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Date : 20120907

Dossier : IMM-8195-11

Référence : 2012 CF 1059

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 7 septembre 2012

En présence de monsieur le juge Mosley

 

 

ENTRE :

 

SU FENG SHI

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               La principale question à trancher dans la présente affaire est de savoir si les principes d’équité procédurale exigent que l’avocat précédemment inscrit au dossier à titre de représentant d’un individu qui fait l’objet d’une demande d’avis de danger reçoive signification des documents destinés à être communiqués au ministre en plus de l’individu concerné. Lorsque l’identité de l’avocat est connue, cette communication est nécessaire. Dans les circonstances particulières de la présente affaire, je suis d’avis qu’il n’y a pas lieu de reprocher au défendeur de ne pas avoir fourni les documents alors qu’il n’avait pas été avisé que l’individu avait un avocat.

 

[2]               Pour les motifs exposés ci-après, j’en arrive à la conclusion que le demandeur n’a pas été privé du droit à l’équité procédurale et la demande est rejetée.

 

LES FAITS À L’ORIGINE DU LITIGE

[3]               Le demandeur, qui est un citoyen de la Chine né en 1980, est arrivé au Canada en 1999 et a vu sa demande de statut de réfugié fondée sur la persécution religieuse accueillie en 2000. Il est devenu résident permanent la même année. Moins de deux ans plus tard, il a fait l’objet de graves accusations criminelles, notamment pour vol à main armée. Étant donné qu’il avait été déclaré coupable de voies de fait causant des lésions corporelles en 2004 sous le régime du Code criminel, il a été jugé interdit de territoire en application de l’alinéa 36(1)a) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (ci-après la LIPR) en janvier 2005 et une mesure de renvoi a été prise contre lui. Le demandeur a interjeté appel de cette décision devant la Section d’appel de l’immigration.

 

[4]               En 2007, l’avocat spécialisé en immigration qui représentait alors le demandeur s’est retiré du dossier, parce qu’il était incapable de joindre le demandeur, et le désistement de l’appel a été prononcé. Un mandat d’arrestation a été délivré à l’encontre du demandeur. Plus tard au cours de la même année, le demandeur a été déclaré coupable de vol à main armée, de déguisement dans un dessein criminel et de possession illégale d’une substance réglementée et le mandat a été exécuté pendant que le demandeur purgeait sa peine.

 

[5]               Le 5 novembre 2007, le demandeur a reçu signification d’un avis l’informant qu’une demande de décision avait été présentée au ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile au sujet de la question de savoir si le demandeur constituait un danger pour le public au Canada et devrait être renvoyé, sous réserve d’une évaluation du risque auquel il pourrait être exposé en Chine, conformément à l’alinéa 115(2)a) de la LIPR. Le demandeur a reçu en même temps une liste et des copies des documents qui seraient soumis à l’examen du ministre, notamment des documents concernant ses antécédents en matière d’immigration, des dossiers judiciaires et des rapports de police. La documentation en question ne comprenait pas les documents liés aux déclarations de culpabilité prononcées en 2007.

 

[6]               Le demandeur a retenu les services d’un avocat aux fins du contrôle des motifs de la détention vers la fin de 2007. Il a été remis en liberté sous réserve de certaines modalités, y compris le dépôt de cautionnements en espèces, le 24 décembre 2007. L’avocat a déposé des observations écrites le 31 décembre 2007 au sujet des documents inclus dans la trousse signifiée au demandeur, soutenant que ces documents ne révélaient pas suffisamment d’éléments de preuve qui établiraient que le demandeur constituait un danger et affirmant que celui-ci était encore exposé à un risque de persécution en Chine. La réception des observations a été reconnue dans une lettre adressée à M. Shi, aux soins du cabinet d’avocats, en janvier 2008. Le demandeur avait désigné le cabinet comme son point de contact sur un formulaire intitulé « Autorisation de communiquer des renseignements personnels à une personne désignée », daté du 11 octobre 2007. Le formulaire énonce que la personne désignée ne sera pas un représentant du demandeur et ne pourra agir au nom de celui‑ci auprès de CIC et de l’ASFC. À cette fin, un autre formulaire intitulé « Recours aux services d’un représentant » doit être rempli.

 

[7]               En mai 2009, M. Shi a été arrêté et accusé d’avoir commis d’autres actes criminels, notamment d’avoir tiré sur une personne dans un endroit public. Il a été déclaré coupable de voies de fait ayant causé des lésions corporelles le 16 décembre 2009. En conséquence, une trousse de documentation mise à jour a été préparée; elle comprenait les rapports d’incident, les certificats de condamnation, les motifs de sentence se rapportant aux déclarations de culpabilité de 2007 et de 2009 et les rapports sur la situation du pays concernant la liberté religieuse en Chine.

 

[8]               Le 9 août 2010, alors que le demandeur se trouvait en détention préventive à la prison de Toronto en attendant son procès relatif à de nouvelles accusations criminelles de voies de fait et de séquestration déposées en avril 2010, il a reçu la visite d’un agent de l’ASFC ainsi que d’une autre agente qui est une interprète compétente dont la langue maternelle est le mandarin. À cette occasion, le demandeur a reçu la trousse de documentation mise à jour et a signé un accusé de réception s’y rapportant. Dans la lettre d’envoi qui était jointe aux documents supplémentaires, il était mentionné que M. Shi disposait d’un délai de quinze jours pour présenter des derniers arguments et observations ou pour déposer des éléments de preuve avant que les documents soient soumis au ministre en vue de l’établissement d’un avis de danger.

 

[9]               La rencontre tenue en août 2010 a été interprétée en mandarin et l’interprète a déclaré qu’elle avait donné au demandeur la possibilité de poser des questions et de demander des précisions s’il ne comprenait pas. L’agent qui a signifié la trousse a affirmé pour sa part qu’il demande toujours au client s’il a un avocat et, si la réponse est affirmative, il communique avec l’avocat pour s’assurer que celui-ci est au courant de la démarche en cours ainsi que des documents destinés à être communiqués au ministre conformément à la politique ministérielle. Dans le système de suivi de l’agent à l’égard des procédures d’avis de danger, aucun avocat n’était mentionné dans le cas de M. Shi et il n’y avait pas non plus de formulaire de « Recours aux services d’un représentant » qui aurait autorisé l’ASFC à traiter avec un avocat pour le compte du demandeur.

 

[10]           Le 20 août 2010, le demandeur a été déclaré coupable de voies de fait et de séquestration et condamné à purger deux peines concurrentes de 18 mois d’emprisonnement et deux ans de probation. Le 20 septembre 2010, la trousse de documentation relative à la demande visant à obtenir un avis de danger du ministre a été remise au demandeur en prison; celui-ci a été informé qu’il pourrait fournir d’autres observations au représentant du ministre avant qu’une décision soit rendue.

 

[11]           Le 7 octobre 2010, le demandeur a à nouveau reçu la visite d’un agent de l’ASFC au Centre correctionnel du Centre-Nord à Penetanguishene (Ontario), l’endroit où il purgeait la peine à laquelle il avait été condamné à l’égard des déclarations de culpabilité de 2010. L’agent a signifié au demandeur deux autres documents concernant les déclarations de culpabilité de 2010 et le demandeur a à nouveau signé une lettre d’accusé de réception se rapportant à ces documents. Il était également mentionné dans cette lettre que le demandeur disposait d’un délai de quinze jours pour présenter des observations supplémentaires.

 

[12]           Aucun des documents signifiés au demandeur en 2010 n’a été communiqué à l’avocat qui avait représenté celui-ci en 2007. M. Shi n’a nullement tenté de joindre un avocat lorsqu’il a reçu signification des trousses de documentation mises à jour. Le demandeur n’a pas présenté d’éléments de preuve ou d’observations supplémentaires avant l’établissement de l’avis du ministre le 13 décembre 2010. L’avocat a été mis au courant pour la première fois de la communication en 2011, lorsqu’il s’est fait demander à nouveau de représenter M. Shi en vue d’un contrôle des motifs de la détention de celui-ci.

 

LA DÉCISION FAISANT L’OBJET DU CONTRÔLE JUDICIAIRE

[13]           Lorsqu’une personne est interdite de territoire au Canada pour cause de grande criminalité, le ministre ou son représentant doit décider si la personne en question constitue un danger pour le public au Canada et, dans l’affirmative, contrebalancer ce risque avec celui auquel l’individu serait exposé s’il retournait dans son pays d’origine ainsi qu’avec toutes considérations d’ordre humanitaire pertinentes.

 

[14]           Dans la présente affaire, le représentant a conclu que, selon la prépondérance des probabilités, eu égard à la nature violente et répétée des infractions commises par le demandeur et aux piètres perspectives de réadaptation de celui-ci, sa présence constituait un danger actuel et futur pour le public canadien.

 

[15]           Le représentant du ministre était d’avis que le demandeur ne serait pas personnellement exposé à une menace à sa vie ou au risque d’être soumis à la torture ou à des traitements ou peines cruels et inusités et qu’il n’existait guère plus qu’une simple possibilité qu’il soit exposé à de la persécution s’il était renvoyé en Chine, que ce soit parce qu’il est un adepte de la religion Tian Dao, le fondement de sa demande d’asile, ou parce qu’il s’est subséquemment converti au christianisme, comme il l’a soutenu en 2007. Le représentant a conclu que, si le demandeur était exposé à un risque, la balance penchait en faveur de son renvoi. Il n’y avait aucune considération d’ordre humanitaire qui l’emportait sur le fait qu’il constituait un danger pour le public.

 

LES QUESTIONS EN LITIGE

[16]           Le demandeur soutient :

                                                              i.      qu’il a été privé du droit à l’équité procédurale;

                                                            ii.      que l’évaluation du risque n’était pas raisonnable.

 

ANALYSE

            La norme de contrôle

[17]           Les questions d’équité procédurale n’appellent aucune retenue : Canada (Procureur général) c Sketchley, 2005 CAF 404, au paragraphe 53, et Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, au paragraphe 43. La question qu’il faut se poser est de savoir si les principes d’équité procédurale ont été respectés dans les circonstances de la présente affaire : Pusat c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 428, au paragraphe 14.

 

[18]           Hormis les questions d’équité qui se posent dans ce contexte, il est établi de façon satisfaisante par la jurisprudence que la norme de contrôle applicable à l’avis de danger du ministre est la décision raisonnable : La c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CFPI 476, aux paragraphes 12 à 16, Randhawa c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 310, au paragraphe 3, et Suresh c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CSC 1, au paragraphe 41.

 

[19]           Comme question préliminaire, j’ai souligné au début de l’audience que la présentation d’un affidavit par un avocat membre du même cabinet que celui qui a comparu au nom du demandeur constituait une violation apparente de l’article 82 des Règles des Cours fédérales. Dans la mesure où il était nécessaire de présenter cette preuve, la bonne façon de procéder à mon avis aurait été de diriger le demandeur vers un autre cabinet d’avocats.

 

            Y a-t-il eu manquement aux principes d’équité procédurale?

[20]           L’obligation de respecter les principes d’équité procédurale est rehaussée dans le contexte du processus de l’avis de danger, eu égard aux répercussions que la décision peut avoir sur le demandeur d’asile et sur les droits que lui reconnaît l’article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés, annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R.-U.), 1982, c 11 : Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Bhagwandass, 2001 CAF 49, aux paragraphes 30 et 31.

 

[21]           Le demandeur soutient qu’il a été privé du droit à l’équité procédurale en raison de la façon dont il a reçu signification des documents et de l’omission du ministre de signifier les documents en question à son avocat. En conséquence, le demandeur fait valoir qu’il a été privé de la possibilité de répondre. Étant donné que les questions que le représentant devait examiner reposaient sur les faits, l’issue aurait pu être différente si des observations appropriées avaient été présentées.

 

[22]            Il est bien reconnu dans la jurisprudence et dans la politique du ministre que le défendeur a l’obligation de communiquer tous les documents au demandeur et à l’avocat de celui-ci, lorsque l’identité de cet avocat est connue. Ce principe est énoncé dans le guide opérationnel du défendeur ENF 28, Avis du ministre sur le danger pour le public et la sécurité du Canada, à la section 7.5. Voir également Chernikov c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 885, au paragraphe 27, et Ashour c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 1998 CanLII 7836 (CF), au paragraphe 8.

 

[23]           Le défendeur savait sans doute que le demandeur avait un avocat spécialisé en immigration en 2007, même si le formulaire exigé n’avait pas été rempli, parce que les observations de l’avocat ont été reçues et ont fait l’objet d’un accusé de réception. Il est également indéniable qu’aucune des deux trousses de documentation signifiées au demandeur en 2010 n’a été fournie à l’avocat spécialisé en immigration qui représentait le demandeur en 2007, lequel n’en a appris l’existence qu’après l’établissement de l’avis de danger. Cependant, il est difficile de savoir à la lumière du dossier si l’avocat spécialisé en immigration qui représentait M. Shi en 2007 a continué à représenter celui-ci entre les événements de 2007 et 2011, lorsqu’il est à nouveau intervenu relativement aux démêlés de M. Shi avec la justice.

 

[24]           Il ne s’agit pas ici d’une situation semblable à celle de la décision Ashour, susmentionnée, qui concernait des procédures en cours devant un organisme quasi judiciaire, la Commission d’appel de l’immigration, et où ni le demandeur ni son avocat n’avaient reçu signification des documents pertinents malgré le fait que le nom de l’avocat était mentionné clairement à titre d’avocat inscrit au dossier. À mon avis, le devoir d’équité en l’espèce a été rempli par la communication des documents directement à M. Shi. Il appartenait alors au demandeur d’informer les agents qu’il était représenté ou d’aviser son avocat qu’il avait reçu communication de certains documents, ce qu’il n’a pas fait.

 

[25]           À mon avis, le défendeur ne peut être blâmé relativement à l’omission du demandeur d’agir dans son propre intérêt lorsqu’il a reçu signification des trousses de documentation alors qu’il savait depuis 2005 qu’il pouvait faire l’objet d’un renvoi.

 

[26]           Le demandeur soutient qu’il n’a pas compris les deux rencontres qu’il a eues avec les agents de l’ASFC. Il appert clairement des démêlés que le demandeur a eus avec le système de justice criminelle qu’il possède une certaine connaissance de la langue anglaise. Bien que l’audience relative à la détermination de sa peine qui a été tenue en 2004 ait été interprétée, il a répondu aux questions du juge pendant les procédures de 2007 et a rempli des documents judiciaires sans recourir à l’interprétation. Le fait qu’il suivait des cours d’anglais langue seconde a été invoqué comme facteur d’atténuation.

 

[27]           Même si j’acceptais l’argument du demandeur selon lequel il a du mal à comprendre l’anglais, la rencontre tenue le 20 août 2010 avec des agents de l’AFSC a été interprétée par une interprète compétente dont la langue maternelle est le mandarin. Contrairement à ce que le demandeur soutient, je ne crois pas qu’il était incapable de comprendre l’interprète, l’objet de la rencontre selon les explications que lui ont données les agents ou la lettre qu’il a signée au sujet de la communication de documents. Même si j’estimais que son affidavit est crédible, le demandeur affirme lui-même que les agents lui ont dit qu’il devrait remettre la trousse à son avocat dans un délai de quinze jours. Il mentionne qu’il a parlé à son épouse peu de temps après. Aucun élément de preuve n’établit que son épouse a tenté de joindre l’avocat pour l’informer qu’une trousse de documentation avait été signifiée à M. Shi.

 

[28]           Selon la preuve par affidavit des agents, que je retiens de préférence à celle du demandeur, celui-ci ne s’est pas plaint d’un problème de compréhension lors de la rencontre ou plus tard avant le prononcé de la décision. Il a été décidé que l’absence de plainte déposée le plus tôt possible au sujet de la qualité de l’interprétation constituait une renonciation : Mohammadian c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2001 CAF 191, au paragraphe 19, Singh c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 1161, au paragraphe 3, et Mowloughi c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 662, aux paragraphes 30 et 32. 

 

[29]           Bien que la rencontre d’octobre 2010 n’ait pas été interprétée, le demandeur était déjà au courant de la teneur des documents supplémentaires qui lui ont alors été communiqués, parce qu’il était présent lors de sa condamnation en août 2010 et avait signé l’ordonnance qui faisait partie de sa sentence. L’argument du demandeur selon lequel il n’a pu faire quoi que ce soit avec les documents qui lui ont été remis au Centre correctionnel du Centre-Nord, étant donné que les documents lui ont été enlevés parce qu’il a été impliqué dans une bagarre, ne tient tout simplement pas la route. Rien n’empêchait le demandeur d’exercer son droit de recourir aux services d’un avocat.

 

[30]           Si j’en étais arrivé à une conclusion différente, il ne s’agit pas ici d’une affaire où j’aurais appliqué le principe de l’issue inéluctable exposé dans Mobil Oil Canada Ltd c Office Canada‑Terre‑Neuve des hydrocarbures extracôtiers, [1994] 1 RCS 202, [1994] ACS no 14 (QL), au paragraphe 53. La décision visée par le présent contrôle est fondée sur les faits et ne concernait pas fondamentalement une question de droit pour laquelle il n’y avait qu’une seule bonne réponse. Le manquement reproché a empêché la présentation d’observations supplémentaires sur des questions importantes, comme les récentes condamnations du demandeur. Bien que cet argument soit loin d’être établi, l’issue aurait peut-être été différente.

 

L’évaluation du risque faite par le représentant était-elle raisonnable?

[31]           Le demandeur a obtenu la protection en 2000 sur la foi de son allégation selon laquelle il était un adepte des croyances et pratiques Tian Dao en Chine. Il soutient que l’évaluation du risque faite par le représentant du ministre n’était pas raisonnable, parce que le représentant n’a pas évalué la possibilité que le demandeur continue d’être perçu comme un adepte de la religion Tian Dao en Chine et n’a pas fondé ses conclusions concernant la persécution des chrétiens en Chine en tenant compte de la preuve.

 

[32]           Une fois que le représentant du ministre a conclu que le demandeur constitue un danger pour le public au Canada, il appartient au demandeur en question de le convaincre de l’existence d’un risque en cas de renvoi. La personne désignée ne peut simplement se fonder sur le statut protégé du demandeur à titre de réfugié au sens de la Convention : Jama c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 781, aux paragraphes 85 et 86, Hasan c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 1069, au paragraphe 22, et Camara c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 168, aux paragraphes 58 à 60.

 

[33]           Dans la présente affaire, la preuve montrant que le demandeur était un adepte de la religion Tian Dao en Chine était mince. En tout état de cause, le demandeur n’a pas continué à pratiquer cette religion au Canada. Le représentant du ministre a conclu de manière raisonnable que, étant donné que le demandeur n’était plus un adepte de la religion Tian Dao et que beaucoup de temps s’était écoulé depuis qu’il avait obtenu le statut de réfugié, le demandeur n’a pas établi qu’il serait exposé au risque d’être persécuté en Chine pour cette raison, ni qu’il serait exposé à un risque du fait de sa conversion sur place au christianisme.

 

[34]           Il appert visiblement du dossier que le demandeur est membre d’un gang depuis longtemps et se soucie fort peu de la sécurité d’autrui ou du droit canadien. Dans l’ensemble, la décision appartient aux issues possibles pouvant se justifier au regard du droit et des faits : Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, au paragraphe 47, et Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c Terre-Neuve-et-Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, aux paragraphes 16 à 18.

 

[35]           L’avocat du demandeur n’a pas proposé de question à certifier lorsqu’il a eu la possibilité de le faire à l’audience. Pour sa part, l’avocat du défendeur a souligné que, si j’en arrivais à la conclusion que la signification à l’avocat était nécessaire en l’espèce, le ministre souhaiterait proposer une question. Comme je l’ai mentionné plus haut, je n’en suis pas arrivé à cette conclusion.

 


JUGEMENT

La demande de contrôle judiciaire est rejetée et aucune question n’est certifiée.

 

 

« Richard G. Mosley »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-8195-11

 

INTITULÉ :                                      SU FENG SHI

 

                                                            c

 

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :             Le 19 juillet 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                            LE JUGE MOSLEY

 

DATE DES MOTIFS :                     Le 7 septembre 2012

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Asiya Hirji

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Ildiko Erdei

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Asiya Hirji

Mamann, Sandaluk & Kingwell LLP

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

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