Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 


Date : 20120529

Dossier : T-1355-11

Référence : 2012 CF 654

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 29 mai 2012

En présence de monsieur le juge Barnes

 

ENTRE :

 

JUSTIN GERMA

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               Le demandeur, Justin Germa, sollicite l’autorisation de se désister de la présente instance en application de l’article 334.3 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106 (les Règles). Le défendeur s’oppose à la requête, apparemment parce qu’un désistement pourrait nuire aux intérêts des autres membres du groupe proposé. Le demandeur a demandé que la présente requête soit jugée sur la foi du dossier. Après avoir pris connaissance des documents que les parties ont déposés, je suis arrivé à la conclusion que la requête peut être examinée conformément à l’article 369 des Règles et que la tenue d’une audience n’est pas justifiée.

 

Les faits à l’origine du litige

[2]               La présente action découle d’un confinement aux cellules à l’Établissement de Kent à Agassiz, en Colombie-Britannique, entre le 7 janvier 2010 et le 18 janvier 2010. Au cours du confinement aux cellules, les droits des détenus auraient apparemment été violés en raison de fouilles illégales, d’extractions de cellules et de l’emploi d’une force excessive.

 

[3]               Le 19 août 2011, M. Germa a engagé le présent recours collectif envisagé pour le compte de tous les détenus qui ont été visés par le confinement aux cellules. Le juge en chef a ordonné que la présente instance fasse l’objet d’une gestion spéciale le 29 novembre 2011. Le demandeur a présenté une requête en vue de faire autoriser l’action à titre de recours collectif et le défendeur a répondu par une requête visant à radier l’action au motif qu’elle ne révélait aucune cause d’action viable. Avant que ces requêtes puissent être entendues, le demandeur a manifesté l’intention de se désister de la présente instance afin de participer à un recours collectif engagé le 6 janvier 2012 par un autre détenu, Jeffrey Ewert, devant la Cour suprême de la Colombie‑Britannique et dans lequel une réparation presque identique est demandée (l’action Ewert). L’avocat des demandeurs dans les deux actions est le même.

 

[4]               Le 17 janvier 2012, un recours collectif a été engagé au nom d’un troisième détenu, Trevor Bell. Ce recours a également été intenté devant la Cour suprême de la Colombie‑Britannique au moyen d’une déclaration comportant des allégations qui chevauchent pour l’essentiel celles des deux autres instances. M. Bell est représenté par un avocat différent. Il ne semble pas y avoir encore d’entente ou de règlement concernant la question de savoir laquelle des deux actions engagées devant la Cour suprême de la Colombie-Britannique devrait avoir priorité.

 

[5]               Le 21 mars 2012, le ministre a présenté une requête visant à faire radier l’action Ewert pour des motifs liés à la compétence et au fait que cette requête constituait une procédure abusive. Le juge R.B.T. Goepel a rejeté la requête du ministre le 30 avril 2012, concluant que la Cour suprême de la Colombie-Britannique avait compétence et que, vu la requête pendante de M. Germa en vue de se désister de la présente instance, il n’était pas abusif de permettre la poursuite de l’action Ewert. Cette ordonnance a été rendue sous réserve du droit du ministre de présenter à nouveau la requête si M. Germa n’était pas autorisé à se désister de la présente instance.

 

La question en litige

[6]               Le demandeur devrait-il être autorisé à se désister de la présente instance conformément à l’article 334.3 des Règles?

 

Analyse

[7]               M. Germa affirme dans son affidavit qu’il n’est plus utile pour lui d’agir comme demandeur représentant dans le recours collectif parce qu’il a été transféré à l’Établissement de Springhill, en Nouvelle-Écosse. Il précise qu’il est satisfait de savoir que sa demande sera examinée dans le contexte de l’action Ewert, et il demande l’autorisation de se désister de la présente instance.

 

[8]               Le défendeur conteste la requête de M. Germa, soutenant qu’il est prématuré de mettre fin à la présente instance parce qu’il pourrait y avoir appel de la décision du juge Goepel. En d’autres termes, jusqu’à ce que l’incertitude entourant l’action Ewert soit réglée, la présente requête devrait être rejetée ou ajournée.

 

[9]               Le défendeur ajoute qu’il faut tenir compte des intérêts des [traduction] « membres éventuels du groupe proposé » dans la présente requête, notamment quant à la possibilité que des moyens de contestation fondés sur la prescription soient soulevés si l’action Ewert est finalement rejetée en appel.

 

[10]           L’argument du défendeur quant à la protection des intérêts juridiques des membres du groupe proposé est quelque peu inhabituel, eu égard aux efforts que le défendeur a déployés pour radier tant l’action Ewert que la présente action.

 

[11]           Il n’y a aucun problème de prescription évident qui empêcherait l’examen des demandes formulées dans l’action Ewert. Le fait que certaines demandes pourraient maintenant être prescrites ne me semble nullement important, tant et aussi longtemps que l’action Ewert se poursuit. Il se pourrait que des questions liées à la prescription se posent dans l’action Bell, mais cet aspect sera probablement examiné lorsque la Cour suprême de la Colombie-Britannique sera appelée à déterminer laquelle des deux actions devrait être poursuivie. Il n’appartient pas à la Cour fédérale de se préoccuper des questions de procédure susceptibles de se poser devant la Cour suprême de la Colombie-Britannique : voir Campbell c Canada (PG), 2009 CF 30, au paragraphe 28, [2009] 4 RCF 211. 

 

[12]           La présente instance n’en est également qu’à ses débuts et il n’y a aucune préoccupation majeure au sujet de dépens engagés inutilement.

 

[13]           Le seul fondement de la requête du défendeur visant à radier l’action Ewert était l’existence de la présente action. Le défendeur a soutenu qu’une instance collatérale devant la Cour fédérale privait la Cour suprême de la Colombie-Britannique de sa compétence et donnait lieu à un abus de procédure. Selon le juge Goepel, ces arguments deviendront théoriques s’il y a désistement de la présente instance. En fait, ce n’est qu’en maintenant la présente instance en vigueur que le défendeur peut invoquer un motif au soutien de la radiation de l’action Ewert. Si le défendeur atteignait ce résultat, il présenterait probablement à nouveau sa requête en radiation de la présente action au motif que celle‑ci ne révèle aucune cause d’action, stratégie qui, si elle est couronnée de succès, priverait le groupe de tout recours.

 

[14]           Dans ces circonstances, il ne me semble pas souhaitable de contraindre une partie réticente à poursuivre une action qui ne l’intéresse plus. En l’absence de préoccupations au sujet d’un préjudice important qui serait causé aux intérêts des membres éventuels du groupe proposé, il convient de laisser à M. Germa et à son avocat le soin de déterminer le tribunal devant lequel un recours collectif devrait être engagé.

 

[15]           En conséquence, la présente requête en autorisation de désistement de la présente action est accueillie sans frais.

 

 


ORDONNANCE

 

LA COUR ORDONNE que la requête en autorisation de désistement de la présente action soit accueillie sans frais pour l’une ou l’autre des parties.

 

 

« R.L. Barnes »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                   T-1355-11

 

INTITULÉ :                                                 GERMA c PGC

 

REQUÊTE JUGÉE SUR DOSSIER À OTTAWA (ONTARIO) CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 369 DES RÈGLES

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :            LE JUGE BARNES

 

DATE DES MOTIFS :                                Le 29 mai 2012

 

 

COMPARUTIONS :

 

Tonia Grace

 

                            POUR LE DEMANDEUR

Banafsheh Sokhansanj

 

                            POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Conroy & Company

Avocats

Abbotsford (C.-B.)

 

                            POUR LE DEMANDEUR

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Vancouver (C.-B.)

 

                             POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.