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Cour fédérale

 

Federal Court

 

 Date: 20120615

Dossier : IMM-8309-11

Référence : 2012 CF 759

Ottawa (Ontario), le 15 juin 2012

En présence de monsieur le juge Scott 

 

ENTRE :

 

FELIPE DE JESUS MORENO CORONA

CECILIA CORTES

 

 

 

demandeurs

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

         MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

I.          Introduction

 

[1]               Il s'agit d'une demande de révision judiciaire déposée aux termes du paragraphe 72(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [LIPR], à l'encontre d'une décision d'une agente d'évaluation du risque avant renvoi [ERAR], Mme Sophie Bisaillon, rendue le 3 août 2011, refusant la demande de surseoir au renvoi de M. Felipe De Jesus Moreno Corona (M. Corona) et de sa conjointe, Mme Cecilia Cortes (Mme Cortes) (les demandeurs).

 

[2]               Pour les raisons qui suivent, cette demande de révision judiciaire est rejetée.

 

II.        Faits

 

[3]               Les demandeurs sont citoyens du Mexique.

 

[4]               Ils déposent une demande d’asile dès leur arrivée au Canada. Cette demande est rejetée le 8 mars 2010, aux motifs qu’ils n’ont pas épuisé leurs recours internes avant de quitter le Mexique. Dans sa décision, la Commission de l’immigration et du statut de réfugié [CISR] souligne également le manque de crédibilité des demandeurs.

 

[5]               Le 6 janvier 2011, le juge Pinard rejette la demande de révision judiciaire des demandeurs.

 

[6]               Le 20 avril 2011, les demandeurs déposent une demande de résidence permanente pour motifs humanitaires.

 

[7]               Les demandeurs déposent également une demande d’ERAR le 9 mai 2011, laquelle est rejetée le 3 août 2011. Dans sa décision, l’agente d’ERAR conclut que les demandeurs n’ont pas déposé de nouveaux éléments de preuve pour réfuter les conclusions de la CISR. Elle ajoute, « après avoir […] consulté la documentation récente, fiable et objective sur le Mexique, j’en arrive à la conclusion que monsieur et sa famille n’ont pas démontré qu’il y aurait plus qu’une simple possibilité qu’ils soient persécutés au Mexique ni qu’il y a des motifs sérieux de croire qu’ils seraient personnellement exposés au risque d’être soumis à la torture, à une menace à leur vie ou aux traitements ou peines cruels et inusités dans leur pays, le Mexique » (voir la décision de l’agente d’ERAR à la page 11 du dossier des demandeurs).

 

[8]               Le 15 novembre 2011, les demandeurs déposent une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire de la décision de l’agente d’ERAR.

 

III.       Législation

 

[9]               L’article 113 de la LIPR précise que :

113. Il est disposé de la demande comme il suit :

113. Consideration of an application for protection shall be as follows:

 

a) le demandeur d’asile débouté ne peut présenter que des éléments de preuve survenus depuis le rejet ou qui n’étaient alors pas normalement accessibles ou, s’ils l’étaient, qu’il n’était pas raisonnable, dans les circonstances, de s’attendre à ce qu’il les ait présentés au moment du rejet;

(a) an applicant whose claim to refugee protection has been rejected may present only new evidence that arose after the rejection or was not reasonably available, or that the applicant could not reasonably have been expected in the circumstances to have presented, at the time of the rejection;

 

b) une audience peut être tenue si le ministre l’estime requis

compte tenu des facteurs réglementaires;

(b) a hearing may be held if the Minister, on the basis of prescribed

factors, is of the opinion that a hearing is required;

 

c) s’agissant du demandeur non visé au paragraphe 112(3), sur la base des articles 96 à 98;

(c) in the case of an applicant not described in subsection 112(3), consideration shall be on the basis of sections 96 to 98;

 

d) s’agissant du demandeur visé au paragraphe 112(3), sur la base des éléments mentionnés à l’article 97 et, d’autre part :

(d) in the case of an applicant described in subsection 112(3), consideration shall be on the basis of the factors set out in section 97 and

 

(i) soit du fait que le demandeur interdit de territoire pour grande criminalité constitue un danger pour le public au Canada,

(i) in the case of an applicant for protection who is inadmissible on grounds of serious criminality, whether they are a danger to the public in Canada, or

 

(ii) soit, dans le cas de tout autre demandeur, du fait que la demande devrait être rejetée en raison de la nature et de la gravité de ses actes passés ou du danger qu’il constitue pour la sécurité du Canada.

(ii) in the case of any other applicant, whether the application should be refused because of the nature and severity of acts committed by the applicant or because of the danger that the applicant constitutes to the security of Canada.

 

IV.       Questions en litige et norme de contrôle

 

A.        Questions en litige

 

1.                  L’agente d’ERAR a-t-elle omis de considérer certains éléments de preuves importants au dossier?

 

2.                  L’agente d’ERAR a-t-elle tiré des conclusions de faits ne reposant pas sur des éléments de preuve au dossier?

 

3.                  L’agente d’ERAR a-t-elle erré en n’analysant pas la protection de l’État au Mexique?

 

B.        Norme de contrôle

 

[10]           Dans la décision Selduz c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 361, [2009] ACF no 471 aux paras 9 et 10, le juge Kelen écrit ce qui suit sur la norme de contrôle applicable aux décisions d’un agent d’ERAR:

[9]        La Cour a conclu que la norme de contrôle qui s'applique aux conclusions de fait d'un agent d'ERAR et aux questions mixtes de fait et de droit est la norme de la décision raisonnable : voir Erdogu c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2008 CF 407, [2008] ACF no 546 (QL), et Elezi c Canada, 2007 CF 240, 310 FTR 59. Dans Ramanathan c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2008 CF 843, 170 ACWS (3d) 140, au paragraphe 18, j'ai jugé que, lorsqu'un demandeur émet des doutes quant au fait qu'un agent d'ERAR a pris dûment en considération la totalité des éléments de preuve au moment de rendre une décision, la norme de contrôle qui s'applique est celle de la décision raisonnable.

 

[10]      Par conséquent, la Cour contrôlera les conclusions de l'agente d'ERAR en ayant égard à "la justification de la décision, à la transparence et à l'intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu'à l'appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit" (Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, 372 NR 1, au paragraphe 47). Cependant, si l'agente d'ERAR omet de motiver convenablement la décision de ne pas prendre en considération de nouveaux éléments de preuve pertinents, importants et probants, le tribunal considérera alors qu'une erreur de droit doit être contrôlée selon la norme de la décision correcte.

 

[11]           La norme de contrôle en l’espèce est celle de la décision raisonnable. Toutefois, comme le souligne le juge Kelen, une omission d’un élément de preuve important constitue une erreur de droit révisable selon la norme de la décision correcte.

 

[12]           La décision raisonnable « tient principalement à la justification de la décision, à la transparence et à l'intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu'à l'appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (voir Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] ACS no 9 au para 47).

 

V.        Position des parties

 

A.        Position des demandeurs

 

[13]           Les demandeurs prétendent que l’agente d’ERAR rejette les éléments de preuve au dossier sous prétexte qu’ils ne rencontrent pas la définition du paragraphe 113a) de la LIPR. Ce rejet porte également sur l’index du cartable national de documentation de la CISR du 29 septembre 2010, car son contenu ne serait pas pertinent au contexte de l’affaire. Les demandeurs soutiennent que ces conclusions sont déraisonnables puisque l’agente d’ERAR n’explique pas les motifs qui l’amènent à rejeter ces éléments de preuve présentés au soutien de leur demande.

 

[14]           Les demandeurs s’appuient sur les conclusions de la juge Sharlow dans l’arrêt Raza c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CAF 385, [2007] ACF no 1632 au para 12 [Raza] ainsi que celles du juge Mosley dans l’affaire Aragon c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 1309, [2008] ACF no 1710 aux paras 9 et 10 [Aragon], selon lesquelles « une demande d’ERAR peut requérir l’examen de quelques-uns ou de la totalité des mêmes points de fait ou de droit qu’une demande d’asile ».

 

[15]           D’autre part, les demandeurs allèguent que l’agente d’ERAR tire une conclusion de fait erronée sur le dépôt de la plainte présentée par M. Corona à la délégation de Texcoco. L’agente d’ERAR souligne dans sa décision que « [sur] la copie de la plainte on ne peut trouver d’informations pertinentes liant le demandeur au dit document. Le nom du demandeur n’apparaît sur aucune des deux pages soumises. Je constate ainsi qu’on ne peut conclure que cette preuve documentaire est liée au demandeur ». Les demandeurs affirment que la conclusion de l’agente d’ERAR est arbitraire et va à l’encontre de leurs soumissions selon lesquelles ils ont entrepris les démarches nécessaires afin d’obtenir une copie de la plainte en question.

 

[16]           Les demandeurs soutiennent enfin que l’agente d’ERAR néglige d’analyser la protection de l’État au Mexique, se fiant plutôt à la conclusion de la CISR contenue dans la décision du 8 mars 2010. Or, les demandeurs soutiennent  qu’un des documents auquel la CISR réfère dans son analyse de la protection de l’État n’est plus dans le cartable national de documentation sur l’État du Mexique. Le document en question ayant été retiré du cartable et puisque la protection de l’État demeure l’enjeu principal de leur demande, l’agente d’ERAR aurait commis une erreur de droit qui doit être révisée selon la norme de la décision correcte ou, subsidiairement, parce qu’une telle erreur est manifestement déraisonnable.

 

B.        Position du défendeur

 

[17]           Le défendeur soutient que l’agente d’ERAR analyse correctement le dossier de demande d’ERAR des demandeurs. L’agente d’ERAR n’accorde aucune force probante aux éléments de preuve soumis par les demandeurs. Il est de jurisprudence constante qu’il appartient à l’agente d’ERAR de juger de la valeur probante des éléments de preuve au dossier. Dans Malhi c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 802 au para 7 [Malhi], la Cour précise que «vu que l’évaluation de la preuve relève du rôle de l’agente d’ERAR, qui a le pouvoir discrétionnaire de s’appuyer sur les éléments de preuve qu’elle considère appropriés, l’intervention de la Cour n’est pas justifiée ». L’analyse de la valeur probante de la plainte déposée à la délégation de Texcoco est raisonnable en l’instance selon le défendeur qui souligne que l’agente d’ERAR pouvait conclure que M. Corona aurait pu se procurer une copie de sa plainte en s’adressant à son employeur d’autrefois, M. Mario Moncada.

 

[18]           Le défendeur allègue que le rejet de l’index du cartable national de documentation de la CISR se justifie puisque ces documents ne sont pas conformes au paragraphe113a) de la LIPR. Le défendeur souligne que la procédure de l’ERAR n’est « pas un appel ou encore, une demande de révision de la décision de la [CISR] étant donné que le législateur a clairement voulu limiter [les éléments de preuve présentables] dans le cadre d’une telle procédure » (voir Abdollahzadeh c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 1310 au para 26). Les demandeurs ne peuvent déposer les mêmes éléments de preuve une seconde fois en alléguant de nouveaux arguments devant l’agente d’ERAR.

 

[19]           Finalement, le défendeur soutient que les nouveaux éléments de preuves au dossier ne permettent pas de réfuter la conclusion de la CISR selon laquelle ils n’ont pas épuisé  tous leurs recours  au Mexique avant de réclamer la protection internationale.

 

VI.       Analyse

 

1.         L’agente d’ERAR a-t-elle omis de considérer certains éléments de preuves importants au dossier ?

 

[20]           L’agente d’ERAR n’a pas omis de considérer certains éléments de preuves importants au dossier.

 

[21]           Au paragraphe 32 de leurs soumissions écrites, les demandeurs reconnaissent que les documents objectifs  déposés à l’appui de leur demande furent présentés devant la CISR. Les demandeurs ne satisfont pas les critères du paragraphe 113a) de la LIPR. La Cour tient à rappeler que « la demande d'ERAR présentée par un demandeur d'asile débouté ne constitue pas un appel ni un réexamen de la décision de la [CISR] de rejeter une demande d'asile » (voir Raza précité au para 12). Conséquemment, la copie de la plainte ne peut être admissible aux termes du paragraphe 113a) de la LIPR. Les conclusions de fait erronées de l’agente d’ERAR sur le contenu du document ne peuvent en modifier l’admissibilité.

 

[22]           Les demandeurs prétendent aussi que la décision de l’agente d’ERAR de rejeter  l’index du cartable national de documentation de la CISR est déraisonnable. Les demandeurs précisent qu’ils ont eu recours à l’index afin de « démontrer que le seul élément de preuve objective invoqué par le commissaire de la [CISR] dans le cadre de son appréciation de la protection offerte par l’État mexicain aux citoyens qui souhaitent porter plainte fut supprimée du Cartable national de documentation sur le Mexique par la CISR en date du 29 septembre 2010 » (voir le paragraphe 31 du mémoire des faits et du droit des demandeurs joint au dossier des demandeurs). Ils citent également la juge Sharlow dans l’arrêt Raza précité, au para 12, où elle précise : « néanmoins une demande d’ERAR peut nécessiter l’examen de quelques-uns ou de la totalité des mêmes points de fait ou de droit qu’une demande d’asile ».

 

[23]            Bien que dans l’affaire Aragon précitée, le juge Mosley ait déterminé qu’il « ressort clairement d’une lecture attentive de la décision de la [CISR] comme de la décision de l’agent d’ERAR que ni la [CISR] ni l’agent n’ont véritablement cherché à savoir si la crainte du demandeur d’être persécuté pouvait être étayée par l’information objective sur la situation dans le pays en cause […] Il ne s’agit pas ici d’un cas où je serais disposé à appliquer la présomption selon laquelle un tribunal administratif a examiné l’ensemble de la preuve qu’il avait devant lui car plusieurs éléments indiquent le contraire ». Toutefois,  rien n’indique qu’en l’espèce, la CISR a omis de faire une telle analyse.

 

[24]           D’ailleurs, le juge Pinard, en révision judiciaire de la décision de la CISR, écrit que « le tribunal a trouvé que même en acceptant le fait que le demandeur ait porté plainte, ses efforts pour revendiquer la protection étatique avaient été insuffisants » (voir Corona c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 4 au para 12). La conclusion de la CISR repose principalement sur le fait que les demandeurs n’ont pas épuisé leurs recours internes avant de réclamer le statut de réfugié au Canada. Bien que la CISR ait basé une partie de sa décision sur la documentation de l’État du Mexique, sa conclusion ne tenait pas strictement sur ce seul élément de preuve. Puisqu’un décideur est présumé avoir tenu compte de tous les éléments de preuve dont il dispose (Florea c Canada (ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1993] ACF no 598 (CA)) et qu’il  lui appartient de juger de leur force probante (voir Malhi précité, au para 7), la conclusion de l’agente d’ERAR est raisonnable en l’espèce.

 

2.         L’agente d’ERAR a-t-elle tiré des conclusions de faits ne reposant pas sur des éléments de preuve au dossier ?

 

[25]           L’agente d’ERAR n’a pas tiré de conclusions de faits ne reposant pas sur des éléments de preuve au dossier.

 

[26]           La Cour constate que les demandeurs ont déposé une copie de la plainte de M. Corona comme élément de preuve au dossier. Toutefois, l’agente d’ERAR pouvait  raisonnablement conclure qu’il s’agit d’une « photocopie d’un document en espagnol. Le document n’est pas accompagné d’une traduction vers le français ou l’anglais […] le document est de piètre qualité et l’original du document n’est pas déposé au dossier » (voir la décision de l’agente d’ERAR à la page 9 du dossier des demandeurs).

 

[27]           Bien que les demandeurs soutiennent qu’il « [est] arbitraire d’affirmer que "le demandeur n’a pas entamé les démarches prescrites par son consulat pour obtenir une copie de la plainte" » (voir le paragraphe 38 du mémoire des faits et du droit des demandeurs joint au dossier des demandeurs), il est raisonnable de penser que M. Corona pouvait se procurer une copie de sa plainte auprès de son employeur. M. Corona a entrepris des démarches auprès du consulat du Mexique à Montréal pour obtenir une copie de sa plainte. Toutefois, il omet d’expliquer pourquoi il n’a pu obtenir copie auprès de son employeur. La Cour tient à rappeler qu’il « appartient au[x] demandeur[s] de faire la preuve du bien-fondé de [leurs] allégations » (voir Ally c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 445, [2008] ACF no 526 au para 23). À défaut par les demandeurs de  démontrer le bien-fondé de leurs allégations, l’agente d’ERAR peut décider qu’elle « accorde peu de valeur probante à ce document pour appuyer les allégations du demandeur » (voir la décision de l’agente d’ERAR à la page 9 du dossier des demandeurs), la Cour n’a pas à intervenir sur cette question puisque cette conclusion n’est pas déraisonnable en l’espèce. ni déterminante par rapport à la question de la suffisance de la protection de l’état au Mexique et qui plus est, le document en question est inadmissible aux termes de l’article 113a) de la LIPR.

 

3.         L’agente d’ERAR a-t-elle erré en ne faisant pas d’analyse sur la protection de l’État au Mexique ?

 

[28]           L’agente d’ERAR écrit ce qui suit au sujet de la protection de l’État :

« Le demandeur a l’obligation de demander la protection de l’état avant de demander la protection internationale. Lorsque l’État en question est démocratique, le demandeur ne peut pas se contenter de démontrer qu’il a rencontré les policiers sans succès. Le niveau de difficulté auquel le demandeur a du faire face pour demander la protection est directement proportionnel au degré de démocratie de l’État en question (…).

 

Aucun gouvernement ne peut garantir la protection de tous ses citoyens en tout temps. Il ne suffit pas, pour le demandeur, de démontrer que l’État n’a pas toujours réussi à protéger les personnes se trouvant dans une situation semblable. Lorsqu’un État contrôle efficacement son territoire, qu’il est doté d’une armée, de corps policiers et d’autorités civiles, et qu’il déploie des efforts sérieux pour protéger ses citoyens, le simple fait de ne pas y être toujours parvenu ne suffit pas à établir que l’État en est incapable.

 

Il y a une présomption que l’État est en mesure d’assurer une protection; pour ces raisons, il faut établir une preuve évidente et probante que l’État n’est pas en mesure ou n’a pas la volonté de fournir la protection ». Le demandeur ne l’a pas fait.

 

La preuve soumise au dossier ne relate pas de faits nouveaux qui se seraient déroulés depuis le rejet de la demande d’asile le 08 MAR 2010. De plus, le demandeur ne soumet pas de preuves permettant de réfuter les conclusions de la [CISR] qui a conclu à la Protection de l’État.» (voir la décision de l’agente d’ERAR à la page 11 du dossier des demandeurs)

 

[29]           Les demandeurs ont déposé 3 lettres à l’appui de leur demande d’ERAR (voir les lettres de Mme Abundia Jiménez Lechuga, Mme Sara Márquez Guzmán et Rafael Rodrigues Moreno aux pages 94 à 101 du dossier des demandeurs). Toutefois, comme l’agente d’ERAR l’indique dans sa décision, ces lettres n’établissent pas de faits nouveaux permettant d’accueillir la demande d’ERAR.

 

[30]           De plus, comme nous l’avons indiqué ci-dessus, l’exclusion d’un document du cartable national de documentation n’est pas déterminante en soi puisque la CISR a jugé que les demandeurs n’ont pas épuisé leur recours internes au Mexique avant de faire leur demande d’asile au Canada. Le juge Pinard s’est d’ailleurs prononcé sur la raisonnabilité de cette conclusion.

 

[31]           En conséquence, la Cour doit faire preuve de retenue face à la conclusion de l’agente d’ERAR qui, en l’espèce, fait partie des issues possibles sur la suffisance de la protection de l’État au Mexique.

 

VII.     Conclusion

 

[32]           La Cour rejette la demande de révision judiciaire des demandeurs et conclut que la décision de l’agente d’ERAR appartient «aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (voir Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 RCS 190 au para 47).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

JUGEMENT

LA COUR STATUE que

1.                  Cette demande de révision judiciaire est rejetée; et

2.                  Il n’y a aucune question d’intérêt général à certifier.

 

« André F.J. Scott »

Juge


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-8309-11

 

INTITULÉ :                                       FELIPE DE JESUS MORENO CORONA

                                                            CECILIA CORTES

                                                            c

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                            ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               29 mai 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE SCOTT

 

DATE DES MOTIFS :                      15 juin 2012

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Me Mylène Barrière

 

POUR LES DEMANDEURS

 

Me Michel Pépin

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Mylène Barrière, Avocate

Montréal (Québec)

POUR LES DEMANDEURS

 

 

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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