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Date: 20130524

Dossier : IMM-5920-12

Référence : 2013 CF 542

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 24 mai 2013

En présence de monsieur le juge O’Reilly

 

 

ENTRE :

 

NGARIPUE MUVANGUA

 

 

 

demanderesse

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

I.          Aperçu

 

[1]               Mme Ngaripue Muvangua (la demanderesse), qui est originaire de la Namibie, a demandé l’asile au Canada parce qu’elle craignait de subir de mauvais traitements aux mains d’un oncle auquel elle avait été promise en mariage. Un tribunal de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission) a rejeté la demande d’asile de la demanderesse, en concluant qu’elle pouvait vivre en sécurité à Walvis Bay en Namibie, parce qu’elle pouvait s’y réclamer de la protection de l’État.

 

[2]               Mme Muvangua prétend que la Commission a commis une erreur, car elle n’a pas appliqué le bon critère en ce qui concerne la protection de l’État. Elle me demande d’annuler la décision de la Commission et d’ordonner que sa demande soit réexaminée par un tribunal différemment constitué.

 

[3]               Je conviens que la Commission a commis une erreur et j’accueillerai la présente demande de contrôle judiciaire pour ce motif. Mme Muvangua a soulevé un certain nombre d’autres questions à l’égard de la décision de la Commission, mais je n’ai pas besoin d’y répondre.

 

II.        La décision de la Commission

 

[4]               La Commission a conclu que Mme Muvangua pouvait se soustraire aux mauvais traitements en déménageant de Windhoek à Walvis Bay. En d’autres mots, elle disposait d’une possibilité de refuge intérieur (PRI) à Walvis Bay. Les autorités étatiques pourraient y « déployer des efforts raisonnablement sérieux » pour la protéger. Étant donné que Mme Muvangua n’avait pas communiqué avec les autorités à Walvis Bay pour obtenir de la protection, la Commission a conclu qu’elle n’avait pas réfuté la présomption selon laquelle l’État de la Namibie pouvait la protéger.

 

[5]               De plus, la Commission a conclu qu’il serait raisonnable que Mme Muvangua déménage à Walvis Bay. Elle est en bonne santé physique, bien instruite et débrouillarde. Après tout, elle a réussi à se rendre au Canada et à se trouver un travail à Fort McMurray, en Alberta.

 

[6]               Par conséquent, la Commission a conclu que la demanderesse n’avait pas établi le bien‑fondé de sa demande d’asile.

 

 

III.       La Commission a-t-elle commis une erreur?

 

[7]               Lorsque des questions relatives à la protection de l’État ou à la PRI sont soulevées, la véritable question est de savoir si le demandeur d’asile répond à la définition de réfugié. Un réfugié est une personne qui a une crainte fondée d’être persécutée dans son pays d’origine et qui ne peut y obtenir de la protection. Si la protection de l’État est disponible, la crainte du demandeur d’asile d’être persécuté n’est pas fondée. Dans la même veine, si la personne peut déménager à l’intérieur du pays afin de se soustraire à la persécution ou d’obtenir la protection de l’État, sa crainte n’est pas fondée. Dans les affaires en matière de réfugiés, la question fondamentale à laquelle il faut répondre, après avoir examiné l’ensemble de la preuve – y compris la preuve relative à la capacité de l’État à protéger le demandeur d’asile, que ce soit à l’endroit particulier qu’il a fui ou un autre endroit dans le pays – est celle de savoir si le demandeur d’asile a établi qu’il est vraisemblablement exposé à une probabilité raisonnable d’être persécuté dans son pays d’origine. Si tel est le cas, le demandeur d’asile répond à la définition de réfugié.

 

[8]               Je suis d’avis que la Commission a commis deux erreurs. Premièrement, elle a reproché à Mme Muvangua de ne pas avoir sollicité la protection de l’État à Walvis Bay, et ce, même si elle n’y avait jamais mis les pieds. Il ne s’agissait tout simplement pas d’un facteur pertinent à considérer pour trancher la question de savoir si Mme Muvangua était exposée à une probabilité raisonnable d’être persécutée à Walvis Bay.

 

[9]               Deuxièmement, la Commission a conclu que les autorités étatiques répondraient à la situation de Mme Muvangua en déployant de « efforts sérieux » pour la protéger. Le fait que les autorités puissent déployer des efforts sérieux ne répondait pas directement à la question fondamentale de savoir si la demande d’asile de Mme Muvangua était fondée. La Commission devait plutôt décider si la preuve relative aux ressources de l’État dont Mme Muvangua pouvait effectivement se prévaloir démontrait qu’elle ne serait probablement pas exposée à une probabilité raisonnable d’être persécutée en Namibie.

 

[10]           Compte tenu de ces erreurs, la conclusion de la Commission selon laquelle Mme Muvangua n’avait pas établi le bien‑fondé de sa demande d’asile était déraisonnable. Par conséquent, je devrai accueillir la présente demande de contrôle judiciaire.

 

IV.       Conclusion et décision

 

[11]           La Commission a commis une erreur dans son traitement des questions relatives à la PRI et à la protection de l’État. Il s’ensuit que je dois accueillir la présente demande de contrôle judiciaire et ordonner la tenue d’une nouvelle audience devant un tribunal différemment constitué. Ni l’une ni l’autre des parties ne m’a demandé de certifier une question de portée générale, et aucune question ne sera énoncée.

 


JUGEMENT

LA COUR STATUE :

1.                                          La demande de contrôle judiciaire est accueillie et la Cour ordonne la tenue d’une nouvelle audience devant un tribunal différemment constitué.

2.                                          Aucune question grave de portée générale n’est énoncée.

 

 

« James W. O’Reilly »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Maxime Deslippes, LL.B., B.A. Trad.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-5920-12

 

INTITULÉ :                                      NGARIPUE MUVANGUA

                                                            c

                                                            MCI

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :             LE 13 MAI 2013

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                            LE JUGE O’REILLY

 

DATE DES MOTIFS

ET DU JUGEMENT :                     LE 24 MAI 2013

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Lily Tekle

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Ada Mok

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Law Office of Larry Butkowsky

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

 

 

 

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