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Date : 20120625

Dossier : IMM‑9651‑11

Référence : 2012 CF 813

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 25 juin 2012

En présence de monsieur le juge Zinn

 

ENTRE :

 

 

RODRIGO SEBBE

PATRICIA ANGELICA GOMES GONCALVES

 

 

 

demandeurs

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Les demandeurs cherchent à faire annuler la décision, en date du 17 novembre 2011, par laquelle un agent principal d’immigration a rejeté leur demande présentée en vertu du paragraphe 25(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27, afin d’obtenir la résidence permanente pour des motifs d’ordre humanitaire.

 

Contexte

[2]               Les demandeurs, Rodrigo Sebbe et son épouse, Patricia Angelica Gomes Goncalves, sont des citoyens du Brésil. Ils ont une fille de quatre ans, Leticia, qui est une citoyenne canadienne de naissance.

 

[3]               Les demandeurs sont arrivés au Canada en mars 2004 à titre de visiteurs. Après l’expiration de leurs visas de visiteur, ils sont demeurés au Canada illégalement en espérant qu’on ne les découvrirait pas; M. Sebbe a toutefois été arrêté et détenu par l’Agence des services frontaliers du Canada en juillet 2006.

 

[4]               Après l’arrestation et la détention, les demandeurs ont demandé l’asile, mais leur demande a été rejetée le 12 février 2008 par la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié.

 

[5]               En janvier 2007, avant que leur demande d’asile ne fasse l’objet d’une décision, les demandeurs ont présenté une demande de résidence permanente fondée sur des motifs d’ordre humanitaire. À titre de facteurs favorables, ils ont invoqué leur établissement au Canada et le fait que M. Sebbe avait travaillé comme stucateur et qu’il exploitait une entreprise de sous‑traitance. Au Canada, les demandeurs ont fréquenté une église et effectué du travail bénévole au sein de la collectivité. Ils ont fait état de difficultés liées à la criminalité au Brésil, affirmant que rien ne les attendait là‑bas à cause des menaces auxquelles M. Sebbe était exposé. En outre, à titre d’immigrants qui retournent au Brésil après un séjour à l’étranger, ils seraient considérés comme fortunés et risqueraient d’être victimes de kidnapping et de demandes de rançon. Les demandeurs ont plusieurs fois mis à jour leur demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire. Plus particulièrement, ils ont fait parvenir une copie du certificat de naissance de Leticia le 5 octobre 2009.

 

[6]               Les demandeurs ont également demandé un examen des risques avant renvoi (ERAR), mesure qui a été refusée par l’agent le 14 novembre 2011. Ce dernier a conclu que les demandeurs n’avaient pas réussi à réfuter la conclusion initiale de la Commission selon laquelle ils pouvaient bénéficier de la protection de l’État.

 

[7]               Le même agent a examiné la demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire et l’a refusée le 16 novembre 2011, après avoir conclu que l’établissement des demandeurs au Canada n’entraînerait pas pour eux de difficultés inhabituelles et injustifiées ou excessives s’ils devaient retourner au Brésil. Il a en outre conclu que la situation dans ce pays n’occasionnerait pas de difficultés pour les demandeurs et n’aurait pas sur Leticia une incidence négative équivalant à des difficultés inhabituelles et injustifiées ou excessives.

 

[8]               L’agent a mentionné le séjour de sept ans des demandeurs au Canada et il a conclu que ces derniers avaient bénéficié de l’application régulière de la loi dans le cadre du régime du droit d’asile. Les demandeurs s’étaient établis au Canada par suite de l’acquisition d’une résidence et avaient noué des liens au sein de la collectivité. L’agent a toutefois précisé qu’ils l’avaient fait en sachant qu’ils pourraient être renvoyés au Brésil à n’importe quel moment. L’agent a estimé que l’établissement des demandeurs au Canada n’était pas exceptionnel et ne justifiait pas une dispense pour des motifs d’ordre humanitaire.

 

[9]               L’agent a également signalé que les demandeurs n’ont aucune famille au Canada, mais que de nombreux membres de leur famille vivent au Brésil. Ces derniers pourraient les aider à se réétablir dans ce pays. Les difficultés auxquelles les demandeurs sont exposés parce qu’ils doivent se réinstaller au Brésil ne sont pas inhabituelles, injustifiées ou excessives et ne donnent pas à penser qu’une dispense fondée sur des motifs d’ordre humanitaire est nécessaire dans leur cas.

 

[10]           L’agent a estimé que Leticia jouirait de meilleures possibilités au Canada. Il n’était toutefois saisi d’aucun élément de preuve établissant qu’on ne pourrait répondre aux besoins fondamentaux de Leticia si elle retournait au Brésil avec ses parents. Comme ses parents, Leticia n’a aucune famille au Canada et irait vivre dans un pays où elle bénéficierait du soutien de nombreux membres de sa famille. Après avoir examiné les intérêts de Leticia, l’agent a conclu que celle‑ci ne subirait pas de difficultés inhabituelles et injustifiées ou excessives si elle devait se réétablir au Brésil.

 

[11]           Même si les demandeurs ont affirmé qu’ils couraient un risque au Brésil parce qu’ils seraient perçus comme fortunés, l’agent a conclu qu’ils n’avaient présenté aucune preuve susceptible d’établir l’existence de cette menace. Les demandeurs ont également dit qu’ils étaient exposés à des difficultés en raison des menaces de kidnapping, d’extorsion et de chômage mais, selon l’agent, tous les Brésiliens éprouvent ce genre de problèmes. Il ressortait de la preuve documentaire dont il disposait que le Brésil est une démocratie bénéficiant d’élections libres et justes et d’un pouvoir judiciaire indépendant. Les Brésiliens peuvent en outre intenter des poursuites judiciaires en cas de violation des droits de la personne. Même si le Brésil fait face à certains problèmes liés à la criminalité, le gouvernement s’efforce de protéger ses citoyens. L’agent a conclu que les risques que les demandeurs sont susceptibles de courir au Brésil sont généralisés et ne peuvent être assimilés à des difficultés inhabituelles et injustifiées ou excessives.

 

Questions en litige

[12]           À mon avis, la seule question grave soulevée en l’espèce est celle de savoir si l’analyse de l’intérêt supérieur de Leticia effectuée par l’agent est raisonnable. Cette question englobe celle de savoir si l’agent a appliqué le bon critère lorsqu’il a examiné l’intérêt supérieur de l’enfant et comment ce facteur a été apprécié pour rendre sa décision relative aux motifs d’ordre humanitaire.

 

Analyse

[13]           Je conviens avec le ministre que les demandeurs ont présenté peu d’éléments de preuve et d’observations quant à l’intérêt supérieur de leur fille. Cependant, les agents ont l’obligation de tenir compte de l’intérêt supérieur des enfants lorsqu’ils doivent trancher une demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire et qu’ils sont saisis d’éléments de preuve. Les enfants ne sont pas représentés de façon distincte dans ces instances et l’agent assume un rôle analogue à celui de parens patriae, et ce, particulièrement lorsque l’enfant est un citoyen canadien et que ses parents ne le sont pas.

 

[14]           L’analyse effectuée par l’agent quant à l’intérêt supérieur de Leticia tient à un seul paragraphe :

[traduction] Je constate que le demandeur a une fille qui est née au Canada le 13 novembre 2008. Même si la fille du demandeur pourrait bénéficier de meilleures possibilités sur le plan social et financier au Canada, la preuve dont je dispose n’est pas suffisante pour me permettre de penser que ses besoins fondamentaux ne seraient pas comblés au Brésil. Je remarque en outre que la fille du demandeur n’a aucune famille au Canada, à l’exception de sa mère et de son père. Les familles de ses deux parents résident au Brésil. En conséquence, j’arrive à la conclusion que la fille du demandeur n’ira pas vivre dans un pays où elle sera privée de soutien social et familial. J’ai examiné l’intérêt supérieur de la fille du demandeur ainsi que la situation personnelle de cette famille et je conclus que le demandeur n’a pas démontré que les conséquences générales de la réinstallation et du réétablissement dans son pays d’origine auraient sur l’enfant des répercussions négatives importantes qui équivaudraient à des difficultés inhabituelles et injustifiées ou excessives.

[Non souligné dans l’original.]

 

[15]           Lorsqu’il mentionne que [traduction] « la preuve dont je dispose n’est pas suffisante pour me permettre de penser que ses besoins fondamentaux ne seraient pas comblés au Brésil », l’agent incorpore dans l’analyse un critère qui ne devrait pas s’y trouver. Il semble affirmer que le fait de demeurer au Canada ne servira l’intérêt supérieur d’un enfant que si l’autre pays n’est pas en mesure de répondre aux « besoins fondamentaux » de ce dernier. Or, ce n’est ni le critère ni l’approche applicable pour déterminer l’intérêt supérieur d’un enfant. Comme le juge Russell l’a récemment indiqué dans Williams c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 166, au paragraphe 64 :

Il n’existe pas de norme minimale en matière de besoins fondamentaux qui satisferait au critère de l’intérêt supérieur. De plus, il n’existe pas de critère minimal en matière de difficultés suivant lequel à un certain point dans l’échelle des difficultés et seulement à ce point pourrait‑on considérer que l’intérêt supérieur de l’enfant est « compromis » au point de justifier une décision favorable. La question n’est pas celle de savoir si l’enfant « souffre assez » pour que l’on considère que son « intérêt supérieur » ne sera pas « respecté ». À cette étape initiale de l’analyse, la question à laquelle il faut répondre est la suivante : « en quoi consiste l’intérêt supérieur de l’enfant? »

 

[16]           Il ne fait aucun doute qu’on ne pourra jamais prétendre qu’il est dans l’intérêt supérieur d’un enfant de le placer dans un milieu où ses besoins fondamentaux ne sont pas comblés. Cependant, laisser entendre que l’intérêt de l’enfant à demeurer au Canada est neutralisé si l’autre pays offre un niveau de vie minimal est abusif. Cette approche escamote complètement la question à laquelle l’agent est chargé de répondre : Quel est l’intérêt supérieur de cet enfant? L’agent était tenu de décider en premier lieu s’il était dans l’intérêt supérieur de Leticia d’aller avec ses parents au Brésil, où elle n’avait jamais mis les pieds, ou plutôt de demeurer au Canada, où elle bénéficiait de [traduction] « meilleures possibilités sur le plan social et financier ». Ce n’est qu’après avoir clairement défini ce qui était dans l’intérêt supérieur de Leticia que l’agent pouvait apprécier ce résultat en tenant compte des autres éléments favorables et défavorables que révèle la demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire.

 

[17]           Je conviens avec le ministre que le simple fait d’employer le terme « difficultés » lorsqu’il est question d’enfants ne constitue pas une erreur susceptible de contrôle. Cependant, il doit ressortir des motifs, « [...] en lisant la décision dans son ensemble que l’agent a appliqué le bon critère et procédé à une analyse appropriée » : Segura c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 894, au paragraphe 29.

 

[18]           Dans la présente affaire, l’agent affirme que les besoins fondamentaux de Leticia seront comblés et qu’il n’y aura sur elle aucune incidence négative importante équivalant à des difficultés inhabituelles et injustifiées ou excessives. Manifestement, l’agent s’est demandé quelles difficultés Leticia risquait de rencontrer au Brésil. L’analyse qu’il a faite de son intérêt supérieur ne permet pas de cerner un quelconque élément donnant à penser qu’il a analysé de manière approfondie quel était cet intérêt supérieur. Comme l’a déclaré le juge Décary dans l’arrêt Hawthorne c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CAF 475, au paragraphe 9 : « [...] le concept de "difficultés injustifiées" n’est pas approprié lorsqu’il s’agit d’évaluer les difficultés auxquelles s’exposent les enfants innocents. Les enfants méritent rarement, sinon jamais, d’être exposés à des difficultés. »

 

[19]           Ces erreurs rendent la décision déraisonnable et la demande doit être renvoyée. Je tiens toutefois à commenter brièvement deux autres points qui me préoccupent.

 

[20]           Lorsqu’il évalue le risque que courraient les demandeurs en retournant au Brésil, l’agent mentionne ce qui suit : [traduction] « Je reconnais que le Brésil éprouve certaines difficultés en raison de l’escalade de la criminalité, mais c’est un risque auquel la population en général est exposée. » Cette analyse est peut‑être appropriée lorsqu’il est question de retourner les deux demandeurs adultes dans leur pays d’origine. Cependant, l’agent ne tient nullement compte de ce fait dans son examen de l’intérêt supérieur de Leticia. Cette dernière est une citoyenne canadienne qui n’est jamais allée au Brésil. Est‑il dans son intérêt supérieur d’accompagner ses parents dans un pays qui [traduction] « éprouve certaines difficultés en raison de l’escalade de la criminalité »?

 

[21]           Le deuxième point qui me trouble touche aux observations formulées par l’agent dans son analyse de la question de l’établissement. Il écrit : [traduction] « Je reconnais que le demandeur a pris des mesures concrètes pour s’établir au Canada, mais je remarque qu’il a bénéficié de l’application régulière de la loi dans le cadre des programmes pour les réfugiés et qu’on lui a donc offert les outils et les possibilités nécessaires pour acquérir un certain degré d’établissement au sein de la société canadienne ». Franchement, je vois mal comment on peut affirmer que l’application régulière de la loi dont le Canada fait bénéficier les demandeurs d’asile offre à ces derniers [traduction] « les outils et les possibilités » nécessaires pour s’établir au Canada. Je suppose que l’agent entend par là que, comme le processus d’application régulière de la loi a pris un certain temps, les demandeurs ont eu l’occasion de s’établir à un certain degré. Il est possible de souscrire à une telle déclaration. Cependant, la présente affaire commande une analyse et une évaluation du degré d’établissement des demandeurs et de la mesure dans laquelle cet élément joue en faveur de l’octroi d’une dispense. L’agent ne doit pas simplement faire abstraction des mesures prises par les demandeurs et en attribuer le mérite au régime canadien de l’immigration et de la protection des réfugiés pour leur avoir donné le temps de prendre ces mesures; il doit reconnaître l’initiative dont les demandeurs ont fait preuve à cet égard. Il doit également se demander si l’interruption de cet établissement milite en faveur de l’octroi de la dispense.

 

[22]           L’agent a en outre écrit ce qui suit : [traduction] « De plus, le demandeur a sciemment acheté divers biens, dont une maison, en sachant pertinemment qu’il était un demandeur d’asile débouté et qu’il était possible qu’il doive retourner au Brésil ».

 

[23]           L’agent a tiré une conclusion abusive de la preuve relative à l’établissement présentée par les demandeurs. Doit‑on faire abstraction de chaque placement, chaque achat, chaque entreprise mise sur pied, chaque résidence acquise, etc., au motif que ces biens ont été acquis alors même que l’on savait devoir peut‑être y renoncer ou les abandonner? L’agent laisse‑t‑il entendre que les Canadiens préfèrent que les demandeurs d’asile déboutés ne fassent rien pour réussir et pour subvenir à leurs besoins pendant qu’ils sont au Canada? Laisse‑t‑il entendre que les mesures, quelles qu’elles soient, prises pour réussir seront dénuées de valeur parce que les demandeurs savaient qu’ils pouvaient faire l’objet d’un renvoi? À mon avis, les réponses à ces questions montrent qu’il n’est nullement pertinent de se demander si les demandeurs savaient qu’ils pouvaient faire l’objet d’une mesure de renvoi lorsqu’ils ont pris des mesures pour s’établir, avec les membres de leur famille, au Canada. Bien que l’on puisse avancer que les demandeurs, en s’établissant au Canada, utilisent une voie détournée pour obtenir l’entrée au Canada, ce point de vue ne peut être fondé que si les demandeurs n’ont aucun réel espoir de demeurer au pays. Dans la presque totalité de ces cas, les demandeurs conservent l’espoir de réussir, en fin de compte, à demeurer ici. Compte tenu de la période que passent la plupart de ces demandeurs au Canada, il n’est pas réaliste de supposer qu’ils vont mettre leur vie en suspens dans l’attente d’une décision définitive.

 

[24]           Il ne s’agit pas de se demander ce qu’ils savaient au moment où ils ont pris ces mesures, mais plutôt quelles étaient ces mesures, si elles ont été prises régulièrement et quelles seront les conséquences s’ils doivent abandonner leurs biens.

 

[25]           Aucune des parties n’a proposé de question aux fins de certification.

JUGEMENT

 

LA COUR STATUE que la présente demande est accueillie, que la demande de dispense en vue d’obtenir le traitement de la demande au Canada pour des motifs d’ordre humanitaire est renvoyée à un agent différent pour qu’il rende une décision à cet égard, qu’il est loisible aux demandeurs de présenter d’autres éléments de preuve et d’autres observations, et qu’aucune question n’est certifiée.

 

 

« Russel W. Zinn »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Sandra de Azevedo, LL.B.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                    IMM‑9651‑11

 

INTITULÉ :                                                  RODRIGO SEBBE ET AL c.
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                          Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                         Le 18 juin 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                        LE JUGE ZINN

 

DATE DES MOTIFS :                                 Le 25 juin 2012

 

 

COMPARUTIONS :

 

Steven Tress

 

POUR LES DEMANDEURS

 

Lucan Gregory

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

STEVEN TRESS

Avocat

Toronto (Ontario)

 

POUR LES DEMANDEURS

 

MYLES J. KIRVAN

Sous‑procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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