULÉ :  SIVAK et al.

  demandeurs 

   et 

 

  SA MAJESTÉ LA REINE et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

   défendeurs

    

LIEU DE L’AUDIENCE :  Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :  Le 16 janvier 2012

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :  LE JUGE RUSSELL

 

DATE DES MOTIFS :  Le 28 février 2012

 

 

COMPARUTIONS : 

 

Rocco Galati  DEMANDEURS

   

Marie-Louise Wcislo  DÉFENDEURS

Prathima Prasad

Susan Gans

 

     AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER : 

 

ROCCO GALATI LAW FIRM  DEMANDEURS

SOCIÉTÉ PROFESSIONNELLE

Toronto (Ontario)

 

Myles J. Kirvan  DÉFENDEURS

Sous-procureur général du Canada

 

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