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Date : 20120515

Dossier : IMM-6377-11

Référence : 2012 CF 582

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 15 mai 2012

En présence de monsieur le juge O'Keefe

 

 

ENTRE :

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L’IMMIGRATION

 

demandeur

 

et

 

CHRISTOPHER SMITH

 

défendeur

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande présentée en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la Loi) en vue de soumettre à un contrôle judiciaire la décision datée du 31 août 2011 par laquelle un commissaire de la Section d’appel de l’immigration de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission) a rétabli le sursis à l’exécution de la mesure de renvoi concernant le défendeur. Cette décision était fondée sur la conclusion de la Commission selon laquelle les conséquences du paragraphe 68(4) de la Loi ne s’appliquaient plus au défendeur et que, de ce fait, l’ordonnance révoquant le sursis et classant son appel était nulle et sans effet. La Commission a donc rétabli le sursis à l’exécution de la mesure de renvoi concernant le défendeur en prescrivant une date de fin théorique - le 1er février 2012 - ainsi qu’un réexamen prévu du sursis.

 

[2]               Le demandeur souhaite que la décision de la Commission soit infirmée et l’affaire renvoyée à un tribunal différemment constitué en vue d’un nouvel examen.

 

Le contexte

 

[3]               Le défendeur, Christopher Smith, est citoyen de la Jamaïque. Il est arrivé une première fois au Canada en 1989, pour participer à un concours d’art culinaire. En 1990, il est revenu au pays muni d’un visa de visiteur. Il a obtenu plusieurs prorogations et permis de travail jusqu’à ce que sa première épouse le parraine avec succès. Il a obtenu le statut de résident permanent le 23 mars 1993.

 

[4]               Au Canada, le défendeur a travaillé comme chef et gérant de restaurant. Pour compléter son revenu, il a vendu du crack. Il a d’abord été reconnu coupable de possession de crack le 12 mars 1998. Le 2 avril 1998, il a été reconnu coupable de deux chefs de défaut de se conformer à un engagement, après avoir vendu du crack à des agents d’infiltration. Cinq ans plus tard, le 20 février 2003, le défendeur a été reconnu coupable de deux chefs de possession de crack en vue d’en faire le trafic, ainsi que de possession du produit de biens criminellement obtenus.

 

[5]               Le 29 octobre 2003, une mesure d’expulsion a été prise contre le défendeur. Cette décision a été fondée sur le fait que ses déclarations de culpabilité le faisaient tomber sous le coup de l’alinéa 36(1)a) de la Loi (grande criminalité). Il a interjeté appel de la mesure d’expulsion. Le 28 avril 2005, la Section d’appel de l’immigration (SAI) a accordé un sursis à l’exécution de la mesure d’expulsion, et ce, pour une période de cinq ans, sous réserve de conditions précises. Cette décision découlait de la conclusion de la SAI selon laquelle il existait des motifs d’ordre humanitaire (CH) suffisants pour justifier la prise de mesures spéciales, compte tenu des cinq enfants biologiques et des deux enfants issus de sa conjointe qu’il avait au Canada.

 

[6]               Le 11 octobre 2005, le défendeur a été déclaré coupable de voies de fait, d’agression armée et de défaut de se conformer à une ordonnance de probation. Par la suite, le demandeur a présenté une demande pour que le sursis du défendeur soit révoqué et son appel rejeté. Le 6 juin 2006, la SAI a conclu que le sursis à l’exécution de la mesure de renvoi concernant le défendeur était révoqué en application du paragraphe 68(4) de la Loi en raison de sa nouvelle déclaration de culpabilité.

 

[7]               Le 15 octobre 2007, la déclaration de culpabilité du défendeur pour agression armée a été infirmée. Le mois suivant, soit le 13 novembre 2007, le défendeur a présenté une demande pour que l’on rouvre son appel concernant la mesure de renvoi. Le 26 janvier 2008, la SAI a fait droit à la demande de réouverture de l’appel du défendeur au motif que sa déclaration de culpabilité avait été annulée et n’était donc plus valide. Le demandeur a demandé que l’on soumette cette décision à un contrôle judiciaire. La demande d’autorisation a été accordée le 15 octobre 2008. La demande de contrôle judiciaire a débuté le 13 janvier 2009, et l’audience a par la suite été ajournée afin de permettre au défendeur de déposer une demande CH.

 

[8]               Le 9 décembre 2010, le juge Michael Kelen, de la Cour fédérale, a déclaré dans une directive que le motif de l’ajournement n’existait plus car il s’était écoulé près de deux ans sans que le défendeur présente une demande CH. Le juge Kelen a fait remarquer que même si la Commission de l’immigration et du statut de réfugié [traduction] « n’était manifestement pas habilitée à rouvrir l’appel du défendeur à l’encontre de la mesure d’expulsion le concernant parce que sa déclaration de culpabilité avait été annulée », il était clair aux deux parties qu’une demande CH aurait vraisemblablement accordé au défendeur une exemption parce que sa déclaration de culpabilité au criminel, qui était le motif de son expulsion, avait été infirmée. Il a été ordonné aux parties de faire part de leurs observations avant que la Cour rende une décision définitive.

 

[9]               Le 7 janvier 2011, le juge Kelen a rendu une décision faisant droit à la demande de contrôle judiciaire et renvoyant l’affaire à un tribunal différent en vue de la tenue d’un nouvel examen. Le juge Kelen a pris acte de l’explication du défendeur selon laquelle, depuis les deux dernières années, il faisait face à des accusations criminelles, ce qui l’empêchait de présenter une demande CH. Le juge Kelen a toutefois fait remarquer que la Cour n’avait ajourné l’audience antérieure que parce qu’elle prévoyait que le défendeur déposerait sa demande CH au cours des semaines suivantes. Les circonstances du moment indiquaient qu’il allait devoir s’écouler trois ans de plus avant que le défendeur puisse déposer une demande CH et, là encore, uniquement s’il était acquitté des accusations criminelles en instance. La Cour a donc entrepris de rendre sa décision faisant droit à la demande de contrôle judiciaire.

 

[10]           Le 15 juillet 2011, un commissaire de la SAI a écrit aux parties pour leur demander de traiter de la pertinence de la décision Nabiloo c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 125, [2008] ACF no 159, relativement à l’ouverture de l’appel du défendeur.

 

La décision de la Commission

 

[11]           La Commission a rendu sa décision le 31 août 2011.

 

[12]           Au départ, la Commission a reconnu qu’aucune disposition ne lui permettait de rouvrir l’appel. Selon l’article 71 de la Loi, elle ne pouvait autoriser une réouverture qu’en cas de manquement de la SAI à un principe de justice naturelle. Elle a conclu qu’il n’y avait pas eu de tel manquement parce que, au moment de la révocation de l’appel du défendeur, sa déclaration de culpabilité était valide.

 

[13]           La Commission a également pris acte des observations des parties à propos de la pertinence de la décision Nabiloo, précitée. D’autre part, le défendeur a fait valoir qu’il se trouve dans une situation plus favorable du fait de son acquittement; dans la décision Nabiloo, précitée, le demandeur n’avait obtenu que des réductions de peine. D’autre part, le demandeur a fait valoir que si la Commission devait envisager d’assouplir ses procédures en vue d’accorder une prorogation de délai comme cela avait été le cas dans Nabiloo, précitée, le défendeur devrait être tenu d’indiquer s’il avait été déclaré coupable ou accusé d’autres infractions criminelles.

 

[14]           La Commission a fait remarquer que la décision Nabiloo, précitée, même si elle n’était pas directement à propos, n’en était pas moins pertinente en ce sens qu’elle reconnaissait qu’il doit exister une mesure de réparation lorsqu’une exclusion prévue par la loi à un appel, qui existait antérieurement, prend fin. En l’espèce, l’exclusion a pris fin au moment où la déclaration de culpabilité du défendeur a été infirmée. La Commission a conclu que l’acquittement du défendeur le remettait dans la situation où il se trouvait au moment de l’annulation du sursis à la mesure de renvoi le concernant. De ce fait, même si l’appel du défendeur n’était pas rouvert en vertu de l’article 71 de la Loi, les conséquences du paragraphe 68(4) ne s’appliquaient plus à lui et l’ordonnance révoquant son sursis et mettant fin à son appel était donc nulle et sans effet. Cela étant, la Commission a rétabli le sursis accordé au défendeur.

 

[15]           La Commission a également fait état des observations présentées au sujet de l’expiration, le 28 avril 2010, du sursis de cinq ans à l’exécution de la mesure de renvoi. Elle a toutefois statué qu’un tel sursis n’expire pas; lorsqu’un sursis prend fin, il est plutôt réexaminé par un commissaire de la SAI, qui décide de faire droit à l’appel, de rejeter ce dernier ou de proroger le sursis.

 

[16]           La Commission a conclu que la mesure de réparation appropriée consistait à soumettre de nouveau le défendeur au sursis à l’exécution de la mesure de renvoi le concernant, et ce, aux conditions initialement précisées et en fixant comme date de fin théorique le 1er février 2012. Le défendeur a été tenu de produire une déclaration de conformité dans un délai précis, ce à quoi le demandeur a obtenu la possibilité de répondre.

 

Les questions en litige

 

[17]           Le demandeur soutient que la question suivante est en litige :

            La Commission a commis une erreur dans son interprétation et son application de l’article 71 de la Loi en concluant qu’elle était compétente pour rouvrir l’appel du défendeur et à rétablir le sursis à l’exécution de la mesure d’expulsion concernant le défendeur.

 

[18]           Je reformulerais la question comme suit :

            1.         Quelle est la norme de contrôle appropriée?

            2.         La Commission a-t-elle commis une erreur en rétablissant le sursis à l’exécution de la mesure de renvoi concernant le défendeur?

 

Les observations écrites du demandeur

 

[19]           Le demandeur soutient que l’interprétation de l’effet juridique du paragraphe 68(4) de la Loi est une question de droit qui ne commande aucune retenue. Les questions de compétence sont également susceptibles de contrôle selon la norme de la décision correcte.

 

[20]           Le demandeur ajoute que la compétence de la Commission en matière de réouverture se limite aux situations où il y a eu manquement à un principe de justice naturelle. L’existence d’une preuve nouvelle ou d’un changement de situation ne suffit pas pour étayer une demande de réouverture.

 

[21]           Le demandeur est d’avis que les motifs de la Commission ne reflètent pas l’existence d’un manquement à un principe de justice naturelle qui justifie la réouverture de l’appel du défendeur. Il soutient donc que la Commission a commis une erreur quand elle s’est déclarée compétente pour rouvrir l’appel du défendeur. En rendant sa décision, la Commission a commis la même erreur que le juge Kelen a relevée dans sa décision du 7 janvier 2011.

 

[22]           Le demandeur reconnaît qu’il peut paraître illogique, inéquitable ou difficultueux de permettre que l’annulation du sursis soit maintenue, alors que la déclaration de culpabilité au criminel qui a mené à son expiration a été portée en appel avec succès, mais cela n’invalide pas une décision convenablement rendue. Cela n’autorise pas non plus la Commission à excéder sa compétence en rouvrant un appel. Le demandeur ajoute que la Commission a perdu valablement sa compétence au moment de la déclaration de culpabilité. C’est donc dire qu’elle a commis une erreur en rouvrant l’appel et en rétablissant le sursis à l’exécution de la mesure de renvoi concernant le défendeur.

 

Les observations écrites du défendeur

 

[23]           Le défendeur a présenté des observations de vive voix à l’audience.

 

Analyse et décision

 

[24]           La première question

            Quelle est la norme de contrôle appropriée?

            Une fois que la jurisprudence a déterminé la norme de contrôle qu’il convient d’appliquer à une question particulière dont elle est saisie, la cour de contrôle peut l’adopter (voir l’arrêt Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 RCS 190, au paragraphe 57).

 

[25]           Il est bien établi qu’une question concernant la compétence de la SAI est une question de droit qui est susceptible de contrôle selon la norme de la décision correcte (voir la décision Nabiloo, précitée, au paragraphe 9). Dans le même ordre d’idées, l’interprétation de l’effet juridique de dispositions de la Loi est une question de droit qui ne commande aucune retenue (voir l’arrêt Nazifpour c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CAF 35, [2007] ACF no 179, au paragraphe 21). Il n’y a pas lieu de faire preuve de retenue envers la Commission à l’égard de ces questions (voir l’arrêt Dunsmuir, précité, au paragraphe 50).

 

[26]           La deuxième question

            La Commission a-t-elle commis une erreur en rétablissant le sursis à l’exécution de la mesure de renvoi concernant le défendeur?

            Dans sa décision, la Commission a reconnu avec justesse qu’elle n’avait pas compétence pour rouvrir l’appel du défendeur en vertu de l’article 71 de la Loi car, au moment de la révocation de son appel, sa déclaration de culpabilité était valide et il n’y avait pas eu de manquement à un principe de justice naturelle. Cependant, elle a ensuite conclu que l’exclusion prévue par la loi dont le défendeur faisait l’objet avait pris fin au moment où la déclaration de culpabilité de ce dernier avait été infirmée. Sur ce fondement, elle a conclu que les conséquences du paragraphe 68(4) ne s’appliquaient plus et que l’ordonnance annulant le sursis et mettant fin à l’appel était nulle et sans effet. Elle a donc décrété que la mesure de réparation qui convenait consistait à soumettre de nouveau le défendeur au sursis initial à l’exécution de la mesure de renvoi en assortissant ce sursis d’une date de fin révisée, soit le 1er février 2012. La Commission a commis une erreur dans cette partie-là de son analyse.

 

[27]           Selon le cadre législatif actuellement en vigueur, la compétence qu’a la Commission dans le cas d’une demande de réouverture d’un appel est très restreinte. L’article 71 de la Loi limite clairement cette compétence aux cas où il y a eu manquement à un principe de la justice naturelle. Dans le cas présent, même si la Commission a explicitement indiqué qu’elle ne rouvrait pas l’appel, sa décision a eu, en fait, exactement cet effet-là, car elle n’avait pas d’autre compétence, et cela n’inclut aucun pouvoir en equity, pour accorder la mesure de réparation qu’elle a choisie.

 

[28]           Une situation quelque peu semblable s’est présentée dans l’affaire Almrei c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 554, [2011] ACF no 781. Dans cette affaire, un certificat de sécurité délivré à l’encontre du demandeur avait par la suite été annulé. La question en litige consistait à savoir si la décision refusant la demande de résidence permanente du demandeur pouvait être maintenue car la preuve sous-jacente, c’est-à-dire le certificat de sécurité, avait été annulé. La juge Judith Snider a conclu que même si la décision n’était pas nulle ou sans effet, on ne pouvait pas l’invoquer pour renvoyer le demandeur du Canada (voir la décision Almrei, précitée, au paragraphe 46) :

Malgré que la question ne soit pas au-dessus de tout doute (Nagra, précitée), il semble que la meilleure position juridique soit de considérer que la décision rendue, avant que ne survienne un changement fondamental de la preuve, n’était pas nulle et non avenue dès sa formation. Cependant, à l’avenir, de telles décisions ne pourront être exécutées, utilisées ni servir de fondement. En l’espèce, la décision de l’agent n’est pas nulle. Ce que je crois cependant, c’est que, en se fondant sur des décisions telles que Kalicharan, le ministre ne peut pas se servir de cette décision pour justifier la prise de mesures additionnelles visant à renvoyer le demandeur du Canada. [Non souligné dans l’original.]

 

 

 

[29]           Une décision antérieure : Kalicharan c Canada (Ministre de la Main-d’œuvre et de l’Immigration), [1976] ACF no 21 (1re inst.) est pertinente elle aussi. Dans cette affaire, il avait été ordonné d’expulser le demandeur à cause de ses déclarations de culpabilité au criminel. Ce dernier avait par la suite bénéficié d’une absolution. La Cour a expliqué que l’octroi, par la Cour d’appel, d’une absolution conditionnelle ne constituait « pas seulement une nouvelle preuve » mais plutôt un motif pour conclure que la mesure d’expulsion n’existait plus (au paragraphe 4). Dans la décision Almrei, précitée, la juge Snider a fait remarquer que la décision Kalicharan, précitée, « semble soutenir l’argument qu’une mesure d’expulsion, ou autre mesure, visant à renvoyer le demandeur du Canada ne puisse être exécutée, rien de plus » (au paragraphe 38).

 

[30]           En l’espèce, la Commission a rétabli le sursis à l’exécution de la mesure d’expulsion concernant le défendeur parce que la décision sous-jacente, c’est-à-dire l’annulation du sursis, était fondée sur une déclaration de culpabilité qui avait par la suite été infirmée. Cependant, comme la Commission et les deux parties ont reconnu qu’il n’y avait pas eu de manquement à un principe de la justice naturelle, la Commission n’était pas compétente pour rétablir le sursis. La Commission a également commis une erreur en qualifiant la décision sous-jacente de nulle et sans effet. Comme l’a déclaré la juge Snider, cela a plutôt eu l’effet suivant : « le ministre ne peut pas se servir de cette décision pour justifier la prise de mesures additionnelles visant à renvoyer le demandeur du Canada » (voir la décision Almrei, précitée, au paragraphe 46).

 

[31]           C’est donc dire que le seul effet pratique que peut avoir la déclaration de culpabilité infirmée est que le demandeur ne peut pas invoquer l’annulation du sursis à l’exécution de la mesure d’expulsion pour tenter de renvoyer le défendeur du Canada. À l’audience, l’avocat du demandeur a reconnu qu’il y avait peu de chances que le défendeur soit renvoyé, et cette interprétation concorde avec la jurisprudence existante.

 

[32]           Je suis donc d’avis de faire droit au contrôle judiciaire et d’infirmer la décision de la Commission. L’affaire est renvoyée à un tribunal différemment constitué pour réexamen, en prescrivant que ce nouveau tribunal rende une décision qui soit conforme à la compétence restreinte que confère l’article 71 de la Loi.

 

[33]           Le défendeur m’a soumis la question suivante à certifier à titre de question grave de portée générale :

Quel est l’effet d’une déclaration de culpabilité au criminel qui est annulée et remplacée par un plaidoyer de non-culpabilité si cette déclaration était le fondement d’une conclusion antérieure de la SAI selon laquelle cette même déclaration pourrait, par application de la loi, donner lieu à la révocation d’un sursis à l’exécution d’une mesure de renvoi pour cause de criminalité?

 

 

 

[34]           Je ne suis pas disposé à certifier cette question. Selon moi, la question de la compétence qu’a la SAI de rouvrir un appel en vertu de l’article 71 de la Loi a déjà été réglée par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Nazifpour, précité. La SAI ne peut rouvrir un appel que si elle a manqué à un principe de justice naturelle, ainsi que le prescrit l’article 71 de la Loi. La SAI n’a pas compétence pour examiner l’effet de l’annulation d’une déclaration de culpabilité sur un sursis à l’exécution d’une mesure de renvoi valablement délivrée. Cela étant, je ne puis retenir la question proposée à titre de question grave de portée générale.

 


JUGEMENT

LA COUR ORDONNE :

            1.         La demande de contrôle judiciaire est accueillie, la décision de la SAI infirmée et l’affaire renvoyée pour réexamen à un tribunal différent de la Commission.

            2.         Aucune question grave de portée générale ne sera certifiée.

 

 

« John A. O’Keefe »

Juge

 

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc, LL.B.


ANNEXE

 

Les dispositions législatives applicables

 

Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27

 

36. (1) Emportent interdiction de territoire pour grande criminalité les faits suivants :

 

 

a) être déclaré coupable au Canada d’une infraction à une loi fédérale punissable d’un emprisonnement maximal d’au moins dix ans ou d’une infraction à une loi fédérale pour laquelle un emprisonnement de plus de six mois est infligé;

 

 

b) être déclaré coupable, à l’extérieur du Canada, d’une infraction qui, commise au Canada, constituerait une infraction à une loi fédérale punissable d’un emprisonnement maximal d’au moins dix ans;

 

c) commettre, à l’extérieur du Canada, une infraction qui, commise au Canada, constituerait une infraction à une loi fédérale punissable d’un emprisonnement maximal d’au moins dix ans.

 

 

 

50. Il y a sursis de la mesure de renvoi dans les cas suivants :

 

[…]

 

c) pour la durée prévue par la Section d’appel de l’immigration ou toute autre juridiction compétente;

 

68. (1) Il est sursis à la mesure de renvoi sur preuve qu’il y a — compte tenu de l’intérêt supérieur de l’enfant directement touché — des motifs d’ordre humanitaire justifiant, vu les autres circonstances de l’affaire, la prise de mesures spéciales.

 

 

 

(2) La section impose les conditions prévues par règlement et celles qu’elle estime indiquées, celles imposées par la Section de l’immigration étant alors annulées; les conditions non réglementaires peuvent être modifiées ou levées; le sursis est révocable d’office ou sur demande.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

(3) Par la suite, l’appel peut, sur demande ou d’office, être repris et il en est disposé au titre de la présente section.

 

 

(4) Le sursis de la mesure de renvoi pour interdiction de territoire pour grande criminalité ou criminalité est révoqué de plein droit si le résident permanent ou l’étranger est reconnu coupable d’une autre infraction mentionnée au paragraphe 36(1), l’appel étant dès lors classé.

 

 

 

71. L’étranger qui n’a pas quitté le Canada à la suite de la mesure de renvoi peut demander la réouverture de l’appel sur preuve de manquement à un principe de justice naturelle.

 

 

72. (1) Le contrôle judiciaire par la Cour fédérale de toute mesure — décision, ordonnance, question ou affaire — prise dans le cadre de la présente loi est subordonné au dépôt d’une demande d’autorisation.

 

36. (1) A permanent resident or a foreign national is inadmissible on grounds of serious criminality for

 

(a) having been convicted in Canada of an offence under an Act of Parliament punishable by a maximum term of imprisonment of at least 10 years, or of an offence under an Act of Parliament for which a term of imprisonment of more than six months has been imposed;

 

(b) having been convicted of an offence outside Canada that, if committed in Canada, would constitute an offence under an Act of Parliament punishable by a maximum term of imprisonment of at least 10 years; or

 

(c) committing an act outside Canada that is an offence in the place where it was committed and that, if committed in Canada, would constitute an offence under an Act of Parliament punishable by a maximum term of imprisonment of at least 10 years.

 

50. A removal order is stayed

 

 

 

(c) for the duration of a stay imposed by the Immigration Appeal Division or any other court of competent jurisdiction;

 

68. (1) To stay a removal order, the Immigration Appeal Division must be satisfied, taking into account the best interests of a child directly affected by the decision, that sufficient humanitarian and compassionate considerations warrant special relief in light of all the circumstances of the case.

 

(2) Where the Immigration Appeal Division stays the removal order

 

(a) it shall impose any condition that is prescribed and may impose any condition that it considers necessary;

 

(b) all conditions imposed by the Immigration Division are cancelled;

 

(c) it may vary or cancel any non-prescribed condition imposed under paragraph (a); and

 

(d) it may cancel the stay, on application or on its own initiative.

 

(3) If the Immigration Appeal Division has stayed a removal order, it may at any time, on application or on its own initiative, reconsider the appeal under this Division.

 

(4) If the Immigration Appeal Division has stayed a removal order against a permanent resident or a foreign national who was found inadmissible on grounds of serious criminality or criminality, and they are convicted of another offence referred to in subsection 36(1), the stay is cancelled by operation of law and the appeal is terminated.

 

71. The Immigration Appeal Division, on application by a foreign national who has not left Canada under a removal order, may reopen an appeal if it is satisfied that it failed to observe a principle of natural justice.

 

72. (1) Judicial review by the Federal Court with respect to any matter — a decision, determination or order made, a measure taken or a question raised — under this Act is commenced by making an application for leave to the Court.

 

 

 


 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-6377-11

 

INTITULÉ :                                      LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

                                                            - et -

 

                                                            CHRISTOPHER SMITH

 

LIEU DE L'AUDIENCE :              TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :             LE 8 MAI 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                            LE JUGE O’KEEFE

 

DATE DES MOTIFS :                     LE 15 MAI 2012

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Laoura Christodoulides

Christopher Ezrin

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Michael M. Doyle

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Myles J. Kirvan

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

Michael M. Doyle

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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