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Date : 20121210

Dossier : IMM-2884-12

Référence : 2012 CF 1456

[traduction FRANÇAISE certifiée, non révisée]

Ottawa (Ontario), le 10 décembre 2012

En présence de monsieur le juge O’Reilly

 

 

ENTRE :

 

ALEXEY AVERIN

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE

ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

I.          Aperçu

 

[1]               En 2007, M. Alexey Averin est arrivé au Canada en provenance de l’Ukraine en qualité de visiteur. Il a présenté une demande d’asile qui a été rejetée.

 

[2]               Après le rejet de sa demande d’asile, M. Averin a été l’objet de plusieurs fâcheux incidents. Il a subi deux accidents de voiture qui ont entraîné chez lui des limitations physiques et des problèmes de santé mentale. Selon les diagnostics de ces médecins, il souffre de dépression majeure, de syndrome de stress post‑traumatique, et d’une forme grave de phobie à l’idée d’être dans une voiture. Il doit prendre beaucoup de médicaments différents. Il dépend de l’aide sociale, et des membres de sa famille au Canada.

 

[3]               En novembre 2011, M. Averin a tenté de se pendre. Ses voisins l’ont sauvé. Pendant qu’il était à l’hôpital, grâce à l’aide de sa mère, M. Averin a présenté une demande d’examen des risques avant renvoi (ERAR). Il prétend qu’il ne serait pas en mesure d’obtenir un traitement médical adéquat en Ukraine, qu’il n’aurait pas les moyens de l’assumer, et qu’il y a [traduction] « un grave problème quant au traitement des patients atteints de santé mentale » dans ce pays. Il a déposé son dossier médical, et des éléments de preuve documentaire sur l’offre de soins de santé mentale en Ukraine.

 

[4]               L’agent chargé de l’ERAR a rejeté la demande de M. Averin. Cette décision fait l’objet d’une demande de contrôle judiciaire distincte (voir IMM‑2600‑12).

 

[5]               M. Averin a aussi demandé à un agent chargé de l’exécution en matière d’immigration le report de son renvoi, jusqu’à ce qu’il soit statué sur sa demande présentée pour des motifs d’ordre humanitaire (la demande CH) en cours. Dans sa demande de report, M. Averin a exprimé des préoccupations quant au défaut de traitement adéquat, et quant à de possibles mauvais traitements en Ukraine. L’agent a rejeté la demande de M. Averin.

 

[6]               M. Averin avance que l’agent a omis d’examiner le véritable fondement de sa demande, à savoir le fait qu’il n’aurait pas accès aux médicaments dont il avait besoin ou à un traitement médical adéquat. L’agent a examiné les dossiers médicaux récents déposés par M. Averin, et l’agent a conclu que l’état de santé de M. Averin s’améliorait. Le fait que M. Averin avait une demande CH en cours ne justifiait pas, en soi, un report du renvoi.

 

[7]               M. Averin fait valoir que la décision de l’agent est déraisonnable, et il demande à la Cour d’infirmer cette décision et d’ordonner qu’un autre agent procède à un nouvel examen de sa demande.

 

[8]               La Cour est d’accord que la décision de l’agent était déraisonnable et la Cour accueillera donc la présente demande de contrôle judiciaire.

 

II.        La décision de l’agent était‑elle déraisonnable?

[9]               Le pouvoir discrétionnaire des agents chargés du renvoi est limité. Ils peuvent seulement reporter le renvoi lorsqu’il existe des circonstances personnelles impérieuses qui justifient un report temporaire : Ramada c Canada (Solliciteur général), 2005 CF 1112, au paragraphe 3; Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile) c Shpati, 2011 CAF 286, au paragraphe 43.

[10]           M. Averin a soulevé une préoccupation quant à savoir s’il pouvait avoir accès aux médicaments dont il avait besoin en Ukraine. Dans une lettre précédente à un autre agent d’exécution, cette préoccupation avait été clairement exprimée et l’agent avait demandé des précisions supplémentaires relativement aux divers médicaments que M. Averin prenait. Dans ses observations à l’agent qui a pris la décision, M. Averin a souligné que l’agent précédent avait conclu que seul un des nombreux médicaments qu’il prenait était offert en Ukraine.

 

[11]           Toutefois, l’agent qui a pris la décision ne s’est pas penché sur cette question, et il n’a pas fait référence à la preuve présentée sur ce point. Selon moi, vu les éléments de preuve dont il disposait, l’agent avait l’obligation d’examiner si le fait que les médicaments n’étaient pas offerts à M. Averin présentait une « circonstance personnelle impérieuse » qui justifiait un report. Le simple fait que M. Averin avait une demande CH en cours n’aurait pas justifié un report. Cependant, le fait que M. Averin n’aurait pas accès aux médicaments dont il avait besoin aurait fourni ladite justification. L’agent n’a pas examiné cette question.

 

[12]           Selon la Cour, la décision l’agent était déraisonnable parce qu’elle n’a pas tenu compte d’une circonstance personnelle impérieuse à laquelle était exposé M. Averin. L’agent disposait d’éléments de preuve établissant que M. Averin pourrait ne pas avoir accès aux médicaments dont il avait besoin. L’agent n’a simplement pas tenu compte de cette preuve. La Cour conclut donc que la décision de l’agent ne représente pas une issue défendable basée sur la preuve dont il disposait et sur le droit qui exige que l’agent examine les circonstances personnelles du demandeur. Par conséquent, la Cour doit accueillir la présente demande de contrôle judiciaire.

 

III.       Conclusion

 

[13]           L’agent a omis d’examiner une question importante relative au moment du départ de M. Averin du Canada. Vu cette omission, la décision de l’agent était déraisonnable parce qu’elle n’a pas tenu compte de la preuve dont il disposait et qu’elle ne satisfaisait pas à l’obligation de tenir compte des circonstances personnelles du demandeur. Par conséquent, la Cour doit accueillir la présente demande de contrôle judiciaire et ordonner qu’un autre agent procède à un nouvel examen de la demande de M. Averin.

 

[14]           Aucune des parties n’a proposé de question de portée générale pour que la Cour la certifie, et aucune n’est énoncée.


JUGEMENT

LA COUR STATUE EN CES TERMES :

1.                                          La demande de contrôle judiciaire est accueillie. L’affaire est renvoyée à un autre agent pour nouvel examen.

2.                                          Aucune question de portée générale n’est énoncée.

 

 

« James W. O’Reilly »

Juge

 

Traduction certifiée conforme

Laurence Endale, LLM., M.A.Trad.jur

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                              IMM-2884-12

 

INTITULÉ :                                            ALEXEY AVERIN

                                                                  c

MSPPC

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                    Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                   Le 19 novembre 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                  Le juge O’Reilly

 

DATE DU JUGEMENT

ET DES MOTIFS :                                 Le 10 décembre 2012

 

 

COMPARUTIONS :

 

Geraldine MacDonald

POUR LE DEMANDEUR

 

Nadine Silverman

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

 

Geraldine MacDonald

Avocate

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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