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Date : 20120814

Dossier : T-655-11

Référence : 2012 CF 994

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Vancouver (Colombie‑Britannique), le 14 août 2012

En présence de monsieur le juge Martineau

 

 

ENTRE :

 

JAMES PETER TAYLOR

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

           MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Le demandeur, qui se représente lui‑même, conteste la légalité d’une décision prise le 21 mars 2011 au nom du défendeur par un fonctionnaire de l’Agence du revenu du Canada (l’ARC), lequel a refusé la demande d’allègement présentée par le demandeur en application du paragraphe 220(3.1) de la Loi de l’impôt sur le revenu, LRC 1985, c 1 (5e suppl.), et ses modifications (la LIR), à l’égard de la nouvelle cotisation relative à sa déclaration de revenus touchant 2005.

 

[2]               Le pouvoir ministériel d’accorder un allègement au contribuable est étendu et la décision de renoncer à un montant de pénalité ou d’intérêts, ou de l’annuler, est de nature discrétionnaire. Le paragraphe 220(3.1) de la LIR est ainsi rédigé :

220 (3.1) Le ministre peut, au plus tard le jour qui suit de dix années civiles la fin de l’année d’imposition d’un contribuable ou de l’exercice d’une société de personnes ou sur demande du contribuable ou de la société de personnes faite au plus tard ce jour-là, renoncer à tout ou partie d’un montant de pénalité ou d’intérêts payable par ailleurs par le contribuable ou la société de personnes en application de la présente loi pour cette année d’imposition ou cet exercice, ou l’annuler en tout ou en partie. Malgré les paragraphes 152(4) à (5), le ministre établit les cotisations voulues concernant les intérêts et pénalités payables par le contribuable ou la société de personnes pour tenir compte de pareille annulation.

 

220 (3.1) The Minister may, on or before the day that is ten calendar years after the end of a taxation year of a taxpayer (or in the case of a partnership, a fiscal period of the partnership) or on application by the taxpayer or partnership on or before that day, waive or cancel all or any portion of any penalty or interest otherwise payable under this Act by the taxpayer or partnership in respect of that taxation year or fiscal period, and notwithstanding subsections 152(4) to (5), any assessment of the interest and penalties payable by the taxpayer or partnership shall be made that is necessary to take into account the cancellation of the penalty or interest.

 

[3]               La principale question que doit trancher la Cour est celle de savoir si le refus de renoncer à l’arriéré au titre de l’intérêt (4 000,36 $) et de la pénalité (3 517,29 $) imposés au demandeur relativement à son année d’imposition 2005, ou de l’annuler, appartient aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit. Il est admis que la norme de contrôle applicable à ce genre de décision est celle du caractère raisonnable selon l’arrêt Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, au paragraphe 47, tandis que la norme de la décision correcte s’applique aux questions visant l’équité procédurale.

 

[4]               Comme l’a énoncé la Cour dans la décision Kapil c Canada (Agence du revenu), 2011 CF 1373, au paragraphe 20 :

En droit, la Cour n’a pas compétence pour ordonner au ministre de renoncer aux taxes, aux pénalités et aux intérêts débiteurs. La compétence de la Cour se limite à ordonner au ministre de réexaminer en détail ses décisions de renoncer aux taxes et aux pénalités et intérêts afférents. Le demandeur doit donc comprendre que, même si la Cour se prononçait en sa faveur, il n’aurait pas automatiquement droit à une renonciation et à un remboursement. La Cour doit s’en tenir à la question de savoir si l’exercice du pouvoir discrétionnaire du ministre lorsqu’il a rejeté les demandes de renonciation était légitime, et non substituer sa décision à celle du ministre : Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, [2009] 1 RCS 339.

 

 

[5]               Il faut également se rappeler que chaque demande d’allègement présentée par un contribuable doit être examinée en fonction des faits qui lui sont propres. Cela étant dit, la Circulaire d’information 07‑1, Dispositions d’allègement pour les contribuables [la IC 07‑1], est d’une certaine utilité pour déterminer quel genre d’affaires sont susceptibles de justifier l’exercice du large pouvoir discrétionnaire conféré au paragraphe 220 (3.1) de la LIR :

23. Le ministre peut accorder un allègement de l’application des pénalités et des intérêts lorsque les situations suivantes sont présentes et qu’elles justifient l’incapacité du contribuable à s’acquitter de l’obligation ou de l’exigence fiscale en cause :

 

a. circonstances exceptionnelles;

 

b. actions de l’ARC;

 

c. incapacité de payer ou difficultés financières.

23. The Minister may grant relief from the application of penalty and interest where the following types of situations exist and justify a taxpayer’s inability to satisfy a tax obligation or requirement at issue:

 

 

(a)  extraordinary circumstances

 

(b)  actions of the CRA

 

(c)  inability to pay or financial hardship.

 

 

[6]               La IC 07‑1 précise que les « circonstances exceptionnelles » englobent ce qui suit :

25. Les pénalités et les intérêts peuvent faire l’objet d’une renonciation ou d’une annulation, en tout ou en partie, lorsqu’ils découlent de circonstances indépendantes de la volonté du contribuable. Les circonstances exceptionnelles qui peuvent avoir empêché un contribuable d’effectuer un paiement lorsqu’il était dû, de produire une déclaration à temps ou de s’acquitter de toute autre obligation que lui impose la Loi sont les suivantes, sans être exhaustives :

 

a. une catastrophe naturelle ou causée par l’homme, telle qu’une inondation ou un incendie;

 

b. des troubles publics ou l’interruption de services, tels qu’une grève des postes;

 

c. une maladie grave ou un accident grave;

 

d. des troubles émotifs sévères ou une souffrance morale grave, tels qu’un décès dans la famille immédiate.

 

25. Penalties and interest may be waived or cancelled in whole or in part where they result from circumstances beyond a taxpayer’s control. Extraordinary circumstances that may have prevented a taxpayer from making a payment when due, filing a return on time, or otherwise complying with an obligation under the Act include, but are not limited to, the following examples:

 

 

 

 

(a) natural or man-made disasters such as, flood or fire;

 

 

 

(b) civil disturbances or disruptions in services, such as a postal strike;

 

(c) a serious illness or accident; or

 

(d) serious emotional or mental distress, such as death in the immediate family.

 

[7]               Après avoir examiné l’ensemble de la preuve et étudié de manière approfondie les motifs du refus à la lumière du dossier et des critères pertinents, et après avoir lu les mémoires des parties et leurs plaidoiries, je ne vois aucune raison, en droit, d’intervenir dans la présente affaire. Je conclus que, dans l’ensemble, la décision attaquée est raisonnable et qu’il n’y a eu aucun manquement à l’équité procédurale. Je vais d’abord replacer l’affaire dans son contexte pour ensuite me prononcer sur les arguments avancés par le demandeur.

 

[8]               En l’espèce, le demandeur a fait l’objet d’une cotisation visant de l’intérêt et une pénalité par suite de son omission de déclarer, avant le 29 octobre 2006 – soit six mois après l’expiration du délai prévu par la loi dans lequel il devait produire sa déclaration de revenus pour 2005 (qui a initialement été produite le 4 septembre 2006) –, un gain en capital de 282 490,00 $ au titre d’une vente d’actions. Le 27 décembre 2006, l’ARC a établi une nouvelle cotisation relativement à l’année d’imposition 2005 du demandeur afin d’ajouter le gain en capital non déclaré, et elle a donc imposé une pénalité pour production tardive.

 

[9]               Le demandeur a présenté une demande d’allègement fiscal. Le 13 juin 2007, la demande présentée au premier palier afin d’obtenir un allègement au titre de l’intérêt a été refusée [premier examen]. Le 10 septembre 2008, l’ARC a refusé au demandeur sa demande d’allègement au titre de l’intérêt présentée au deuxième palier ainsi que sa demande d’allègement au titre de la pénalité présentée au premier palier [deuxième examen initial]. Le 24 novembre 2008, la demande d’allègement au titre de la pénalité présentée au deuxième palier par le demandeur a été refusée [deuxième examen ultérieur].

 

[10]           Le demandeur a déposé à la Cour des demandes de contrôle judiciaire dans lesquelles il allègue qu’il y a eu violation des principes de justice naturelle (dossiers de la Cour T‑740‑09 et T‑1364‑09).

 

[11]           Le 14 septembre 2010, la Cour a renvoyé l’affaire pour nouvel examen. Le défendeur a consenti à l’ordonnance. Apparemment, le problème tenait au fait que le dossier du demandeur avait auparavant été traité par le bureau des services fiscaux de Sudbury, en Ontario (vérification et premier examen), alors que le demandeur avait déménagé à Vancouver en 2006. Dans l’intervalle, le bureau des services fiscaux de Victoria, en Colombie‑Britannique, avait procédé au deuxième examen initial et au deuxième examen ultérieur. Or, ce bureau avait, semble‑t‑il, omis de rencontrer le demandeur et d’obtenir de lui tous les renseignements nécessaires avant de prendre une décision finale.

 

[12]           Le demandeur soutient maintenant que l’ARC n’a pas effectué un véritable examen après le renvoi de l’affaire pour nouvel examen puisque le deuxième examen initial et le deuxième examen ultérieur se fondaient tous deux sur l’historique du dossier du demandeur que l’ARC a établi sans avoir l’avantage de disposer du propre dossier du demandeur. Ce dernier avance en outre qu’on ne l’a pas suffisamment convaincu que les décideurs ont, dans le cadre de l’examen demandé, tenu compte de la correspondance qu’il a échangée avec l’ARC.

 

[13]           Les plaintes formulées quant au deuxième examen initial et au deuxième examen ultérieur n’ont plus aucune pertinence. À la lumière de la preuve versée au dossier, le défendeur, y compris l’ARC, s’est entièrement conformé à l’ordonnance rendue par la Cour en septembre 2011. En janvier 2011, le Bureau des services fiscaux de Burnaby‑Fraser [le BSFBF] en Colombie‑Britannique, lequel prenait alors connaissance du dossier du demandeur pour la première fois, a procédé à un nouvel examen de l’affaire. Mme Tracy Sine, conseillère technique à la section des appels du BSFBF [la conseillère technique] a rencontré le demandeur le 19 janvier 2011. Cette rencontre a duré trois heures et demie. À cette occasion, le demandeur a présenté certains documents. Le lendemain, la conjointe du demandeur a formulé d’autres observations.

 

[14]           En janvier 2011, le rapport de la conseillère technique et sa recommandation visant à refuser la demande du demandeur ont ensuite été examinés par le chef des appels au BSFBF, M. Mumtaz Amlani, lequel a signé et produit un affidavit dans le cadre de la présente instance. Après avoir pris en considération les conclusions du demandeur relatives à sa demande d’allègement visant l’intérêt et la pénalité (telles qu’elles figuraient dans les notes de la conseillère technique), le chef des appels a rendu une décision écrite informant le demandeur que l’allègement n’était pas justifié dans son cas; d’où la présente demande de contrôle judiciaire.

 

[15]           Le demandeur n’a désigné avec précision aucun document dont le décideur aurait dû être saisi ni aucun élément de preuve dont on aurait fait abstraction. En l’absence d’une quelconque preuve à l’effet contraire, et compte tenu de l’affidavit du chef des appels du BSFBF ainsi que des motifs donnés dans la décision attaquée, je suis convaincu que tous les renseignements nécessaires ont dûment été pris en considération dans le cadre d’un nouvel examen indépendant en matière d’équité. Avant de formuler une recommandation et de prendre une décision finale, la conseillère technique a rencontré le demandeur et elle lui a donné l’occasion de présenter ses arguments et de faire des observations sur le projet de rapport qu’elle avait établi. Aucun manquement à l’équité procédurale n’a eu lieu dans le cadre de la nouvelle décision visant la demande d’allègement du demandeur.

 

[16]           Les autres aspects de la décision en cause dont se plaint le demandeur n’intéressent pas vraiment l’examen en matière d’équité lui‑même, mais plutôt certains actes accomplis par l’ARC en 2004 et 2005 en réponse au demandeur, qui voulait que ses pertes locatives soient augmentées pour l’année d’imposition 1997. Les pertes ou les frais d’entretien déduits se rapportaient à un duplex situé à Toronto [l’immeuble Lonsdale], dont une partie servait de résidence principale au demandeur et une partie était louée à un tiers non lié. Par suite de la vérification, qui s’est terminée le 7 juillet 2005, le prix de base rajusté de l’immeuble Lonsdale a été augmenté. Le demandeur allègue que l’ARC a omis de lui fournir, avec exactitude et de manière opportune, tous les documents pertinents de son dossier en cours à partir de 1997, contrairement aux exigences fixées au paragraphe 165(3) de la LIR et au point 6 de la Charte des droits du contribuable de l’ARC.

 

[17]           À cet égard, le demandeur précise qu’il a demandé une copie papier des documents faisant état des calculs pertinents du coût en capital révisé de la partie louée de l’immeuble Lonsdale, situé à Toronto, mais qu’on ne lui a remis les documents demandés que le 11 juillet 2006, soit 72 jours après la date limite de production du 30 avril 2006. Le demandeur fait donc valoir qu’il n’y avait pas lieu de lui imposer une pénalité pour production tardive et qu’il a droit à un remboursement d’impôt en raison de l’examen antérieur de ses déclarations de revenus. Le défendeur répond que le prix de base rajusté de l’immeuble Lonsdale a été fourni par lettre au demandeur le 17 octobre 2005, et qu’il n’appartenait pas à l’ARC d’établir une ventilation du prix de base rajusté entre le terrain et le bâtiment.

 

[18]           Les arguments du demandeur n’ont aucun fondement en l’espèce. De toute évidence, ils reposent sur l’hypothèse erronée voulant qu’il doive nécessairement exister un lien entre les demandes de révision du demandeur concernant ses déclarations de revenus relatives à 1997 et à 2005. Or, ce n’est tout simplement pas le cas puisque l’assiette fiscale pour chaque année d’imposition est établie de façon indépendante et, en particulier dans la présente affaire, le gain en capital que le demandeur a omis de déclarer dans sa déclaration de revenus T1 de 2005 et la demande connexe touchant la déduction compensatoire au titre du gain en capital n’avaient aucun lien avec le coût en capital de son immeuble à revenu ayant fait l’objet d’un réajustement après la vérification effectuée en 2004 et 2005.

 

[19]           Les relations entre le demandeur et l’ARC ont toujours été tendues. Le demandeur affirme qu’il [traduction] « a cessé de produire des déclarations de revenus annuelles pour tenter d’inciter l’ARC à communiquer avec lui ». Il n’en demeure pas moins que le demandeur avait l’entière responsabilité, selon le régime d’autocotisation canadien, d’honorer les obligations fiscales qu’il assumait suivant la LIR, de déclarer le gain en capital et d’effectuer les calculs appropriés (R c McKinlay Transport Ltd, [1990] 1 RCS 627). Les employés de l’ARC n’ont commis aucune faute. La preuve dont je suis saisi ne me permet simplement pas de conclure que les employés de l’ARC ont agi de mauvaise foi ou ont fait des promesses ou des observations ayant un effet obligatoire. Manifestement, le défendeur n’a pas renoncé à établir une nouvelle cotisation ni à réclamer tout ou partie d’une pénalité ou de l’intérêt par ailleurs exigible sous le régime de la LIR.

 

[20]           Le demandeur soutient également que le décideur a formulé des assertions contradictoires et qu’il a réitéré certaines idées fausses et erreurs numériques des décideurs antérieurs. Pourtant, il ne fait état d’aucun problème de cette nature dans la décision attaquée de l’ARC, sauf lorsqu’il mentionne que les allégations relatives à ses antécédents médiocres en matière d’observation sont fausses ou grandement exagérées en l’espèce. Après avoir minutieusement examiné le dossier et la preuve présentés par les parties, je ne puis conclure que le refus de renoncer à tout ou partie de la pénalité et de l’intérêt imposés se fonde sur une conclusion de fait erronée que l’ARC aurait tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont elle disposait. Dans l’ensemble, je ne suis pas convaincu, à la lumière de la preuve versée au dossier, que les actes de l’ARC dont se plaint le demandeur ont, individuellement ou ensemble, eu pour effet, dans les circonstances, de rendre déraisonnable la décision attaquée de refuser l’allègement.

 

[21]           De plus, bien que le rapport de la conseillère technique comporte apparemment des renseignements inexacts en ce qui a trait aux dates auxquelles le demandeur a produit ses déclarations de revenus T1 pour les années d’imposition allant de 1999 à 2009, d’autres renseignements relatifs aux antécédents du demandeur en matière d’observation sont exacts. Quoi qu’il en soit, même s’il s’agissait de l’un des éléments pris en compte, les antécédents en matière d’observation n’ont pas joué un rôle prépondérant dans la décision de refuser l’allègement en l’espèce. Pour l’essentiel, la principale raison pour ne pas annuler l’intérêt et la pénalité imposés tenait au fait que l’incapacité du demandeur de produire en temps opportun une déclaration de gain en capital ne découlait pas de circonstances exceptionnelles, d’actes accomplis par l’ARC ni d’une incapacité à payer ou de difficultés financières.

 

[22]           Le demandeur invite également la Cour à déclarer que les cotisations arbitraires antérieures ne sont pas susceptibles d’exécution forcée. Toutefois, dans la présente instance, le demandeur ne peut contester la légalité de la nouvelle cotisation relative à 2005 ni d’autres nouvelles cotisations en vertu de la LIR. Le demandeur n’a pas produit d’avis d’opposition concernant la nouvelle cotisation relative à 2005 et il n’a pas contesté les ajustements de 2 500 $ effectués au titre de l’entretien et des réparations touchant l’immeuble Lonsdale. Il ne peut maintenant se plaindre devant la Cour qu’il y a eu une cotisation arbitraire ou que la situation entraîne une double imposition.

 

[23]           Il ne s’agit pas en l’espèce d’un appel interjeté à l’égard d’un avis de cotisation (sur lequel il aurait appartenu à la Cour canadienne de l’impôt de statuer), mais bien du contrôle judiciaire d’une mesure d’ordre discrétionnaire prise en vertu du paragraphe 220(3.1) de la LIR. Les décisions invoquées par le demandeur sont dénuées de pertinence ou ne s’appliquent pas aux faits dont je suis saisi. Comme l’a énoncé le présent tribunal dans la décision Jenkins c Canada (Revenu), 2007 CF 295, au paragraphe 13 :

Il importe [...] de ne pas perdre de vue que le pouvoir conféré au ministre par le paragraphe 220(3.1) de la Loi est un pouvoir discrétionnaire et qu’en conséquence le ministre n’est aucunement tenu de parvenir à une conclusion particulière. En outre, l’obligation incombant au contribuable de payer des pénalités et des intérêts en cas de production tardive de ses déclarations de revenus découle de l’application de la Loi et non pas d’une décision discrétionnaire du ministre qui aurait choisi d’imposer des pénalités et des intérêts. Le pouvoir discrétionnaire du ministre se limite donc à l’octroi d’une dispense de l’application de la Loi à titre exceptionnel lorsqu’il estime qu’une telle dispense est justifiée.

 

 

[24]           Dans l’ensemble, je suis convaincu en l’espèce que le décideur n’a pas entravé l’exercice de son pouvoir discrétionnaire, il n’a écarté aucun élément de preuve et il n’a fait abstraction d’aucun critère pertinent. En réalité, le refus d’annuler l’intérêt et la pénalité se fonde sur un certain nombre de raisons valables, qui ne sont pas déraisonnables dans les circonstances :

•   Selon la preuve produite au dossier, l’ARC a répondu d’une manière prompte et efficace à la demande d’ajustement présentée par le demandeur au titre de sa déclaration de revenus T1 relative à 2005;

•   L’intérêt et la pénalité imposés à l’égard de l’année d’imposition 2005 du demandeur l’ont été à juste titre et ils découlaient des seuls actes de ce dernier;

•   Au moment où le délai de production de sa déclaration de revenus T1 relative à 2005 a expiré (soit le 30 avril 2006), le demandeur savait qu’il avait réalisé un gain en capital sur la vente des actions pendant l’année d’imposition;

•   La vérification de la déclaration de revenus relative à 1997 du demandeur, laquelle a été effectuée par suite de la demande d’allègement pour contribuables qu’il a présentée en 2004, avait eu lieu et le demandeur en avait été informé le 17 octobre 2005, ce qui lui laissait amplement le temps d’évaluer et de verser l’impôt pour 2005 avant le 30 avril 2006;

•   L’ARC n’a nullement tardé à fournir au demandeur les renseignements requis;

•   L’ARC n’a accompli aucun acte ayant eu une incidence sur l’intérêt couru ou la pénalité pour production tardive;

•   Il n’existait aucune circonstance indépendante de la volonté du demandeur ou découlant de problèmes personnels qui l’aurait empêché de satisfaire aux exigences législatives aux fins de l’impôt sur le revenu;

•   Même s’il a volontairement déclaré le gain en capital en cause, le demandeur n’a pas rempli les exigences fixées par le programme des divulgations volontaires, à savoir que les renseignements non déclarés auraient dû l’être plus d’un an auparavant et qu’aucune observation écrite n’a été présentée avec le formulaire requis RC199 « Programme des divulgations volontaires – Acceptation du contribuable » et les documents à l’appui.

 

[25]           En résumé, le demandeur n’a pas isolé de manquement précis à l’équité procédurale qui aurait été commis dans l’exercice, en l’espèce, du pouvoir ministériel discrétionnaire de refuser au contribuable l’allègement demandé. Le demandeur n’a renvoyé à aucune jurisprudence concernant la nature et le contenu de l’obligation de diligence invoquée. Il n’a pas établi qu’il y avait lieu de reprocher aux employés de l’ARC un quelconque retard à lui fournir les documents relatifs à la vérification fiscale dont il a fait l’objet en 1997. Quoi qu’il en soit, le coût en capital rajusté de l’immeuble du demandeur n’a pas influé sur son année d’imposition 2005 puisque les déclarations fiscales relatives à cette année n’avaient pas à inclure un état du prix de base rajusté ni aucun autre renseignement dont le demandeur ne disposait pas au 30 avril 2006. En outre, à partir du moment où le prix de base rajusté de l’immeuble du demandeur a été communiqué à ce dernier (dans une lettre du 17 octobre 2005), l’ARC n’assumait plus, dans le cadre du régime canadien d’autodéclaration et d’autocotisation, aucune responsabilité en ce qui touche l’évaluation ou la ventilation de ce prix de base rajusté.

 

[26]           À la lumière de tout ce qui précède, il convient de rejeter la présente demande de contrôle judiciaire.

 

[27]           Compte tenu de l’issue de la présente affaire, les dépens seront adjugés en faveur du défendeur. Comme le demandeur se représente lui‑même et qu’il s’agit d’une affaire plutôt simple, comme la quantité de travail requise était relativement modeste et compte tenu de la contribution proprement dite des avocats du défendeur, je décide, dans l’exercice de mon pouvoir discrétionnaire, d’accorder au défendeur une somme forfaitaire de 750 $, comprenant l’ensemble des débours.


JUGEMENT

LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire présentée par le demandeur soit rejetée. Des dépens s’élevant à 750 $, comprenant l’ensemble des débours, sont adjugés au défendeur.

 

 

« Luc Martineau »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L

 

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        T-655-11

 

INTITULÉ :                                      JAMES PETER TAYLOR c LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              Vancouver (C.‑B.)

 

DATE DE L’AUDIENCE :             Le 8 août 2012

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                            LE JUGE MARTINEAU

 

DATE DES MOTIFS :                     Le 14 août 2012

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

James Peter Taylor

 

POUR LE DEMANDEUR

(EN SON PROPRE NOM)

 

Max Matas

Johanna Russell

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

S.O.

 

POUR LE DEMANDEUR

(EN SON PROPRE NOM)

 

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Vancouver (C.-B.)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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