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Date : 20120719

Dossier : IMM-9721-11

Référence : 2012 CF 900

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Montréal (Québec), le 19 juillet 2012

En présence de monsieur le juge Shore

 

 

ENTRE :

 

HUSSAIN, TAHIR PASHA

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

Aperçu

[1]               Pour obtenir un visa d’étudiant, le demandeur aurait dû présenter évidemment une preuve capable de convaincre l’agent des visas qu’il quitterait le Canada à la fin de la période autorisée. Plus précisément, il n’a pas produit un plan d’études, un élément pourtant essentiel pour démontrer pourquoi il voulait venir au Canada.

 

[2]               Dans les circonstances, l’agent des visas n’avait pas et n’a pas l’obligation de tenir une entrevue. Comme la juge Judith Snider l’a dit dans Ayatollahi c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CFPI 248, 229 FTR 98 :

[21]      À mon avis, l’omission de l’agent des visas de faire part de ses préoccupations au demandeur n’a pas donné lieu à un manquement à l’équité procédurale. Fait plus important, il incombait au demandeur de présenter ses meilleurs éléments de preuve. Or, il ne l’a pas fait; plus précisément, il n’a pas donné d’explications au sujet des études qu’il se proposait de faire, si ce n’est pour dire qu’il voulait aider son père à son retour. Étant donné la charge qui incombait au demandeur, je crois qu’il aurait été avec raison loisible à l’agent de refuser la demande pour ce seul motif. [Non souligné dans l’original.]

 

(La Cour se réfère également à Duong c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CF 834, et Danioko c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 479, 292 FTR 1.) Ainsi, « [f]ait plus important, il incombait au demandeur de présenter ses meilleurs éléments de preuve ».

 

[3]               Comme la Cour d’appel fédérale l’a affirmé dans un arrêt unanime rendu par les juges Létourneau, Rothstein et McDonald, Wong c Canada [1999] ACF no 1049 : « Nous sommes fermement convaincus que l’agent des visas a compétence, même dès la première demande d’un tel visa, pour examiner l’ensemble des circonstances, y compris l’objectif à long terme du demandeur. »

 

I. Introduction

[4]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire fondée sur le paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la LIPR], visant la décision d’un agent des visas du Haut‑commissariat du Canada à Islamabad, au Pakistan, de rejeter, en date du 29 novembre 2011, la demande de visa d’étudiant du demandeur.

 

II. Le contexte

[5]               Le demandeur, M. Tahir Pasha Hussain, est un citoyen du Pakistan âgé de 22 ans.

 

[6]               Le demandeur a présenté une demande d’admission au programme de génie électrique du Humber College à Toronto. Ce programme d’une durée de deux ans devait commencer en janvier 2012.

 

[7]               Le demandeur a présenté une demande de visa d’étudiant, qui a été rejetée le 29 novembre 2011.

 

III. La décision faisant l’objet du présent contrôle

[8]               Après avoir examiné la preuve produite par le demandeur, l’agent des visas n’était pas convaincu que ce dernier quitterait le Canada à la fin de la période demandée, en raison de ses antécédents de voyage et du but de sa visite.

 

IV. La question en litige

[9]               L’agent des visas a-t-il commis une erreur en déterminant que le demandeur ne satisfaisait pas aux conditions d’obtention d’un permis d’études?

 


V. Les dispositions législatives pertinentes

[10]           Les dispositions suivantes de la LIPR sont pertinentes en l’espèce :

Visa et documents

 

 

11.      (1) L’étranger doit, préalablement à son entrée au Canada, demander à l’agent les visa et autres documents requis par règlement. L’agent peut les délivrer sur preuve, à la suite d’un contrôle, que l’étranger n’est pas interdit de territoire et se conforme à la présente loi.

 

 

 

Obligation à l’entrée au Canada

 

20.      (1) L’étranger non visé à l’article 19 qui cherche à entrer au Canada ou à y séjourner est tenu de prouver :

 

 

a) pour devenir un résident permanent, qu’il détient les visa ou autres documents réglementaires et vient s’y établir en permanence;

 

 

 

 

b) pour devenir un résident temporaire, qu’il détient les visa ou autres documents requis par règlement et aura quitté le Canada à la fin de la période de séjour autorisée.

Application before entering Canada

 

11.      (1) A foreign national must, before entering Canada, apply to an officer for a visa or for any other document required by the regulations. The visa or document may be issued if, following an examination, the officer is satisfied that the foreign national is not inadmissible and meets the requirements of this Act.

 

Obligation on entry

 

20.      (1) Every foreign national, other than a foreign national referred to in section 19, who seeks to enter or remain in Canada must establish,

 

(a) to become a permanent resident, that they hold the visa or other document required under the regulations and have come to Canada in order to establish permanent residence; and

 

(b) to become a temporary resident, that they hold the visa or other document required under the regulations and will leave Canada by the end of the period authorized for their stay.

[11]           Les dispositions suivantes du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002‑227 [le Règlement], sont pertinentes en l’espèce :

VISA DE RÉSIDENT TEMPORAIRE

 

Délivrance

 

179. L’agent délivre un visa de résident temporaire à l’étranger si, à l’issue d’un contrôle, les éléments suivants sont établis :

 

 

a) l’étranger en a fait, conformément au présent règlement, la demande au titre de la catégorie des visiteurs, des travailleurs ou des étudiants;

 

b) il quittera le Canada à la fin de la période de séjour autorisée qui lui est applicable au titre de la section 2;

 

c) il est titulaire d’un passeport ou autre document qui lui permet d’entrer dans le pays qui l’a délivré ou dans un autre pays;

 

d) il se conforme aux exigences applicables à cette catégorie;

 

e) il n’est pas interdit de territoire;

 

f) il satisfait aux exigences prévues à l’article 30.

 

DÉLIVRANCE DU PERMIS D’ÉTUDES

 

Permis d’études

 

216.      (1) Sous réserve des paragraphes (2) et (3), l’agent délivre un permis d’études à l’étranger si, à l’issue d’un contrôle, les éléments suivants sont établis :

 

 

a) l’étranger a demandé un permis d’études conformément à la présente partie;

 

b) il quittera le Canada à la fin de la période de séjour qui lui est applicable au titre de la section 2 de la partie 9;

 

c) il remplit les exigences prévues à la présente partie;

 

d) il satisfait aux exigences prévues à l’article 30.

 

e) [Abrogé, DORS/2004‑167, art. 59]

TEMPORARY RESIDENT VISA

 

Issuance

 

179. An officer shall issue a temporary resident visa to a foreign national if, following an examination, it is established that the foreign national

 

(a) has applied in accordance with these Regulations for a temporary resident visa as a member of the visitor, worker or student class;

 

(b) will leave Canada by the end of the period authorized for their stay under Division 2;

 

 

(c) holds a passport or other document that they may use to enter the country that issued it or another country;

 

 

(d) meets the requirements applicable to that class;

 

 

(e) is not inadmissible; and

 

 

(f) meets the requirements of section 30.

 

ISSUANCE OF STUDY PERMITS

 

Study permits

 

216.      (1) Subject to subsections (2) and (3), an officer shall issue a study permit to a foreign national if, following an examination, it is established that the foreign national

(a) applied for it in accordance with this Part;

 

 

 

(b) will leave Canada by the end of the period authorized for their stay under Division 2 of Part 9;

 

(c) meets the requirements of this Part; and

 

(d) meets the requirements of section 30;

 

(e) [Repealed, SOR/2004-167, s. 59]

 

VI. Les thèses des parties

[12]           Le demandeur soutient qu’il n’y a aucun lien logique entre ses antécédents de voyage et la possibilité qu’il reste au Canada illégalement. Selon lui, les permis d’études ne devraient pas être refusés sur la foi de généralisations et l’agent des visas aurait dû tenir une audience afin de lui permettre d’apaiser les craintes que sa demande pouvait susciter.

 

[13]           Le défendeur soutient que les notes que l’agent des visas a versées dans le Système de traitement informatisé des dossiers d’immigration [le STIDI] appuient sa conclusion. Selon lui, le demandeur devait prouver qu’il n’était pas un immigrant et qu’il quitterait le Canada à la fin de la période autorisée. 

 

[14]           De plus, le défendeur affirme qu’aucune disposition législative n’exige qu’une audience soit tenue pour dissiper les doutes découlant de la preuve.

 

[15]           Le défendeur affirme également que le demandeur n’a pas produit un plan d’études et que les antécédents de voyage d’une personne sont un facteur pertinent.

 

VII. Analyse

[16]           Il est bien établi en droit que la décision de délivrer une autorisation d’entrer au Canada pour une période temporaire est susceptible de contrôle selon la norme de la raisonnabilité, sauf si le décideur n’a pas respecté les principes d’équité procédurale (Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 RCS 190; Ji c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2001 CFPI 786).

 

[17]           Il faut tenir compte du contexte pour déterminer si le demandeur a eu droit à l’équité procédurale; l’obligation d’équité procédurale peut varier selon les circonstances de chaque cas (Baker c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 RCS 817).

 

[18]           Le demandeur prétend que les motifs donnés par l’agent ne sont pas suffisants. La Cour n’est pas de cet avis. La Cour suprême du Canada a dit, au sujet du caractère suffisant des motifs, que ceux‑ci « doivent être examinés en corrélation avec le résultat et ils doivent permettre de savoir si ce dernier fait partie des issues possibles » (Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c Terre‑Neuve‑et‑Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, [2011] 3 RCS 708, au paragraphe 14).

 

[19]           Dans une lettre adressée au demandeur le 29 novembre 2011, l’agent des visas a posé des questions au sujet des « antécédents de voyage » et du « but de la visite » et a conclu que le demandeur ne quitterait pas le Canada à la fin de son séjour. Dans les notes qu’il a versées dans le STIDI, il a écrit :

[traduction] Vérification du SSOBL terminée. Homme célibataire âgé de 22 ans, suivra un programme de technologie électrique d’une durée de 2,5 ans au Humber Institute de Toronto. 1 frère ayant obtenu le droit d’asile au Canada; a obtenu le droit d’établissement à titre de TR de catégorie 1 en 2008; NAI trouvé. Produits : LE, certificat de police, IELTS (7.0). Le demandeur suit la dernière année d’un programme de génie électronique menant à l’obtention d’un B. Sc. à l’Université Sir Syed. Les examens finaux auront lieu en décembre 2011. Selon son dossier, ses résultats sont satisfaisants jusqu’à maintenant. Fonds : parents; fonds OK. Aucun plan d’études produit. Les raisons pour lesquelles il veut suivre un programme similaire au Canada immédiatement après avoir obtenu un baccalauréat au Pakistan n’ont pas été données. Pas de ressources financières personnelles. Pas de preuve d’un voyage précédent. Tout bien pesé, pas convaincu de la BF ou des liens. Demande rejetée. [Non souligné dans l’original.]

 

(Dossier du tribunal [DT], à la page 13.)

 

[20]           Bien qu’elles soient brèves, les notes du STIDI semblent indiquer que le demandeur a été informé des raisons du rejet de sa demande de visa. Comme la Cour l’a dit, les notes électroniques constituent une partie d’une décision administrative (Wang c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 1298, 302 FTR 127, au paragraphe 19).

 

[21]           La Cour reconnaît que l’agent s’est contredit au début lorsque, après avoir convenu que des fonds avaient été fournis par les parents du demandeur, il a indiqué que celui‑ci ne disposait pas de ressources financières personnelles. Cette conclusion n’a pas en soi une incidence défavorable sur la décision. En fait, la demande de visa du demandeur n’était pas fondée sur ses actifs personnels et sa situation financière, comme l’indiquait une lettre datée du 29 novembre 2011. D’autres motifs détaillés expliquant le rejet de la demande ont aussi été donnés.

 

[22]           Le demandeur propose une interprétation qui amènerait la Cour à conclure qu’une entrevue est nécessaire en raison de l’emploi du terme « contrôle » au paragraphe 216(1) du Règlement.

 

[23]           L’agent des visas n’avait pas l’obligation de tenir une entrevue. La Cour a affirmé dans Ayatollahi c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CFPI 248, 229 FTR 98 :

[21]      À mon avis, l’omission de l’agent des visas de faire part de ses préoccupations au demandeur n’a pas donné lieu à un manquement à l’équité procédurale. Fait plus important, il incombait au demandeur de présenter ses meilleurs éléments de preuve. Or, il ne l’a pas fait; plus précisément, il n’a pas donné d’explications au sujet des études qu’il se proposait de faire, si ce n’est pour dire qu’il voulait aider son père à son retour. Étant donné la charge qui incombait au demandeur, je crois qu’il aurait été avec raison loisible à l’agent de refuser la demande pour ce seul motif. [Non souligné dans l’original.]

 

(La Cour s’est référé également à Duong c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CF 834, et Danioko c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 479, 292 FTR 1.)

 

[24]           Le principal problème en l’espèce réside dans le fait que le demandeur n’a pas produit une preuve visant à convaincre l’agent des visas qu’il quitterait le Canada à la fin de la période autorisée. Il n’a pas produit un plan d’études, un élément fondamental pour démontrer le but de son voyage au Canada.

 

[25]           Par conséquent, la Cour conclut, compte tenu des antécédents de voyage du demandeur, que l’agent des visas n’a pas tiré une conclusion défavorable sans avoir apprécié la preuve.

 

VIII. Conclusion

[26]           Pour tous les motifs exposés ci‑dessus, la demande de contrôle judiciaire du demandeur est rejetée.


 

JUGEMENT

 

LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire du demandeur soit rejetée. L’affaire ne soulève aucune question de portée générale devant être certifiée.

 

 

 

 

« Michel M.J. Shore »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-9721-11

 

INTITULÉ :                                      Hussain, Tahir PashA c

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :             Le 18 juillet 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                            LE JUGE SHORE

 

DATE DES MOTIFS :                     Le 19 juillet 2012

 

 

COMPARUTIONS :

 

Jean-François Bertrand

 

                            POUR LE DEMANDEUR

 

Mario Blanchard

                            POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Bertrand, Deslauriers

Montréal (Québec)

 

                            POUR LE DEMANDEUR

 

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

                            POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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