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Cour fédérale

 

Federal Court

 

Date : 20120625


Dossier : IMM-8519-11

Référence : 2012 CF 806

[traduction certifiée non révisée]

Toronto (Ontario), le 25 juin 2012

En présence de monsieur le juge Zinn

 

ENTRE :

 

 

MARKETA OLAHOVA

DENIS OLAH

ZANETA KECLIKOVA

JANA DIROVA

 

 

demandeurs

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Les demandeurs en l’instance sont deux sœurs, Marketa et Zaneta, et leurs enfants mineurs. Ils sont arrivés au Canada en provenance de la République tchèque avec l’autre fille de Zaneta qui, par la suite, s’est désistée de sa demande d’asile et est retournée en République tchèque. Ils se disent persécutés en raison de leur origine ethnique rome. Leurs parents, qui avaient déjà présenté une demande d’asile, sont retournés eux aussi en République tchèque après le rejet de leur demande.

 

[2]               La Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié a conclu que la protection de l’État était suffisante en République tchèque, et elle a rejeté leur demande d’asile.

 

[3]               La Commission a également conclu que les incidents relatés par les demandeurs ne constituaient pas de la persécution. Je constate toutefois qu’elle n’a pas appuyé sa conclusion d’une d’analyse de l’effet cumulatif des actes discriminatoires allégués. Elle n’a pas non plus examiné expressément si ces actes étaient graves au point de dépasser la simple discrimination. Je relève, à cet égard, une agression ayant laissé les enfants inconscients.

 

[4]               Les demandeurs soulèvent deux questions :

1.      la Commission a-t-elle appliqué le bon critère en matière de protection de l’État;

2.      la Commission a-t-elle mal interprété la preuve ou omis d’en tenir compte?

 

[5]               Je conviens avec les demandeurs que la première question appelle l’application de la norme de la décision correcte : voir Koky c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 1407, au para 19, et la jurisprudence qui y est citéet. La seconde doit être examinée en fonction de la norme de la raisonnabilité.

 

[6]               La Cour d’appel a statué qu’un demandeur « doit produire une preuve pertinente, digne de foi et convaincante qui démontre au juge des faits, selon la prépondérance des probabilités, que la protection accordée par l’État en question est insuffisante » : Flores Carillo c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CAF 94, au para 30. La protection n’a pas à être parfaite, mais la capacité de fournir une protection n’établit pas à elle seule la suffisance de la protection de l’État si la volonté de protection fait défaut. De la même façon, on ne fait pas d’équation entre les efforts de protection par eux‑mêmes et la protection, à moins qu’ils aient « véritablement engendré une protection adéquate de l’État » au plan opérationnel : voir Beharry c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 111, au para 9. 

 

[7]               Les demandeurs soutiennent, entre autres, que la Commission a axé son examen sur les efforts sérieux déployés par la République tchèque pour protéger les Roms, plutôt que sur la suffisance de la protection qui leur a été offerte par suite de ces « efforts sérieux ».

 

[8]               Le défendeur soutient à bon droit qu’il faut évaluer ce qu’a réellement fait la Commission et non laisser entendre au moyen de phrases tirées de la décision qu’elle n’aurait pas procédé comme il le fallait. Néanmoins, compte tenu des faits particuliers soumis à la cour, je ne suis pas convaincu que la Commission ait appliqué le bon critère. Elle a fait trop grand cas des efforts et des bonnes intentions de l’État et n’a pas assez examiné la mise en œuvre et le résultat de ces efforts et intentions.

 

[9]               Cet aspect problématique de l’examen de la Commission rejoint le deuxième argument des demandeurs, à savoir que la décision est déraisonnable parce qu’elle ne mentionne expressément qu’un document au sujet de la question de la protection des Roms en République tchèque, alors que les demandeurs en ont déposé de nombreux autres tendant à établir que les efforts et les intentions ne se traduisent pas réellement en protection. Bien que la Commission n’ait pas à citer tous et chacun des documents déposés devant elle, le déséquilibre exagéré entre l’unique document sur lequel elle s’est appuyée et les nombreux autres qui pointaient vers une autre conclusion que celle qu’elle a tirée fait en sorte que sa décision n’appartient pas « aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » : voir Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, au para 47.

 

[10]           En conséquence, la demande est accueillie. Aucune partie n’a soumis de question pour certification.


 

JUGEMENT

LA COUR STATUE que la demande est accueillie; la demande d’asile est renvoyée à la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et de la protection des réfugiés pour nouvel examen par un tribunal différemment constitué, et aucune question n’est certifiée.

 

« Russel W. Zinn »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Ghislaine Poitras, LL.L., Trad. a.



COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-8519-11

 

INTITULÉ :                                      MARKETA OLAHOVA ET AL c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :             Le 7 juin 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                            LE JUGE ZINN

 

DATE DES MOTIFS :                     Le 25 juin 2012

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Marjorie L. Hiley

 

                        POUR LES DEMANDEURS

Neal Samson

 

                           POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

FLEMINGDON COMMUNITY LEGAL SERVICES

Don Mills (Ontario)

 

                           POUR LES DEMANDEURS

MYLES J. KIRVAN

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

                           POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

 

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