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Date : 20120321


Dossier : IMM-1660-11

Référence : 2012 CF 345

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 21 mars 2012

En présence de monsieur le juge O’Keefe

 

 

ENTRE :

 

EMILIO FLORES JACOBO

YESENIA ALVAREZ GARCIAE

EMILIO FLORES ALVAREZ

 

 

 

demandeurs

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

           MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande visée au paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la Loi), visant le contrôle judiciaire d’une décision rendue par la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission) en date du 22 février 2011. Selon cette décision, les demandeurs n’avaient ni qualité de réfugié au sens de la Convention selon l’article 96 de la Loi, ni celle de personne à protéger selon le paragraphe 97(1) de la Loi. Cette décision était fondée sur la conclusion de la Commission selon laquelle le demandeur principal avait été témoin d’actes de corruption commis par certains individus et non par le gouvernement mexicain de manière plus générale et il n’avait pas réfuté la présomption de protection de l’État.

 

[2]               Les demandeurs demandent à la Cour d’annuler la décision de la Commission.

 

Le contexte

 

[3]               Emilio Flores Jacobo est le demandeur principal. Yesenia Alvarez Garciae est son épouse et Emilio Flores Alvarez, le demandeur mineur, leur enfant.

 

[4]               Avant 2005, le demandeur travaillait comme comptable au sein d’une entreprise. Il a aussi brièvement aidé à installer des pancartes dans le cadre d’une campagne politique locale.

 

[5]               À la fin de 2005, le demandeur principal a commencé à travailler pour le service de l’immatriculation des véhicules automobiles au sein du gouvernement. Dans le cadre de cet emploi, il devait vérifier l’immatriculation des véhicules volés importés au Mexique. Au début, il n’a eu aucun problème au travail. Dans le but de protéger ses inspecteurs, le gouvernement les transférait régulièrement dans d’autres municipalités. Ainsi, le demandeur principal a été muté dans une autre municipalité en 2007. Il a alors commencé à apercevoir dans la rue des véhicules que son ancien bureau avait considérés comme ayant été volés. Lorsqu’il en a parlé à son superviseur, Carlos Avena Ledon, ce dernier lui a dit de ne pas s’en préoccuper. Le demandeur principal a porté plainte contre M. Ledon auprès du ministère public. Un fonctionnaire a pris note de la plainte. Le demandeur principal n’a pas été en mesure d’obtenir une copie de celle‑ci. Il n’a jamais été contacté et ignorait ce qu’il était advenu de sa plainte.

 

[6]               Par ailleurs, le demandeur principal a commencé à recevoir des demandes afin qu’il autorise des véhicules à l’égard desquels les documents étaient faux. M. Ledon lui a ordonné d’autoriser ces véhicules, mais il a refusé. M. Ledon l’a fait venir dans son bureau et l’a menacé s’il ne coopérait pas. M. Ledon a dit qu’il était le neveu du gouverneur local, Ney Gonzalez Sanchez, et qu’il pouvait donc faire ce qu’il voulait. Le demandeur principal a dit à M. Ledon qu’il allait le dénoncer au secrétaire général du ministère public, le Commandant Julio Cesar Jimenez Arcadia (le Commandant), ce qui n’a pas semblé l’inquiéter.

 

[7]               Le demandeur principal a dénoncé M. Ledon au Commandant. Il a indiqué que M. Ledon permettait que des véhicules volés circulent et qu’il l’avait accusé à tort de le faire lui aussi. Le Commandant a répondu qu’il menait une enquête sur la situation. M. Ledon a découvert que le demandeur principal l’avait dénoncé et a commencé à le harceler. À la fin de son contrat, le demandeur principal a quitté son emploi au service d’immatriculation des véhicules. Il a conservé certains documents prouvant la corruption.

 

[8]               Avec l’aide du Commandant, le demandeur principal s’est ensuite trouvé un emploi de chauffeur au Secrétariat de la santé. À la même époque, il a présenté une demande dans le cadre du Programme des travailleurs agricoles (Mexique‑Canada), puis, en 2008, il a terminé un contrat de sept mois en Ontario. Dans les jours qui ont suivi son retour au Mexique, il a été informé par des amis que des personnes possédant des cartes de la police judiciaire le cherchaient. Selon le demandeur principal, il s’agissait de personnes envoyées par M. Ledon.

 

[9]               Le demandeur principal a ensuite été convoqué au bureau du gouverneur. Avant de s’y rendre, il a appelé le Commandant pour le remercier pour l’emploi de chauffeur. Le Commandant lui a dit qu’il avait été congédié en raison de son enquête sur la vente de véhicules volés et le trafic de drogue au sein de la police. Le Commandant a demandé à accompagner le demandeur principal chez le gouverneur afin de lui dire ce qu’il savait.

 

[10]           En se rendant au bureau du gouverneur, le demandeur principal et le Commandant ont fait un arrêt afin de récupérer du matériel publicitaire. Lorsqu’ils sont sortis du commerce, quatre hommes ont tiré des coups de feu en leur direction et ont tué le Commandant. Un homme a rattrapé le demandeur principal et lui a demandé de lui remettre les documents relatifs à la corruption. La mort du Commandant ayant attiré un grand nombre de personnes, le demandeur principal a réussi à prendre la fuite.

 

[11]           Le demandeur principal s’est réfugié à la ferme de ses beaux‑parents, puis dans les montagnes, où il s’est caché pendant environ cinq mois. Sa femme et son fils auraient échappé à l’attention de M. Ledon parce que, lorsque le demandeur principal a commencé à travailler au service d’immatriculation des véhicules en 2005, il était célibataire. Le couple s’est marié l’année suivante, le 10 mai 2006. Selon le demandeur principal, M. Ledon ignorait qu’il avait une femme et un fils.

 

[12]           En juin 2009, M. Ledon s’est rendu chez la mère du demandeur principal pour qu’elle lui remette les documents relatifs aux cas de corruption. Il en a récupéré certains, mais pas tous. À la même occasion, il a demandé où se trouvait le demandeur principal et a menacé de le tuer.

 

[13]           Parce qu’ils craignaient M. Ledon, les demandeurs se sont enfuis du Mexique le 20 juin 2009 et ont demandé l’asile au Canada le 2 juillet suivant.

 

La décision de la Commission

 

[14]           La Commission a instruit la demande d’asile des demandeurs le 18 janvier 2011 et a rendu sa décision le 18 février suivant.

 

[15]           La Commission a tiré les conclusions suivantes :

            1.         les demandeurs n’ont pas qualité de réfugié au sens de la Convention car ils n’ont pas une crainte fondée de persécution pour un motif prévu par la Convention au Mexique;

            2.         les demandeurs n’ont pas qualité de personne à protéger car, par suite de leur renvoi au Mexique, ils ne seraient pas personnellement exposés à une menace à leur vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités;

            3.         il n’existe pas de motif sérieux de croire qu’ils seraient personnellement exposés au risque d’être soumis à la torture par suite de leur retour au Mexique.

 

[16]           En examinant la demande d’asile, la Commission a rappelé les motifs sur lesquels doit être fondée la crainte de persécution d’une personne pour que celle‑ci soit visée par la définition : sa race, sa religion, sa nationalité, son appartenance à un groupe social ou ses opinions politiques. La Commission a reconnu que la jurisprudence établit que, lorsque la corruption est très répandue au sein du gouvernement, le demandeur qui s’y oppose peut craindre d’être persécuté en raison de ses opinions politiques (voir Klinko c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1re inst), [2000] 3 CF 327, [2000] ACF no 228, au paragraphe 35). La Commission a cependant estimé que les faits étaient différents de ceux en cause dans Klinko, précitée. Elle a fait référence à la preuve relative aux conditions du pays lorsqu’elle a conclu que, même si la corruption existait dans certaines institutions mexicaines, le Mexique est un pays où la démocratie fonctionne, et non un État défaillant, et où le gouvernement prend des mesures pour enrayer la criminalité et la corruption. La Commission a conclu également que seuls certains individus s’intéressaient au demandeur principal. Pour ces motifs, elle a refusé de conclure que la corruption faisait partie de la structure même du système mexicain.

 

[17]           En ce qui concerne la prétention selon laquelle les demandeurs étaient des personnes à protéger selon l’article 97 de la Loi, la Commission a statué que, comme aucun acte de torture n’était allégué, cette prétention fondée sur l’alinéa 97(1)a) n’avait pas été établie.

 

[18]           En ce qui concerne l’alinéa 97(1)b), la Commission a examiné la preuve afin de déterminer si les demandeurs seraient exposés à une menace à leur vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités s’ils retournaient au Mexique. Elle a indiqué que l’élément déterminant à cet égard était la protection de l’État. La Commission a exigé que les demandeurs produisent, pour réfuter la présomption de protection de l’État dans un pays où la démocratie fonctionne, une preuve objective claire et convaincante de l’incapacité de l’État de les protéger.

 

[19]           La Commission n’était pas convaincue qu’il y avait une contradiction entre le Formulaire de renseignements personnels (FRP) du demandeur principal et son témoignage sur la question de savoir s’il avait dénoncé au ministère public la corruption à laquelle se livrait M. Ledon. La Commission a cependant supposé qu’il l’avait fait. Or, aucun document concernant la plainte n’était disponible et le demandeur principal a déclaré dans son témoignage que, n’ayant pas été informé de la suite donnée à celle‑ci, il avait conclu, sans chercher à en savoir davantage, que la police n’enquêtait pas sur l’affaire. Comme la crainte subjective du demandeur principal concernant la corruption au sein de la police n’était pas étayée par une preuve objective, la Commission n’a pas ajouté foi à cette prétention.

 

[20]           La Commission a également considéré que certains actes et décisions du demandeur principal étaient discutables. Par exemple, il était illogique ou invraisemblable, selon elle :

            1.         que le demandeur principal ait informé M. Ledon de son intention de le dénoncer s’il avait vraiment peur de lui;

            2.         qu’il ait porté plainte d’abord à un fonctionnaire s’il avait facilement accès à un officier supérieur comme le Commandant;

            3.         qu’il n’ait pas demandé ce qu’il était advenu de la plainte au Commandant;

            4.         que, dans la lettre de plainte qu’il a envoyée au Commandant, il ait mis l’accent sur le fait que M. Ledon l’accusait d’avoir accepté un pot‑de‑vin, plutôt que sur la prétendue corruption concernant les véhicules volés;

            5.         que les hommes qui ont tué le Commandant aient laissé le demandeur principal s’échapper uniquement parce qu’une foule s’était rassemblée;

            6.         que le demandeur principal n’ait pas signalé ce qu’il avait vu lorsque le Commandant avait été tué, même si le meurtre avait suscité un grand intérêt chez la population.

 

[21]           La Commission a ensuite fait référence à la preuve relative au pays, qui indiquait que le Mexique est une démocratie où la magistrature est relativement indépendante et impartiale et que les forces de police ont une structure hiérarchique, ce qui semble indiquer que les citoyens ont la possibilité de s’adresser aux échelons supérieurs s’ils sont insatisfaits des services locaux. Elle a en outre fait ressortir des éléments de preuve démontrant que les citoyens peuvent se tourner vers plusieurs autorités et organismes s’ils croient que des fonctionnaires sont corrompus ou s’ils sont insatisfaits des services des forces de sécurité. Reconnaissant la preuve relative à la corruption qui prévaut dans certaines parties de l’administration mexicaine, notamment dans les forces de police, la Commission a fait référence à d’autres éléments de preuve qui décrivaient les mesures prises pour enrayer la corruption au sein des organismes, notamment l’adoption de nouvelles lois et des opérations de lutte contre la corruption menées par le gouvernement. La Commission a conclu que, même s’il était possible que des individus corrompus travaillent au sein du gouvernement, cela ne signifiait pas que tout le système était corrompu, contrairement à ce que le demandeur principal croyait subjectivement.

 

[22]           Par ailleurs, la Commission ne disposait d’aucune preuve de l’effondrement complet de l’appareil étatique mexicain. Elle a signalé l’absence de preuve concernant des personnes se trouvant dans une situation semblable à celle du demandeur principal et ayant vécu des expériences personnelles qui amèneraient ce dernier à croire qu’il ne pouvait pas raisonnablement obtenir la protection de l’État.

 

[23]           En résumé, la Commission a conclu que le demandeur principal n’avait pas produit une preuve claire et convaincante démontrant qu’il ne pourrait pas obtenir la protection de l’État au Mexique s’il la demandait et que, dans les circonstances, il ne serait pas raisonnable qu’il la sollicite.

 

[24]           Comme les demandes d’asile du demandeur mineur et de l’épouse du demandeur principal étaient fondées sur les mêmes faits que celle de ce dernier, la Commission a statué que son analyse et son évaluation de la protection de l’État s’appliquaient dans leur cas également.

 

Les questions en litige

 

[25]           Les demandeurs soulèvent les questions en litige suivantes :

            1.         le lien avec un motif prévu par la Convention et l’article 96 de la Loi;

                        a.         certains éléments de preuve/aucune preuve;

                        b.         lien et protection de l’État;

            2.         la protection de l’État et l’article 97 de la Loi.

 

[26]           Je reformulerais ces questions de la façon suivante :

            1.         Quelle est la norme de contrôle appropriée?

            2.         La Commission a-t-elle commis une erreur en concluant à l’absence de lien entre les demandes d’asile des demandeurs et les motifs prévus à l’article 96 de la Loi?

            3.         La Commission a-t-elle commis une erreur dans son analyse de la question de la protection de l’État sous le régime de l’article 97 de la Loi?

 

Les observations écrites des demandeurs

 

[27]           Les demandeurs soutiennent que les éléments corrompus sont si répandus au sein du gouvernement mexicain qu’ils font partie de la structure de ce dernier. Son opposition à la corruption équivalant à une opinion politique, le demandeur principal est visé par la définition de « réfugié au sens de la Convention » prévue à l’article 96 de la Loi.

 

[28]           Les demandeurs soutiennent que la Commission a estimé de manière déraisonnable qu’elle ne disposait d’aucune preuve démontrant que la corruption était si répandue au Mexique qu’elle faisait partie de la structure du pays. Ils mettent en avant les éléments de preuve suivants sur le pays qui, selon eux, offrent des motifs raisonnables de conclure qu’une telle situation existe :

  • les rapports du Département d’État des États‑Unis sur les pratiques en matière de droits de la personne pour 2009, publiés en 2010, reconnaissaient :
    • que le président du Mexique avait fait remarquer que la corruption constituait un problème grave au sein des forces de police du pays;
    • que les services de police, en particulier ceux des États et les services locaux, étaient impliqués dans des enlèvements et des extorsions, protégeaient les membres du crime organisé et les trafiquants de drogue ou agissaient directement pour leur compte;
    • que les forces locales sont souvent l’objet de pressions directes de la part de groupes criminels, ce qui les rend plus susceptibles d’être infiltrées;
    • que l’impunité dans le pays était répandue, ce qui faisait en sorte que bon nombre de victimes hésitaient à porter plainte;
  • le USA Today a indiqué en 2008 :
    • que l’armée et le gouvernement mexicains ont tenté de débarrasser les forces locales des agents corrompus;
    • que des tentatives semblables avaient échoué dans le passé et que certains analystes doutaient que les efforts produisent des résultats durables.
  • le journal University of Chicago Chronicle a signalé en 1995 :
    • que, selon un professeur d’histoire, la corruption constituait une force dans la vie publique au Mexique depuis l’époque coloniale;
    • qu’au Mexique la corruption consistait en un système complexe d’échanges effectués en retour de certains privilèges;
    • que la corruption était devenue un moyen d’augmenter ses revenus et avait créé son propre ensemble de normes et d’attentes de la population;
  • le Metropolitan Corporate Counsel a signalé en 2009 :
    • que la violence généralisée récente serait une réponse aux efforts accrus en matière de lutte contre la corruption;
    • que la corruption était largement associée au trafic de drogue;
    • que le versement de pots‑de‑vin était une tradition de longue date au Mexique;
    • que le gouvernement essayait de lutter contre la corruption depuis les années 1990, avec un succès très limité;
    • que le Mexique obtenait une note de 3,6 sur 10 selon l’Index des perceptions de la corruption de Transparency International, lequel mesure le degré de corruption associé aux affaires;
    • que, même si des lois contre la corruption très sévères étaient en vigueur au Mexique, les entreprises continuaient d’affirmer que la corruption constituait un problème grave.

 

[29]           Pour étayer leur thèse concernant l’article 96, les demandeurs ont fait une analogie avec les faits en cause dans Guzman c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 179 FTR 309, [1999] ACF no 1869. Dans cette affaire, la demanderesse craignait de subir un préjudice physique si elle retournait au Mexique parce qu’elle était au courant de la corruption qui existait au sein du ministère du Revenu. Les demandeurs soutiennent que la Cour a convenu, dans Guzman, précitée, que, comme l’avocat de la demanderesse l’affirmait, rien n’avait changé au Mexique, même si le gouvernement prétendait lutter contre la corruption. Ils ajoutent que, quoique Guzman, précitée, date de 1999, la situation est en grande partie la même aujourd’hui au Mexique.

 

[30]           Pour étayer davantage leur thèse concernant l’article 96, les demandeurs soutiennent que la Commission a confondu les deux éléments de la définition de « réfugié au sens de la Convention » : le lien entre une demande d’asile et un motif prévu par la Convention et la protection de l’État. Ils font référence aux propos suivants de la Commission :

Le Mexique n’est pas un État défaillant, mais bien une démocratie fonctionnelle dont les institutions respectent la primauté du droit. Les documents sur le pays m’indiquent que le gouvernement prend des mesures sérieuses pour enrayer la criminalité et la corruption dans ses rangs. [Non souligné dans l’original.]

 

 

[31]           Selon les demandeurs, la mention d’État défaillant s’applique au critère relatif à la protection de l’État, et non à celui concernant le lien. Ils se réfèrent à Klinko, précitée, affirmant que, compte tenu de la preuve dans cette affaire – 9 000 fonctionnaires avaient été déclarés coupables de crimes économiques – la Cour pouvait également conclure, dans le cadre du contrôle judiciaire, que le gouvernement prenait des mesures sérieuses pour lutter contre la corruption dans ses rangs. Or, la Cour ne l’a pas fait et la Commission a commis une erreur en rejetant cette partie de leur thèse pour cette raison.

 

[32]           Les demandeurs s’appuient sur Canada (Procureur général) c Ward, [1993] 2 RCS 689, pour faire valoir que la Commission a exigé à tort qu’ils réfutent la présomption de protection de l’État dans le cadre de l’analyse relative à l’article 96. Selon eux, il n’est même pas nécessaire de réfuter la présomption lorsqu’un effondrement complet de l’appareil étatique est survenu.

 

[33]           De plus, les demandeurs soutiennent que la Commission n’a pas apprécié les trois éléments de l’absence de protection de l’État, à savoir :

            1.         l’effondrement complet de l’appareil étatique;

            2.         l’expérience personnelle;

            3.         l’expérience de personnes se trouvant dans une situation similaire.

 

Selon les demandeurs, la Commission n’a donc pas bien appliqué le critère.

 

[34]           Les demandeurs soutiennent en outre que des normes de preuve différentes s’appliquent sous le régime de l’article 96 et de l’article 97 de la Loi : une possibilité raisonnable ou des motifs valables (article 96) et la question de savoir si le demandeur d’asile est plus susceptible d’être persécuté que le contraire (article 97).

 

[35]           Les demandeurs prétendent que la Commission a commis une erreur en confondant l’aspect subjectif avec l’aspect objectif. En ce qui concerne la question du lien, les demandeurs s’appuient sur le paragraphe 83 de Ward, précité, pour affirmer que ce qui compte, c’est le fait que, du point de vue de l’agent de persécution à la source de la crainte, le demandeur d’asile a une opinion politique. En conséquence, la prétention concernant l’existence d’un lien ne peut être rejetée simplement en invoquant la protection de l’État.

 

[36]           Les demandeurs soutiennent que la Commission a exagéré le critère selon lequel la corruption doit être répandue au sein du gouvernement. Selon eux, ce critère n’exige pas que l’ensemble du gouvernement soit corrompu. Ils font valoir que l’emploi du mot « partie » par la Cour au sujet de la structure du gouvernement dans Klinko, précitée, indique que ce critère n’exige pas que l’ensemble du gouvernement soit corrompu; la corruption d’une partie du gouvernement est suffisante.

 

[37]           Enfin, les demandeurs critiquent le fait que la Commission n’a pas procédé à une évaluation objective de la capacité de l’État de les protéger. Selon eux, la Commission a eu tort de tenir compte uniquement de la volonté de l’État de les protéger et non de sa capacité de le faire. Ils font référence aux éléments de preuve mentionnés ci‑dessus qui, selon eux, montrent l’incapacité de l’État de les protéger.

 

[38]           En résumé, les demandeurs soutiennent que l’analyse relative à l’article 96 effectuée par la Commission était déficiente sur le fond, ce qui, selon eux, est suffisant en soi pour que la Cour annule la décision de la Commission.

 

[39]           Pour ce qui est de l’analyse relative à l’article 97, les demandeurs soutiennent que la Commission a commis une erreur en mentionnant uniquement la volonté du Mexique de les protéger, sans évaluer sa capacité ou l’efficacité de sa volonté de le faire. En outre, ils soutiennent que les conclusions suivantes de la Commission montrent que celle‑ci a négligé des éléments de preuve dont elle disposait :

            1.         il n’y avait aucune preuve concernant des personnes se trouvant dans une situation semblable à celle des demandeurs qui n’avaient pas été protégées par l’État;

            2.         il n’y avait aucune preuve d’expériences personnelles passées susceptibles d’amener les demandeurs à croire qu’ils ne pouvaient pas obtenir la protection de l’État.

 

[40]           Les demandeurs soutiennent que le meurtre du Commandant survenu alors qu’il se rendait chez le gouverneur avec le demandeur principal pour signaler les mêmes cas de corruption et la tentative de meurtre et d’agression commise à l’égard du demandeur principal contredisent ces conclusions. En ce qui concerne la possibilité, pour le demandeur principal, de demander la protection de l’État, les demandeurs s’appuient sur Ward, précité, où la Cour suprême a statué, au paragraphe 48, que le fait qu’un demandeur doive mettre sa vie en danger en sollicitant la protection inefficace d’un État, simplement pour démontrer cette inefficacité, irait à l’encontre de l’objet de la protection internationale.

 

[41]           En résumé, les demandeurs soutiennent que la Commission a rendu sa décision sans tenir compte des éléments dont elle disposait et que cette décision était abusive ou arbitraire.

 

Les observations écrites du défendeur

 

[42]           Le défendeur soutient que la Commission a effectué l’analyse appropriée afin de déterminer si l’opposition du demandeur principal à la corruption constituait une opinion politique au sens de l’article 96 de la Loi et qu’elle a rendu une décision raisonnable fondée sur la preuve dont elle disposait. Il souligne l’attention portée par la Commission à la preuve relative à la criminalité et à la corruption au Mexique, ainsi qu’à la preuve qui l’a amenée à conclure que la corruption ne faisait pas partie de la structure du système mexicain. Il soutient en conséquence que la conclusion de la Commission était raisonnable.

 

[43]           Selon le défendeur, la présente affaire est différente de Guzman, précitée. Il met en évidence l’analyse de la question de savoir si la corruption est très répandue dans l’État qui a été effectuée par la Commission; le fait que cette analyse n’a pas été faite dans Guzman, précitée, est suffisant pour faire une distinction entre les deux affaires.

 

[44]           Le défendeur soutient en outre que la Commission n’a pas incorporé une notion de droit sur la protection de l’État dans son analyse de la question du lien. L’emploi de l’expression « État défaillant » dans son évaluation de l’étendue de la corruption au Mexique ne fait pas en sorte que son analyse de la question du lien est erronée. Le défendeur prétend que, au contraire, lorsqu’on la lit dans son ensemble plutôt que comme une seule phrase, cette partie de la décision révèle que la Commission n’a pas commis l’erreur alléguée.

 

[45]           Au sujet de l’analyse de la protection de l’État effectuée par la Commission sous le régime de l’article 97 de la Loi, le défendeur soutient que la décision de la Commission montre qu’elle a apprécié à la fois la volonté et la capacité du Mexique de protéger les demandeurs. Il cite le passage suivant de la décision à cet égard :

[...] le système de justice pénale n’est pas corrompu au Mexique, et [...] il s’agit plutôt d’un système basé sur une démocratie fonctionnelle, qui offre un niveau de protection adéquat aux citoyens.

 

 

[46]           Le défendeur soutient également que la Commission a tiré une conclusion raisonnable lorsqu’elle a dit qu’elle ne disposait pas d’une preuve crédible concernant des personnes se trouvant dans une situation semblable à celle des demandeurs qui n’avaient pas obtenu la protection de l’État ou concernant des expériences personnelles passées susceptibles d’amener le demandeur principal à croire qu’il ne pouvait pas raisonnablement obtenir la protection de l’État.

 

[47]           Le défendeur fait référence à la preuve limitée qui a été produite au sujet de la protection que le Commandant avait demandée dans le passé, des actes qu’il avait commis pour s’opposer à la corruption et d’incidents dans lesquels il avait été ciblé. Cette preuve limitée n’était pas suffisante pour que la Commission détermine si le demandeur principal et le Commandant se trouvaient dans une situation similaire. En ce qui concerne la protection de l’État que le demandeur principal avait tenté d’obtenir dans le passé, le défendeur fait valoir que cela est survenu avant le meurtre du Commandant. Il soutient en outre que la preuve produite par le demandeur sur ce point était insuffisante pour réfuter la présomption de protection de l’État.

 

[48]           En résumé, le défendeur soutient que la Commission a rendu une décision sensée qui ne contient aucune erreur susceptible de contrôle. Cette décision doit donc être maintenue et la présente demande, être rejetée.

 

Analyse et décision

 

[49]           Question no 1

      Quelle est la norme de contrôle appropriée?

            Lorsque la jurisprudence a défini la norme de contrôle applicable à une question particulière, la cour de révision peut adopter cette norme (voir Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 RCS 190, au paragraphe 57).

 

[50]           Il est établi en droit que les conclusions quant à l’existence d’un lien avec un motif prévu par la Convention sous le régime de l’article 96 de la Loi sont des questions mixtes de fait et de droit susceptibles de contrôle selon la norme de la raisonnabilité (voir Ariyathurai c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 716, [2009] ACF no 879, au paragraphe 6; Marino Gonzales c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 389, [2011] ACF no 498, au paragraphe 22; Lozano Navarro c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 768, [2011] ACF no 968, au paragraphe 15).

 

[51]           Il est également établi en droit que l’évaluation du caractère adéquat de la protection de l’État soulève des questions mixtes de fait et de droit qui sont révisables selon la norme de la raisonnabilité (voir Hinzman c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CAF 171, [2007] ACF no 584, au paragraphe 38; Gaymes c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 801, [2010] ACF no 982, au paragraphe 9; James c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 546, [2010] ACF no 650, au paragraphe 16).

 

[52]           Lorsqu’elle procède au contrôle d’une décision de la Commission en appliquant la norme de la raisonnabilité, la Cour ne doit intervenir que si la Commission est arrivée à une conclusion qui n’est pas justifiable, transparente et intelligible et qui n’appartient pas aux issues acceptables vu la preuve dont elle disposait (voir Dunsmuir, précité, au paragraphe 47; Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, [2009] ACS no 12, au paragraphe 59). Ainsi que la Cour suprême l’a statué dans Khosa, précité, les cours de révision ne peuvent substituer la solution qu’elles jugent elles‑mêmes appropriée à celle qui a été retenue et il n’entre pas dans leurs attributions de soupeser à nouveau les éléments de preuve (aux paragraphes 59 et 61).

 

[53]           Question no 2

            La Commission a-t-elle commis une erreur en concluant à l’absence de lien entre les demandes d’asile des demandeurs et les motifs prévus à l’article 96 de la Loi?

            En l’espèce, les demandes d’asile des demandeurs doivent satisfaire aux conditions suivantes pour que la qualité de réfugié au sens de la Convention puisse leur être reconnue en vertu de l’article 96 de la Loi :

            1.         avoir une crainte fondée de persécution du fait de leurs opinions politiques;

            2.         ne pas pouvoir ou, à cause de cette crainte, ne pas vouloir se prévaloir de la protection du Mexique.

 

[54]           Comme la Commission l’a reconnu, la première question peut recevoir une réponse affirmative lorsqu’un demandeur s’oppose à de la corruption répandue :

[...] Dans les cas où, comme en l’espèce, les éléments corrompus sont si répandus au sein du gouvernement qu’ils font partie de la structure de ce dernier, une dénonciation de la corruption constitue l’expression d’une « opinion politique ». [...] (voir Klinko, précitée, au paragraphe 35).

 

 

 

[55]           En l’espèce, la Commission n’a pas conclu que les éléments corrompus étaient répandus à ce point au sein du gouvernement mexicain. La question est de savoir si cette conclusion était raisonnable.

 

[56]           La Commission a affirmé ce qui suit aux paragraphes 25 à 27 de sa décision :

[25]      Je ne suis saisi d’aucune preuve m’amenant à conclure que la corruption est omniprésente au Mexique au point où elle fait maintenant partie intégrante de son système politique et de son système juridique. En fait, le rapport du Département d’État des États-Unis indique que le Mexique poursuit sa lutte contre le crime organisé. Il ne fait aucun doute que la criminalité demeure problématique au Mexique et que certaines institutions du pays sont aux prises avec la corruption. Cela ne signifie pas pour autant que la corruption fasse partie intégrante de l’appareil mexicain; selon le critère établi dans Klinko, cette condition doit exister avant que la dénonciation d’activités criminelles puisse être considérée comme l’expression d’une opinion politique. Le Mexique n’est pas un État défaillant, mais bien une démocratie fonctionnelle dont les institutions respectent la primauté du droit. Les documents sur le pays m’indiquent que le gouvernement prend des mesures sérieuses pour enrayer la criminalité et la corruption dans ses rangs. 

 

[26]      D’après la preuve dont je dispose, le demandeur d’asile principal a prétendument été pris pour cible par des criminels qui travaillent au sein de l’appareil gouvernemental mexicain. Cela ne signifie pas pour autant que l’appareil entier est corrompu.

 

[27]      J’estime que les préjudices craints par les demandeurs d’asile ne s’apparentent à aucun des cinq motifs énumérés dans la définition de réfugié au sens de la Convention. Par conséquent, je suis d’avis que les demandeurs d’asile n’ont pas qualité de réfugié au sens de la Convention suivant l’article 96 de la Loi.

 

 

[57]           Je ne suis pas d’accord avec la Commission lorsqu’elle dit qu’elle ne disposait d’aucune preuve démontrant que la corruption fait partie intégrante de l’appareil gouvernemental mexicain. Comme les demandeurs l’ont fait remarquer, il n’est pas nécessaire, pour se conformer à Klinko, précitée, de démontrer que la corruption fait partie intégrante de l’ensemble de l’appareil gouvernemental mexicain.

 

[58]           Le demandeur principal n’a pas été jugé non crédible. Sa preuve démontrait qu’il y avait de la corruption dans le service où il travaillait. En fait, il semble que l’ancien Commandant ait été tué alors qu’il tentait d’apporter une preuve de la corruption au gouverneur. Il ressort également de la preuve que le Commandant avait été congédié parce qu’il enquêtait sur la corruption.

 

[59]           De même, des éléments de preuve documentaire étayent le fait qu’il y a des éléments corrompus au sein de l’appareil mexicain (voir le dossier du tribunal à la page 389 et le dossier de demande des demandeurs aux pages 86 à 89 et 90 à 95).

 

[60]           À mon avis, la Commission aurait dû analyser cette preuve afin de déterminer si les demandeurs satisfaisaient au critère établi dans Klinko, précitée, et, ensuite, déterminer s’il existait un lien entre leurs demandes et un motif prévu à l’article 96 de la Loi.

 

[61]           En conséquence, la décision de la Commission était déraisonnable et elle doit être annulée et renvoyée à un tribunal différemment constitué de la Commission afin qu’une nouvelle décision soit rendue.

 

[62]           La Commission a analysé la question de la protection de l’État aux fins de l’article 97 de la Loi, et non de l’article 96. Aussi, je ne dispose d’aucune décision relativement à cette question aux fins de l’article 96.

 

[63]           Vu mes conclusions sur cette question, il n’est pas nécessaire que je me penche sur l’autre question.

 

[64]           Les demandeurs m’ont soumis des questions graves de portée générale afin que je les certifie. Je ne suis pas disposé à le faire car ces questions ne permettraient pas de trancher la présente affaire.


 

JUGEMENT

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est accueillie et que l’affaire est renvoyée à un tribunal différemment constitué de la Commission pour qu’une nouvelle décision soit rendue.

 

 

 

« John A. O’Keefe »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.

 

 


ANNEXE

 

Dispositions législatives pertinentes

 

Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27

 

72. (1) Le contrôle judiciaire par la Cour fédérale de toute mesure — décision, ordonnance, question ou affaire — prise dans le cadre de la présente loi est subordonné au dépôt d’une demande d’autorisation.

 

96. A qualité de réfugié au sens de la Convention — le réfugié — la personne qui, craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques :

 

a) soit se trouve hors de tout pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de chacun de ces pays;

 

b) soit, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle, ne peut ni, du fait de cette crainte, ne veut y retourner.

 

 

97. (1) A qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et serait personnellement, par son renvoi vers tout pays dont elle a la nationalité ou, si elle n’a pas de nationalité, dans lequel elle avait sa résidence habituelle, exposée :

 

a) soit au risque, s’il y a des motifs sérieux de le croire, d’être soumise à la torture au sens de l’article premier de la Convention contre la torture;

 

b) soit à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités dans le cas suivant :

 

(i) elle ne peut ou, de ce fait, ne veut se réclamer de la protection de ce pays,

 

 

(ii) elle y est exposée en tout lieu de ce pays alors que d’autres personnes originaires de ce pays ou qui s’y trouvent ne le sont généralement pas,

 

(iii) la menace ou le risque ne résulte pas de sanctions légitimes — sauf celles infligées au mépris des normes internationales — et inhérents à celles-ci ou occasionnés par elles,

 

(iv) la menace ou le risque ne résulte pas de l’incapacité du pays de fournir des soins médicaux ou de santé adéquats.

 

72. (1) Judicial review by the Federal Court with respect to any matter — a decision, determination or order made, a measure taken or a question raised — under this Act is commenced by making an application for leave to the Court.

 

96. A Convention refugee is a person who, by reason of a well-founded fear of persecution for reasons of race, religion, nationality, membership in a particular social group or political opinion,

 

 

 

(a) is outside each of their countries of nationality and is unable or, by reason of that fear, unwilling to avail themself of the protection of each of those countries; or

 

(b) not having a country of nationality, is outside the country of their former habitual residence and is unable or, by reason of that fear, unwilling to return to that country.

 

97. (1) A person in need of protection is a person in Canada whose removal to their country or countries of nationality or, if they do not have a country of nationality, their country of former habitual residence, would subject them personally

 

(a) to a danger, believed on substantial grounds to exist, of torture within the meaning of Article 1 of the Convention Against Torture; or

 

(b) to a risk to their life or to a risk of cruel and unusual treatment or punishment if

 

 

(i) the person is unable or, because of that risk, unwilling to avail themself of the protection of that country,

 

(ii) the risk would be faced by the person in every part of that country and is not faced generally by other individuals in or from that country,

 

(iii) the risk is not inherent or incidental to lawful sanctions, unless imposed in disregard of accepted international standards, and

 

 

(iv) the risk is not caused by the inability of that country to provide adequate health or medical care.

 

 

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                   IMM-1660-11

 

INTITULÉ :                                                 EMILIO FLORES JACOBO

                                                                       YESENIA ALVAREZ GARCIAE

                                                                       EMILIO FLORES ALVAREZ c.

                                                                       LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                                       ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                         Winnipeg (Manitoba)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                        Le 3 octobre 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                       LE JUGE O’KEEFE

 

DATE DES MOTIFS :                                Le 21 mars 2012

 

COMPARUTIONS :

 

David Matas

 

                                 POUR LES DEMANDEURS

 

Nalini Reddy

                                 POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

David Matas

Winnipeg (Manitoba)

 

                                 POUR LES DEMANDEURS

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Winnipeg (Manitoba)

                                 POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

 

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