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Date : 20120416

Dossiers : IMM‑5046‑11

IMM‑5047‑11

IMM‑5048‑11

 

Référence : 2012 CF 437

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 16 avril 2012

En présence de madame la juge Gleason

 

ENTRE :

 

LUIS ENRIQUE GARCIA RODRIGUEZ

JOSE MIGUEL GARCIA RODRIGUEZ

JAIME GARCIA RODRIGUEZ

 

 

 

demandeurs

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               La Cour est saisie des demandes de contrôle judiciaire de Pedro Jose Garcia Obispo [M. Obispo] et ses trois enfants adultes, Luis Enriqué, José Miguel et Jaime Garcia Rodriguez [les demandeurs], qui visent à faire annuler les décisions, datées du 26 juin 2011, par lesquelles un agent [l’agent] de la Section de l’immigration du Canada à Saint‑Domingue, République dominicaine, a refusé de leur accorder le statut de résident permanent au titre de la catégorie du regroupement familial [les décisions].

 

[2]               M. Obispo a cherché à parrainer ses fils au titre de la catégorie du regroupement familial. Né en République dominicaine, il est maintenant citoyen canadien. Il a été parrainé par son ex‑épouse en 1995. Il n’avait pas à cette époque déclaré dans sa demande de résidence permanente qu’il avait des enfants à charge. Par conséquent, aucun des demandeurs n’a fait l’objet d’un contrôle dans le cadre du traitement de la demande. En vertu de l’alinéa 117(9)d) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002‑227 [le Règlement], cette omission a fait en sorte que les demandeurs n’ont pu par la suite être considérés comme appartenant à la catégorie du regroupement familial. Voici un extrait de la disposition pertinente :

117.(9) Ne sont pas considérées comme appartenant à la catégorie du regroupement familial du fait de leur relation avec le répondant les personnes suivantes […] :

 

d) […] dans le cas où le répondant est devenu résident permanent à la suite d’une demande à cet effet, l’étranger qui, à l’époque où cette demande a été faite, était un membre de la famille du répondant n’accompagnant pas ce dernier et n’a pas fait l’objet d’un contrôle.

117.(9) A foreign national shall not be considered a member of the family class by virtue of their relationship to a sponsor if …

 

(d) … the sponsor previously made an application for permanent residence and became a permanent resident and, at the time of that application, the foreign national was a non‑accompanying family member of the sponsor and was not examined.

 

 

[3]               Les demandeurs ont demandé, sur le fondement du paragraphe 25(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la LIPR], une exemption discrétionnaire des exigences de l’alinéa 117(9)d) du Règlement pour des motifs d’ordre humanitaire. L’agent a rejeté ces demandes dans les décisions qui font l’objet du présent contrôle judiciaire.

 

[4]               Les décisions sont consignées dans trois lettres et dans les notes du Système de traitement informatisé des dossiers d’immigration [STIDI] de l’agent. Ce dernier a envoyé aux demandeurs trois lettres au contenu identique dans lesquelles il rejette leurs demandes. L’agent y conclut que l’exemption ne saurait être justifiée par des motifs d’ordre humanitaire étant donné que les réponses des demandeurs aux questions concernant leur père [traduction] « ne démontraient pas l’existence d’une relation continue avec ce dernier ». L’agent y précise également que pour prendre sa décision, il a tenu compte de la relation suivie que les demandeurs avaient avec leur mère, leurs grands‑parents et leurs frères et sœurs en République dominicaine.

 

[5]               Dans les notes du STIDI, l’agent souligne les incohérences entre les réponses fournies par les trois demandeurs relativement au moment où leur père avait immigré au Canada, à la fréquence de ses rencontres avec eux en République dominicaine (l’un des frères a répondu chaque année, un autre aux quatre ans et le troisième, une seule fois au cours des neuf années précédentes) et à la question de savoir si M. Obispo vivait dans une maison ou dans un appartement. L’agent mentionne que les seules photos soumises en preuve étaient d’une part les photos prises lors d’une visite de M. Obispo en République dominicaine en 2010 et, d’autre part, des photos beaucoup plus anciennes. L’agent évoque en outre la difficulté qu’ont eue tous les demandeurs à fournir des détails au sujet de la vie de leur père et de la période pendant laquelle ce dernier a attendu avant de les parrainer. Il renvoie à la preuve qui lui a été soumise relativement aux sommes que M. Obispo versait à ses fils. Il tient compte également de la situation des demandeurs en République dominicaine, soulignant qu’ils travaillaient ou fréquentaient un établissement d’enseignement, et il fait ressortir la solidité des liens qui les unissaient aux autres membres de la famille en République dominicaine. Il conclut qu’aucun élément de preuve ne donnait à penser qu’ils aient fait l’objet de contrainte.

 

[6]               Les demandeurs et M. Obispo soutiennent que les décisions devraient être annulées, alléguant qu’elles sont déraisonnables. Ils invoquent principalement deux motifs à l’appui de leur allégation : premièrement, l’agent n’a pas tenu compte de l’objet de l’alinéa 117(9)d) du Règlement et, deuxièmement, l’agent n’a pas apprécié correctement la preuve qui lui était soumise. Par ailleurs, le défendeur soutient que les décisions sont raisonnables, que l’agent a exercé correctement le pouvoir discrétionnaire que lui confère le paragraphe 25(1) de la LIPR, qu’il a tenu compte de la preuve qui lui était soumise et qu’il a tiré une conclusion qu’il lui était loisible de tirer. Le défendeur demande également que le nom de M. Obispo soit rayé de l’intitulé de l’instance, soutenant qu’il n’a pas qualité pour présenter les présentes demandes de contrôle judiciaire.

 

Qualité de demandeur de M. Obispo

[7]               Abordons d’abord la question de la qualité pour agir. Le paragraphe 18.1(1) de la Loi sur les Cours fédérales, LRC 1985, c 41 [LCF] prévoit qu’une demande de contrôle judiciaire peut être présentée « par quiconque est directement touché par l’objet de la demande ». Selon le défendeur, étant donné que M. Obispo n’agissait pas comme demandeur devant l’agent et que les décisions ne le concernent pas, il ne convient pas qu’il soit désigné comme demandeur dans la présente demande de contrôle judiciaire. Le défendeur invoque les décisions Douze c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 1337, 2010 ACF no 680 [Douze], et Carson c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) 1995, 95 FTR 137 [Carson] à l’appui de la prétention selon laquelle les personnes qui parrainent des membres de leur famille qui présentent une demande d’établissement fondée sur des motifs d’ordre humanitaire n’ont pas qualité pour demander le contrôle judiciaire des décisions faisant suite à ces demandes. M. Obispo et les demandeurs soutiennent que M. Obispo peut agir comme demandeur étant donné que c’est son omission de mentionner les demandeurs en 1995 qui a entraîné leur exclusion et qui les oblige à demander une exemption des exigences de l’alinéa 117(9)d) du Règlement pour des motifs d’ordre humanitaire. Ils ne citent aucune jurisprudence à l’appui de leur position.

 

[8]               À mon avis, les décisions Douze et Carson font autorité et, pour cette raison, elles doivent être suivies. Comme l’indiquait la juge Tremblay‑Lamer au paragraphe 15 de la décision Douze, pour déterminer si une partie est directement touchée au sens du paragraphe 18.1(1) de la LCF, « il faut se demander si la question en litige porte directement atteinte à ses droits, si elle lui impose des obligations juridiques ou si elle lui cause directement préjudice ». Aucun de ces éléments ne s’applique à M. Obispo relativement aux décisions en cause dans le présent contrôle judiciaire. En effet, ses droits et obligations ne sont pas directement visés étant donné que seuls ses fils cherchent à être exemptés des exigences du Règlement. Par conséquent, la demande du défendeur de rayer le nom de M. Obispo de l’intitulé de l’instance sera accordée.

 

Norme de contrôle

[9]               Les deux parties soutiennent que la norme de contrôle applicable par la Cour à l’égard des présentes demandes est celle de la décision raisonnable. Je suis d’accord. Au paragraphe 18 du récent arrêt Kisana c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CAF 189, [2010] 1 FCR 360 [Kisana], la Cour d’appel fédérale tranche la question et confirme que la norme de la décision raisonnable s’applique au contrôle des décisions des agents d’immigration sur les demandes CH qui sont présentées dans le contexte des demandes de parrainage familial.

 

[10]           La norme de la décision raisonnable suppose une grande retenue judiciaire et son application exige que le tribunal de révision n’intervienne que si la décision n’est pas justifiée, que le processus décisionnel n’est ni transparent ni intelligible et que la décision ne fait pas partie des issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit (Dunsmuir c. Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, par. 47, [2008] 1 RCS 190).

 

L’agent a‑t‑il commis une erreur susceptible de contrôle en interprétant incorrectement les exigences de l’alinéa 117(9)d) du Règlement?

 

[11]           Passons maintenant au bien‑fondé de ces demandes. Les demandeurs soutiennent d’abord que les décisions devraient être annulées parce qu’elles sont déraisonnables étant donné que l’agent n’a pas pris en compte l’objet de l’alinéa 117(9)d) du Règlement. Ils soutiennent à cet égard que c’est par inadvertance qu’en 1995 M. Obispo n’a pas nommé les demandeurs comme personnes à charge dans sa demande de résidence permanente. Selon le conseil des demandeurs, cette omission par inadvertance s’explique probablement par le fait qu’à cette époque, M. Obispo ne maîtrisait pas bien l’anglais et que c’est son ex‑épouse (qui ne voulait peut‑être pas que ses fils aillent au Canada) qui avait alors rempli les formulaires nécessaires. Les demandeurs soutiennent de plus que cette omission par inadvertance aurait dû être considérée comme un motif impérieux d’accueillir la demande CH des demandeurs. À leur avis, la considération de politique générale qui sous‑tend l’alinéa 117(9)d) du Règlement veut que les personnes non admissibles ne puissent par la suite obtenir le statut de résident permanent et ils allèguent que cette considération de politique générale aurait dû militer en faveur de l’application de motifs d’ordre humanitaire étant donné qu’ils n’étaient pas interdits de territoire au Canada en 1995.

 

[12]           Cet argument pose plusieurs problèmes. Premièrement, il n’a pas été soumis à l’agent et il n’est pas non plus étayé par la preuve. En effet, comme preuve des motifs pour lesquels les demandeurs n’avaient pas été déclarés comme personnes à charge par leur père en 1995, l’agent ne disposait que de l’explication selon laquelle M. Obispo n’était pas certain des raisons pour lesquelles il avait omis de les déclarer et que c’est peut‑être parce qu’ils n’allaient pas vivre avec lui au Canada. Il n’existe tout simplement aucun élément de preuve permettant de croire que les demandeurs n’ont pas été mentionnés dans la demande de 1995 par suite d’un simple oubli de M. Obispo. De la même façon, la Cour ne dispose d’aucun élément de preuve en ce sens. En fait, dans son affidavit déposé à l’appui de sa demande, M. Obispo précise simplement qu’il [traduction] « ne se rappelle pas exactement pour quelles raisons ses enfants n’ont pas été déclarés dans la demande [de 1995] ». L’absence de preuve au soutien de cet argument suffit pour le rejeter.

 

[13]           Cet argument présente aussi des failles sur le plan des principes. Bien qu’un agent puisse remédier aux effets de l’alinéa 117(9)d) du Règlement lorsqu’il existe des « motifs impérieux » de le faire, la jurisprudence reconnaît que la simple inadvertance ne constitue pas habituellement un motif impérieux. Par exemple, dans Pascual c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 993, [2008] ACF no 1233, l’agente d’immigration avait conclu qu’une omission par inadvertance semblable à celle qu’invoque M. Obispo ne constituait pas un motif impérieux de soustraire la personne à l’application de l’alinéa 117(9)d) du Règlement; la conclusion de l’agente dans cette affaire a été confirmée par la Cour dans le cadre d’un contrôle judiciaire (voir par. 19). En fait, comme la Cour d’appel fédérale l’a conclu au paragraphe 27 de l’arrêt Kisana, les fausses déclarations, comme celles dont il est question en l’espèce, font partie des considérations d’intérêt public qui doivent entrer en ligne de compte dans l’appréciation des motifs d’ordre humanitaire et elles peuvent très bien inciter un agent à rejeter une demande d’exemption des exigences de l’alinéa 117(9)d) du Règlement fondée sur des considérations d’ordre humanitaire.

 

[14]           Il n’y a donc rien de déraisonnable dans la façon dont l’agent a traité les raisons pour lesquelles M. Obispo a omis en 1995 d’inscrire le nom des demandeurs dans sa demande de résidence permanente. L’agent n’a pas non plus mal compris les considérations d’intérêt public qui sous‑tendent l’alinéa 117(9)d) du Règlement. Par conséquent, le premier argument soumis par les demandeurs ne permet pas d’accorder la réparation demandée dans les présentes demandes de contrôle judiciaire.

 

L’agent a‑t‑il commis une erreur susceptible de contrôle dans son examen de la preuve?

 

[15]           Le même raisonnement s’applique au deuxième argument. Les demandeurs soutiennent en second lieu que l’agent a commis une erreur en concluant que les considérations d’ordre humanitaire ne suffisaient pas pour accorder aux demandeurs le statut de résident permanent. Plus précisément, ils allèguent que, dans son appréciation des facteurs énumérés au paragraphe 25(1) de la LIPR, l’agent s’est appuyé uniquement sur les réponses données au cours des entrevues, qu’il n’a pas examiné l’ensemble de la preuve qui lui était soumise, y compris le désir des membres de la famille d’être réunis, et qu’il a accordé trop d’importance à la possibilité qu’avaient les demandeurs de demeurer en République dominicaine. Ils ajoutent que l’agent a commis une erreur en concluant que les incohérences entre les réponses qu’ils ont fournies à l’entrevue témoignaient de l’absence d’une relation continue avec leur père, et ils laissent entendre qu’il est normal que de jeunes hommes au début de la vingtaine ou des adolescents puissent ne pas connaître les détails de l’emploi de leur père ou de sa situation familiale. Les demandeurs déclarent aussi que l’agent a eu tort de ne pas tenir compte des raisons expliquant le nombre relativement faible de visites effectuées par M. Obispo en République dominicaine au cours des dernières années et le long délai écoulé avant qu’il cherche à parrainer les demandeurs. Ils soulignent que la preuve soumise à l’agent démontrait que M. Obispo n’était pas allé en République dominicaine pendant une longue période avant 2010 parce qu’il ne travaillait plus pour une compagnie aérienne, ce qui lui avait permis auparavant de voyager gratuitement. Ils soutiennent aussi que M. Obispo n’aurait pas pu parrainer les demandeurs plus tôt parce qu’il n’en avait pas la garde.

 

[16]           Le défendeur soutient pour sa part que les décisions doivent être examinées dans leur ensemble, que l’agent a bien apprécié tous les facteurs pertinents et que sa décision est raisonnable. Le défendeur ajoute que l’agent n’avait pas à énumérer tous les éléments de preuve dont il a tenu compte et que les demandeurs demandent à la Cour d’apprécier de nouveau la preuve, ce que ne doit pas faire le tribunal saisi d’une demande de contrôle judiciaire, surtout dans un cas où la norme de la raisonnabilité s’applique.

 

[17]           À mon avis, l’agent n’a commis aucune erreur susceptible de contrôle dans le traitement de la preuve. En effet, il a tenu compte des facteurs pertinents, ses conclusions étaient raisonnables et il n’était pas tenu de mentionner spécifiquement tel ou tel élément de preuve dans ses décisions.

 

[18]           Au paragraphe 33 de l’arrêt Kisana, la Cour d’appel fédérale a résumé les divers facteurs à considérer dans un contexte de séparation géographique des membres d’une même famille. L’agent devrait tenir compte des :

[...] liens réels qu’entretiennent les membres de la famille, c’est‑à‑dire les relations actuelles par opposition au simple lien biologique, de la question de savoir s’il y a eu des périodes de séparation auparavant et, dans l’affirmative, pendant combien de temps et pourquoi, du degré de soutien psychologique et émotif par rapport aux autres membres de la famille, de la possibilité pour la famille de se retrouver ensemble dans un autre pays, de la dépendance financière et des circonstances particulières des enfants.

 

 

[19]           L’examen des lettres et des notes du STIDI révèle que chacun des facteurs pertinents a été examiné et soupesé par l’agent. Voici un extrait des notes du STIDI rédigées par l’agent :

[traduction] […] j’ai examiné soigneusement toute la preuve dans chaque cas afin de me préparer aux entrevues […] et j’ai conclu que je devrais me concentrer sur les motifs d’ordre humanitaire, préciser les relations entre les demandeurs et M. Obispo, de même que les relations familiales entre les demandeurs et leur mère, leurs grands‑parents et leurs frères et sœurs en République dominicaine. Cette évaluation permettra alors de déterminer s’il existe suffisamment de motifs d’ordre humanitaire pour remédier à l’exclusion ayant fait suite à l’omission par M. Obispo de déclarer les demandeurs au moment où il a émigré au Canada.

 

 

[20]           Après les entrevues, l’agent a conclu que les demandeurs n’avaient pas fait la preuve de l’existence d’une relation suffisamment suivie avec M. Obispo pour justifier la prise en compte de motifs d’ordre humanitaire et que, inversement, la solidité des liens qu’ils entretenaient avec les autres membres de leur famille en République dominicaine permettait de croire qu’ils ne seraient pas sans ressources si leurs demandes étaient rejetées.

 

[21]           Les conclusions de l’agent sont amplement étayées par la preuve. L’agent n’a mentionné aucun élément de preuve en particulier (sauf le contenu des discussions au cours des entrevues), mais il n’avait pas à le faire. S’exprimant au nom des juges unanimes dans l’arrêt de la Cour suprême, Newfoundland and Labrador Nurses Union c. Terre‑Neuve‑et‑Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, la juge Abella a écrit au paragraphe 16 :

Il se peut que les motifs ne fassent pas référence à tous les arguments, dispositions législatives, précédents ou autres détails que le juge siégeant en révision aurait voulu y lire, mais cela ne met pas en doute leur validité ni celle du résultat au terme de l’analyse du caractère raisonnable de la décision. Le décideur n’est pas tenu de tirer une conclusion explicite sur chaque élément constitutif du raisonnement, si subordonné soit‑il, qui a mené à sa conclusion finale (Union internationale des employés des services, local no 333 c. Nipawin District Staff Nurses Assn., 1973 CanLII 191 (CSC), [1975] 1 R.C.S. 382, p. 391).

 

 

[22]           En ce qui concerne la conclusion de l’agent relativement à l’importance des liens unissant M. Obispo et les demandeurs, je suis plutôt d’accord avec les demandeurs pour dire que les adolescents et les jeunes hommes n’ont pas nécessairement une connaissance détaillée du travail et du cadre de vie de leurs parents si ces derniers vivent dans une autre ville et que cela ne signifie pas nécessairement que ces jeunes hommes ou ces adolescents n’ont pas de relation suivie et forte avec leurs parents. Cependant, l’agent disposait de suffisamment d’autres éléments de preuve quant à l’absence de liens entre M. Obispo et les demandeurs pour étayer sa conclusion, entre autres que M. Obispo avait émigré au Canada en laissant les demandeurs derrière lui, qu’il avait renoncé à en avoir la garde et que, au cours des dernières années, il ne leur avait rendu visite qu’occasionnellement, peu importe les motifs. Il n’est donc pas possible de dire que la conclusion de l’agent au sujet de l’absence d’une relation suffisamment approfondie était déraisonnable.

 

[23]           Quant à la conclusion de l’agent au sujet de la force des liens unissant les demandeurs et les membres de leur famille en République dominicaine, elle est étayée par l’ensemble de la preuve. En effet, chacun des demandeurs a souligné en entrevue que les liens qu’il avait avec les membres de sa famille en République dominicaine, y compris la mère, étaient solides. Cette conclusion est donc elle aussi raisonnable.

 

[24]           Vu ce qui précède, les décisions étaient tout à fait raisonnables et, par conséquent, les présentes demandes de contrôle judiciaire seront rejetées.

 

[25]           Aucune question à certifier en vertu de l’article 74 de la LIPR n’a été présentée et aucune n’est soulevée en l’espèce.

 

[26]           Conformément à l’ordonnance du protonotaire Aalto dans le dossier de la Cour IMM‑5046‑11, en date du 8 septembre 2011, les dossiers de la Cour IMM‑5046‑11, IMM‑5047‑11 et IMM‑5048‑11 sont regroupés. Une copie du présent jugement et des motifs du jugement sera déposée dans chaque dossier.

 


JUGEMENT

 

LA COUR ORDONNE :

1.                  Le nom du demandeur Pedro Jose Obispo est rayé de l’intitulé de l’instance dans les dossiers IMM‑5046‑11, IMM‑5047‑11 et IMM‑5048‑11.

2.                  Les présentes demandes de contrôle judiciaire sont rejetées.

3.                  Aucune question de portée générale n’est certifiée.

4.                  Aucuns dépens ne sont adjugés.

 

 

« Mary J.L. Gleason »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Édith Malo, LL.B.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIERS :                                                  IMM‑5046‑11, IMM‑5047‑11 et IMM‑5048‑11

 

 

INTITULÉ :                                                   LUIS ENRIQUÉ GARCIA RODRIGUEZ, JOSÉ MIGUEL GARCIA RODRIGUEZ, JAIME GARCIA RODRIGUEZ c.
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           Le 28 mars 2012

 

MOTIFS DU jugement

et jugement :                                          La Juge GLEASON

 

DATE des motifs :                                  Le 16 avril 2012

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Alla Kikinova

 

POUR LES DEMANDEURS

 

Sally Thomas

Alex Kam

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Michael Loebach,

Avocat

London (Ontario)

 

POUR LES DEMANDEURS

 

Myles J. Kirvan

Sous‑procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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