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Date : 20130205

Dossier : T‑582‑12

Référence : 2013 CF 123

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

ENTRE :

 

AMIR ATTARAN

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

          TAXATION DES DÉPENS – MOTIFS

Bruce Preston – Officier taxateur

 

[1]               Le 30 mai 2012, le demandeur s’est désisté de son avis de demande.

 

[2]               Le 2 octobre 2012, le défendeur a déposé son mémoire de frais. À la suite d’une directive donnée le 29 juin 2012, les parties ont déposé leurs observations quant aux dépens. Il est consigné au dossier que le 30 octobre 2012, le défendeur a déposé un mémoire de frais modifié. C’est ce mémoire de frais modifié que je vais taxer.

 

Services à taxer

[3]               Le défendeur a réclamé sept unités au titre de l’article 5 (requête contestée) pour l’obtention d’une décision concernant son opposition fondée sur le paragraphe 318(2), conformément au paragraphe 318(3) des Règles des Cours fédérales. Le défendeur fait valoir que la Cour accorde régulièrement des dépens pour les requêtes fondées sur l’article 318 des Règles. À l’appui de cet argument, il invoque plusieurs affaires dans lesquelles la Cour a accordé des dépens après une décision rendue en vertu de l’article 318 des Règles : Yeager c Canada (Sécurité publique et protection civile), 2009 CF 813; Lafond c Ledoux, 2008 CF 1369; Western Canada Wilderness Committee c Canada (Ministre de l’Environnement), 2006 CF 786; Canadian Artic Resources Committee Inc c Diavik Diamond Mines Inc, [2000] ACF no 910; Pauktuutit Inuit Women’s Association c Canada, 2003 CFPI 165. De plus, le défendeur soutient que la requête en cause se rapportait à une demande théorique et donc vexatoire et qu’en obligeant la présentation d’une requête pour qu’il soit statué sur l’opposition du défendeur, le demandeur a inutilement forcé le défendeur à contester la requête.

 

[4]               En réponse, le demandeur soutient que la requête n’a pas été tranchée puisqu’il s’est désisté de sa demande dans son intégralité et que, comme il n’y a pas eu de décision, aucuns dépens n’avaient été adjugés par la Cour. Il ajoute que, dans ces circonstances, l’officier taxateur n’a pas compétence pour accorder au défendeur des dépens au titre de l’article 5. Pour appuyer sa prétention, le demandeur renvoie aux trois décisions suivantes : Haghparast‑Rad c Canada (Procureur général), 2011 CF 1072, Canada c Uzoni, 2006 CAF 344, et Halme and Fex c Caisse Populaire de Hearst Ltée, 2011 CF 916.

 

[5]               En réplique, le défendeur prétend que le demandeur a mal interprété la nature de la requête et se fonde sur des décisions qui ne s’appliquent pas en l’espèce : il ne s’agit pas d’une requête en prorogation de délai dans un dossier préliminaire (Haghparast‑Rad), on n’est pas en présence d’un dispositif qui ne prévoit aucune adjudication de dépens (Uzoni), et il ne s’agit pas d’une requête du défendeur qui a été finalement entendue avant le désistement de l’instance par le demandeur (Halme). De plus, au paragraphe 3 des observations qu’il a formulées en réplique, le défendeur soutient ce qui suit :

[traduction] La requête fondée sur l’article 317 des Règles a été présentée par le demandeur, non par le défendeur. C’est le demandeur qui a demandé des directives pour présenter des observations sur l’opposition fondée sur l’article 318 des Règles, et la Cour a ordonné au défendeur de signifier et de déposer ses observations dans les 10 jours suivant la date de l’ordonnance. Le défendeur s’est dûment conformé à cette ordonnance.

 

[6]               Enfin, le défendeur fait valoir que l’officier taxateur a clairement compétence pour établir les dépens relatifs à la requête abandonnée par le demandeur. Le défendeur soutient que le demandeur ne peut se soustraire à l’action de l’article 402 des Règles portant sur l’abandon d’une requête, en présentant un avis de désistement, alors que le défendeur a consacré des ressources considérables à la préparation d’observations.

 

[7]               L’article 318 des Règles dispose :

318. (1) Dans les 20 jours suivant la signification de la demande de transmission visée à la règle 317, l’office fédéral transmet

 

a) au greffe et à la partie qui en a fait la demande une copie certifiée conforme des documents en cause;

 

b) au greffe les documents qui ne se prêtent pas à la reproduction et les éléments matériels en cause.

 

(2) Si l’office fédéral ou une partie s’opposent à la demande de transmission, ils informent par écrit toutes les parties et l’administrateur des motifs de leur opposition.

 

 

(3) La Cour peut donner aux parties et à l’office fédéral des directives sur la façon de procéder pour présenter des observations au sujet d’une opposition à la demande de transmission.

 

(4) La Cour peut, après avoir entendu les observations sur l’opposition, ordonner qu’une copie certifiée conforme ou l’original des documents ou que les éléments matériels soient transmis, en totalité ou en partie, au greffe.

 

318. (1) Within 20 days after service of a request under rule 317, the tribunal shall transmit

 

 

(a) a certified copy of the requested material to the Registry and to the party making the request; or

 

(b) where the material cannot be reproduced, the original material to the Registry.

 

 

(2) Where a tribunal or party objects to a request under rule 317, the tribunal or the party shall inform all parties and the Administrator, in writing, of the reasons for the objection.

 

(3) The Court may give directions to the parties and to a tribunal as to the procedure for making submissions with respect to an objection under subsection (2).

 

 

(4) The Court may, after hearing submissions with respect to an objection under subsection (2), order that a certified copy, or the original, of all or part of the material requested be forwarded to the Registry.

 

 

[8]               Il n’y a rien dans les dispositions de l’article 318 des Règles qui indique une obligation de déposer un avis de requête pour que le juge statue sur une opposition faite en vertu du paragraphe 318(2). Par ailleurs, il ressort clairement des données consignées dans le présent dossier que la décision relative à l’opposition faisait suite à une directive de la Cour datée du 15 mai 2012. De plus, l’article 5 du tableau du tarif B vise les services taxables touchant la « préparation et [le] dépôt d’une requête contestée, y compris les documents et les réponses s’y rapportant ». Étant donné qu’il n’y a pas d’obligation de déposer un avis d’une requête en vertu de l’article 318 des Règles, que la Cour n’a pas exigé un tel dépôt et qu’aucun avis d’une requête n’a été déposé, j’estime que les circonstances justifiant une réclamation au titre de l’article 5 ne sont pas présentes.

 

[9]               Toutefois, si je suis dans l’erreur et que la décision relative à une opposition fondée sur le paragraphe 318(2) des Règles devrait être réputée une requête dans le cadre d’une taxation des dépens, ma décision reste la même. Le paragraphe 318(3) dispose que « la Cour peut donner aux parties et à l’office fédéral des directives sur la façon de procéder pour présenter des observations au sujet d’une opposition à la demande de transmission », mais les parties ne sont pas formellement tenues de demander de telles directives. De plus, la directive de la Cour, datée du 15 mai 2012, prévoit que :

 

[traduction]

a)                  Dans les 10 jours suivant la date de la présente directive, le défendeur signifie et dépose un dossier contenant des observations écrites faisant état des motifs et des arguments à l’appui de son opposition à la production de documents en vertu de l’article 318 des Règles, lequel comprend, le cas échéant, toute preuve par affidavit qui pourrait être utile à la Cour pour statuer sur l’opposition.

 

b)                  Dans les sept jours suivant la signification du dossier du défendeur, le demandeur présente un dossier de réponse, lequel comprend toute preuve par affidavit qui pourrait être utile à la Cour pour statuer sur l’opposition.

 

c)                  Des prétentions écrites en réponse peuvent être signifiées et déposées par le défendeur au plus tard quatre jours après la signification du dossier du demandeur.

 

d)                 Sauf directives contraires de la Cour, il est statué sur l’opposition sur la base du dossier écrit constitué conformément à la présente directive.

 

e)                  Le greffe doit retourner au défendeur la lettre datée du 10 avril 2012.

 

 

[10]           Comme le défendeur a, aux termes de la directive, la possibilité d’être le premier à signifier et à déposer des observations, j’estime que la Cour a considéré que le défendeur était le requérant. D’ailleurs, le défendeur s’est vu offrir la possibilité de répondre à la réponse du demandeur. Par conséquent, si la décision concernant l’opposition devait être considérée comme une requête, c’est l’opposition du défendeur fondée sur le paragraphe 318(2) des Règles qui est la requête, et non pas la demande de directives faite par le demandeur. Par conséquent, j’estime que la requête du défendeur ne peut pas avoir été abandonnée par suite du désistement du demandeur de sa demande. Dans ces circonstances et conformément à la décision Halme, précitée, j’estime que la Cour n’a pas tranché la requête du défendeur avant le désistement de l’avis de demande et que, par conséquent, la Cour n’a pas accordé de dépens pour la requête. Comme il a été déclaré dans l’arrêt Uzoni, précité, il est bien établi que la Cour a le pouvoir discrétionnaire d’adjuger des dépens et, lorsqu’elle ne le fait pas, les officiers taxateurs n’ont pas compétence pour accorder les dépens afférents à une requête. Quoi qu’il en soit, la réclamation du défendeur au titre de l’article 5 n’est, par conséquent, pas accueillie.

 

[11]           Puisque la réclamation du défendeur au titre de l’article 25 n’est pas contestée par le demandeur, elle est accueillie telle qu’elle a été présentée dans le mémoire de frais.

 

[12]           Concernant l’article 26, le défendeur allègue dans ses observations que la réclamation de quatre unités constitue un compromis raisonnable étant donné la nature vexatoire de la demande.

 

[13]           En réponse, le demandeur avance qu’un officier taxateur peut accorder les dépens de la taxation à l’une ou l’autre des parties et que les dépens devraient être accordés à la partie qui a fait l’offre la plus raisonnable pour régler les dépens. Le demandeur poursuit en faisant valoir que le défendeur a offert de fixer les dépens à 1 250 $ et le demandeur a offert, en contre‑offre, 500 $. Le demandeur soutient que, selon l’alinéa 400(3)e) des Règles des cours fédérales, un officier taxateur peut tenir compte des offres faites par les parties, même si elles ne satisfont pas au critère de l’article 420 des Règles. De plus, au paragraphe 34 des observations du demandeur, il est écrit :

 

[traduction] L’officier taxateur peut aussi, en vertu des alinéas 400(3)c), i) et k), tenir compte de la complexité des questions en litige, de la conduite d’une partie et de la question de savoir si une mesure prise au cours de l’instance était inappropriée, vexatoire ou inutile. Dans la présente affaire, le défendeur a soulevé plusieurs questions complexes qui se rattachent au droit régissant les dépens devant les tribunaux fédéraux. De plus, le défendeur a essentiellement utilisé à mauvais escient l’article 420 des Règles pour intimider la partie adverse. La demande, qui avait un certain fondement, a fait l’objet d’un désistement au tout début de l’instance. Le fait de solliciter des dépens importants dans de telles circonstances est injustifié et contraire à la politique voulant que la Cour doive encourager les parties à se désister des affaires au tout début de l’instance.

 

 

[14]           En réplique, le défendeur affirme que le demandeur n’a pas droit aux dépens après s’être désisté de sa demande et fait valoir que le plaidoyer du demandeur repose sur l’assertion inexacte selon laquelle l’officier taxateur n’a pas compétence pour adjuger les dépens en faveur du défendeur par suite de la requête fondée sur l’article 317 des Règles. Enfin, le défendeur soutient que, compte tenu de son offre de règlement et des inexactitudes que contient la réponse du demandeur, la réclamation du défendeur au titre de l’article 26 devrait être augmentée à six unités.

 

[15]           Même si j’estime qu’un officier taxateur a toute latitude pour accorder des dépens à une partie en réponse à un mémoire de frais, je ne crois pas qu’il soit justifié de le faire en l’espèce. Même s’il n’a pas eu gain de cause à l’égard de certains articles, le défendeur n’a pas fait valoir de réclamations qui puissent être considérées comme étant manifestement déraisonnables. Par ailleurs, je ne crois pas que la présente taxation des dépens soit exagérément complexe. Le désistement de la demande a eu lieu au début de l’instance, ce qui limite le montant des frais pouvant être réclamés. Pour ce qui est de l’offre de régler les dépens, bien qu’elle ait été mentionnée par les parties, je ne vois aucune preuve de la nature ou de la date de quelque offre que ce soit dans le dossier ni dans les documents présentés. Par conséquent, j’estime n’être en mesure de prendre en considération aucune offre ou contre‑offre relativement à la taxation de l’article 26. Ayant tiré les conclusions susmentionnées, je suis d’avis que la réclamation initiale du défendeur de quatre unités pour la taxation des dépens est raisonnable dans les circonstances. Par conséquent, j’accorde quatre unités au titre de l’article 26.

 

[16]           Pour ce qui est des débours réclamés par le défendeur, le demandeur n’a contesté aucun des montants réclamés. Après examen du dossier, j’estime que les débours réclamés étaient fondés puisqu’ils se rapportent à la directive du 15 mai 2012 ou à la taxation des dépens. De plus, compte tenu des circonstances du présent dossier, j’estime que les débours demandés sont raisonnables. Par conséquent, les débours du défendeur sont accordés tels qu’ils sont présentés dans le mémoire de frais.

 

[17]           Au paragraphe 20 des observations faites par le défendeur pour réfuter les allégations du demandeur, il est concédé que le doublement des dépens en vertu de la règle 420 pourrait ne pas s’appliquer aux frais engagés après la date du jugement et, à ce titre, pourrait ne pas être accordé à l’égard des articles 25 et 26. De plus, j’ai examiné l’article 419 des Règles et j’estime que le doublement des dépens ne s’applique pas à la taxation des dépens puisque cette procédure ne figure pas parmi celles auxquelles les articles 420 et 421 des Règles s’appliquent. Considérant la concession du défendeur et mon examen de l’article 419 des Règles, et considérant que l’article 5 n’a pas été accordé, j’estime qu’il n’est pas nécessaire de trancher la question du doublement des dépens puisqu’il n’y a pas de dépens à doubler.

 

[18]           Pour les motifs qui précèdent, le mémoire de frais du défendeur est taxé à 1 339,52 $. Un certificat de taxation des dépens sera délivré.

 

 

« Bruce Preston »

Officier taxateur

 

Toronto (Ontario)

Le 5 février 2013

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Sandra de Azevedo, LL.B.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                    T‑582‑12

 

INTITULÉ :                                                  AMIR ATTARAN c
procureur général du  CANADA

 

 

TAXATION DES DÉPENS SUR DOSSIER, SANS COMPARUTION DES PARTIES

 

 

LIEU DE LA TAXATION :                       Toronto (Ontario)

 

 

MOTIFS DE LA TAXATION

DES DÉPENS :                                             BRUCE PRESTON

 

 

DATE DES MOTIFS :                                 Le 5 février 2013

 

 

Observations écrites :

 

Paul Champ

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Brian Harvey

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Champ & Associates

Ottawa (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

William F Pentney

Sous‑procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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