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Cour fédérale

 

Federal Court

 

Date : 20120524

Dossier: T-1229-11

Référence : 2012 CF 593

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 24 mai 2012

En présence de monsieur le juge Pinard

ENTRE :

GULNAZ ZARQA KHAN

 

demanderesse

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

 

[1]               Le 26 juillet 2011, Gulnaz Zarqa Khan (la demanderesse), une citoyenne du Pakistan, a interjeté le présent appel de la décision du juge de la citoyenneté Philip M. Gaynor en vertu du paragraphe 14(5) de la Loi sur la citoyenneté, LRC 1985, ch C­29 (la Loi). Le juge de la citoyenneté a rejeté la demande de citoyenneté de la demanderesse parce qu’elle ne respectait pas l’exigence prévue à l’alinéa 5(1)e) de la Loi : la demanderesse n’avait pas une connaissance suffisante du Canada et des responsabilités et avantages conférés par la citoyenneté canadienne.

 

[2]               Dans sa lettre envoyée en application du paragraphe 14(3) de la Loi afin d’informer la demanderesse de sa décision, le juge de la citoyenneté a conclu que la demanderesse n’avait pas une connaissance suffisante du Canada ni des responsabilités et des avantages conférés par la citoyenneté canadienne, ce qu’exige l’alinéa 5(1)e) de la Loi. Cette conclusion était fondée sur la piètre performance de la demanderesse à l’examen de citoyenneté effectué à l’audience : elle n’a réussi à répondre correctement qu’à 9 questions sur 20. Le juge de la citoyenneté estimait que la note de passage était de 15 sur 20.

 

[3]               Puisque la demanderesse n’avait pas satisfait à l’exigence en matière de connaissance prévue par la Loi, le juge de la citoyenneté s’est par la suite demandé, en vertu du paragraphe 15(1) de la Loi, s’il devrait exercer le pouvoir discrétionnaire que les paragraphes 5(3) et (4) de la Loi lui confèrent. Cependant, aucun élément de preuve témoignant de telles circonstances spéciales n’a été présenté à l’audience.

 

[4]               La demande de citoyenneté de la demanderesse a donc été rejetée, et on l’a invitée à présenter une autre demande ou à interjeter appel de la décision.

 

* * * * * * * *

 

[5]               La demanderesse semble d’abord soutenir qu’elle n’a pas eu droit à une audience équitable parce qu’on lui aurait fait subir [traduction] « une entrevue musclée ». Puisque la demanderesse n’a pas demandé que l’entrevue devant le juge de la citoyenneté soit suspendue, la nervosité alléguée de la demanderesse et l’intimidation qu’elle aurait subie ne constituent pas un manquement à l’équité procédurale vu les circonstances particulières de l’espèce.

 

[6]               L’autre question que la présente demande soulève est de savoir si la décision du juge de la citoyenneté est déraisonnable, et ce, bien qu’en l’espèce il s’agisse d’un appel en matière de citoyenneté et non d’un contrôle judiciaire (Akan c Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration (1999), 170 F.T.R. 158, paragraphe 9 [Akan], citant Lam c Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration (1999), 164 F.T.R. 177; Arif c Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, 2007 CF 557, paragraphe 6 [Arif]).

 

[7]               La conclusion du juge de la citoyenneté quant à savoir si la demanderesse avait une connaissance suffisante du Canada constitue essentiellement une question de fait et il faut donc lui accorder une grande retenue; il faut faire preuve de la même retenue envers la décision du juge de la citoyenneté de ne pas exercer son pouvoir discrétionnaire suivant les paragraphes 5(3) et (4) de la Loi (Arif, précitée, paragraphes 7 et 8; Zahra c Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, 2009 CF 444, paragraphe 9). La question est donc de savoir si le juge de la citoyenneté a fondé sa décision sur des conclusions de fait erronées tirées de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments de preuve dont il disposait (Arif, précitée, paragraphe 9).

 

[8]               Bien que la Cour puisse comprendre la situation de la demanderesse et les nombreux problèmes qu’elle a dû surmonter, comme l’a dit le juge Pierre Blais, il « n’en demeure pas moins que l’acquisition de la citoyenneté canadienne constitue un privilège enviable et que, pour exercer pleinement les droits et obligations afférents à la citoyenneté, il est normal que l’on exige que l’intéressé possède des connaissances de base du Canada » (Arif, précitée, paragraphe 27). La demanderesse a obtenu 9 sur 20 à son examen de citoyenneté, elle n’a donc pas montré qu’elle connaissait suffisamment le Canada et, par conséquent, elle ne satisfait pas à l’exigence de la Loi. La décision du juge de la citoyenneté était donc raisonnable, et la demanderesse n’a pas établi que l’intervention de la Cour est justifiée : la Cour ne peut pas accueillir un appel en matière de citoyenneté sur le simple fondement d’allégations de stress ou de nervosité pendant l’audience.

 

[9]               En outre, la demanderesse n’a pas établi que le juge de la citoyenneté avait commis une erreur en refusant d’exercer le pouvoir discrétionnaire que la Loi lui confère. Comme je l’ai dit précédemment, les conclusions et les recommandations faites en vertu des paragraphes 5(3) et (4) de la Loi sont purement discrétionnaires et il faut faire preuve d’une grande retenue envers la décision du juge de la citoyenneté (Akan, précitée, paragraphe 11). Le juge de la citoyenneté a expliqué dans la lettre adressée à la demanderesse que la preuve dont il avait été saisi ne justifiait pas qu’il recommande l’exercice du pouvoir discrétionnaire prévu aux paragraphes 5(3) et (4), et la preuve dont la Cour est saisie aujourd’hui ne montre pas que cette conclusion était déraisonnable (voir Arif, paragraphe 22, et Re Koo, [1993] 1 CF 286 (C.F. 1re inst.)).

 

[10]           La demanderesse devrait plutôt envisager l’autre option que le juge de la citoyenneté a proposé dans sa décision, soit de présenter une nouvelle demande de citoyenneté lorsqu’elle aura une connaissance suffisante du Canada et des responsabilités et avantages de la citoyenneté canadienne.

 

* * * * * * * *

 

[11]           Pour les motifs exposés ci­dessus, l’appel sera rejeté, sans dépens.

 


 

JUGEMENT

 

            L’appel interjeté contre la décision du juge de la citoyenneté Philip M. Gaynor, qui a rejeté la demande de citoyenneté de la demanderesse parce qu’elle ne satisfaisait pas à l’exigence prévue à l’alinéa 5(1)e) de la Loi sur la citoyenneté, LRC 1985, ch C­29, est rejeté, sans dépens.

 

 

« Yvon Pinard »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Jean-François Martin, LL.B., M.A.Trad.jur.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        T-1229-11

 

INTITULÉ :                                      GULNAZ ZARQA KHAN c MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :             Le 24 avril 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                            Le juge Pinard

 

DATE DES MOTIFS :                     Le 24 mai 2012

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Gulnaz Zarqa Khan                             LA DEMANDERESSE POUR SON PROPRE COMPTE

 

Neal Samson                                       POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

LA DEMANDERESSE POUR SON PROPRE COMPTE

 

 

Myles J. Kirvan                                               POUR LE DÉFENDEUR

Sous‑procureur général du Canada

 

 

 

 

 

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