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Cour fédérale

 

Federal Court

Date : 20120503


Dossier : IMM‑6149‑11

Référence : 2012 CF 527

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 3 mai 2012

En présence de monsieur le juge Russell

 

 

ENTRE :

 

ZAINAB BAHR

 

 

 

demanderesse

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

           MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

INTRODUCTION

[1]               La Cour est saisie, sous le régime du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la Loi), d’une demande de contrôle judiciaire de la décision en date du 14 août 2011 (la décision contrôlée) par laquelle un agent d’immigration de l’ambassade du Canada à Amman (Jordanie) [l’agent] a rejeté la demande de permis d’études formée par la demanderesse.

 

LE CONTEXTE

[2]               La demanderesse est une citoyenne irakienne âgée de 26 ans. Elle habite actuellement à Amman (Jordanie) en qualité de visiteuse.

[3]               La demanderesse a été admise à un cours de programmation informatique au Niagara College Canada, sis à Welland (Ontario), et elle prévoyait d’y commencer ses études en septembre 2012. Dans ce but, elle a présenté une demande de permis d’études (la demande de permis d’études) à l’ambassade du Canada à Amman le 31 juillet 2011. Elle a joint à cette demande une lettre de Haider Muhi Abbas, le directeur général de la société Al Iraq (la lettre de M. Abbas). Le dossier ne permet pas de se faire une idée précise de la nature des activités commerciales de la société Al Iraq (Al Iraq). La lettre de M. Abbas portait que la demanderesse travaillait à Al Iraq et qu’il assumerait les frais de son séjour d’études au Canada.

[4]               La demanderesse a en outre présenté une lettre de son père, M. Talbib Bahr Fayyadh (M. Fayyadh), où ce dernier s’engageait aussi à assumer ses frais au Canada. Afin de prouver sa capacité de paiement, M. Fayyadh joignait à sa lettre un instantané de sa situation financière, ainsi qu’une lettre de sa banque selon laquelle le solde de son compte s’élevait à 101 millions de dinars irakiens, soit environ 60 000 $.

[5]               L’agent, après examen des documents produits par la demanderesse, a rejeté sa demande de permis d’études. Il l’a informée des motifs de la décision contrôlée par lettre en date du 14 août 2011.

LA DÉCISION CONTRÔLÉE

[6]               La décision ici contrôlée est constituée par la lettre de l’agent à la demanderesse (la lettre de rejet) et par les notes sur le dossier qu’il a enregistrées dans le Système mondial de gestion des cas (les notes du SMGC).

[7]               Dans la lettre de rejet, l’agent expliquait à la demanderesse qu’il rejetait sa demande de permis d’études au motif qu’il n’était pas convaincu qu’elle remplît les exigences de la Loi et du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002‑227 (le Règlement). Il n’était pas convaincu, précisait‑il, que les études fussent réellement le but principal de sa visite au Canada ni qu’elle quitterait celui‑ci à la fin de sa période de séjour autorisée.

[8]               Dans les notes du SMGC, l’agent constatait que la demanderesse avait achevé ses études secondaires en 2004 et n’avait depuis suivi aucun cours relatif à la technologie de l’information.

[9]               La lettre de M. Abbas n’a pas paru authentique à l’agent. Ce dernier faisait remarquer qu’elle avait été produite par une imprimante laser, n’était pas rédigée sur du papier à en‑tête et péchait par sa présentation négligée. Il a en outre constaté que, même si la lettre de M. Abbas était authentique, Al Iraq n’était pas une société bien établie. Bien qu’elle s’engageât à assumer les frais de la demanderesse au Canada, faisait‑il observer, cette société n’avait pas produit de pièces attestant sa situation financière. L’agent notait aussi que M. Fayyadh avait produit des documents selon lesquels il était chargé de cours et employé par deux entreprises différentes.

[10]           L’agent a conclu que la demande de permis d’études n’était pas authentique et que, étant donné la situation économique de l’Irak et l’insécurité qui y régnait, il était peu probable que la demanderesse quittât le Canada si elle y était admise. Il a en conséquence rejeté cette demande.

LES DISPOSITIONS APPLICABLES

[11]           Les dispositions suivantes de la Loi sont applicables à la présente instance :

11. (1) L’étranger doit, préalablement à son entrée au Canada, demander à l’agent les visa et autres documents requis par règlement. L’agent peut les délivrer sur preuve, à la suite

d’un contrôle, que l’étranger n’est pas interdit de territoire et se conforme à la présente loi.

 

 

 

[...]

 

32. Les règlements régissent l’application des articles 27 à 31, définissent, pour l’application de la présente loi, les termes qui y sont employés

et portent notamment sur:

 

 

 

a) les catégories de résidents temporaires, notamment les étudiants et les travailleurs;

[...]

11. (1) A foreign national must, before entering Canada, apply to an officer for a visa or for any other document required by the regulations. The visa or document may be issued if, following an examination, the officer is satisfied that the foreign national is not inadmissible and meets the requirements of this Act.

 

[...]

 

32. The regulations may provide for any matter relating to the application of sections 27 to 31, may define, for the purposes of this Act, the terms used in those sections, and may include provisions respecting

 

(a) classes of temporary residents, such as

students and workers;

[...]

 

[12]           Les dispositions suivantes du Règlement sont également applicables à la présente instance :

9. (1) L’étranger ne peut entrer au Canada pour y étudier que s’il a préalablement obtenu un permis d’études.

 

[...]

 

179. L’agent délivre un visa de résident temporaire à l’étranger si, à l’issue d’un

contrôle, les éléments suivants sont établis:

 

 

a) l’étranger en a fait, conformément au présent règlement, la demande au titre

de la catégorie des visiteurs, des travailleurs ou des étudiants;

 

b) il quittera le Canada à la fin de la période de séjour autorisée qui lui est applicable au titre de la section 2;

 

c) il est titulaire d’un passeport ou autre document qui lui permet d’entrer dans le pays qui l’a délivré ou dans un autre

pays;

 

d) il se conforme aux exigences applicables à cette catégorie;

 

e) il n’est pas interdit de territoire;

 

f) il satisfait aux exigences prévues à l’article 30.

 

[...]

 

210. La catégorie des étudiants est une catégorie réglementaire de personnes qui peuvent devenir résidents temporaires.

 

[...]

 

216. (1) Sous réserve des paragraphes (2) et (3), l’agent délivre un permis d’études à l’étranger si, à l’issue d’un

contrôle, les éléments suivants sont établis :

 

 

a) l’étranger a demandé un permis d’études conformément à la présente partie;

 

b) il quittera le Canada à la fin de la période de séjour qui lui est applicable au titre de la section 2 de la partie 9;

 

c) il remplit les exigences prévues à la présente partie;

 

d) il satisfait aux exigences prévues à l’article 30.

 

[...]

 

9. (1) A foreign national may not enter Canada to study without first obtaining a study permit.

 

[...]

 

179. An officer shall issue a temporary resident visa to a foreign national if, following

an examination, it is established that the foreign national

 

(a) has applied in accordance with these Regulations for a temporary resident visa as a member of the visitor, worker

or student class;

 

 

(b) will leave Canada by the end of the period authorized for their stay under Division 2;

 

 

(c) holds a passport or other document that they may use to enter the country that issued it or another country;

 

 

(d) meets the requirements applicable to that class;

 

 

(e) is not inadmissible; and

 

 

(f) meets the requirements of section 30

 

[...]

 

210. The student class is prescribed as a class of persons who may become temporary

Residents

 

[...]

 

216. (1) Subject to subsections (2) and (3), an officer shall issue a study permit to a foreign national if, following an examination, it is established that the foreign national

 

(a) applied for it in accordance with this Part;

 

 

(b) will leave Canada by the end of the period authorized for their stay under Division 2 of Part 9;

 

(c) meets the requirements of this Part; and

 

(d) meets the requirements of section 30;

 

[...]

LES QUESTIONS EN LITIGE

[13]           La demanderesse met en litige les questions suivantes dans la présente instance :

a.                   L’agent a‑t‑il violé son droit à l’équité procédurale en ne la convoquant pas pour un entretien?

 

b.                  L’agent a‑t‑il omis de tenir compte d’éléments d’appréciation produits par elle?

 

 

LA NORME DE CONTRÔLE

[14]           La Cour suprême du Canada a posé en principe dans l’arrêt Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, qu’il n’est pas nécessaire d’effectuer dans chaque cas une analyse exhaustive pour déterminer la norme de contrôle qui convient. Lorsque la jurisprudence établit déjà de manière satisfaisante la norme de contrôle applicable à la question dont elle est saisie, la cour de révision peut l’adopter sans autre examen. C’est seulement lorsque sa recherche dans la jurisprudence se révèle infructueuse qu’elle doit entreprendre l’analyse des quatre facteurs qui définissent la norme de contrôle appropriée.

[15]           La décision de l’agent de ne pas convoquer la demanderesse pour un entretien concerne le point de savoir si la possibilité a été donnée à celle‑ci de dissiper les doutes de celui‑là, laquelle possibilité constitue un aspect de l’obligation d’équité (ou obligation d’agir équitablement). La Cour suprême du Canada affirme au paragraphe 100 de l’arrêt Syndicat canadien de la fonction publique (S.C.F.P.) c Ontario (Ministre du Travail), 2003 CSC 29 (QL), qu’« [i]l appartient aux tribunaux judiciaires et non au ministre de donner une réponse juridique aux questions d’équité procédurale ». En outre, la Cour d’appel fédérale formule les observations suivantes au paragraphe 53 de Canada (Procureur général) c Sketchley, 2005 CAF 404 : « La question de l’équité procédurale est une question de droit. Aucune déférence n’est nécessaire. Soit le décideur a respecté l’obligation d’équité dans les circonstances propres à l’affaire, soit il a manqué à cette obligation. » La norme de contrôle applicable à la première question en litige est donc celle de la décision correcte.

[16]           La conclusion de l’agent selon laquelle la demande de permis d’études n’était pas authentique est une conclusion de fait. Au paragraphe 51 de l’arrêt Dunsmuir, précité, la Cour suprême du Canada affirme que les conclusions de fait du décideur commandent en général la retenue judiciaire. La même Cour a réaffirmé cette conclusion de principe au paragraphe 26 de Smith c Alliance Pipeline Ltd., 2011 CSC 7. La norme de contrôle applicable à la seconde question en litige est donc celle du caractère raisonnable.

[17]           La cour qui contrôle une décision suivant la norme du caractère raisonnable doit se rappeler dans son analyse que ce caractère « tient principalement à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ». Voir Dunsmuir, précité, paragraphe 47; et Canada (Citoyenneté et Immigrationc. Khosa, 2009 CSC 12, paragraphe 59. Autrement dit, la Cour ne doit intervenir que si la décision contrôlée se révèle déraisonnable au sens où elle n’appartient pas « aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ».

LES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

La demanderesse

            Le manquement supposé à l’équité procédurale

 

[18]           La demanderesse fait valoir que l’agent ne l’a pas convoquée pour un entretien alors qu’il était tenu de le faire. Il a ainsi violé son droit à l’équité procédurale, de sorte que l’affaire doit être renvoyée devant l’autorité compétente. La demanderesse rappelle que l’agent a rejeté la demande de permis d’études en partie parce qu’il a conclu à l’inauthenticité de la lettre de M. Abbas. Or, raisonne‑t‑elle, la décision Hassani c Canada (Citoyenneté Immigration), 2006 CF 1283, pose que l’agent d’immigration, lorsqu’il estime inauthentiques des pièces présentées par le demandeur, doit en aviser celui‑ci. Dans la présente espèce, l’agent n’a pas donné à la demanderesse la possibilité de dissiper ses doutes dans le cadre d’un entretien.

[19]           L’agent n’a pas donné non plus à la demanderesse la possibilité de dissiper ses doutes touchant la situation économique de l’Irak et l’insécurité qui y règne. Or Hassani établit aussi que l’agent d’immigration est tenu de communiquer les préoccupations qui ne découlent pas des prescriptions de la Loi ou du Règlement. L’agent avait donc l’obligation de faire part à la demanderesse des doutes susdits.

[20]           La demanderesse rappelle que le temps écoulé entre l’obtention de son diplôme d’études secondaires et le début de son cours prévu pour 2012 préoccupait aussi l’agent. S’il est vrai que cette préoccupation découlait des prescriptions de la Loi et du Règlement, l’exposé des motifs de l’agent ne permet pas de dire quel rôle elle a joué par rapport aux autres facteurs de la décision contrôlée, de sorte qu’il est impossible de savoir en quoi l’issue de cette affaire aurait été différente si ledit agent n’avait pas violé le droit de la demanderesse à l’équité procédurale. Le dossier doit donc être renvoyé devant l’autorité compétente.

L’agent aurait omis de tenir compte d’éléments d’appréciation

[21]           La demanderesse fait observer que, même si l’agent doutait de la capacité d’Al Irak à assumer ses frais, M. Fayyadh avait déclaré détenir plus de 60 000 $ en banque. Il y avait donc des éléments d’appréciation établissant les ressources pécuniaires mises à la disposition de la demanderesse, éléments dont l’agent n’avait pas tenu compte.

Le défendeur

            La lettre de M. Abbas

 

[22]           Le défendeur fait valoir que l’obligation d’équité est assouplie pour ce qui concerne les demandes de permis d’études. L’agent n’était pas tenu de faire part à la demanderesse de ses doutes, quels qu’ils fussent. Le défendeur ajoute que les doutes de l’agent sur l’authenticité de la lettre de M. Abbas n’ont pas joué un rôle majeur dans la décision contrôlée. L’agent a tiré, pour le cas où cette lettre serait authentique, une conclusion subsidiaire qui suffisait à régler le sort de la demande de permis d’études. Il a en effet conclu que, en supposant que ladite lettre fût authentique, la demande n’expliquait pas suffisamment pourquoi Al Iraq enverrait étudier au Canada une personne dépourvue de formation en informatique.

[23]           La décision finale de l’agent ne dépendait pas de sa conclusion selon laquelle la lettre de M. Abbas n’était pas authentique. Si cette conclusion était entachée d’un manquement à l’équité procédurale, celui‑ci n’a pas influé sur le sort de la demande de permis d’études, de sorte que rien ne justifie ici l’intervention de notre Cour; voir Stelco Inc. c British Steel Canada Inc., [2000] ACF no 286; et Bhogal c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2000] ACF no 1581, paragraphe 22.

La situation en Irak

[24]           Le fait pour l’agent de s’être fondé sur la situation économique en Irak et l’insécurité qui y règne, soutient en outre le défendeur, ne constitue pas une erreur donnant lieu à révision. Il est permis aux agents d’immigration de prendre en compte leur expérience des conditions locales et régionales. Le défendeur attire l’attention de la Cour sur les paragraphes 14 et 15 de Skoruk c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2001 CFPI 1220, où le juge Marc Nadon formulait à ce sujet les observations suivantes :

La question à trancher n’est pas de savoir si l’agent aurait dû en arriver à une conclusion différente. Il s’agit plutôt de savoir si, d’après les faits portés à son attention, l’agent des visas en est arrivé à une conclusion déraisonnable. Je ne suis pas convaincu que tel était le cas. À mon sens, l’agent des visas ne s’est pas fondé sur des considérations inappropriées ou étrangères pour formuler sa conclusion et n’a pas commis d’erreur en tenant compte du trafic illégal de femmes dans les pays du bloc de l’Est et du fait que de nombreuses personnes poursuivant temporairement des études présentaient des demandes de statut de réfugié au Canada. Ces facteurs propres aux conditions locales et ceux qui concernaient davantage la demanderesse faisaient partie de l’ensemble de la situation que l’agent des visas devait évaluer pour en arriver à sa conclusion.

 

L’agent des visas a examiné la situation personnelle de la demanderesse dans le contexte des conditions et circonstances qui prévalaient en Ukraine. Dans ce contexte, l’agent avait des doutes au sujet de la sincérité du désir de la demanderesse de venir au Canada comme visiteuse. Par conséquent, la demande de la demanderesse a été rejetée et je n’ai pas été persuadé que l’agent des visas a commis une erreur susceptible de révision.

 

 

[25]           L’affaire qui a donné lieu à la décision Hassani, précitée, se distingue de la présente espèce en ce qu’il s’y agissait d’une demande formée dans le cadre du programme des travailleurs qualifiés (fédéral). Les demandes de permis d’études font l’objet d’une procédure d’examen moins rigoureuse que les demandes présentées dans le cadre du programme des travailleurs qualifiés, de sorte qu’elles ne sont pas soumises aux mêmes exigences d’équité procédurale.

Les ressources pécuniaires

[26]           Le défendeur fait en outre observer que les documents financiers produits par M. Fayyadh ne faisaient état que du solde de son compte courant. La lettre de sa banque ne ventilait pas ses avoirs par catégorie, si bien qu’elle ne prouvait pas irréfutablement qu’il disposât de moyens suffisants pour assumer les frais de la demanderesse. Pour voir accueillir sa demande de permis d’études, la demanderesse devait prouver que son père disposait d’au moins 80 000 $ en espèces ou quasi-espèces, ce qu’elle n’a pas fait. Qui plus est, on comprend mal pourquoi la demanderesse compterait sur son père pour assumer ses frais alors qu’Al Iraq s’était engagée à le faire. Elle aurait dû donner des explications sur cet aspect de la demande de permis d’études, et l’on ne peut tenir l’agent pour responsable de cette omission de la demanderesse.

La réplique de la demanderesse

[27]           La demanderesse soutient que la décision Hassani, précitée, ne s’applique pas seulement à la catégorie des travailleurs qualifiés (fédéral). De plus, la décision Skoruk, également précitée, concernait une obligation découlant du Règlement, ce qui n’est pas le cas de la présente espèce. La demanderesse à la présente instance ne pouvait pas savoir en quoi la situation économique en Irak et l’insécurité qui y règne influeraient sur le sort de sa demande de permis d’études, de sorte que l’agent était tenu de lui faire part de ses préoccupations à ce sujet. Quant aux arguments du défendeur concernant la situation pécuniaire de M. Fayyadh, ils se fondent sur de pures conjectures.

            Le mémoire supplémentaire du défendeur

[28]           Le défendeur fait valoir que la demande de permis d’études a été rejetée au motif des omissions et ambiguïtés évidentes qui l’entachaient. La demanderesse ne peut se dédouaner en affirmant maintenant que l’agent aurait dû lui faire part de ses doutes, alors que la charge pesait sur elle de produire des éléments d’appréciation suffisants et de fournir les explications nécessaires.

[29]           Le demandeur réaffirme en outre que la question de l’authenticité de la lettre de M. Abbas n’a pas influé sur le sort de la demande de permis d’études. L’agent a conclu que, même en supposant cette lettre authentique, ladite demande comportait toujours une lacune : elle ne proposait aucun élément tendant à établir la capacité de la société Al Iraq à payer ses études et à assumer ses frais de subsistance.

[30]           Les éléments d’appréciation que la demanderesse a produits pour établir le revenu et les avoirs de M. Fayyadh n’étaient pas particulièrement fiables. Cependant, l’agent n’a pas rejeté la demande de permis d’études au motif de l’insuffisance des ressources pécuniaires mises à la disposition de la demanderesse, de sorte que la promesse de paiement de M. Fayyadh n’aurait pas pu assurer à cette demande une issue favorable. Ces éléments d’appréciation ne dissipaient pas la crainte de l’agent que la demanderesse ne restât au Canada après sa période de séjour autorisée. La demanderesse n’a pas synthétisé tous les aspects de sa demande de permis d’études de manière à montrer à l’agent pourquoi il devrait l’accueillir. La décision contrôlée remplit le critère des issues possibles acceptables formulé dans Dunsmuir, de sorte que l’intervention de la Cour ne se justifie pas.

ANALYSE

[31]           Les questions ici en litige ont déjà été portées devant notre Cour à de multiples reprises, de sorte qu’il ne me paraît pas inutile de récapituler partiellement la jurisprudence applicable avant d’examiner les faits de la présente espèce.

[32]           Premièrement, pour ce qui concerne l’obligation d’agir équitablement, le juge Francis C. Muldoon a proposé les lignes directrices générales qui suivent aux paragraphes 45 à 50 de Li c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2001 CFPI 791 :

Le premier facteur identifié par la Cour dans l’arrêt Baker est la mesure dans laquelle le processus administratif se rapproche du processus judiciaire. Plus la démarche à suivre pour parvenir à la décision ressemble à une prise de décision judiciaire, plus il est probable que l’obligation d’agir équitablement exigera des protections procédurales proches du modèle du procès. Le traitement d’une demande de permis de séjour pour étudiant par un agent des visas est hautement administratif et ne ressemble pas à une prise de décision judiciaire. Ce facteur milite en faveur de conditions moins strictes concernant l’obligation d’agir équitablement.

 

Le deuxième facteur est la nature du régime législatif en vertu duquel agit l’organisme en question. Des protections plus importantes seront exigées lorsque la loi ne prévoit aucune procédure d’appel, ou lorsque la décision est déterminante quant à la question en litige. Pour les demandes de permis de séjour pour étudiant, le demandeur éconduit peut demander réparation à la Cour par voie de contrôle judiciaire. Cela milite en faveur d’exigences procédurales moins strictes.

 

Le troisième facteur permettant de définir la nature et l’étendue de l’obligation d’équité est l’importance de la décision pour les personnes visées. Plus la décision est importante dans leur vie et plus ses répercussions sont grandes pour ces personnes, plus les protections procédurales requises seront rigoureuses. Une décision négative signifie que la demanderesse ne pourra étudier au Canada pendant une période temporaire. Elle est libre de présenter une autre demande dans l’avenir. Par conséquent, ce facteur milite en faveur d’exigences procédurales moins strictes.

 

Le quatrième facteur porte sur les attentes légitimes de la personne qui conteste la décision. Si le demandeur s’attend légitimement à ce qu’une certaine procédure soit suivie, l’obligation d’équité exigera cette procédure. Néanmoins, cette doctrine ne peut pas donner naissance à des droits matériels. Une personne qui demande un permis de séjour pour étudiant n’a pas une attente légitime concernant la procédure suivie pour traiter sa demande.

 

Finalement, l’analyse des procédures requises par l’obligation d’équité devrait également prendre en considération et respecter les choix de procédure que l’organisme fait lui-même, particulièrement lorsque la loi laisse au décideur la possibilité de choisir ses propres procédures, ou quand l’organisme a une expertise dans le choix des procédures appropriées dans les circonstances. La Loi sur l’immigration n’exige pas qu’une procédure particulière soit suivie pour traiter les demandes de permis de séjour pour étudiant. Considérant le grand nombre de demandes de ce genre qui sont traitées, la procédure adoptée par l’ambassade devrait être respectée.

 

Si l’on pondère les facteurs énoncés dans l’arrêt Baker, les protections procédurales exigées par l’obligation d’équité devraient être assouplies pour le traitement des demandes de permis de séjour pour étudiant par les agents des visas à l’étranger. Par conséquent, il n’y a pas de raison de prétendre qu’il y a eu manquement à l’équité dans ce processus parce qu’une agente des visas n’a pas communiqué tous ses doutes à la demanderesse, ou qu’elle ne lui a pas accordé la possibilité de dissiper ces doutes.

 

 

[33]           La Cour d’appel fédérale a recensé aux paragraphes 31 et 32 de Khan c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2001 CAF 345, les facteurs qui limitent le contenu de l’obligation d’équité dans les affaires telles que la présente :

Les facteurs qui tendent à limiter le contenu du devoir d’équité en l’espèce sont les suivants : l’absence d’un droit reconnu par la loi d’obtenir un visa; l’obligation pour le demandeur de visa d’établir son admissibilité à un visa; les conséquences moins graves en général du refus d’un visa pour l’intéressé, contrairement à la suppression d’un avantage, par exemple la suppression du droit de résider au Canada, et le fait que la question en litige dans cette affaire (à savoir la nature des services dont Abdullah aura probablement besoin au Canada, et la question de savoir si tels services constitueraient un fardeau excessif) n’en est pas une à laquelle le demandeur est particulièrement à même de répondre.

 

Finalement, lorsqu’elle fixe le contenu du devoir d’équité qui s’impose pour le traitement des demandes de visas, la Cour doit se garder d’imposer un niveau de formalité procédurale qui risque de nuire indûment à une bonne administration, étant donné le volume des demandes que les agents des visas doivent traiter. La nécessité pour l’État de maîtriser les coûts de l’administration et de ne pas freiner le bon déroulement du processus décisionnel doit être mise en parallèle avec les avantages d’une participation de l’intéressé au processus.

 

 

[34]           Le juge Robert L. Barnes a aussi examiné ces questions au paragraphe 20 de Wang c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2006 CF 1298 :

En l’espèce, il s’agissait, pour le défendeur, d’une demande de visa parmi les milliers reçues chaque mois à Beijing. Sa pratique quant à la façon de rendre les décisions témoigne de la charge de travail liée au processus. Peu importe le bien‑fondé de sa demande, la demanderesse n’avait pas le droit d’entrer au Canada. Dans un tel contexte, l’obligation d’équité consistant à motiver une décision se situe au plus bas de l’échelle pour ce qui est des détails à fournir et des formalités procédurales à respecter et, à mon avis, les motifs fournis à la demanderesse satisfaisaient adéquatement à cette obligation juridique.

 

 

[35]           En outre, il est de droit constant que, pour reprendre les termes employés par la juge Snider au paragraphe 12 de la décision Ayatollahi c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CFPI 248, « la décision qui est prise à la suite d’une demande de permis temporaire de séjour pour étudiant n’est pas de nature judiciaire ou quasi judiciaire ».

[36]           Il faut se rappeler que la demanderesse avait la charge de présentation de la preuve consistant à convaincre l’agent qu’elle quitterait le Canada à la fin de son séjour autorisé. Les observations formulées par le juge Luc Martineau au paragraphe 7 de Huang c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 145, peuvent ici nous guider :

Les arguments du demandeur ne sont pas convaincants. La jurisprudence enseigne que lorsqu’un demandeur ne s’acquitte pas de la charge de présentation de la preuve qui consiste à convaincre l’agent des visas qu’il quittera le Canada à la fin de son séjour autorisé, une entrevue ne constitue pas une obligation prévue par la loi. C’est aux demandeurs qu’il incombe de s’acquitter du fardeau de fournir aux agents des visas des demandes complètes (Lu c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CFPI 440, au paragraphe 11; Dhillon c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 614, aux paragraphes 30 à 32; Bonilla c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 20, au paragraphe 22 [Bonilla]). Règle générale, si un agent possède de l’information extrinsèque dont le demandeur n’est pas au courant, ce dernier devrait avoir l’occasion de dissiper chez l’agent les réserves découlant de cette preuve (Ling c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CF 1198, au paragraphe 16; Chow c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2001 CFPI 996, au paragraphe 14). Il existe une exception similaire dans le cas où la conclusion de l’agent est fondée sur une considération subjective plutôt que sur une preuve objective (Bonilla, précitée, au paragraphe 27; Yuan c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2001] ACF 1852, au paragraphe 12). Ce n’est pas le cas en l’espèce. Dans le cas qui nous occupe, l’agent des visas s’est fondé seulement sur les documents présentés ou connus par le demandeur; par conséquent, il n’était pas tenu de tenir une entrevue. Le billet de banque expiré et l’absence de tout autre dossier ou document financier confirmant la résidence et l’enregistrement constituent, comme tels, des éléments pertinents pour évaluer la capacité financière du demandeur et son degré d’établissement en Chine (par exemple, le demandeur ne possède pas de maison en Chine). L’agent des visas n’a donc pas commis d’erreur susceptible de révision à cet égard.

 

 

[37]           De même, la conclusion formulée par le juge Russell Zinn au paragraphe 7 de Singh c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2009 CF 620, s’applique tout aussi bien à la présente espèce :

J’estime que l’observation selon laquelle l’agente aurait dû donner au demandeur la possibilité de répondre à ses doutes est sans fondement. Le juge Russell, dans la décision Ling c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CF 1198, a passé en revue les circonstances où, selon la loi, l’agent des visas doit donner une telle possibilité. Se fondant sur l’arrêt Ali c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1998] A.C.F. no 468, il a tout d’abord noté que la loi ne prévoyait pas le droit à une entrevue, ni à aucun dialogue du type proposé en l’espèce. Deuxièmement, il a ensuite mentionné que, en règle générale, la possibilité de réponse n’existe que lorsque l’agent possède des informations à l’insu du demandeur. À l’instar de Ling, ce n’est pas le cas en l’espèce, ce qui signifie qu’il n’était pas nécessaire de donner à M. Singh la possibilité de répondre aux doutes de l’agent. De plus, lorsque l’agent ne se fie qu’à des pièces présentées ou connues du demandeur, comme c’est le cas en l’espèce, l’entrevue n’est pas nécessaire.

 

 

[38]           Bien que le contenu de l’obligation d’équité soit réduit au minimum dans le genre de cas qui nous occupe, il existe indéniablement une jurisprudence de notre Cour selon laquelle l’agent d’immigration qui a des doutes sur la crédibilité ou l’authenticité de documents devrait donner au demandeur la possibilité de les dissiper. Voir Salman c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2007 CF 877, et Hassani, précitée.

[39]           Dans la présente espèce, cependant, il ressort à l’évidence des notes du SMGC que l’agent se fondait sur plusieurs éléments importants pour mettre en doute la volonté de la demanderesse de retourner en Irak ou en Jordanie après son séjour au Canada. Dans l’affidavit qu’il a produit en réponse à la présente demande – lequel est à mon sens admissible parce qu’il se contente d’expliquer les motifs exposés dans les notes et n’essaie pas d’aller au‑delà de la décision contrôlée [voir le paragraphe 11 de Sklyar c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 1226, et le paragraphe 15 de Kalra c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CF 941] –, l’agent déclare que, même s’il n’avait pas douté de l’authenticité de la lettre de M. Abbas, il n’en aurait pas été plus persuadé de la bonne foi de la demanderesse. La lecture des notes du SMGC et l’examen des autres facteurs en jeu dans la présente demande me convainquent que tel est bien le cas. En fait, l’agent écrit dans la décision contrôlée elle-même : [TRADUCTION] « Si ce document est effectivement authentique, il apparaît que l’employeur n’est pas une société bien établie. » J’estime que l’agent fait ainsi comprendre sans ambiguïté que, indépendamment du point de savoir si la lettre est authentique, la société en question pose des problèmes importants qui jouent en défaveur de la demande de permis d’études et incitent à douter de la bonne foi de la demanderesse.

[40]           Je ne pense pas que, dans les circonstances de la présente espèce, l’agent fût tenu de faire part à la demanderesse de ses doutes sur l’authenticité de la lettre en cause, parce que le véritable problème était que les entreprises irakiennes n’ont pas l’habitude de financer des études au Canada et qu’aucune pièce ne venait garantir l’engagement de l’employeur ou en attester la sincérité.

[41]           Pour ce qui concerne le fait que l’agent ait pris en compte la situation de l’Irak sur les plans de l’économie et de la sécurité sans communiquer ces préoccupations à la demanderesse, cette dernière soutient que l’obligation d’équité astreint l’agent d’immigration à faire part au demandeur de tous doutes que celui‑ci n’aurait pas pu raisonnablement devancer. Je ne pense pas que la jurisprudence de notre Cour étaye cette thèse. On lit par exemple à ce sujet les observations suivantes du juge Michel Shore aux paragraphes 30 à 33 de Tran c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2006 CF 1377 :

Comme je l’ai mentionné, la protection procédurale fournie dans le contexte d’une demande de visa d’étudiant est « moins stricte ». Il n’y a pas eu de manquement à l’équité du fait que l’agente des visas n’a pas communiqué tous ses doutes à M. Le Minh Duc Tran ou ne lui a pas accordé la possibilité de dissiper ses doutes. (Li, précité; Skoruk, précité.)

 

Il est également raisonnable de s’attendre à ce que les agents de visas se servent de leur propre expérience et de leur propre expertise pour trancher les demandes qui leur sont soumises. (Wen c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CFPI 1262, [2002] A.C.F. no 1719 (QL), paragraphe 16; Skoruk, précité, paragraphe 14.)

 

L’agente des visas n’a pas commis d’erreur en tenant compte du fait que des programmes de gestion culinaire semblables sont offerts au Vietnam et dans l’Asie du Sud, pour une [traduction] « fraction du coût ». Contrairement à ce que M. Le Minh Duc Tran a soutenu, l’agente des visas ne s’est pas fondée sur des éléments de preuve extrinsèques, mais elle s’est plutôt fondée sur sa propre expertise et sur son analyse de l’ensemble des éléments de preuve qui lui avaient été fournis. (Wen, précité, paragraphes 18 et 19.)

 

Comme dans la décision Skoruk, précitée, ces facteurs propres aux conditions locales et ceux qui concernaient davantage M. Le Minh Duc Tran faisaient partie de l’ensemble de la situation que l’agente des visas devait évaluer pour arriver à sa décision. (Affidavit Brown; Skoruk, précité, paragraphe 14.)

 

[42]           Il me paraît donc que le demandeur doit se rappeler que la charge pèse sur lui de constituer un dossier convaincant, et qu’il lui faut s’attendre à ce que l’agent des visas examine la demande en s’appuyant sur son expérience générale et sa connaissance des conditions locales pour faire des déductions et tirer des conclusions à partir des renseignements et documents produits par ledit demandeur, sans nécessairement lui faire part, le cas échéant, des doutes que le dossier suscite. Il incombe au demandeur de faire en sorte que sa demande soit complète et comprenne tous les éléments nécessaires pour convaincre l’agent.

[43]           En conséquence, la décision contrôlée ne me paraît entachée d’aucune erreur donnant lieu à révision.

[44]           Les avocats s’accordent à reconnaître que la présente affaire ne soulève aucune question à certifier, et la Cour partage leur avis.

 

JUGEMENT

 

 

LA COUR STATUE COMME SUIT :

 

1.                  La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

2.                  Il n’y a aucune question à certifier.

 

« James Russell »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                              IMM‑6149‑11

 

INTITULÉ :                                             ZAINAB BAHR

 

                                                                  et

 

                                                                  LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                                  ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                       Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                     Le 4 avril 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                    LE JUGE RUSSELL

 

DATE DES MOTIFS :                            Le 3 mai 2012

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Hart A. Kaminker                                                                     POUR LA DEMANDERESSE

 

Stephen Jarvis                                                                          POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Hart A. Kaminker                                                                     POUR LA DEMANDERESSE

Avocat

Toronto (Ontario) 

 

Myles J. Kirvan, c.r.                                                                 POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

 

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