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Cour fédérale

 

Federal Court

Date : 20120612

Dossier : IMM-7150-11

Référence : 2012 CF 705

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario, le 12 juin 2012

En présence de monsieur le juge Pinard

ENTRE :

Gwang Su LEE, Su Mi HONG, alias Sumi HONG,

et Hana LEE

 

demandeurs

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire présentée en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la Loi), par Gwang Su Lee, son épouse, Su Mi Hong (alias Sumi Hong), ainsi que leur fille mineure Hana Lee (les demandeurs), citoyens de la Corée du Sud, à l’encontre de la décision par laquelle la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission) a rejeté la demande d’asile qu’ils avaient présentée sous le régime de la Loi.

 

[2]               La Commission a conclu que les demandeurs manquaient de crédibilité, qu’ils ne craignaient pas subjectivement de retourner en Corée du Sud et que, de toute façon, il existait dans ce pays une protection de l’État.

 

[3]               Les demandeurs allèguent qu’on ne leur a pas donné une possibilité raisonnable de présenter leur preuve à l’audience après que le ministre et le commissaire eurent fini de poser leurs questions. La seule question dont la Cour est saisie consiste donc à savoir si la Commission a mené son audience d’une manière conforme aux principes de l’équité procédurale :

La commission a-t-elle manqué aux principes de l’équité procédurale en privant les demandeurs de la possibilité de témoigner en réponse à des questions soulevées durant l’interrogatoire fait par la Commission et le ministre?

 

 

 

[4]               La Cour n’étant pas tenue de faire preuve de déférence à l’égard des questions d’équité procédurale, la norme de contrôle applicable est la décision correcte (voir l’arrêt Sketchley c Procureur général, 2005 CAF 404, au paragraphe 53).

 

* * * * * * * *

 

[5]               Les demandeurs affirment qu’ils n’ont pas eu une audience équitable, n’ayant pas eu la possibilité de répondre aux questions qui leur avaient été posées.

 

[6]               Ils soutiennent de plus que les décideurs administratifs sont soumis à une obligation d’équité accrue lorsqu’ils ont affaire à des parties non représentées, invoquant à cet égard la décision Nemeth c Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, 2003 CFPI 590, où le juge James O’Reilly a conclu ainsi, au paragraphe 13 :

[…] Les obligations de la Commission dans les cas où des revendicateurs ne sont pas représentés sont peut-être en réalité plus élevées parce qu’elle ne peut compter sur un avocat pour protéger leurs intérêts.

 

 

[7]               Aux dires des demandeurs, la Commission n’a pas protégé suffisamment leurs droits procéduraux. Cette dernière, ajoutent-ils, ne leur a pas permis de témoigner après les avoir interrogés, ce qui était inéquitable, vu qu’ils n’ont pas eu la possibilité d’expliquer pourquoi ils n’avaient pas sollicité la protection de l’État en Corée ni d’expliquer leur version des faits de façon à aider la Commission à comprendre les apparentes contradictions dans leur témoignage.

 

[8]               Les demandeurs soutiennent finalement que la commissaire aurait dû leur donner la possibilité de produire leur propre preuve principale et que le fait de ne pas leur avoir permis de le faire constitue une erreur susceptible de contrôle.

 

[9]               Le défendeur admet que les principes de justice fondamentale exigent que la Commission donne aux demandeurs la possibilité de relater leur récit en entier, de produire de la preuve à l’appui de leur demande et de formuler des observations pertinentes. Cependant, soutient-il, les demandeurs ont effectivement eu cette possibilité, comme l’illustre la transcription de l’audience.

 

[10]           Le défendeur soutient que rien dans la transcription n’indique que les demandeurs souhaitaient témoigner davantage après que la Commission eut fini de les interroger, pas plus qu’ils n’ont produit une preuve par affidavit à cet effet. Quoi qu’il en soit, ajoute-t-il, la commissaire leur a demandé à la fin de l’audience s’ils avaient quelque chose à ajouter, et ils ont effectivement fait des observations supplémentaires.

 

* * * * * * * *

 

[11]           La véritable question en litige consiste à savoir si la demande que la Commission a faite aux demandeurs à l’audience pour savoir s’ils avaient des derniers commentaires à formuler leur a donné la possibilité de présenter leur propre preuve. À mon avis, cette demande était suffisante et permettait aux demandeurs de le faire.

 

[12]           Selon la jurisprudence, les parties non représentées qui comparaissent devant la Commission ont droit à une obligation d’équité accrue. Toutefois, il ressort de la transcription de l’audience que les demandeurs ont eu la chance de présenter leur version des faits. Au début de l’audience, la Commission a expliqué aux demandeurs que, après ses questions et celles du ministre, les demandeurs auraient [traduction] « la possibilité d’ajouter n’importe quel élément qui serait pertinent à [leur] demande ». Après les observations finales du ministre, la Commission les a invités [traduction] « à dire pourquoi, en fonction de la preuve et du droit, […] [on] devrait leur accorder l’asile au Canada ».

 

[13]           La réponse des demandeurs à cette dernière invitation indique clairement qu’ils ont compris qu’ils étaient en droit de faire des commentaires sur le caractère suffisant des éléments de preuve figurant déjà dans le dossier et de soumettre de nouveaux éléments à l’attention de la Commission, comme l’illustre le passage suivant tiré des dernières remarques que Gwang Su Lee a faites à l’audience :

[traduction]

 

Le conseil a déclaré qu’il n’y avait aucune preuve que nous avions rencontré des agents de la CIA aux États-Unis, mais quand nous les avions rencontrés, nous avions demandé une confirmation ou un document quelconque qui porterait leur signature pour obtenir la résidence permanente, mais ils ont dit que, comme ils faisaient partie de l’organisme de renseignement secret, ils ne pouvaient laisser aucune preuve. […]

 

 

 

[14]           La Commission n’est pas liée par de strictes règles de preuve. Il n’est donc pas important que la possibilité qu’ont eue les demandeurs de soumettre leur propre preuve soit survenue au stade des « observations », et non pas après que la Commission eut fini de poser ses questions. Ils ont eu la chance de commenter les éléments de preuve figurant dans le dossier et d’en produire des nouveaux, ce qu’ils ont fait.

 

[15]           Par ailleurs, rien dans le dossier n’indique que les demandeurs n’aient pas eu la chance d’expliquer pourquoi ils n’avaient pas sollicité la protection de l’État en Corée, ni d’éclaircir les apparentes contradictions dans leur témoignage. Là encore, il ressort de la transcription que les demandeurs ont eu la possibilité de le faire, et ils n’ont fourni aucune preuve contraire.

 

* * * * * * * *

 

[16]           Comme les demandeurs n’ont pas établi qu’une erreur de procédure susceptible de contrôle avait été commise, la présente demande de contrôle judiciaire sera rejetée.

 

[17]           Aucune question à certifier n’a été proposée, et il n’en est certifié aucune.

 

 


 

JUGEMENT

 

            La demande de contrôle judiciaire concernant la décision par laquelle la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié a rejeté la demande d’asile présentée par les demandeurs sous le régime de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27, est rejetée.

 

 

« Yvon Pinard »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

 

Christian Laroche, LL.B.

Juriste-traducteur et traducteur-conseil


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-7150-11

 

INTITULÉ :                                      Gwang Su LEE, Su Mi HONG, alias Sumi HONG, et Hana LEE c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              VANCOUVER (COLOMBIE-BRITANNIQUE)

 

DATE DE L’AUDIENCE :             LE 10 MAI 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                            LE JUGE PINARD

 

DATE DES MOTIFS :                     LE 12 JUIN 2012

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Shepherd I. Moss                                POUR LES DEMANDEURS

 

Cheryl D. Mitchell                              POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Shepherd I. Moss                                            POUR LES DEMANDEURS

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

Myles J. Kirvan                                               POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

 

 

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