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Date : 20130503

Dossier : T‑952‑12

Référence : 2013 CF 464

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 3 mai 2013

En présence de monsieur le juge Roy

ENTRE :

WANDA MACFARLANE

 

demanderesse

 

et

 

 

DAY & ROSS INC. et

E. THOMAS CHRISTIE

 

défendeurs

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

 

[1]               La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision rendue le 30 avril 2012 par un arbitre, M. E. Thomas Christie (l’arbitre), nommé en vertu du paragraphe 241(3) du Code canadien du travail, LRC 1985, c L‑2 (le Code). La plainte de congédiement injuste déposée par Mme Wanda MacFarlane (la demanderesse) a été rejetée par l’arbitre.

 

[2]               La demanderesse s’est représentée elle‑même dans la présente instance pour laquelle deux audiences ont déjà eu lieu afin que la Cour statue sur des questions préliminaires concernant la compétence. Il sera important de se reporter à ces deux décisions étant donné qu’elles permettront de situer le débat sur le fond de l’affaire.

 

Les faits

[3]               La demanderesse a travaillé pour la défenderesse de février 2001 au 4 juillet 2008. La défenderesse, Day & Ross Inc., est une entreprise de camionnage. Pendant cette période, la demanderesse a travaillé comme programmatrice de premier échelon au service de dépannage informatique. Elle avait une formation de programmatrice d’ordinateurs et était chargée de régler les problèmes de technologie de l’information éprouvés par d’autres services de l’entreprise.

 

[4]               La défenderesse compte quelque 3 000 employés et passe aussi des contrats avec quelque 1 500 propriétaires exploitants indépendants et courtiers. Les paiements à ces exploitants et à ces courtiers sont versés au moyen d’un système informatisé; l’information qui y est contenue relève du directeur de la paie des courtiers. C’est le directeur de la paie qui autorise le service de dépannage informatique à apporter des modifications aux dossiers.

 

[5]               Les faits dans des affaires de ce genre sont bien sûr importants : ils sont exposés de façon assez détaillée par l’arbitre dans les motifs de la décision contestée. Aux fins du présent contrôle judiciaire, nous nous contenterons du résumé ci‑après.

 

[6]               Au début de l’année 2008, Mme MacFarlane souffrait de plus en plus souvent de migraines. Le 3 avril 2008, la demanderesse a expliqué à son superviseur que les modifications de ses tâches au cours des six mois précédents l’avaient obligée à passer beaucoup de temps devant des écrans d’ordinateur [traduction] « défilants » qui avaient déclenché ses symptômes. Son superviseur avait constaté une augmentation du nombre de demandes d’aide acheminées au service de dépannage informatique.

 

[7]               La demanderesse a fait part de son désir d’obtenir une promotion, mais l’employeur l’a informée que sa formation et son expérience ne lui permettraient pas d’occuper un poste plus élevé. La demanderesse a pris un congé d’invalidité de courte durée pendant la plus grande partie du mois d’avril. Aucune preuve médicale n’a été produite devant l’arbitre pour justifier le congé d’invalidité en question.

 

[8]               L’arbitre a ensuite souligné que, le 29 avril 2008, une rencontre de retour au travail avait été organisée entre la demanderesse et des représentants de la direction de la défenderesse. Aucun document à caractère médical n’a été apporté à cette occasion mais, selon les déclarations de la demanderesse, les superviseurs ont convenu qu’elle pourrait cesser immédiatement une tâche qui déclenchait le retour des symptômes; dans ce genre de situation, elle était autorisée à confier la tâche en question à une autre personne.

 

[9]               La demanderesse est retournée au travail le 30 avril. Elle avait compris que son retour au travail se faisait dans le cadre d’une période d’essai, mais son superviseur l’avait avertie que si elle souhaitait cesser de travailler de nouveau dans le cadre d’un congé d’invalidité de courte durée, elle devrait formuler une nouvelle demande et étayer cette dernière au moyen d’une preuve médicale. Contrariée par ces nouvelles exigences, la demanderesse a laissé tomber bruyamment un livre sur son bureau. Vers la mi‑mai 2008, la défenderesse a embauché des étudiants dans le service où travaillait la demanderesse. Un des étudiants a obtenu un poste supérieur à celui qu’occupait Mme MacFarlane, ce qui a, encore une fois, déplu à la demanderesse. Elle a dit à son superviseur qu’elle voulait ce poste et sa demande a été refusée. La demanderesse a de nouveau exprimé sa frustration en laissant tomber bruyamment des livres sur son bureau.

 

[10]           Le 22 mai, le directeur des comptes fournisseurs a parlé au superviseur de la demanderesse au sujet de problèmes relatifs aux comptes de paie des courtiers. Le superviseur a téléphoné à Mme MacFarlane à la maison afin de lui demander si elle avait une idée de la source du problème étant donné qu’elle était une des rares personnes à avoir accès aux dossiers informatiques. La demanderesse a répondu qu’elle n’en savait rien.

 

[11]           Or, une enquête a vite révélé que la demanderesse avait supprimé 148 dossiers au cours d’une période de 20 minutes l’après‑midi du vendredi 16 mai 2008; elle a ensuite passé deux jours à les remettre dans le système. La preuve révèle que certains des renseignements avaient été entrés de nouveau de façon inexacte, ce qui a provoqué d’autres problèmes. De plus, selon la preuve, la demanderesse n’avait parlé à personne de ce problème. Au cours de cette période, la demanderesse n’a pas non plus parlé à qui que ce soit de migraines ou d’un autre problème de santé dont elle aurait pu souffrir.

 

[12]           Le superviseur a demandé des explications à la demanderesse, qui lui a répondu qu’elle ne savait pas pour quelle raison elle avait supprimé des dossiers, qu’elle en avait restauré 27 et qu’elle ignorait si d’autres suppressions avaient eu lieu. Le superviseur et les membres de l’équipe ont réussi à recréer les dossiers le 15 mai à partir d’un système de sauvegarde.

 

[13]           Le lundi 26 mai 2008, la demanderesse a écrit au vice‑président des systèmes d’information, une personne qui était présente lors de sa rencontre de retour au travail le 29 avril, pour lui dire que son jugement avait été affaibli au moment où elle avait effectué les suppressions de dossiers et qu’elle ne pouvait pas se rappeler exactement ce qu’elle avait fait ou pourquoi elle avait agi ainsi. Elle a avancé l’hypothèse qu’elle se trouvait alors dans un état précédant l’apparition d’une migraine et elle demandait une mutation à un poste qui ne provoquerait pas de migraines chez elle.

 

[14]           Le dernier jour de travail de la demanderesse a été le 26 mai 2008, avant son départ en congé. Le 30 mai, elle demandait des prestations d’invalidité de courte durée.

 

[15]           La demande de prestations d’invalidité de courte durée a été refusée le 24 juin parce que la preuve médicale ne permettait pas d’étayer ladite demande. La demanderesse a été informée qu’elle devait revenir au travail. Le 27 juin 2008 ou vers cette date, elle a communiqué avec l’administrateur du régime pour lui dire qu’elle en appellerait du refus. Le 30 juin 2008, une lettre l’informait qu’elle devait se présenter à une rencontre le 4 juillet étant donné qu’elle s’était absentée du travail sans autorisation. Le 4 juillet 2008, la demanderesse a téléphoné au bureau pour dire qu’elle ne pouvait pas se présenter à la rencontre et elle a demandé si la rencontre en question porterait sur son licenciement. Elle a été informée que c’était bien le cas.

 

[16]           Une lettre de licenciement a été rédigée le même jour. Quatre motifs étaient invoqués pour justifier le licenciement : négligence grave ayant entraîné la suppression de dossiers; tentative de camoufler l’incident; absence récente sans autorisation; et refus de continuer à travailler à son poste actuel. L’employeur a offert de lui verser son salaire jusqu’au 3 janvier 2009 si elle ne réussissait pas à trouver un autre emploi, de maintenir son admissibilité aux régimes de soins de santé et de soins dentaires et de poursuivre sa participation au régime de retraite. En retour, la défenderesse s’attendait à une exonération complète de responsabilité. Enfin, le licenciement serait considéré comme un licenciement non justifié, ce qui permettrait à la demanderesse d’obtenir des prestations d’assurance‑emploi.

 

[17]           Il convient de faire état du témoignage de certaines personnes afin de mieux comprendre l’affaire dont était saisi l’arbitre.

 

[18]           Un témoin représentant la division de l’entreprise chargée de la gestion des cas d’invalidité a déclaré que la demanderesse n’avait jamais fourni assez d’éléments de preuve médicale objective pour justifier le versement de prestations d’invalidité. Il a été établi qu’un billet d’un médecin daté de février 2008 indiquait que les écrans d’ordinateur défilants pouvaient déclencher des migraines et que par conséquent, ces derniers devraient être évités; selon un autre billet de médecin, la demanderesse avait souffert d’une grave migraine et, par conséquent, elle devrait prendre deux jours de congé. Cependant, la demanderesse avait été invitée à plusieurs reprises à fournir un diagnostic plus précis, un plan de traitement et des renseignements détaillés sur les limites qui en résultaient quant aux tâches et au matériel qui lui étaient confiés. Le 10 mars 2008, la demanderesse a remis à la défenderesse un autre billet de médecin selon lequel elle souffrait de migraines depuis une dizaine d’années et qu’elle devait éviter les excitants visuels, particulièrement après avoir eu à chercher de l’information à un écran d’ordinateur pendant une longue période. C’est sur la foi de ce billet de médecin que l’entreprise avait approuvé sa demande de prestations pour la période du 1er au 28 avril 2008. La rencontre de retour au travail du 29 avril a suivi ce congé.

 

[19]           Le vice‑président des services d’information a aussi témoigné. Il a expliqué que les suppressions de dossiers qui avaient eu lieu le 16 mai 2008 n’étaient pas accidentelles. En effet, elles ne pouvaient être que délibérées. Le témoin ne pouvait pas établir le lien entre des suppressions de dossiers effectuées par la demanderesse et les problèmes de migraine de cette dernière. Les actes de la demanderesse ont détruit le lien de confiance qui doit exister entre un employeur et un employé.

 

[20]           Enfin, la demanderesse a témoigné devant l’arbitre. Elle a décrit la période pendant laquelle elle a travaillé pour la défenderesse. Elle a été embauchée en février 2001 dans le cadre d’un programme d’intégration au marché du travail. Elle a accepté en mai 2001 le poste permanent qui lui était offert. C’est en 2004 qu’elle a fait part de son souhait de quitter le service de dépannage informatique et d’obtenir une promotion. Cette demande a été refusée. Pendant la période où un membre de sa famille très proche d’elle a souffert d’une maladie terminale, elle a cherché à obtenir un horaire variable, mais l’employeur a refusé. Elle a aussi demandé la permission de faire du télétravail, mais sans succès. Elle a de plus demandé un congé pour raisons familiales dans le cadre d’un programme gouvernemental, mais cette demande a été refusée parce qu’elle n’avait pu fournir la date à laquelle elle serait de retour au travail. En mars 2004, le médecin de la demanderesse a déclaré que cette dernière subissait des pressions trop importantes au travail. Elle s’est retrouvée en congé d’invalidité de courte durée, qui s’est transformé en congé d’invalidité de longue durée en juillet 2004. Ce congé d’invalidité s’est poursuivi jusqu’en avril/mai 2006.

 

[21]           À son retour au travail, des modifications ont été peu à peu apportées à ses tâches. Elle a commencé à recevoir des demandes d’aide relativement à des programmes rédigés dans un code différent, ce qui l’obligeait à faire défiler de nombreux écrans pour une même application. L’adoption d’un nouveau système de repérage d’appels l’a aussi obligée à consulter divers écrans. À l’été 2007, elle a demandé de l’aide vu l’augmentation de la charge de travail; elle a alors été informée que d’autres personnes au bureau se chargeraient d’une partie des appels. La demanderesse a ensuite fourni une explication des événements du 16 mai. Elle a dit qu’elle avait reçu une demande de rajustement à dix opérations dans l’application utilisée pour le règlement des paiements aux courtiers. Le dossier contenait plusieurs courriels au sujet de fichiers invalides qu’il fallait supprimer. La demanderesse a déclaré que tout en traitant la demande du 15 mai, elle avait constaté l’existence de fichiers invalides et avait décidé de corriger la situation en les supprimant. C’est uniquement après qu’elle s’est rendu compte qu’elle avait supprimé des renseignements valides; elle a alors essayé de restaurer les dossiers. La demanderesse a nié avoir tenté de camoufler les choses et a souligné qu’elle avait tenté de corriger son erreur. Elle a reconnu qu’elle ne considérait pas qu’elle était invalide au moment de cet incident, mais elle a souligné que, à son avis, la défenderesse ne s’était pas montrée aussi compréhensive qu’elle aurait dû l’être.

 

[22]           Enfin, lorsqu’elle a quitté le travail le 26 mai, elle était certaine que sa nouvelle demande de prestations d’invalidité de courte durée serait autorisée parce qu’elle croyait que la politique de l’entreprise exigeait l’autorisation automatique des demandes renouvelées de prestations. Lorsqu’elle a été convoquée à la rencontre du 4 juillet, elle croyait qu’elle ne pouvait pas être congédiée pendant qu’elle était en congé d’invalidité. Le soir de son congédiement, elle a été hospitalisée à cause de symptômes d’une crise cardiaque. Elle a par la suite obtenu des prestations de maladie dans le cadre du programme d’assurance‑emploi, puis des prestations d’invalidité du Régime de pensions du Canada, qu’elle reçoit encore à ce jour.

 

Instances

[23]           La demanderesse a déposé une plainte contre la défenderesse en vertu de l’article 240 du Code pour congédiement injuste. Un arbitre a été nommé aux termes du paragraphe 242(1) du Code et l’instruction de la plainte devait se dérouler les 25 et 26 août 2009. Cependant, dans l’intervalle, soit le 28 mai 2009, la demanderesse a déposé une plainte devant la Commission canadienne des droits de la personne; dans cette plainte, elle alléguait avoir été victime de discrimination fondée sur l’âge et une incapacité. Elle a soutenu être invalide depuis le 23 mai 2008 et avoir été congédiée alors qu’elle était invalide.

 

[24]           Le 13 août 2009, soit quelque dix jours avant l’audience devant l’arbitre, la défenderesse a soutenu que l’arbitre n’avait pas compétence étant donné la plainte dont avait été saisie la Commission canadienne des droits de la personne [CCDP]. Le 2 septembre 2009, l’arbitre a conclu qu’il ne pouvait connaître de l’affaire de congédiement injuste au fond étant donné qu’une plainte relative aux droits de la personne avait été déposée.

 

[25]           C’est cette décision initiale de l’arbitre que Mme MacFarlane a contestée devant la Cour fédérale. Le juge Robert Mainville, maintenant juge à la Cour d’appel fédérale, a conclu le 26 mai 2010 (2010 CF 556), que l’arbitre avait en partie raison, mais qu’il avait interprété la question de sa compétence sans vérifier s’il aurait pu connaître de l’affaire si celle-ci lui avait été renvoyée en vertu de l’article 44 de la Loi canadienne sur les droits de la personne, LRC 1985, c H‑6. Voici le libellé du paragraphe 84 de la décision :

Pour conclure, j’estime que l’arbitre n’a violé aucun principe de justice naturelle ou d’équité procédurale lors du déroulement de l’instance ou dans sa décision. J’estime également que c’est à bon droit que l’arbitre a décidé de ne pas statuer sur le fond de la plainte dont il était saisi. En conséquence, la décision que l’arbitre a rendue en l’espèce est en grande partie confirmée, sauf dans la mesure où l’arbitre a décliné compétence d’une manière qui empêchait la Commission canadienne des droits de la personne de lui renvoyer la plainte en vertu des pouvoirs conférés à la Commission par l’alinéa 41(1)b) ou l’alinéa 44(2)b) de la Loi canadienne sur les droits de la personne.

 

 

[26]           Vient ensuite le deuxième contrôle judiciaire dont la Cour a été saisie dans la présente affaire. La Commission canadienne des droits de la personne avait remis aux parties son rapport d’enquête établi en application de l’article 41 et elle a décidé le 2 décembre 2009 de ne pas instruire la plainte de Mme MacFarlane parce qu’il s’agissait d’une plainte [traduction] « qu’il valait mieux confier en premier lieu à l’arbitre ».

 

[27]           La demanderesse avait écrit à l’arbitre pour lui demander de connaître de l’affaire de congédiement injuste par suite de la décision rendue dans le cadre du premier contrôle judiciaire. L’arbitre n’a pas instruit l’affaire non plus parce qu’il a conclu que la décision de la CCDP de ne pas instruire la plainte ne devait pas être comprise comme un renvoi de l’affaire à l’arbitre, possibilité évoquée dans la décision de la Cour relative au premier contrôle judiciaire. C’est le contrôle judiciaire de cette décision qui a été demandé, cette fois devant le juge Robert Barnes.

 

[28]           Dans MacFarlane c Day & Ross Inc, 2011 CF 377, le juge Barnes a conclu que l’arbitre avait commis une erreur en déclinant compétence. Il fallait comprendre du rapport que la Commission renvoyait l’affaire à l’arbitre. Voici un extrait du paragraphe 13 des motifs de la décision :

[13]     … L’arbitre semble s’être attendu à ce que la Commission lui communique une demande officielle avant qu’il puisse entendre l’affaire sur le fond. Mme MacFarlane a soutenu avec raison qu’aucune mesure semblable n’était requise. L’article 44 de la LCDP énonce que, lorsque la Commission décide de déférer à une autre autorité, elle « renvoie le plaignant à l’autorité compétente ». En vertu du paragraphe 44(4), la Commission « informe par écrit » les parties à une plainte de sa décision de déférer à une autre autorité et elle « peut informer toute autre personne, de la manière qu’elle juge indiquée ». Lorsque ces dispositions sont lues ensemble, il est clair qu’au soutien du renvoi d’une plainte, la Commission est seulement tenue d’aviser les parties de sa décision, et qu’il revient ensuite à l’une d’elles de demander à ce que l’autre autorité se déclare compétente. …

 

Le juge Barnes a conclu que, dans les circonstances, un nouvel arbitre devait être nommé pour connaître de l’affaire au fond. Un autre arbitre a été nommé et c’est à l’égard de sa décision que la demanderesse sollicite un troisième contrôle judiciaire.

 

[29]           Par conséquent, les deux décisions de la Cour ont permis de confirmer que l’autre arbitre, nommé pour connaître de l’affaire au fond, avait le pouvoir de se prononcer sur la plainte de congédiement injuste visée à l’article 240 du Code, et celui de statuer sur la plainte relative aux droits de la personne dans la mesure où elle concernait le congédiement. L’arbitre a déclaré, à raison, ce qui suit au paragraphe 2 de sa décision :

[traduction]

En réalité, il y a deux questions à trancher. La première est celle de savoir si la plaignante a été congédiée injustement. La seconde, celle de savoir si, dans le cadre du congédiement, l’intimée a violé les droits de la plaignante énoncés dans la Loi canadienne sur les droits de la personne, L.R.C. 1985, c H‑6 (LCDP).

 

En outre, ces deux décisions de la Cour délimitent les questions qui se posent en l’espèce. Aucune des décisions n’a fait l’objet d’un appel devant la Cour d’appel fédérale et, pour les besoins du présent contrôle judiciaire, la question de la compétence de l’arbitre doit être considérée comme réglée, dans la mesure où il a respecté les paramètres fixés par la Cour. Comme nous le verrons, c’est ce qu’il a fait.

 

Questions en litige

[30]           La demanderesse a soumis plusieurs questions à la Cour. Les voici :

a)         L’arbitre a‑t‑il outrepassé sa compétence lorsqu’il a examiné la plainte déposée devant la CCDP?

b)         L’arbitre a‑t‑il commis une erreur de droit ou outrepassé sa compétence lorsqu’il a fondé ses conclusions relatives à la plainte de congédiement injuste sur des conclusions qu’il a tirées après avoir examiné la plainte déposée devant la CCDP?

c)         L’arbitre a-t-il outrepassé sa compétence ou fait défaut de l’exercer et commis une erreur de droit parce qu’il n’a pas bien cerné la nature du congédiement qu’il devait examiner et parce qu’il ne s’est pas clairement exprimé sur la question principale qui lui était posée?

d)         L’arbitre a-t-il outrepassé sa compétence parce qu’il n’a pas abordé des motifs de congédiement qui ne figuraient pas dans la lettre de congédiement?

e)         L’arbitre a-t-il fondé sa décision sur des conclusions de fait erronées tirées sans tenir compte des éléments de preuve qui lui avaient été présentés?

f)         Les conclusions contradictoires qui figuraient dans sa décision la rendent-elles déraisonnable?

 

[31]           J’ai déjà abordé les questions a) et b) lorsque j’ai conclu que l’arbitre avait eu raison de tenir compte de la plainte déposée devant la Commission canadienne des droits de la personne, conformément aux décisions de notre Cour. Dans la mesure où il se prononçait sur la question du congédiement, l’arbitre respectait sa compétence. La demanderesse semble laisser entendre que l’arbitre a eu tort d’appliquer les conclusions qu’il avait tirées sur la question de savoir si elle avait fait l’objet de discrimination au moment où elle a été congédiée, moment durant lequel elle prétendait avoir été invalide (et non au moment où les actes qui ont entraîné le congédiement ont eu lieu), à la plainte de congédiement injuste. Non seulement la nature du problème est-elle difficile à saisir mais, en plus, l’allégation paraît invraisemblable. L’arbitre s’est penché sur les deux questions séparément et il a tiré une conclusion à l’égard de chacune. Les observations de la demanderesse devant la Cour n’étayaient pas ses prétentions. Les questions a) et b) ne sont pas justifiées. En ce qui concerne les questions c), d), e) et f), elles sont mieux formulées par la défenderesse :

(i)         L’arbitre a-t-il commis une erreur lorsqu’il a rejeté l’allégation fondée sur les droits de la personne?

(ii)        L’arbitre a-t-il commis une erreur lorsqu’il a rejeté l’allégation de congédiement injuste de la demanderesse?

Les questions plus précises soulevées par la demanderesse seront abordées dans le cadre de mon examen des deux allégations. J’examinerai donc ces deux questions.

 

Analyse

[32]           La première question est fondamentale dans les circonstances. La demanderesse a cherché à faire instruire de nouveau l’affaire par la Cour en tentant de démontrer que l’arbitre avait effectué une analyse erronée, comme si la Cour devait appliquer en l’espèce la norme de la décision correcte. La question de savoir quelle est la norme de contrôle applicable dans une affaire de congédiement injuste est donc importante.

 

[33]           Il n’est pas nécessaire de se livrer à une analyse exhaustive lorsque la norme de contrôle qui s’applique à une question donnée a déjà été établie par la jurisprudence (Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, [2008] 1 RCS 190, au paragraphe 57).

 

[34]           Dans le premier contrôle judiciaire, MacFarlane c Day & Ross Inc, 2010 CF 556, le juge Mainville a abordé la question globalement et a conclu que c’est la norme de la décision raisonnable qui s’applique. De même, la Cour d’appel fédérale a récemment conclu dans une autre affaire de congédiement injuste que la norme de contrôle est celle de la décision raisonnable. Voici le paragraphe 32 de la décision Payne c Banque de Montréal, 2013 CAF 33 :

La principale question en litige en l’espèce est de savoir si le congédiement de M. Payne était injuste. C’est une question mixte de fait et de droit parce que la réponse est fonction de l’application par l’arbitre des règles de droit pertinentes aux conclusions de fait qu’il a tirées, l’exercice nécessitant d’évaluer les faits dans le cadre juridique approprié. La norme de contrôle applicable à la décision d’un tribunal administratif sur des questions mixtes de fait et de droit est présumée être la décision raisonnable (Dunsmuir c. Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190, au paragraphe 53).

 

La décision en cause fera donc l’objet d’un contrôle selon la norme de la décision raisonnable.

 

[35]           Au paragraphe 47 de l’arrêt Dunsmuir, la Cour suprême a décrit la façon dont la cour de révision doit aborder le contrôle de la décision d’un tribunal administratif selon la norme de la décision raisonnable :

[47]     La norme déférente du caractère raisonnable procède du principe à l’origine des deux normes antérieures de raisonnabilité : certaines questions soumises aux tribunaux administratifs n’appellent pas une seule solution précise, mais peuvent plutôt donner lieu à un certain nombre de conclusions raisonnables. Il est loisible au tribunal administratif d’opter pour l’une ou l’autre des différentes solutions rationnelles acceptables. La cour de révision se demande dès lors si la décision et sa justification possèdent les attributs de la raisonnabilité. Le caractère raisonnable tient principalement à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit.

 

 

[36]           La première question à trancher selon la norme de la décision raisonnable est donc celle de savoir si l’arbitre a commis une erreur lorsqu’il a rejeté les allégations de la demanderesse relatives aux droits de la personne.

 

[37]           Sur cette première question, Mme MacFarlane soutient de façon très générale que l’arbitre a eu tort d’examiner la plainte relative aux droits de la personne. Or, comme je l’ai déjà indiqué, l’arbitre a eu raison de trancher l’affaire comme il l’a fait, sa décision ayant fait suite à deux contrôles judiciaires intentés par la demanderesse elle‑même. À bon nombre de reprises, elle a répété qu’elle ne contestait pas les faits, soutenant plutôt que ses arguments étaient fondés sur la façon dont certaines conclusions avaient été tirées. Dans les faits cependant, tant dans ses observations écrites que dans les longues observations qu’elle a présentées de vive voix devant la Cour, la demanderesse a cherché à faire instruire de nouveau son congédiement plutôt qu’à démontrer que la conclusion de l’arbitre était déraisonnable au sens où cette notion est comprise dans l’arrêt Dunsmuir, précité.

 

[38]           La norme de la décision raisonnable n’autorise pas la Cour à substituer sa propre conclusion à celle de l’arbitre.

 

[39]           La demanderesse a aussi soutenu qu’en statuant sur les deux plaintes, une présentée en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne et une autre en vertu du Code canadien du travail, l’arbitre a mêlé les questions. Voici ce qu’elle affirme en conséquence : [traduction] « [S]es conclusions relativement à ma plainte de congédiement injuste ne justifient aucune retenue parce qu’elles sont influencées par les conclusions qu’il a tirées dans son interprétation de l’autre instance. » (Paragraphe 126 des observations de la demanderesse.)

 

[40]           Comme je l’ai souligné, l’arbitre a pris soin tout au long de sa décision de se limiter à la discrimination fondée sur l’âge et une incapacité dans le contexte du congédiement dans son examen de la plainte relative aux droits de la personne. De son côté, la demanderesse a restreint sa demande à la discrimination fondée sur l’invalidité au moment du congédiement. L’arbitre a conclu que la preuve dont il était saisi ne permettait pas d’étayer la thèse de la demanderesse. En fait, il a souligné que la demanderesse, tant au cours de son témoignage que dans son exposé final, a déclaré qu’au moment de son congédiement, elle n’était pas invalide (paragraphe 143 des motifs de la décision de l’arbitre). Je n’ai rien trouvé dans le dossier dont je suis saisi qui donne à penser que la décision de l’arbitre était déraisonnable. L’arbitre a effectué une analyse minutieuse et équitable de la preuve qui lui avait été soumise et il a fourni des motifs transparents et intelligibles. De nombreux éléments de preuve lui permettaient de conclure que le congédiement n’était pas fondé sur des motifs discriminatoires. Aucun élément de preuve n’établissait de tels motifs. C’était le cas en ce qui concerne l’allégation relative à une incapacité et d’autant plus encore en ce qui concerne la discrimination fondée sur l’âge. Il n’y a eu aucune confusion entre les plaintes; les éléments de preuve à l’appui de la plainte que l’arbitre devait instruire en raison des décisions de la Cour lors des deux contrôles judiciaires précédents étaient toutefois insuffisants.

 

[41]           La seconde question, qui doit être examinée selon le critère de la décision raisonnable, est celle de savoir si l’arbitre a commis une erreur lorsqu’il a rejeté l’allégation de congédiement injuste présentée par la demanderesse. Là encore, la demanderesse a essentiellement cherché à faire instruire de nouveau l’affaire au lieu de démontrer à la Cour, selon la prépondérance de la preuve, que la décision de l’arbitre n’était pas raisonnable dans les circonstances.

 

[42]           Dans le cadre de ses observations écrites, la demanderesse a soutenu que l’arbitre [traduction] « semblait avoir retenu l’argument de la défenderesse selon lequel la suppression de dossiers valides constituait un acte intentionnel » (paragraphe 148 des observations de la demanderesse). De même, elle allègue ce qui suit au paragraphe 152 de ses observations : [traduction] « La défenderesse a aussi mentionné l’absence sans autorisation comme un des motifs de mon congédiement. L’arbitre aurait dû vérifier s’il existait suffisamment d’éléments de preuve pour démontrer que je m’étais absentée sans autorisation. » Le problème que posent ces observations vient du fait que l’arbitre a estimé que les actes qui avaient entraîné la suppression des dossiers étaient intentionnels et que l’absence du travail de la demanderesse n’était pas autorisée. La preuve à cet égard favorisait nettement la défenderesse.

 

[43]           Là encore, la question qui se pose n’est pas de savoir si la Cour est d’accord avec l’arbitre ou, d’ailleurs, avec la demanderesse. Il faut plutôt se demander si les conclusions tirées par l’arbitre étaient raisonnables. À ce sujet, il ne peut y avoir aucun doute.

 

[44]           La preuve était suffisamment abondante pour permettre à l’arbitre de conclure qu’il y avait eu non seulement une négligence grave, mais aussi des actes intentionnels qui avaient entraîné la suppression des données. La preuve démontrant les étapes à franchir pour supprimer les dossiers était convaincante et sans équivoque. De plus, l’arbitre était fondé à conclure que la demanderesse avait cherché à camoufler ces actes. Les éléments de preuve techniques allaient clairement dans ce sens. Le compte rendu fourni par la demanderesse est à tout le moins contradictoire. Les conclusions de l’arbitre sont on ne peut plus limpides. Voici un extrait du paragraphe 158 de sa décision :

[traduction]

À mon avis, Mme MacFarlane ne s’est pas rendue coupable de négligence grave. J’estime qu’il s’agissait plutôt d’un acte intentionnel. Étant donné les explications fournies sur les étapes requises pour se déplacer d’un écran à l’autre, mettre en évidence l’information à supprimer puis l’obligation de confirmer cette intention, il est difficile de croire que ces gestes ont été posés de façon accidentelle. Une fois peut‑être, mais sûrement pas de nombreuses fois.

 

Voici un autre extrait, au paragraphe 159 :

 

[traduction]

Si ses actes étaient délibérés, résultaient-ils de ses migraines? Dans l’affirmative, Mme MacFarlane serait peut-être coupable à un moindre degré. Or, Mme MacFarlane a invoqué cet argument. Là encore, je n’ai été saisi d’aucune preuve médicale qui me permet d’établir qu’elle a agi ainsi ce jour‑là à cause de son problème de santé. Je ne doute pas qu’au moment de la suppression des dossiers, Mme MacFarlane ait souffert d’un accès quelconque de migraine. Mais de là à conclure que ses actions avaient été causées par son problème de santé, il y a un pas que je ne suis pas prêt à franchir en l’absence d’une preuve médicale explicite à ce sujet.

 

Vu la preuve, il est difficile de ne pas donner raison à l’arbitre, lorsque, au paragraphe 154, il conclut ce qui suit au sujet de la tentative de camouflage des actes posés le 16 mai :

[traduction]

J’ai été particulièrement troublé au cours de l’audience par le fait que Mme MacFarlane a fourni des justifications contradictoires de l’incident relatif à la suppression des dossiers. Par exemple, elle a obtenu des courriels remontant à 2004 pour démontrer qu’elle supprimait en fait de l’information qui avait été demandée plusieurs années auparavant. Elle a déclaré à son employeur, lorsque ce dernier lui a parlé pour la première fois de ce problème, qu’elle ne savait pas de quoi Mme Johnson parlait. Elle a ensuite reconnu avoir supprimé un certain nombre de dossiers, mais pas autant que l’allègue la défenderesse. À l’audience, elle a dit qu’elle naviguait dans le système de paiement des courtiers par suite d’une demande de Mme Wasson et que, au moment où elle faisait le travail qui lui avait été demandé, elle a vu des données invalides qu’elle a décidé de corriger. Pour dire les choses franchement, aucune de ces explications ne semblait vraisemblable et la plaignante semblait ne pas reconnaître l’ampleur du problème qu’elle avait volontairement créé. Madame MacFarlane a peut‑être raison de remettre en cause l’ampleur des répercussions sur les systèmes que la suppression des dossiers avait créées, mais, selon l’intimée, sa crédibilité en a pris un bon coup.

 

Selon la preuve qui avait été soumise à l’arbitre, ces conclusions sont tout à fait raisonnables. À mon avis, elles sont inattaquables.

 

[45]           L’arbitre a aussi conclu que si la demanderesse ne s’était pas présentée au travail après le 24 juin 2008, ce n’est pas parce qu’elle était malade. Là encore, l’invalidité alléguée durant la période en cause, soit entre la mi‑mai 2008 et le congédiement de la demanderesse le 4 juillet, n’était pas étayée par une preuve médicale quelconque. De plus, au cours des jours qui ont suivi, la demanderesse a déclaré qu’elle avait l’intention d’en appeler du rejet de sa demande de prestations d’invalidité, mais aucun appel de cette nature n’a été formé et aucune mesure dans ce sens n’a été prise.

 

[46]           En d’autres termes, la preuve donnait à penser que la demanderesse avait intentionnellement posé des gestes pour détruire des dossiers dont elle connaissait l’importance pour son employeur. Elle n’était pas très disposée à expliquer ses gestes à cet égard. Après avoir tout nié, la demanderesse a fourni différentes versions sans toutefois jamais reconnaître sa responsabilité. Après ces événements, elle n’est pas revenue au travail et n’a fourni aucune preuve médicale pour justifier pourquoi elle devait être en congé d’invalidité. Il n’est pas surprenant que l’employeur lui ait retiré sa confiance. Dans les circonstances, l’employeur a décidé de congédier son employée et l’arbitre a estimé que l’employeur [traduction] « avait agi de façon raisonnable lorsqu’il a congédié la plaignante » (au paragraphe 161). Il n’appartient pas à la Cour de restreindre indûment la vaste marge de manœuvre dont dispose un arbitre, expert en la matière, qui a conclu que l’inconduite était suffisamment grave pour justifier le congédiement.

 

[47]           Voici, par conséquent, la conclusion de la Cour :

a)         l’arbitre s’est acquitté de son devoir et a respecté les limites de sa compétence en statuant à la fois sur la plainte, déposée en vertu du Code canadien du travail, selon laquelle le congédiement était injuste et sur la plainte, déposée en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne, selon laquelle la demanderesse avait fait l’objet de discrimination du fait de l’âge et d’une incapacité dans le cadre dudit congédiement;

 

b)         l’arbitre a agi de façon raisonnable lorsqu’il a conclu que la plainte déposée en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne devait être rejetée; et

 

c)         l’arbitre a agi de façon raisonnable lorsqu’il a rejeté la plainte déposée en vertu du Code canadien du travail.


JUGEMENT

 

La demande de contrôle judiciaire de la décision rendue le 30 avril 2012 par E. Thomas Christie, arbitre nommé en vertu du paragraphe 241(3) du Code canadien du travail, LRC 1985, c L‑2, est rejetée.

 

 

« Yvan Roy »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Linda Brisebois, LL.B.

 


Cour fédérale

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                    T‑952‑12

 

 

INTITULÉ :                                                  WANDA MACFARLANE c.
DAY & ROSS INC. et E. THOMAS CHRISTIE

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                          Fredericton (Nouveau‑Brunswick)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                         Le 12 mars 2013

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                        LE JUGE ROY

 

DATE DES MOTIFS :                                 Le 3 mai 2013

 

 

COMPARUTIONS :

 

Wanda MacFarlane

 

LA DEMANDERESSE

POUR SON PROPRE COMPTE

 

Jordan D. Winch

 

POUR LA DÉFENDERESSE

DAY & ROSS INC.

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Wanda MacFarlane

Summerfield (Nouveau‑Brunswick)

 

LA DEMANDERESSE

POUR SON PROPRE COMPTE

 

NORTON ROSE CANADA LLP

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DÉFENDERESSE

DAY & ROSS INC.

 

 

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