Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20120719

Dossiers : T‑616‑12

T‑619‑12

T‑620‑12

T‑621‑12

T‑633‑12

T‑634‑12

T‑635‑12

Référence : 2012 CF 916

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Toronto (Ontario), le 19 juillet 2012

En présence de madame la protonotaire Milczynski

 

ENTRE :

Dossier : T‑616‑12

 

LEEANNE BIELLI

 

 

 

demanderesse

 

et

 

 

 

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA, MARC MAYRAND (DIRECTEUR GÉNÉRAL DES ÉLECTIONS), URMA ELLIS (DIRECTRICE DU SCRUTIN DE DON VALLEY‑EST), JOE DANIEL, YASMIN RATANSI, MARY TRAPANI HYNES, AKIL SADIKALI ET RYAN KIDD

 

 

 

défendeurs

 

ET ENTRE :

Dossier : T‑619‑12

 

SANDRA McEWING ET BILL KERR

 

 

 

demandeurs

 

et

 

 

 

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA, MARC MAYRAND (DIRECTEUR GÉNÉRAL DES ÉLECTIONS), JOHANNA GAIL DENESIUK (DIRECTRICE DU SCRUTIN DE WINNIPEG‑SUD‑CENTRE),

JOYCE BATEMAN, ANITA NEVILLE, DENNIS LEWYCKY, JOSHUA McNEIL, LYNDON B. FROESE ET

MATT HENDERSON

 

 

 

défendeurs

 

ET ENTRE :

Dossier : T‑620‑12

 

KAY BURKHART

 

 

 

demanderesse

 

et

 

 

 

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA, MARC MAYRAND (DIRECTEUR GÉNÉRAL DES ÉLECTIONS), DIANNE CELESTINE ZIMMERMAN

(DIRECTRICE DU SCRUTIN DE SASKATOON‑ROSETOWN‑BIGGAR),

KELLY BLOCK, LEE REANEY, VICKI STRELIOFF ET NETTIE WIEBE

 

 

 

défendeurs

 

ET ENTRE :

Dossier : T‑621‑12

 

JEFF REID

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA, MARC MAYRAND (DIRECTEUR GÉNÉRAL DES ÉLECTIONS), LAUREL DUPONT (DIRECTRICE DU SCRUTIN

D’ELMWOOD‑TRANSCONA), JIM MALOWAY, ILONA NIEMCZYK,

LAWRENCE TOET ET ELLEN YOUNG

 

 

 

défendeurs

 

ET ENTRE :

Dossier : T‑633‑12

 

KEN FERANCE ET PEGGY WALSH CRAIG

 

 

 

demandeurs

 

et

 

 

 

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA, MARC MAYRAND (DIRECTEUR GÉNÉRAL DES ÉLECTIONS), DIANNE JAMES MALLORY (DIRECTRICE DU SCRUTIN DE NIPPISSING‑TIMISKAMING), JAY ASPIN SCOTT,

EDWARD DALEY, RONA ECKERT ET ANTHONY ROTA

 

 

 

défendeurs

 

ET ENTRE :

Dossier : T‑634‑12

 

YVONNE KAKFA

 

 

 

demanderesse

 

et

 

 

 

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA, MARC MAYRAND (DIRECTEUR GÉNÉRAL DES ÉLECTIONS), ALEXANDER GORDON (DIRECTEUR DU SCRUTIN DE L’ÎLE DE VANCOUVER‑NORD), JOHN DUNCAN, MIKE HOLLAND, RONNA‑RAE LEONARD, SUE MOEN, FRANK MARTIN ET

JASON DRAPER

 

 

 

défendeurs

 

ET ENTRE :

Dossier : T‑635‑12

 

THOMAS JOHN PARLEE

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA, MARC MAYRAND (DIRECTEUR GÉNÉRAL DES ÉLECTIONS), SUSAN J. EDELMAN (DIRECTRICE DU SCRUTIN DU YUKON), RYAN LEEF, LARRY BAGNELL, KEVIN BARR ET JOHN STREICKER

 

 

 

défendeurs

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

Contexte – les demandes

 

[1]               La Cour est saisie au principal de sept demandes distinctes formées en vertu de l’alinéa 524(1)b) de la Loi électorale du Canada, L.C. 2000, ch. 9, contestant les résultats des élections générales fédérales du 2 mai 2011 dans chacune des sept circonscriptions auxquelles elles s’appliquent respectivement, soit : 

Don Valley‑Est,

Winnipeg‑Sud‑Centre,

Saskatoon‑Rosetown‑Biggar,

Elmwood‑Transcona,

Nipissing‑Timiskaming,

l’Île de Vancouver‑Nord

et le Yukon.

 

 

[2]               Les motifs de ces demandes sont formulés de manière identique, pour l’essentiel, dans chacun des sept avis de demande. Les demandeurs soutiennent que, [TRADUCTION] « au cours de l’élection, une ou plusieurs personnes inconnues se sont livrées à des fraudes, à des manœuvres frauduleuses ou à des actes illégaux qui ont influé sur le résultat de cette élection, en essayant d’empêcher des électeurs de voter ou en les incitant à s’abstenir de voter pour un candidat déterminé ».

 

[3]               Plus précisément, les demandeurs affirment avoir reçu des appels téléphoniques en direct et/ou automatiques dont les auteurs :

i)                    prétendaient que l’appel provenait d’Élections Canada ou était fait en son nom,

ii)                  leur ont dit que leur bureau de scrutin avait changé,

iii)                les ont adressés à un bureau de scrutin inexistant, parfois prétendument situé loin de chez eux ou en un lieu peu pratique d’accès.

 

[4]               Certains des demandeurs affirment aussi avoir reçu pendant la campagne électorale des appels téléphoniques de nature injurieuse ou harcelante, conçus pour être (faussement) mis en rapport avec un candidat déterminé qu’ils auraient pu appuyer.

 

[5]               Les demandeurs soutiennent que ces appels en direct et automatiques (ou « robotisés ») n’étaient pas des incidents isolés, des erreurs ni des farces, mais s’inscrivaient dans une vaste campagne, délibérée et concertée, de manipulation, de perturbation ou de neutralisation de la participation électorale, visant à influer sur le résultat de l’élection dans chacune des circonscriptions où cette campagne était menée. Les demandeurs avancent aussi que ces appels étaient spécialement destinés à ceux qui les ont reçus. Seuls des sympathisants du Parti libéral, du Nouveau Parti démocratique et du Parti vert, expliquent‑ils, ont reçu ces appels frauduleux, après avoir déclaré lors d’appels antérieurs sollicitant leurs suffrages pour le Parti conservateur du Canada (le PCC) qu’ils n’appuieraient pas le candidat conservateur dans leur circonscription.

 

Question en litige dans les requêtes et résumé de la décision – les requêtes sont rejetées

 

[6]               Chacun des sept défendeurs qui étaient candidats du PCC aux élections du 2 mai 2011 et qui sont maintenant députés a déposé une requête en radiation de la demande afférente à la circonscription où son élection est contestée. Ces requêtes sont déposées à la présente étape préliminaire, avant que toute la preuve n’ait été produite, que les contre‑interrogatoires n’aient été effectués, que la Cour ne dispose d’un dossier complet, y compris les exposés des moyens des parties, et qu’elle n’instruise les demandes sur le fond.

[7]               La réparation que demandent les députés défendeurs est exceptionnelle, mais la Loi électorale du Canada en prévoit la possibilité pour prévenir les abus du droit de contester les élections. Les élections expriment démocratiquement la volonté populaire et ne doivent pas être invalidées à la légère, pas plus que les candidats ou les électeurs ne doivent exercer le droit d’en contester les résultats à des fins illégitimes, pour la simple raison qu’ils désapprouvent ceux‑ci ou en sont déçus. Toute demande en contestation d’élection formée sous le régime de la Loi peut être radiée et rejetée sommairement n’importe quand, à l’issue d’une requête dont le bien‑fondé est clairement établi.

 

[8]               Cependant, dans le cas des présentes requêtes, j’estime pour les motifs exposés ci‑dessous qu’il n’y a pas lieu à l’étape actuelle de radier les demandes.

 

[9]               Les députés défendeurs soutiennent dans leurs requêtes en radiation que les demandes sont frivoles, vexatoires et fondamentalement viciées à première vue. Ils ajoutent que les avis de ces demandes, tels qu’ils sont rédigés, n’exposent pas de faits substantiels suffisants pour étayer la conclusion qu’on aurait effectivement mené une campagne de neutralisation de la participation électorale et qu’on aurait empêché le dépôt d’un certain nombre de bulletins de vote, de sorte qu’il ne peut y avoir eu d’effet sur les résultats des élections dans aucune des circonscriptions en question, étant donné les marges de victoire de chacun des députés défendeurs. Ceux‑ci soutiennent également que les demandes attaquées sont invalides au motif qu’elles ont toutes été introduites bien après l’expiration du délai dans lequel la Loi électorale du Canada permet de déposer une demande en contestation d’élection.

 

[10]           Cependant, malgré ces arguments avancés par les députés défendeurs dans leurs requêtes et quels que soient les obstacles auxquels ils prédisent que les demandeurs se heurteront dans la poursuite des demandes, je ne puis conclure que le rejet de celles‑ci à ces motifs soit à prévoir avec une certitude suffisante pour justifier leur radiation à la présente étape. En effet, il n’est pas indubitable que les avis de demande, tels qu’ils sont rédigés, soient si radicalement viciés qu’aucune de leurs allégations ne puisse jamais être prouvée ni qu’une réparation ne pourrait pas être accordée. Les questions et objections soulevées par les députés défendeurs dans le cadre de leurs requêtes devraient plutôt être soulevées et plaidées sur la base d’un dossier complet à l’instruction sur le fond des demandes attaquées.

 

[11]           Loin d’être frivoles, vexatoires ou à l’évidence abusives, les demandes soulèvent de graves questions relatives à l’intégrité du processus démocratique canadien et visent des pratiques qui, si leur réalité était prouvée, témoigneraient d’efforts concertés en vue de priver les électeurs admissibles de leur droit de vote, et/ou de manipuler, de perturber ou d’empêcher le libre exercice de ce droit – tous agissements qui, si on leur permettait d’échapper à la possibilité même d’un examen judiciaire, risqueraient d’ébranler la confiance du public dans le processus électoral et en ceux qui briguent de bonne foi les suffrages des électeurs.

 

[12]           Cela ne veut pas dire que toute demande déposée dans laquelle on allègue des activités frauduleuses, malhonnêtes ou illégales devrait survivre à une requête en rejet et être instruite sur le fond. La Cour, quand elle est saisie d’une requête en radiation, doit veiller à ne pas permettre une mise en doute abusive ou injustifiée de l’intégrité du processus électoral. Le fait d’autoriser l’instruction d’une demande manifestement frivole et vexatoire porterait atteinte en soi au processus électoral. Toute demande en annulation d’élection doit être formée de bonne foi et reposer sur des motifs clairs et raisonnables. Les affirmations et accusations non étayées ne permettront pas d’accueillir une demande en annulation des résultats d’une élection.

 

[13]           Les allégations formulées dans les présentes demandes concernant la neutralisation de la participation électorale et l’existence d’une campagne concertée d’appels téléphoniques frauduleux et harcelants, en particulier à l’échelle évoquée, n’ont jamais fait l’objet d’une demande de la nature prévue à l’alinéa 524(1)b) de la Loi électorale du Canada. La jurisprudence relative aux fraudes électorales, bien que considérable, porte en général sur les irrégularités commises aux bureaux de scrutin, sur l’admissibilité des électeurs ou sur la validité des bulletins de vote déjà déposés dans les urnes. Malgré la pertinente argumentation des avocats des députés défendeurs, il n’est pas possible de conclure à l’étape actuelle des instances que les démarches, critères et exigences de preuve convenant aux affaires de ces catégories s’appliquent de la même façon aux faits des présentes demandes. Il n’a encore jamais été statué, dans une affaire comparable, sur les questions suivantes : 1) comment déterminer avec certitude l’effet réel d’appels téléphoniques frauduleux et/ou recenser les suffrages dont, le cas échéant, ils ont empêché l’expression; 2) comment établir si ces appels frauduleux ont influé sur les résultats de l’élection ou de quelle manière ils l’ont fait. Le cas qui nous occupe est le premier de son genre, et l’on ne peut savoir d’avance comment un tribunal abordera de telles questions sur le fond.

 

[14]           Les demandeurs ont formulé leurs allégations d’actes répréhensibles sous le régime de l’alinéa 524(1)b), et ils ont recensé et/ou présenté dans les documents déposés les éléments de preuve qu’ils prévoient produire pour établir les fraudes, manœuvres frauduleuses et actes illégaux qu’ils dénoncent et indiqué leur effet sur les résultats des élections. Il ne conviendrait pas de prononcer sur l’admissibilité et le caractère suffisant de cette preuve dans le cadre d’une requête en radiation – surtout eu égard à l’exigence de la disposition de la Loi électorale du Canada selon laquelle il doit être statué sur les demandes sans délai et selon la procédure sommaire. C’est plutôt au stade de l’instruction sur le fond que ces questions doivent être tranchées.

 

[15]           Quant au point de savoir si les sept demandes attaquées ont été introduites hors délai, c’est là une question à laquelle on ne peut répondre sans disposer d’un dossier de preuve complet. Il n’est pas permis de conclure à l’étape actuelle, en se fondant simplement sur des inférences et les arguments présentés, que l’un quelconque des demandeurs ou ceux‑ci pris collectivement ont attendu pour faire valoir leurs droits que le délai de dépôt des demandes soit expiré. La question reste posée de savoir si les demandes ont été introduites dans les 30 jours suivant la date où les résultats des élections ont été certifiés ou, dans le cas où elle serait postérieure, la date à laquelle le où les demandeurs ont appris ou auraient dû savoir que les fraudes, manœuvres frauduleuses ou actes illégaux qu’ils dénoncent avaient été commis. La Cour ne peut établir ce que les demandeurs pris isolément savaient ou auraient dû savoir sur la base des éléments produits devant elle dans le cadre de la présente requête : il lui faut, pour tirer une conclusion de fait à ce sujet, disposer de leur preuve et de leurs déclarations en contre‑interrogatoire.

 

Les dispositions législatives applicables

 

                        Loi électorale du Canada

 

Mode de contestation

522. (1) La validité de l’élection d’un candidat ne peut être contestée que sous le régime de la présente partie.

 

Contestation

524. (1) Tout électeur qui était habile à voter dans une circonscription et tout candidat dans celle‑ci peuvent, par requête, contester devant le tribunal compétent l’élection qui y a été tenue pour les motifs suivants :

[...]

b) irrégularité, fraude, manœuvre frauduleuse ou acte illégal ayant influé sur le résultat de l’élection.

 

Règles de procédure

525. (3) La requête est instruite sans délai et selon la procédure sommaire; le tribunal peut toutefois entendre des témoins lors de l’audition dans des circonstances particulières.

 

Délai de présentation

527. La requête en contestation fondée sur l’alinéa 524(1)b) doit être présentée dans les trente jours suivant la date de la publication dans la Gazette du Canada du résultat de l’élection contestée ou, si elle est postérieure, la date à laquelle le requérant a appris, ou aurait dû savoir, que les irrégularité, fraude, manœuvre frauduleuse ou acte illégal allégués ont été commis.

 

Rejet de la requête et décision du tribunal

531.  (1) Le tribunal peut en tout temps rejeter toute requête qu’il juge vexatoire ou dénuée de tout intérêt ou de bonne foi.

 

         (2) Au terme de l’audition, il peut rejeter la requête; si les motifs sont établis et selon qu’il s’agit d’une requête fondée sur les alinéas 524(1)a) ou b), il doit constater la nullité de l’élection du candidat ou il peut prononcer son annulation.

 

Appel

532. (1) Appel peut être interjeté à la Cour suprême du Canada de la décision rendue en application du paragraphe 531(2), sur une question de droit ou de fait, dans les huit jours suivant la date où elle a été rendue.

 

Procédure

(2) La Cour statue sur l’appel sans délai et selon la procédure sommaire.

 

Le critère applicable aux requêtes en radiation formées sous le régime de la Loi électorale du Canada

 

[16]           La requête en radiation d’une demande introduite en vertu de l’alinéa 524(1)b) de la Loi électorale du Canada est formée sous le régime de son paragraphe 531(1), qui précise que le tribunal peut en tout temps rejeter toute requête qu’il juge vexatoire ou dénuée de tout intérêt ou de bonne foi. La demande en contestation d’une élection introduite en vertu de l’alinéa 524(1)b) de la Loi électorale du Canada n’est ni une demande de contrôle judiciaire présentée en vertu de l’article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales, ni une action qui serait régie par les articles des Règles des Cours fédérales relatifs aux actes de procédure et à la conduite d’une action.

 

[17]           Par conséquent, ni le critère de radiation d’une demande au titre de l’article 18.4 de la Loi sur les Cours fédérales ni le critère de radiation d’une action formulé à l’article 221 des Règles des Cours fédérales ne s’appliquent en toute rigueur aux présentes requêtes formées sous le régime de la Loi électorale du Canada, mais ils peuvent néanmoins éclairer l’analyse sur la question de savoir quand et sur quels fondements ou à quels motifs il est permis à la Cour d’éteindre une instance à une étape peu avancée. La jurisprudence concernant la signification des termes « scandaleux, frivole ou vexatoire » de l’alinéa 221 c) des Règles des Cours fédérales est particulièrement utile à cet égard. Ainsi, les actions peuvent être rejetées dans l’un et/ou l’autre des cas suivants :

i)                    La déclaration est si défectueuse que la partie adverse ne peut en déduire la thèse qu’elle a à réfuter ou présenter une défense pleine et entière.

ii)                  La déclaration n’expose pas de faits substantiels suffisants susceptibles d’étayer une cause d’action.

iii)                La déclaration est si visiblement futile qu’il est « évident et manifeste » que le demandeur n’a aucune chance de succès.

 

[18]           Dans la présente affaire, la Cour doit examiner les avis de demande et décider au vu de ces derniers si les députés défendeurs peuvent comprendre les allégations qui y sont formulées, s’il s’y trouve un quelconque grief ou une quelconque allégation qui, une fois prouvé, pourrait donner lieu à la réparation sollicitée, et si l’une ou l’autre des demandes est manifestement vexatoire, frivole ou de mauvaise foi. Une telle conclusion peut être tirée dans les cas où l’acte de procédure considéré est abusif ou scandaleux, ou n’expose aucun fait substantiel, ne contenant que de simples affirmations, des conclusions de droit, ou des déclarations ou arguments non étayés.

 

[19]           Je conviens avec les députés défendeurs que les auteurs des demandes ici considérées doivent au minimum alléguer dans leurs avis de demande, pris isolément ou collectivement :

i)                    que la conduite dont il est fait état, si elle est prouvée, constituerait une « irrégularité, [une] fraude, [une] manœuvre frauduleuse ou [un] acte illégal »;

ii)                  que la conduite en question a « influé sur le résultat de l’élection » tenue dans chacune des circonscriptions en cause;

iii)                que l’« influence » ou l’incidence de cette conduite dans la circonscription s’est révélée substantielle, en ce sens que le résultat de l’élection y aurait été différent n’eût été ladite conduite.

 

[20]           L’application de ce critère, qui exige que l’instance soit « manifestement futile » ou qu’il soit « évident et manifeste » qu’elle est mal fondée, se révèle conforme à la démarche adoptée dans d’autres affaires où les dispositions applicables prévoient le rejet anticipé d’une demande au motif qu’elle est « scandaleu[se], frivole ou vexatoire ». Il est dûment fait référence dans cette jurisprudence au critère de radiation des actions formulé à l’article 221 des Règles des Cours fédérales; voir par exemple Pfizer Canada Inc. c. Apotex Inc., 1999 CanLII 8371 (CF); et Sanofi‑Aventis Canada Inc. c. Novopharm Ltd., 2007 CAF 163.

 

Les demandes sont‑elles hors délai?

[21]           Comme je le rappelais plus haut, l’article 527 de la Loi électorale du Canada dispose que la demande en contestation d’une élection doit être présentée dans les 30 jours suivant 1) la date de la publication dans la Gazette du Canada du résultat de l’élection contestée ou, 2) si elle est postérieure, la date à laquelle le demandeur a appris, ou aurait dû savoir, que les irrégularité, fraude, manœuvre frauduleuse ou acte illégal allégués ont été commis.

 

[22]           Le point de savoir ce qu’un demandeur « aurait dû savoir » est une question de fait, dont l’examen est régi par les principes que la jurisprudence a élaborés concernant le moment où le préjudice aurait pu être découvert et les inférences raisonnables pouvant être tirées des faits et circonstances de l’espèce. La réponse à cette question ne se fonde pas sur la perception ou l’expérience subjectives ou individuelles, mais sur ce qu’on peut raisonnablement déduire que la personne aurait dû savoir compte tenu des circonstances.

 

[23]           Il est acquis aux débats, font valoir les députés défendeurs – chacun des demandeurs le reconnaît lui‑même et le déclare dans son avis de demande –, que lesdits demandeurs ont reçu, avant le jour de l’élection ou ce jour même, des appels téléphoniques en direct et/ou automatiques pour les informer d’un changement de bureau de scrutin, et qu’ils ont su immédiatement ou peu après que cette information était inexacte. Exception faite de la demanderesse Mme Leeanne Bielli, tous les demandeurs ont voté. Pour ce qui concerne les appels téléphoniques visant à harceler sous prétexte de sollicitation de votes, les députés défendeurs ajoutent que les avis de demande donnent à penser que les destinataires de ces appels savaient qu’ils étaient simulés ou à tout le moins suspects et n’ont pas influencé leur façon d’exercer leur droit de vote.

 

[24]           Le délai de 30 jours a commencé à courir dès que les demandeurs ont pris conscience d’avoir reçu des appels téléphoniques déplacés ou propres à induire en erreur, soutiennent les députés défendeurs, de sorte qu’ils auraient dû introduire leurs demandes en contestation des élections au plus tard le 20 juin 2011, date de la publication des résultats dans la Gazette du Canada.

 

[25]           Les demandeurs font quant à eux valoir que, bien qu’ils aient conclu au moment même de leur réception ou peu après que les appels en cause étaient étranges et destinés à induire en erreur, ils n’avaient aucun moyen de savoir, ni aucune raison de croire ou même de soupçonner, qu’ils n’étaient pas des farces isolées ou faites au hasard, mais s’inscrivaient plutôt dans ce qu’ils affirment maintenant être un plan plus vaste de manipulation, de perturbation et de neutralisation de la participation électorale, qui pourrait constituer une fraude, une manœuvre frauduleuse ou un acte illégal au sens de la Loi électorale du Canada.

 

[26]           Les avis de demande précisent également que les demandeurs ne soupçonnaient pas qu’il puisse s’agir d’une fraude, d’une manœuvre frauduleuse ou d’un acte illégal comme il le font valoir maintenant avant que les médias ne commencent à parler, en février‑mars 2012, des appels robotisés faits dans la circonscription de Guelph, en Ontario, et de l’enquête que menait à ce sujet Élections Canada. C’est seulement alors que les demandeurs disent avoir [TRADUCTION] « fait le lien » et avoir conclu que ce qui leur était arrivé de si nombreux mois auparavant était de même nature et s’inscrivait dans une campagne concertée et délibérée.

 

[27]           Les demandeurs affirment qu’ils n’avaient sur le moment aucune raison de soupçonner qu’une ou plusieurs personnes auraient pu entreprendre une campagne de coups bas ou de neutralisation de la participation électorale comme ils le soutiennent maintenant, et qu’il ne serait pas raisonnable de conclure qu’eux‑mêmes, ou tous autres électeurs ayant reçu ce genre d’appels, étaient tenus de les signaler immédiatement ou d’introduire sur‑le‑champ une demande en contestation d’élection sous le régime de la Loi électorale du Canada. Au moment où ils ont reçu le ou les appels étranges, douteux ou trompeurs en question, expliquent‑ils, ils n’avaient aucune raison de croire qu’il ne s’agissait pas d’événements isolés ni de penser ou de croire que ces appels pouvaient faire partie de quelque chose de plus vaste ou d’orchestré.

 

[28]           Il n’est pas possible de décider dans le cadre de la présente requête en rejet sommaire si les demandes attaquées ont été introduites hors délai de sorte qu’il serait maintenant interdit aux demandeurs de les poursuivre. Quand les demandeurs auraient‑ils dû savoir? Il n’est pas évident, contrairement à ce que soutiennent les députés défendeurs, que toute personne raisonnable informée de tous les faits et circonstances aurait su, de même que les demandeurs auraient dû savoir au moment où ils ont reçu l’appel ou les appels en cause, que ceux‑ci relevaient ou pouvaient relever d’une fraude, d’une manœuvre frauduleuse ou d’un acte illégal commis pendant la campagne électorale, et que le délai d’introduction d’une demande en contestation d’élection avait commencé à courir. Or, s’il n’est pas possible de la décider de manière claire et certaine à partir des documents déposés dans le cadre de la présente requête, la question de la conformité au délai prescrit doit être tranchée, et peut seulement l’être, sur la base d’un dossier complet dans le cadre de l’instruction des demandes sur le fond.

 

Les demandes sont‑elles radicalement viciées et vouées à l’échec?

 

[29]           Les députés défendeurs font valoir que le critère auquel le paragraphe 524(1) de la Loi électorale du Canada subordonne l’annulation d’une élection exige que les demandeurs prouvent les faits suivants :

i)                    il y a eu une irrégularité, une fraude, une manœuvre frauduleuse ou un acte illégal;

ii)                  ces agissements ont influé sur le résultat de l’élection;

iii)                l’effet desdits agissements sur le résultat de l’élection en prouvant que le nombre des votes sur lesquels ils ont influé était supérieur à la marge de victoire.

 

[30]           Les députés défendeurs soutiennent que, étant donné la forme que les demandeurs ont donnée aux instances et les faits substantiels exposés dans les actes de procédure, il est impossible pour les demandeurs de remplir ce critère. Les députés défendeurs expliquent d’abord que les demandeurs ne remplissent pas la première condition du critère, soit celle qui consiste à exposer des faits substantiels qui, s’ils étaient prouvés, suffiraient à établir qu’une fraude, une manœuvre frauduleuse ou un acte illégal a été commis lors des dernières élections générales fédérales. Ils invoquent aussi les deuxième et troisième volets du critère et soutiennent que les demandeurs se trouvent indubitablement incapables d’établir, sur la base des faits exposés, que les pratiques irrégulières alléguées, à en supposer l’existence, aient influé sur les résultats des élections, ou que leurs marges respectives de victoire devraient être, ou seraient, réduites ou supprimées de manière à justifier l’annulation de ces résultats. Il ne fait fondamentalement aucun doute, ajoutent les députés défendeurs, que la Cour se verra dans l’impossibilité de conclure que des irrégularités ou des actes illicites, à supposer qu’il en ait été commis, aient influé sur une quantité de votes égale ou supérieure à la marge de majorité qu’ils revendiquent, et que par conséquent l’instruction sur le fond des demandes attaquées serait essentiellement inutile. Voir Blanchard c. Cole, [1950] 4 DLR 316 (C.A.N.‑É.); et O’Brien c. Hamel, [1990] 73 O.R. (2d) 87 (H.C.).

 

[31]           Les députés défendeurs font aussi observer que, à l’exception de Mme Bielli, tous les demandeurs ont voté, par anticipation ou le jour même de l’élection, et qu’ils n’ont annoncé la production d’aucun élément de preuve directe tendant à établir que la réception de l’un ou l’autre des appels téléphoniques en cause, ordinaires ou automatiques, ait influencé ou empêché de voter un quelconque électeur, comme il le faudrait pour justifier l’annulation d’une élection : Di Biase c. Vaughan (City), 2007 CarswellOnt 8775 (C.A.), conf. 2007 CarswellOnt 5876 (C.S.J.); voir aussi Gross c. Wiebe, [1976] W.W.R. 394 (C.A. Sask.).

 

[32]           On peut lire ce qui suit dans les prétentions écrites déposées par chacun des députés défendeurs :

[TRADUCTION] Au lieu d’exposer des cas réels d’électeurs qui auraient été empêchés de voter, les demandeurs s’appuient sur une « analyse empirique de la participation au scrutin et des tendances de celle‑ci » et affirment qu’une prétendue campagne de « neutralisation de la participation électorale » aurait réduit cette participation « en moyenne de 3 % ».

 

 

Selon les députés défendeurs, une telle preuve reposant sur des techniques des sciences sociales est insuffisante et, en l’absence de tous autres faits substantiels, la Cour se verra incapable de conclure que les appels en cause ont le moindrement influé sur les résultats des élections, ou l’ont fait dans une mesure telle qu’elle puisse ordonner l’annulation de celles‑ci.

 

[33]           Les demandeurs ne contestent pas les observations des députés défendeurs touchant le cadre d’analyse ou le critère général que la Cour doit appliquer à tout examen au fond d’une contestation d’élection. Les demandeurs reconnaissent que pèse sur eux la charge d’établir : 1) qu’il y a eu fraude, manœuvre frauduleuse ou acte illégal; 2) que ces agissements ont influé sur le résultat de l’élection; et 3) que cet effet était tel que la marge de majorité ou de victoire s’en trouve réduite ou supprimée, et qu’il convient en conséquence de constater la nullité de l’élection ou d’en prononcer l’annulation. Les points sur lesquels ne s’entendent pas les parties tiennent à la nature de la preuve pertinente et admissible et à la manière dont la Cour devrait effectuer l’analyse qui la mènera à tirer des conclusions.

 

[34]           Les demandeurs déclarent que, dans les contestations d’élection qui mettent en jeu des suffrages non exprimés pour cause de fraude, de manœuvre frauduleuse ou d’acte illégal (telles que les affaires de neutralisation de la participation électorale ou d’intimidation d’électeurs), il est impossible d’effectuer un décompte sûr ou réaliste des votes ou des électeurs touchés, tout comme d’établir par une analyse concrète si les votes fantômes ou inexistants en question ont influé sur la marge de victoire de l’un quelconque des députés défendeurs. Dans ce genre d’affaires, on ne peut s’en remettre simplement à une opération quantitative ou arithmétique, puisque le tribunal ne peut compter ce qui n’existe pas. Les demandeurs ajoutent qu’il serait déraisonnable et même abusif d’attendre des électeurs admissibles, pris individuellement, qu’ils s’identifient en masse afin de faciliter un tel dénombrement hypothétique des suffrages non exprimés.

 

[35]           Concernant les avis de demande, les demandeurs y décrivent en détail les actes qu’ils affirment relever de la neutralisation de la participation électorale ou du harcèlement d’électeurs ainsi que la manière dont ils ont été commis, y compris les appels visant à les induire en erreur sur les bureaux de scrutin où ils devaient se présenter. Ils s’appuient en outre sur des articles de presse touchant les appels « robotisés » et les enquêtes que menait Élections Canada sur des allégations de neutralisation de la participation électorale avancées à propos d’autres circonscriptions.

 

[36]           Les demandeurs ont déposé au soutien de leurs demandes respectives des affidavits où chacun d’eux rend compte de sa propre réception d’appels téléphoniques en direct ou automatiques pendant la campagne électorale. Ils s’appuient également sur un affidavit de Mme Annette Desgagné, ancienne employée de RMG, entreprise que le PCC et certains de ses candidats ont engagée pour appeler les électeurs pendant ladite campagne. Ils ont également déposé un affidavit de M. Robert Penner, présenté comme [TRADUCTION] « un expert dans l’élaboration et la mise en œuvre de programmes hautement perfectionnés de communication avec les électeurs », qui expose ses connaissances sur la manière dont les partisans d’un candidat sont identifiés et joints, ainsi que son opinion sur la nature et la source des appels trompeurs et harcelants faits dans les sept circonscriptions que visent les demandes en cause. Enfin, les demandeurs ont déposé un affidavit de M. Frank Graves, de la firme EKOS Research Associates Inc., qui est présenté comme un expert des méthodes de recherche sociale et d’analyse statistique, et qui expose entre autres son opinion d’expert, fondée sur un sondage d’électeurs qu’il a effectué, touchant l’effet des appels en direct et automatisés sur les résultats des élections tenues dans chacune des sept circonscriptions en cause.

 

[37]           Les demandeurs déclarent ce qui suit dans les avis de demande concernant la manière dont les agissements considérés ont influé sur les résultats des élections dans les sept circonscriptions et leur effet possible sur la marge de victoire ou de majorité :

[TRADUCTION]

 

Il est possible d’estimer l’efficacité des techniques de neutralisation de la participation électorale, telles que celles dont on a signalé l’emploi au cours des élections, au moyen d’une analyse empirique de la participation au scrutin et des tendances de celle‑ci. Cette analyse donne à penser que des techniques comme celles qui mettent en œuvre des appels adressant les électeurs à un autre bureau de vote que celui où ils devraient se présenter, ou les harcelant afin de les détourner d’appuyer des opposants politiques, ont réduit en moyenne de 3 % la participation au scrutin.

 

Une réduction de 3 % de la participation au scrutin dans une circonscription typique équivaut à l’abstention de 2 500 électeurs admissibles.

 

 

[38]           Le point de savoir si ces éléments sont suffisants n’est pas en litige dans la présente requête; la Cour ne peut se prononcer sur l’admissibilité ou le caractère suffisant ou non de la preuve dans le cadre d’une requête en radiation. Les demandeurs et les députés défendeurs se font manifestement une idée différente de la nature de la preuve qui peut ou doit être produite, et de l’analyse qui peut ou doit être effectuée, dans les affaires de neutralisation de la participation électorale.

 

[39]           Les députés défendeurs exhortent la Cour à adopter la démarche suivie dans des affaires portant sur l’admissibilité d’électeurs ou la légitimité de suffrages effectivement exprimés, où il s’agissait de savoir si ceux‑ci devaient être déclarés valides et comptés, ou annulés. Ils citent à ce propos les paragraphes 70 à 72 de Wrzesnewskyj c. Attorney General (Canada), 2012 ONSC 2873 (CanLII) :

[TRADUCTION]

 

70. Je me trouve ainsi amené à considérer l’essence du critère : Que faut‑il pour établir qu’une irrégularité déterminée a influé sur le résultat de l’élection?

 

71. La jurisprudence donne à penser qu’il s’agit d’une question étroite, et, en général, les parties s’entendent sur la réponse à y donner. « [L’]élection doit être invalidée si le nombre des votes irréguliers dépasse la marge de majorité des suffrages exprimés [...] La marge de majorité, soit le nombre des votes dont il faut constater la nullité avant d’invalider une élection, a été désignée dans des affaires telles que la présente comme un nombre magique [...]

 

72. La question à se poser pour établir si une élection doit être annulée a été exprimée de différentes manières :

– Y avait‑il dans l’urne des bulletins de vote qui n’auraient pas dû s’y trouver? [...]

– Y a-t-il des personnes qui ont voté qui [...] n’auraient pas dû être autorisées à voter [...]?

 

 

Ces questions exigent que le tribunal qui en est saisi détermine l’irrégularité en cause et ses effets, analyse chaque bulletin de vote contesté soit isolément, soit comme partie d’un ensemble qui pourrait avoir été touché par la même irrégularité, puis, s’il y a lieu, additionne les bulletins qui n’auraient pas dû être déposés et établisse si le nombre des suffrages ainsi écartés égale ou dépasse la marge de majorité.

 

[40]           Selon les députés défendeurs, il incombe de la même manière aux demandeurs d’identifier et de dénombrer avec précision les électeurs touchés et les bulletins de vote qui auraient dû être déposés mais n’ont pu l’être, et il faut que ces suffrages dont l’expression est supposée avoir été empêchée soient en nombre suffisant pour avoir influé sur le résultat de l’élection. Les demandeurs soutiennent pour leur part qu’il faut adopter, dans les affaires de neutralisation de la participation électorale, un fondement probatoire différent ou une autre méthode d’analyse pour établir si les actes illicites en question ont influé sur les résultats de l’élection ou comment ils l’ont fait. On ne peut dire avec certitude lequel de ces critères ou laquelle de ces démarches doit être retenu dans une affaire où l’on affirme qu’il a été fait obstacle à la participation électorale.

 

[41]           Étant donné l’absence de jurisprudence claire sur cette question, on ne peut conclure que les demandes sont si « complètement dépourvues de bien‑fondé » qu’il faille les rejeter sommairement. Il y a donc lieu de rejeter les requêtes des députés défendeurs, et les questions du caractère suffisant ou non de la preuve ainsi que celle du critère applicable devront être tranchées dans le cadre de l’instruction des demandes sur le fond.

 

Conclusion

[42]           Les avis de demande exposent les allégations des demandeurs, les faits sur lesquels ils les fondent et la réparation qu’ils sollicitent. La question reste posée de savoir s’ils obtiendront ou non gain de cause, mais on ne m’a pas convaincue, malgré l’argumentation des députés défendeurs, que les demandes sont si défectueuses que leur instruction sur le fond serait manifestement une opération inutile ou un gaspillage de ressources.

 

[43]           Comme les demandeurs le font observer, Élections Canada ne dispose pas du pouvoir d’annuler ni d’autrement invalider le résultat d’une élection qui pourrait avoir été entachée de fraude, de manœuvres frauduleuses ou d’actes illégaux. Seul le « tribunal compétent », au sens de la Loi électorale du Canada, est apte à le faire, sur demande d’un électeur habile à voter dans la circonscription en cause ou d’un candidat dans celle‑ci.

 

[44]           Les parties rappellent toutes deux que les demandes formées en vertu du paragraphe 524(1) de la Loi électorale du Canada doivent être instruites sans délai et selon la procédure sommaire. En conséquence, je renvoie les parties à l’ordonnance de la protonotaire Aronovitch, responsable principale de la gestion de l’instance, en date du 25 mai 2012 et modifiée par la suite, et les exhorte à faire en sorte que les demandes en cause soient instruites le plus tôt possible.


ORDONNANCE

 

            LA COUR ORDONNE :

 

1.                  Les requêtes sont rejetées.

 

2.                  Si les parties ne peuvent s’entendre sur les dépens, chacune d’elles pourra déposer à ce sujet des observations écrites, qui ne devront pas dépasser trois pages, dans les dix jours suivant la date de la présente ordonnance.

 

 

« Martha Milczynski »

Protonotaire,

responsable de la gestion de l’instance

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Sandra de Azevedo, LL.B.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                    T‑616‑12

 

INTITULÉ :                                                  LEEANNE BIELLI c.
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA, MARC MAYRAND (DIRECTEUR GÉNÉRAL DES ÉLECTIONS), URMA ELLIS (DIRECTRICE DU SCRUTIN DE DON VALLEY‑EST), JOE DANIEL, YASMIN RATANSI, MARY TRAPANI HYNES, AKIL SADIKALI ET RYAN KIDD

 

 

DOSSIER :                                                    T‑619‑12

 

INTITULÉ :                                                  SANDRA McEWING ET BILL KERR c.
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA, MARC MAYRAND (DIRECTEUR GÉNÉRAL DES ÉLECTIONS), JOHANNA GAIL DENESIUK (DIRECTRICE DU SCRUTIN DE WINNIPEG‑SUD‑CENTRE), JOYCE BATEMAN, ANITA NEVILLE, DENNIS LEWYCKY, JOSHUA McNEIL, LYNDON B. FROESE ET MATT HENDERSON

 

 

DOSSIER :                                                    T‑620‑12

 

INTITULÉ :                                                  KAY BURKHART c.
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA, MARC MAYRAND (DIRECTEUR GÉNÉRAL DES ÉLECTIONS), DIANNE CELESTINE ZIMMERMAN (DIRECTRICE DU SCRUTIN DE SASKATOON‑ROSETOWN‑BIGGAR), KELLY BLOCK, LEE REANEY, VICKI STRELIOFF ET NETTIE WIEBE

 

 

DOSSIER :                                                    T‑621‑12

 

INTITULÉ :                                                  JEFF REID c.
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA, MARC MAYRAND (DIRECTEUR GÉNÉRAL DES ÉLECTIONS), LAUREL DUPONT (DIRECTRICE DU SCRUTIN D’ELMWOOD‑TRANSCONA), JIM MALOWAY, ILONA NIEMCZYK, LAWRENCE TOET ET ELLEN YOUNG

 

DOSSIER :                                                    T‑633‑12

 

INTITULÉ :                                                  KEN FERANCE ET PEGGY WALSH CRAIG c.
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA, MARC MAYRAND (DIRECTEUR GÉNÉRAL DES ÉLECTIONS), DIANNE JAMES MALLORY (DIRECTRICE DU SCRUTIN DE NIPPISSING‑TIMISKAMING), JAY ASPIN SCOTT, EDWARD DALEY, RONA ECKERT ET ANTHONY ROTA

 

DOSSIER :                                                    T‑634‑12

 

INTITULÉ :                                                  YVONNE KAKFA c.
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA, MARC MAYRAND (DIRECTEUR GÉNÉRAL DES ÉLECTIONS), ALEXANDER GORDON (DIRECTEUR DU SCRUTIN DE L’ÎLE DE VANCOUVER‑NORD), JOHN DUNCAN, MIKE HOLLAND, RONNA‑RAE LEONARD, SUE MOEN, FRANK MARTIN ET JASON DRAPER

 

 

DOSSIER :                                                    T‑635‑12

 

INTITULÉ :                                                  THOMAS JOHN PARLEE c.
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA, MARC MAYRAND (DIRECTEUR GÉNÉRAL DES ÉLECTIONS), SUSAN J. EDELMAN (DIRECTRICE DU SCRUTIN DU YUKON), RYAN LEEF, LARRY BAGNELL, KEVIN BARR ET JOHN STREICKER

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                          Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                         Le 25 juin 2012

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                                  LA PROTONOTAIRE MILCZYNSKI

 

DATE DES MOTIFS :                                 Le 19 juillet 2012

 

 

COMPARUTIONS :

 

Steven Shrybman

Lucy Draper‑Chislett (stagiaire)

 

POUR LES DEMANDEURS

 

Arthur Hamilton

Ted Frankel

Chris Selby (stagiaire)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Sack, Goldblatt

Avocats

Ottawa (Ontario)

 

POUR LES DEMANDEURS

 

Cassels Brock

Avocats

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.