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Date : 20120528

Dossier : IMM-7225-11

Référence : 2012 CF 649

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Toronto (Ontario), le 28 mai 2012

En présence de madame la juge Tremblay-Lamer

 

 

ENTRE :

 

LYNETTE ALMINA FREDERICK

 

 

 

demanderesse

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

           MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire présentée en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la Loi], relativement à une décision rendue en date du 6 octobre 2011 par la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié [la Commission], selon laquelle la demanderesse n’a ni qualité de réfugié au sens de la Convention ni celle de personne à protéger.

 

LE CONTEXTE FACTUEL

 

[2]               La demanderesse est une citoyenne de Saint‑Vincent née le 15 septembre 1963 qui a peu d’instruction. Elle demande l’asile parce qu’elle craint son ancien petit ami, Glendon Lewis [M. Lewis]. Comme travail, elle vendait des fruits à Saint‑Vincent et à Saint‑Martin.

 

[3]               Elle allègue que M. Lewis l’a battue si violemment le 18 mai 2008 qu’elle a dû être hospitalisée durant trois jours. À sa sortie de l’hôpital, elle s’est installée chez un ami pendant quelques jours, puis elle est allée à Saint‑Martin. Craignant que M. Lewis puisse la retrouver à cet endroit, elle s’est enfuie au Canada, où elle est arrivée le 3 décembre 2008.

 

[4]               Elle a demandé l’asile le 29 janvier 2010. Sa demande a été instruite le 3 octobre 2011 et la Commission a exposé ses motifs oralement à la fin de l’audience; les motifs écrits ont été signés trois jours plus tard.

 

LA DÉCISION FAISANT L’OBJET DU PRÉSENT CONTRÔLE

 

[5]               La Commission a conclu que la demanderesse n’avait pas établi de façon crédible les principaux éléments de sa demande d’asile. Plus particulièrement, elle a estimé qu’elle ne disposait pas d’une preuve crédible démontrant que M. Lewis existait, qu’il avait battu et menacé la demanderesse ou qu’il était toujours à sa recherche aujourd’hui. La Commission n’a accordé aucun poids à la copie du rapport d’hôpital produite par la demanderesse parce qu’un logo ou le nom exact de l’hôpital n’y figuraient pas et qu’il contenait de l’encre bleue alors qu’il s’agissait manifestement d’une photocopie. De plus, la Commission avait des doutes au sujet de l’authenticité de ce document parce que la demanderesse avait déclaré dans son témoignage qu’une autre personne l’avait obtenu pour elle et l’avait apporté au Canada, mais qu’elle était incapable de se rappeler le nom de cette personne ou d’expliquer comment un tiers avait pu obtenir ses dossiers médicaux confidentiels sans avoir à démontrer qu’elle l’avait autorisé à cette fin.

 

[6]               La Commission a conclu également qu’elle n’était pas en mesure de déterminer si la demanderesse se trouvait réellement à Saint‑Vincent à la date à laquelle elle affirmait que son ancien petit ami l’avait battue, à cause des renseignements contradictoires contenus dans son Formulaire de renseignements personnels [le FRP] et dans son témoignage au sujet des périodes où elle se trouvait à Saint‑Vincent et des périodes où elle se trouvait à Saint‑Martin. La demanderesse a donné des réponses contradictoires même après que la Commission eut suspendu brièvement l’audience pour permettre à son conseil de passer le FRP en revue avec elle dans le but d’essayer de clarifier où elle était à différentes dates.

 

[7]               En ce qui concerne les lettres produites par la demanderesse pour corroborer sa demande, la Commission a reconnu qu’elles corroboraient la présumée agression commise par M. Lewis. Elle a toutefois noté qu’aucune de ces lettres, qui étaient pourtant assez récentes au moment de l’audience, ne mentionnait que M. Lewis essayait de la retrouver depuis son départ.

 

[8]               À peu près à la moitié de l’audience, et malgré le fait qu’elle avait déclaré que son FRP était complet, vrai et exact, la demanderesse a informé la Commission que sa fille aînée, Handra Jackson [Handra], n’était pas à Tortula comme elle l’avait écrit dans son FRP, mais au Canada et qu’elle avait déposé une demande d’asile distincte. Handra avait aussi écrit dans sa demande que M. Lewis était l’auteur du préjudice, et sa mère et elle étaient représentées par le même conseil. Or, celui‑ci n’a jamais informé la Commission que les deux demandes étaient liées ou n’a jamais demandé à ce qu’elles soient jointes, et aucune preuve provenant d’Handra, une lettre ou son témoignage par exemple, n’a été fournie afin d’appuyer la demande d’asile de la demanderesse. Le conseil a laissé entendre que la Commission pouvait alors décider de joindre les demandes, mais la Commission a refusé de le faire parce que la demanderesse avait déjà témoigné pendant environ deux heures. La Commission a tiré une conclusion défavorable importante au regard de la crédibilité de la demanderesse du défaut de celle‑ci de l’informer plus tôt au sujet de l’arrivée d’Handra ou de la demande d’asile de cette dernière.

 

[9]               La Commission a tiré une autre conclusion défavorable du temps qu’il avait fallu à la demanderesse pour demander l’asile. Malgré le fait qu’un ami lui avait suggéré de demander l’asile peu de temps après son arrivée au Canada le 3 décembre 2008, la demanderesse a attendu environ 16 mois pour le faire. La Commission a rejeté son explication voulant qu’elle n’ait pas présenté une demande d’asile parce qu’elle avait peur d’être renvoyée à Saint‑Vincent.

 

[10]           La Commission a fait remarquer également que la demanderesse n’avait jamais signalé l’incident du 18 mai 2008 et a conclu que, compte tenu de ce fait et des circonstances relatives à sa demande d’asile, la demanderesse n’avait pas réussi à réfuter la présomption de protection de l’État. Subsidiairement, la Commission a conclu que la demanderesse avait une possibilité de refuge intérieur [la PRI] à Georgetown ou à Fancy, soulignant que la seule raison pour laquelle la demanderesse avait dit qu’elle ne pourrait pas chercher refuge à Saint‑Vincent était le fait que ce pays était très petit.

 

[11]           En conséquence, la Commission a statué que la demanderesse n’avait ni qualité de réfugié au sens de la Convention ni celle de personne à protéger.

 

LES QUESTIONS EN LITIGE

1)      La Commission a-t-elle commis une erreur en refusant d’ajourner l’audience de la demanderesse afin de joindre sa demande et celle de sa fille?

2)      La conclusion relative à la crédibilité est‑elle raisonnable?

3)      La conclusion relative à la PRI est‑elle raisonnable?

 

LA NORME DE CONTRÔLE

 

[12]           La Cour a examiné la question particulière du défaut de la Commission de joindre deux demandes d’asile conformément au paragraphe 49(1) des Règles dans Randhawa c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 485, 312 FTR 179. Dans cette décision, la norme de contrôle de la décision correcte a été appliquée parce que la Cour a considéré que la question concernait l’interprétation des Règles adoptées en vertu de la Loi.

 

[13]           La décision Randhawa a cependant été rendue avant Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 RCS 190, où la Cour suprême du Canada a statué que l’interprétation de sa loi constitutive ou de règlements connexes par un organisme est assujettie à la norme de contrôle de la raisonnabilité. La Cour suprême s’est récemment penchée sur cette conclusion et a affirmé que l’interprétation de sa loi constitutive par un organisme commandera toujours la déférence, sauf si elle relève d’une catégorie de questions à laquelle la norme de la décision correcte s’applique, par exemple les questions constitutionnelles ou les questions de droit d’importance générale (voir Alberta (Information and Privacy Commissioner) c Alberta Teachers’ Association, 2011 CSC 61, [2011] 3 RCS 654). Par conséquent, j’appliquerai la norme de la raisonnabilité à la première question.

 

[14]           La conclusion de la Commission concernant la crédibilité appelle la déférence et est donc assujettie à la norme de la raisonnabilité (voir Mejia c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 354, 2009 CarswellNat 898). Il en est de même de sa conclusion relative à la PRI (voir Castillo Mejia c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 530, 2010 CarswellNat 1386). Comme cette dernière conclusion est suffisante pour disposer de la présente demande, il n’est pas nécessaire que j’examine la conclusion relative à la protection de l’État.

 

ANALYSE

 

1.   La Commission a-t-elle commis une erreur en refusant d’ajourner l’audience de la demanderesse afin de joindre sa demande et celle de sa fille?

 

 

[15]           La procédure de la Commission est régie par les Règles de la Section de la protection des réfugiés, DORS/2002‑228. Aux termes du paragraphe 49(1) de ces règles, « [l]a Section joint la demande d’asile du demandeur d’asile à celle de son époux ou conjoint de fait, son enfant, son père, sa mère, son frère, sa sœur, son petit‑fils, sa petite‑fille, son grand‑père et sa grand‑mère ». S’appuyant sur cette disposition, la demanderesse soutient que la Commission a commis une erreur susceptible de contrôle en n’ajournant pas l’audience et en ne joignant pas les demandes d’asile.

 

[16]           Pour sa part, le défendeur attire l’attention de la Cour sur l’alinéa 69b) des Règles, qui permet à la Commission de modifier une exigence d’une règle. Citant Chiwara c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 188, 2011 CarswellNat 352, il avance que cette disposition permet à la Commission de déroger à la règle obligatoire prévue au paragraphe 49(1) des Règles, pourvu qu’elle explique pourquoi elle le fait. Il fait valoir que, comme les motifs de la Commission sont clairs, le refus d’ajourner l’audience et de joindre les demandes d’asile était raisonnable. La Commission ne pouvait pas raisonnablement joindre les demandes car elle aurait dû alors soit préserver le témoignage fait jusque‑là par la demanderesse même si cela aurait été inéquitable pour Handra, soit supprimer les deux heures de témoignage du dossier et nuire considérablement à sa capacité d’apprécier la crédibilité de la demanderesse. Compte tenu de cette situation difficile, ainsi que du défaut de la demanderesse de porter la demande d’Handra à l’attention de la Commission en temps utile, le défendeur prétend qu’il était raisonnable que celle‑ci refuse de joindre les demandes d’asile et de reporter le reste de l’audience de la demanderesse jusqu’à ce que la demande d’asile d’Handra soit prête à être entendue.

 

[17]           Je partage l’avis du défendeur. Handra et la demanderesse étaient représentées par le même conseil, lequel avait de l’expérience en matière d’immigration et savait que les deux dossiers étaient liés. On peut supposer que le conseil était au courant du préjudice éventuel qui pouvait être causé si les deux demandes d’asile n’étaient pas jointes, et il aurait dû informer la Commission du fait que celles‑ci devaient être jointes. Il ne l’a toutefois pas fait et, lorsque la Commission lui a demandé pourquoi il n’avait pas joint les demandes, il a répondu : [traduction] « Probablement parce que je ne connaissais pas le contenu des demandes au regard de la préparation de la cliente en vue de l’audience. » Il a répété à maintes reprises que la Commission pouvait alors joindre les demandes.

 

[18]           Cette réponse est insatisfaisante. La demanderesse et Handra n’ont pas le même nom de famille et elles ont présenté leur demande d’asile indépendamment l’une de l’autre et à des dates différentes, de sorte que la Commission n’était pas en mesure de savoir que leurs demandes étaient liées, sauf si les demandeures d’asile, ou l’une d’elles, le lui avaient dit. Dans ces circonstances, il incombait au conseil de la demanderesse d’informer la Commission que les demandes devaient être jointes et de le faire avant l’audience; un conseil expérimenté comme celui qui représentait la demanderesse à l’audience aurait dû savoir également que les allégations concernant l’équité procédurale – comme celles relatives au défaut de la Commission de joindre les demandes d’asile – devaient être avancées à la première occasion (voir Mohammadian c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2000] 3 CF 371, 185 FTR 144). Le conseil n’ayant pas informé la Commission que les dossiers auraient dû être joints et la demanderesse ne l’ayant pas fait non plus même si elle avait modifié son FRP à de nombreuses reprises, ils ne peuvent pas se plaindre maintenant. Bien que la demanderesse ait laissé entendre à l’audience qu’elle ne devrait pas être tenue responsable du défaut de son conseil, la Cour a statué que, « en règle générale, il ne faut pas dissocier le comportement de l’avocat de celui de son client. L’avocat est le mandataire de son client et, aussi sévère que cela puisse paraître, si le client a retenu les services d’un avocat médiocre, il doit en subir les conséquences » (voir Jouzichin c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1994), 52 ACWS (3d) 157, 1994 CarswellNat 1592). Comme le défendeur l’a souligné, joindre les deux demandes à cette étape de l’audience aurait causé un retard considérable et l’audience aurait pu être inéquitable pour Handra.

 

[19]           Cette question a été examinée dans Randhawa, où mon ancien collègue le juge Blais, maintenant juge en chef de la Cour d’appel fédérale, a statué ce qui suit :

La règle de jonction automatique implique que les autorités soient au courant du lien de parenté. Si ni le demandeur ni sa belle-fille, qui sont arrivés au Canada séparément et ont déposé leurs demandes avec au moins un an d’écart, n’ont mentionné le lien qui les unissait, comment les autorités pouvaient-elles procéder à la jonction des instances?

 

D’ailleurs, le demandeur aurait pu prendre l’initiative à la suite de l’arrivée de sa petite-fille au Canada, et demander la jonction de leurs demandes, ce qu’il n’a pas fait. En effet, en l’absence de jonction automatique, la règle 50 prévoit [qu’une partie peut demander que des demandes d’asile soient jointes].

 

Le lien de parenté ayant été mentionné pour la première fois lors de l’audience du demandeur devant le tribunal, soit après l’audience de sa belle-fille et de sa petite-fille, il était trop tard pour joindre les demandes. [Aux paragraphes 27 à 29.]

 

[20]           Ces remarques s’appliquent également en l’espèce. En conséquence, je conclus que le refus de la Commission de joindre les deux demandes d’asile était raisonnable.

 

2.         La conclusion relative à la crédibilité est‑elle raisonnable?

[21]           La demanderesse soutient que la conclusion relative à la crédibilité était déraisonnable. Plus particulièrement, elle affirme que la Commission n’a pas tenu compte de la preuve qu’elle avait produite à l’audience et qui était contenue dans son FRP selon laquelle des amis et des membres de sa famille lui ont dit que M. Lewis était toujours à sa recherche. Selon elle, la Commission n’a pas tenu compte non plus de la preuve établissant que M. Lewis avait agressé sa fille en 2010.

 

[22]           La demanderesse conteste également le fait que la Commission a rejeté son rapport d’hôpital. Elle prétend que la Commission était tenue de faire référence aux éléments externes sur lesquels elle s’appuyée pour conclure que le rapport était frauduleux, citant Ramalingam c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1998), 77 ACWS (3d) 156, [1998] ACF no 10.

 

[23]           Enfin, la demanderesse soutient que la Commission n’a pas tenu compte du rapport d’un médecin canadien, qui confirmait que ses cicatrices étaient compatibles avec ses allégations.

 

[24]           Le défendeur soutient que la conclusion relative à la crédibilité était raisonnable. Il fait valoir en particulier que la Commission a raisonnablement écarté la preuve relative à l’agression dont Handra aurait été victime car il n’en était pas fait mention dans le FRP de la demanderesse, malgré le fait que celui‑ci avait été modifié à l’audience. Selon le défendeur, cet aspect de la conclusion relative à la crédibilité est particulièrement raisonnable étant donné l’absence d’un témoignage corroborant d’Handra, même si celle‑ci est au Canada et est représentée par le même conseil. Je suis d’accord avec le défendeur.

 

[25]           La Commission n’a pas mentionné le rapport médical canadien, mais ce rapport ne corroborait pas les allégations de la demanderesse, mais seulement qu’elle avait des cicatrices causées à une date inconnue qui auraient pu être attribuables à des coups assenés avec un objet peu tranchant. En ce qui a trait au rapport médical provenant de Saint‑Vincent, la Commission a, contrairement à la prétention de la demanderesse, exprimé plusieurs réserves concernant notamment le nom différent de l’hôpital. Il n’était pas déraisonnable d’écarter ce rapport. En outre, le rapport d’hôpital de Saint‑Vincent n’est pas du tout pertinent au regard de la question de savoir si M. Lewis est toujours à la recherche de la demanderesse – ce qui constitue l’élément central de sa demande d’asile.

 

[26]           La Commission a raisonnablement écarté la preuve relative à l’agression qui aurait été commise contre Handra. La Cour a affirmé à maintes reprises qu’il est raisonnable de tirer une conclusion défavorable concernant la crédibilité de l’absence de renseignements importants dans le FRP (voir, par exemple, Esteban Zeferino et al c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 456, [2011] ACF no 644). En l’espèce, non seulement la demanderesse a omis de mentionner cette agression, même si elle a modifié son FRP à plusieurs reprises, mais elle n’a pas produit un témoignage corroborant d’Handra malgré le fait que celle‑ci est au Canada et est représentée par le même conseil, lequel a admis à l’audience qu’il savait que les deux demandes d’asile étaient liées. Je ne peux pas reprocher à la Commission de ne pas avoir ajouté foi aux allégations dans ces circonstances.

 

[27]           La conclusion défavorable concernant la crédibilité est étayée en outre par le fait qu’aucune des lettres produites par la demanderesse n’indique que M. Lewis est à sa recherche, même si elles ont été écrites peu de temps avant l’audience. De plus, la demanderesse n’a pas expliqué pourquoi elle avait attendu aussi longtemps avant de demander l’asile. En conséquence, j’estime que la conclusion relative à la crédibilité est raisonnable.

 

3.         La conclusion relative à la PRI est‑elle raisonnable?

 

[28]           La demanderesse soutient que la Commission n’a pas tenu compte de son témoignage selon lequel Saint‑Vincent est un si petit pays que M. Lewis pourrait la retrouver n’importe où. Elle a aussi dit qu’elle craignait même qu’il la retrouve à Saint‑Martin.

 

[29]           Le défendeur cite plusieurs décisions portant sur le critère qui sert à déterminer si un demandeur d’asile a une PRI. Il soutient que la demanderesse n’a pas réussi à démontrer qu’elle serait en danger à Georgetown ou à Fancy. Il souligne que la Commission a estimé qu’elle ne disposait pas d’une preuve crédible suffisante établissant que M. Lewis était toujours à la recherche de la demanderesse.

 

[30]           Je suis aussi de cet avis. Saint‑Vincent est un petit pays à l’égard duquel il est relativement facile, pour les demandeurs d’asile, d’établir qu’il n’existe pas une PRI, mais la conclusion de la Commission concernant la question de la PRI est inextricablement liée à son autre conclusion selon laquelle la demanderesse n’était pas crédible. La seule preuve que la demanderesse a produite au regard de cette question est son témoignage et, même si la Commission l’avait jugé crédible, il était mitigé. Il est vrai que la demanderesse a déclaré dans son témoignage que Saint‑Vincent est un petit pays, mais, lorsque la Commission lui a demandé si elle pourrait s’installer à Fancy ou à Georgetown, elle s’est contentée de dire qu’elle n’était jamais allée à Fancy et qu’il y avait longtemps qu’elle était allée à Georgetown.

 

[31]           Cette preuve est nettement insuffisante pour établir l’existence d’un danger pour la demanderesse dans l’une ou l’autre de ces villes. La conclusion relative à la PRI est donc raisonnable. Comme l’existence d’une PRI est déterminante au regard de la demande d’asile de la demanderesse, il n’est pas nécessaire que j’examine la conclusion relative à la protection de l’État (voir Guzman Lopez c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 990, 2010 CarswellNat 4409).

 

[32]           Pour ces motifs, la demande est rejetée.

 


JUGEMENT

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

 

 

« Danièle Tremblay-Lamer »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-7225-11

 

INTITULÉ :                                      LYNETTE ALMINA FREDERICK c

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                            ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :             Le 24 mai 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                            LA JUGE TREMBLAY-LAMER

 

DATE DES MOTIFS :                     Le 28 mai 2012

 

 

COMPARUTIONS :

 

Viken G. Artinian

 

                            POUR LA DEMANDERESSE

 

Thomas Cormie

                            POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Allen et associés

Montréal (Québec)

 

                            POUR LA DEMANDERESSE

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

                            POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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