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Date : 20130618

Dossier : T-787-10

Référence : 2013 CF 685

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 18 juin 2013

En présence de monsieur le juge Mandamin

 

 

ENTRE :

 

PATRICK McEVOY ET

CLAUDIO PELLICORE

 

 

 

demandeurs

 

et

 

 

 

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

           MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

Introduction

 

[1]               La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire présentée par MM. Patrick McEvoy et Claudio Pellicore (les demandeurs) d’une décision rendue le 16 avril 2012 par Mme Camille Therriault-Power, vice-présidente de la Direction générale des ressources humaines à l’Agence des services frontaliers du Canada (l’ASFC), en sa qualité de déléguée de l’administrateur général (la déléguée).

 

[2]               Les demandeurs sont des agents d’application de la loi à l’intérieur du pays (agents d’application de la loi) à l’ASFC. Ils ont déposé des griefs au sujet de la description et de la classification du poste d’agent d’application de la loi à l’intérieur du pays, PMC003 (PM‑03), en l’occurrence les postes nos 30153666 et 30154307. Ils affirment que leurs postes devraient être classés au niveau PM‑04.

 

[3]               Le grief des demandeurs a donné lieu à une médiation concernant leur description de travail, laquelle a ensuite été soumise à un comité de règlement des griefs de classification (le comité) qui a été constitué pour examiner la classification de la description de travail en question. Le comité a entendu les observations des demandeurs et de leur représentant syndical. Ils ont tous les deux fait valoir que le poste d’agent d’application de la loi devait être classé PM‑04 parce que les agents d’application de la loi se voyaient confier de nouvelles fonctions en vertu de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la LIPR). Le comité a par la suite posé des questions à la direction au sujet du poste d’agent d’application de la loi et transmis la réponse de la direction aux demandeurs, qui ont répliqué en présentant d’autres éléments de preuve et d’autres observations.

 

[4]               Le comité a conclu que le travail des agents d’application de la loi justifiait leur classification dans le groupe et au niveau PM‑03 et a recommandé que le poste faisant l’objet du grief soit classé au niveau PM‑03. La déléguée a accepté la recommandation du comité suivant laquelle le poste d’agent d’application de la loi à l’intérieur du pays faisant l’objet du grief soit classé au niveau PM‑03 à compter du 11 août 2002.

 

[5]               Les demandeurs ont introduit une demande de contrôle judiciaire dans laquelle ils reprochaient à la déléguée d’avoir violé les principes d’équité procédurale et de justice naturelle en se fondant sur la décision du comité, laquelle avait été rendue avant que les demandeurs n’aient communiqué leurs observations en réponse aux renseignements fournis par la direction. Ils soutenaient également que le comité n’avait pas motivé suffisamment sa décision et qu’il n’avait pas tenu compte de l’ensemble des éléments de preuve et des observations qui lui avaient été soumis. Enfin, les demandeurs affirmaient également que la déléguée avait l’obligation de leur accorder la possibilité de répondre à d’autres aspects qu’elle avait évoqués dans une lettre qu’elle avait adressée au président de l’ASFC pour l’informer de sa décision.

 

[6]               Pour les motifs qui suivent, je conclus que la demande doit être rejetée.

 

Contexte

 

[7]               Aux termes du paragraphe 5(4) et de l’alinéa 11.1(1)b) de la Loi sur la gestion des finances publiques, LRC 1985, c F‑11, modifiée, le Conseil du Trésor a le pouvoir gérer l’organisation de la fonction publique fédérale et plus particulièrement celui de pourvoir à la classification des postes et des personnes employées dans la fonction publique. En vertu de ce pouvoir, les griefs de classification sont réglés par un comité de règlement des griefs de classification conformément aux règles et à la procédure énoncées dans une série de politiques du Conseil du Trésor, à savoir la Politique sur les griefs de classification, la Procédure du règlement des griefs de classification et les textes complémentaires suivants : Clarification de la procédure du règlement des griefs de classification et Rappel - Processus de résolution des griefs de classification.

 

[8]               Les fonctions du comité et du délégué de l’administrateur général sont précisées dans la Procédure du règlement des griefs de classification. Le mandat du comité est le suivant :

 

Le comité de règlement des griefs doit déterminer la classification appropriée du poste qui fait l’objet d’un grief en tenant compte des fonctions et responsabilités assignées par la gestion, et qui sont accomplies par l’employé; le comité doit aussi tenir compte de l’information présentée par le plaignant et/ou son représentant et par le représentant de la direction. L’information doit être examinée et analysée de façon non sexiste et la recommandation présentée à l’administrateur général ou à son délégué doit être juste, équitable et en accord avec les principes de classification.

 

[9]               La Procédure du règlement des griefs de classification définit comme suit le mandat du délégué :

L’administrateur général ou son délégué pourra confirmer la recommandation du comité ou trancher en cas de décision partagée. Le délégué doit informer l’administrateur général en cas de décision partagée, si l’opinion minoritaire est retenue. Le délégué doit faire approuver une nouvelle décision par l’administrateur général s’il décide de rejeter une recommandation unanime du comité. En pareil cas, l’administrateur général doit communiquer les raisons du rejet de la décision au SCT en se basant sur les motifs invoqués par le comité pour formuler sa recommandation.

 

[10]           Les demandeurs ont présenté un grief dans lequel ils ont affirmé que le poste PM‑03 d’agent d’application de la loi à l’intérieur du pays devait être reclassifié à la hausse au niveau approprié, en l’occurrence PM‑04, à compter du 11 août 2002. La description de travail des agents d’application de la loi proposée dans le grief était celle prévue par un protocole d’entente daté du 17 mars 2008.

 

[11]           Un comité de règlement des griefs de classification a été constitué pour entendre le grief de classification des demandeurs. Le comité était composé d’un président, M. Robert Martin, d’un consultant en classification, M. James Myles, membre du Conseil du Trésor, et du directeur général de la Direction des programmes commerciaux de l’ASFC, M. Mike Jordan.

 

[12]           Le comité a entendu le grief des demandeurs le 26 novembre 2009. Au cours de l’audience relative au grief, les demandeurs ont présenté au comité tant des observations orales que des observations écrites. Le représentant syndical des demandeurs de l’Alliance de la fonction publique du Canada (l’AFPC) a également présenté des observations orales et écrites au comité.

 

[13]           À la suite de l’audience relative au grief tenue le 26 novembre 2009, et avant la seconde audience, qui a eu lieu le 14 décembre 2009, le comité a réclamé des documents complémentaires au représentant des ressources humaines du Ministère pour évaluer l’étude sur la relativité présentée par les demandeurs à l’audience du 26 novembre 2009. Le président du comité a reçu ces documents le 3 décembre 2009 et les a transmis aux demandeurs par l’intermédiaire de leur représentant syndical le même jour.

 

[14]           À l’audience du 14 décembre 2009, le comité a entendu les observations de M. Robert Johnston, directeur chargé du Programme d’exécution de la loi pour les services intérieurs pour la région de la Colombie‑Britannique, et Mme Susan Kramer, directrice générale par intérim, Direction générale des opérations, au sujet des fonctions des agents d’application de la loi.

 

[15]           Après l’audience relative au grief tenue le 14 décembre 2009 et avant de délibérer, le comité a demandé à la direction de lui fournir des éclaircissements au sujet du travail effectué par les agents d’application de la loi. Une copie des questions du comité et des réponses données par la direction de l’ASFC a été transmise aux demandeurs par le truchement de leur représentant syndical le 29 janvier 2010.

 

[16]           Le 11 février 2010, les demandeurs ont soumis au comité des observations écrites et des pièces en réponse aux réponses de la direction de l’ASFC. Le 26 février 2010, les membres du comité se sont réunis pour délibérer.

 

[17]           Les membres du comité ont préparé un rapport qui a été achevé le 14 mars 2010 et signé le 16 avril 2010 avec la recommandation que l’emploi visé par le grief soit reclassifié dans le groupe et au niveau PM‑03. Le rapport du comité a été transmis à la déléguée pour son approbation et sa signature. La déléguée a accepté la recommandation du comité et a signé le document le 17 avril 2010. La décision de la déléguée a été transmise aux demandeurs le 19 avril 2010.

 

[18]           Les demandeurs ont introduit le 18 mai 2010 une demande de contrôle judiciaire de la décision de la déléguée. Toutefois, avant que les demandeurs ne déposent leur demande, M. Mike Matuzic, un compagnon de travail des demandeurs qui était également visé par la décision de la déléguée, avait présenté le 26 avril 2010 une demande d’accès aux renseignements se rapportant à ce processus de classification.

 

[19]           Par lettre datée du 11 mai 2010, l’ASFC a accusé réception de cette demande d’accès. Dans une lettre subséquente datée du 8 juin 2010, l’ASFC a expliqué qu’il fallait proroger jusqu’à 150 jours le délai de 30 jours prévu par la loi pour traiter la demande d’accès aux renseignements.

 

[20]           Le 5 novembre 2010, l’ASFC a remis une liasse de documents en réponse à la demande d’accès aux renseignements. Après avoir examiné ces documents et aux termes d’une ordonnance rendue par la Cour le 10 mars 2011, les demandeurs ont déposé un mémoire complémentaire portant sur les éléments de preuve supplémentaires obtenus en réponse à la demande d’accès aux renseignements.

 

Décision à l’examen

 

[21]           La décision à l’examen comporte trois volets. Le premier est composé des deux lettres par lesquelles la déléguée a transmis sa décision aux plaignants le 19 avril 2010. Le second est constitué du rapport publié par le comité le 16 avril 2010 (le rapport) dans lequel on trouve la recommandation que la déléguée a acceptée et signée le 17 avril 2010. Le troisième volet de la décision est une lettre adressée par la déléguée au président (vraisemblablement le président de l’ASFC), également datée du 19 avril 2010, dans laquelle la déléguée informe le président de l’issue du grief de classification. Cette dernière lettre est l’un des documents obtenus par les demandeurs grâce à sa demande d’accès aux renseignements.

 

Lettres de décision de la déléguée envoyées aux plaignants

 

 

[22]           Ces deux lettres, la première rédigée en anglais, et la seconde, en français, contiennent essentiellement les mêmes renseignements. La déléguée explique que les membres du comité se sont réunis le 26 novembre 2009 et le 14 décembre 2009 pour examiner le grief. La déléguée explique que le comité a recommandé que le poste soit classifié dans le groupe et au niveau PM‑03 et elle fait état du rapport d’évaluation du comité. La déléguée conclut ses lettres en expliquant qu’elle a approuvé la recommandation du comité et que la décision, qui est définitive et exécutoire, prendra effet le 11 août 2002. Les lettres mentionnent qu’une copie du rapport y est jointe.

 

[23]           Comme nous l’avons déjà fait observer, la déléguée a approuvé la recommandation du comité contenue dans le rapport.

 

Le rapport du comité

 

[24]           Le comité était composé d’un agent accrédité de l’ASFC, d’un agent du Secrétariat du Conseil du Trésor et d’un représentant de la direction de l’ASFC qui avait reçu une formation sur la façon d’utiliser les normes de classification PM. Les membres du comité ont, par consensus, recommandé que le poste d’agent d’application de la loi à l’intérieur du pays qui faisait l’objet du grief soit classifié au niveau PM‑03 à compter du 11 août 2002.

 

[25]           On trouve dans la partie introductive du rapport des renseignements au sujet du grief, des membres du comité, du lieu et de l’endroit de l’audience relative aux griefs, de la nature du grief, ainsi que quelques remarques préliminaires.

 

[26]           La première grande section du rapport porte sur les observations formulées par les plaignants ou en leur nom. Le rapport donne d’abord un résumé des observations présentées par Mme Mary Ann Wight, de l’AFPC, qui appuyaient les plaignants et qui commentaient les raisons ayant justifié une médiation quant à la description d’emploi et l’évaluation proposée de la description de travail des agents d’application de la loi. Le rapport résume ensuite les observations formulées par les plaignants sur les aspects suivants : (1) renseignements généraux; (2) évolution du poste; (3) évaluation du poste d’agent d’application de la loi.

 

[27]           La deuxième section du rapport porte sur les renseignements fournis par les représentants de la direction, Mme Kramer et M. Johnston. Le comité n’a fourni que de brefs résumés des renseignements fournis par ces deux personnes, étant donné que leurs réponses avaient déjà été communiquées aux demandeurs.

 

[28]           La troisième section du rapport expose les délibérations du comité. Le rapport explique que le comité avait pour mission d’établir :

 

[traduction

[...] le groupe et le niveau appropriés et d’évaluer le poste faisant l’objet du grief selon les fonctions et responsabilités définies par la direction et confiées aux employés, en tenant compte des renseignements et des recommandations formulées par le syndicat et par les représentants des employés au nom des plaignants ainsi que des renseignements et des explications fournis par les représentants de la direction.

 

[29]           Le rapport du comité expose l’évaluation soumise par l’AFPC en passant en revue chacun des facteurs examinés et explique les raisons pour lesquelles le comité est d’accord avec certaines des observations formulées. Le comité examine ensuite les observations formulées par les plaignants, en particulier l’évaluation faite par les plaignants de l’emploi visé par le grief, ainsi que les pièces, lesquelles sont constituées d’évaluations faites par deux consultants externes. Le rapport passe en revue ces observations et explique là encore les raisons pour lesquelles le comité n’est pas d’accord avec certaines des observations formulées par les plaignants.

 

[30]           Dans la section finale du rapport, le comité propose sa propre évaluation du poste faisant l’objet du grief et conclut par un résumé indiquant le total des points attribués à chacun des facteurs d’évaluation retenus par le comité.

 

[31]           Le rapport se termine par la recommandation suivante du comité :

 

[traduction

Les membres du comité de règlement des griefs de classification sont arrivés à un consensus et estiment que le poste visé par le grief (agent d’application de la loi à l’intérieur du pays) mérite une classification dans le groupe et au niveau PM‑03. Par conséquent, le comité recommande que le poste visé par le grief soit classifié au niveau PM‑03 à compter du 11 août 2002.

 

Le rapport est daté et signé par chacun des trois membres du comité.

 

[32]           La décision de la déléguée se trouve à la fin du rapport :

 

[traduction

Je souscris à la recommandation du comité de règlement des griefs de classification suivant laquelle le poste d’agent d’application de la loi à l’intérieur du pays faisant l’objet du grief devrait être classifié au niveau PM‑03 à compter du 11 août 2002. La présente décision est définitive et exécutoire et ne peut être modifiée à moins qu’un changement important ne soit effectué aux fonctions du poste.

 

 

Sa décision a été signée et datée par la déléguée le 17 avril 2010.

 

Lettre de la déléguée au président

 

[33]           Par lettre datée du 19 avril 2010, la déléguée a informé le président de la recommandation du comité, ajoutant qu’elle souscrivait à cette recommandation. Dans sa lettre, la déléguée a exposé les raisons pour lesquelles elle acceptait les recommandations du comité :

 

[traduction

Voici les raisons pour lesquelles j’estime que les recommandations du rapport sont raisonnables :

 

         À chaque étape, tant au début, au niveau de CIC que dans les décisions plus récentes de l’ASFC, ce poste a été classé dans le groupe et au niveau PM‑03.

 

         À la demande du Syndicat des douanes et de l’immigration et pour rassurer les employés que leur dossier serait analysé de façon impartiale, un consultant accrédité a présidé les audiences les plus récentes et a rédigé le rapport du comité de règlement des griefs de classification.

 

         La décision a été prise par un comité de règlement des griefs de classification, composé d’un agent accrédité de l’ASFC, d’un représentant du Secrétariat du Conseil du Trésor et d’un représentant de la direction de l’ASFC qui avait reçu une formation sur l’utilisation des normes de classification PM.

 

         La cotation numérique du rapport le plus récent attribue 440 points à ce poste, ce qui le situe au milieu de la fourchette de 401 à 500 points prévus pour les postes PM‑03.

 

 

[34]           La déléguée a également minimisé l’importance des évaluations du poste effectuées par les deux consultants soumises par les plaignants. La déléguée a fait observer que ni l’une ni l’autre ne pouvaient être considérées comme faisant autorité. La déléguée a déclaré que le premier consultant avait été engagé par le Syndicat des douanes et de l’immigration et qu’il ne pouvait donc pas être considéré comme impartial. La déléguée a poursuivi en expliquant que le second consultant n’était pas accrédité et qu’il ne pouvait donc pas attribuer des points et que l’ASFC ne lui avait pas demandé de le faire.

 

Dispositions législatives applicables

 

[35]           La Loi sur la gestion des finances publiques, LRC 1985, c F‑11, dispose :

5. [...]

 

(4) Le Conseil du Trésor établit son règlement intérieur sous réserve des autres dispositions

de la présente loi et des instructions du gouverneur en conseil.

 

[...]

 

11.1 (1) Le Conseil du Trésor peut, dans l’exercice des attributions en matière de gestion des ressources humaines que lui confère l’alinéa 7(1)e) :

[...]

b) pourvoir à la classification des postes et des personnes employées dans la fonction publique;

5. ...

(4) Subject to this Act and any directions of the Governor in Council, the Treasury Board

may determine its own rules and procedures.

...

 

11.1 (1) In the exercise of its human resources management responsibilities under paragraph 7(1)(e), the Treasury Board may

...


(b) provide for the classification of positions and persons employed in the public service;

 

 

Questions en litige

 

[36]           Les demandeurs soulèvent les questions suivantes :

 

a)                  La déléguée a‑t‑elle manqué aux principes d’équité procédurale et de justice naturelle en se fondant sur une recommandation du comité formulée avant que toutes les observations des demandeurs aient été entendues, ou la déléguée avait‑elle autrement préjugé l’affaire?

 

b)                  Le comité a‑t‑il fait défaut d’exposer des motifs suffisants pour justifier son analyse des arguments et de la preuve et a‑t‑il manqué aux exigences en matière d’équité procédurale?

 

c)                  Le comité a‑t‑il négligé de tenir dûment compte de l’ensemble des arguments et des éléments de preuve soumis par les demandeurs?

 

 

[37]           La Cour a également été appelée à s’interroger sur le rôle que joue le délégué lorsqu’il accepte ou rejette une recommandation du comité et la question de savoir si la déléguée était tenue en l’espèce d’accorder aux demandeurs la possibilité de répondre aux préoccupations exprimées dans la lettre adressée par la déléguée au président.

 

Norme de contrôle

 

[38]           Il n’existe que deux normes de contrôle : celle de la décision correcte et celle de la décision raisonnable (Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, au paragraphe 45 (Dunsmuir)). Lorsque la norme de contrôle a déjà été arrêtée, il n’est pas nécessaire de reprendre l’analyse de la norme de contrôle applicable (Dunsmuir, au paragraphe 62).

 

[39]           Le Comité de griefs de classification assume des fonctions hautement spécialisées et possède une expertise en matière de classification; les décisions du comité doivent faire l’objet d’un degré élevé de déférence. La norme de contrôle appropriée est celle de la décision raisonnable (Beauchemin c Canada (Agence canadienne d’inspection des aliments), 2008 CF 186, au paragraphe 20 (Beauchemin)).

 

[40]           Il est bien établi que la norme de contrôle qui s’applique dans le cas des questions de justice naturelle et d’équité procédurale est celle de la décision correcte (Groulx c Canada (Anciens combattants), 2007 CF 293, au paragraphe 14 (Groulx)).

 

Analyse

 

[41]           D’entrée de jeu, il importe de se rappeler que la décision contestée en l’espèce est la décision de la déléguée d’accepter la recommandation du comité. Toutefois, lorsqu’un comité de grief de classification a été constitué, c’est essentiellement celui‑ci qui fournit les motifs invoqués. C’est lui qui entend la preuve et qui a l’obligation d’assurer aux parties le degré approprié d’équité procédurale; le rôle du délégué est alors très limité.

 

[42]           Le rôle du comité de griefs de classification en tant que décideur de fait dans des cas comme celui‑ci a été examiné dans la jurisprudence. Ainsi, dans l’arrêt Bulat c Canada (Conseil du Trésor), [2000] ACF no 148 (Bulat), au paragraphe 10, la Cour d’appel fédérale a déclaré :

 

L’un des aspects élémentaires de l’obligation d’agir équitablement veut que la personne sur laquelle une décision a un effet négatif ait véritablement la possibilité de débattre d’une question qui joue, de l’avis du comité, un rôle crucial dans le règlement du grief, mais que l’auteur du grief ne croit pas litigieuse et qu’il ne s’attend donc pas à voir surgir ni à traiter.

 

[Non souligné dans l’original.]

 

[43]           Le rôle de décideur de fait du comité a également été relevé par le juge Blais (alors juge à la Cour fédérale) dans la décision Groulx :

 

[23]      En somme, le demandeur a eu droit à une audience devant un décideur impartial et expert, qui a rendu une décision détaillée, fondée sur son argumentation et sur la description de tâches officielle, qu’il connaissait et acceptait. Le Comité a donc rejeté les prétentions du demandeur, quant à ses responsabilités de surveillance, en se basant sur des informations dont il avait connaissance.

 

[24]      Je dois donc conclure que le droit du demandeur à l’équité procédurale a été respecté par le Comité de grief de classification.

 

[Non souligné dans l’original.]

 

 

[44]           Il ressort clairement de ce qui précède que c’est le comité qui est tenu d’assurer le degré approprié d’équité procédurale envers les demandeurs et dont la décision et la recommandation doivent être raisonnables.

 

La déléguée a‑t‑elle manqué aux principes d’équité procédurale et de justice naturelle en se fondant sur une recommandation du comité formulée avant que toutes les observations des demandeurs aient été entendues, ou la déléguée avait‑elle autrement préjugé l’affaire?

 

[45]           Le juge Pelletier, qui était l’auteur de motifs concourants pour la Cour d’appel dans Canada (Procureur général) c Khawaja, 2007 CAF 388 (Khawaja), a déclaré, au paragraphe 114, que la maxime audi alteram partem « oblige un décideur à s’assurer que la personne touchée par une décision a la possibilité de se faire entendre avant que la décision ne soit rendue ». Le juge Pelletier a cité et a approuvé le passage suivant tiré de l’arrêt Gallant c Canada (Sous-commissaire, Service correctionnel du Canada), [1989] 3 CF 329 (Gallant), dans lequel le juge Marceau déclare :

 

Le principe audi alteram partem, qui porte tout simplement que la personne dont les droits ou intérêts peuvent être touchés doit pouvoir participer au processus décisionnel, est fondé sur la prémisse suivante : la personne doit toujours avoir la possibilité de soumettre de l’information, sous forme de faits ou d’arguments, afin de permettre à l’instance décisionnelle de rendre une décision équitable et raisonnable. Il est reconnu depuis longtemps qu’en toute logique, et en pratique, la portée et la nature de cette participation dépendent des circonstances de l’espèce et de la nature de la décision à rendre. Cette interprétation de l’application pratique du principe doit être la même, peu importe que l’obligation d’agir équitablement soit fondée sur le devoir d’agir équitablement établi par la jurisprudence ou sur les principes de justice naturelle reconnus en common law ou sur le concept de justice fondamentale auquel se réfère l’article 7 de la Charte. (« Il est également clair que les exigences de la justice fondamentale ne sont pas immuables; elles varient selon le contexte dans lequel on les invoque. », le juge La Forest, dans l’arrêt R. c. Lyons, [1987] 2 R.C.S. 309, à la page 361.) Le principe demeure évidemment le même, partout où il s’applique.

 

 

[46]           Si les demandeurs ont été privés de la possibilité de se faire entendre sur une importante question avant que le comité ne rende sa décision, le comité a pu manquer aux principes d’équité procédurale. En d’autres termes, si le comité a rendu sa décision avant d’avoir reçu ou examiné les observations des demandeurs, la demande devrait être accueillie.

 

[47]           Les demandeurs se fondent sur l’arrêt SCFP c Ontario (Ministre du Travail), 2003 CSC 29 (SCFP) pour affirmer que les questions de justice naturelle et d’équité procédurale concernent le cadre procédural à l’intérieur duquel la déléguée a rendu sa décision et qu’il revient à la Cour de préciser la teneur de l’obligation d’équité en tant que question de droit en fonction de la norme de la décision correcte.

 

[48]           Les demandeurs reconnaissent que les obligations en matière d’équité procédurale se situent en règle générale à l’extrémité inférieure du continuum dans le contexte du processus des griefs de classification en raison de leur caractère administratif. Toutefois, les demandeurs affirment que certaines exigences essentielles doivent être respectées en matière d’équité procédurale indépendamment de l’endroit où la question se situe le long du continuum.

 

[49]           Les demandeurs renvoient également à l’arrêt Chong c Canada (Procureur général), [1999] ACF no 176 (CAF) (Chong), dans lequel la Cour d’appel fédérale a jugé que les plaignants devaient se voir accorder la possibilité d’aborder une question que le comité considérait cruciale pour trancher le grief, mais que le plaignant ne s’attendait pas à voir en litige (Chong, aux paragraphes 12 et 13). Les demandeurs affirment que malgré le caractère administratif du processus de règlement des griefs de classification, les questions précises soulevées dans la présente demande constituent des aspects fondamentaux des principes d’équité procédurale et que ces questions doivent être appréciées selon la norme de la décision correcte.

 

[50]           Les demandeurs affirment que la question de savoir si l’affaire était jugée d’avance intéresse le cœur même de l’équité procédurale et qu’à ce titre, elle constitue un aspect essentiel de l’équité justifiant l’intervention de la cour de révision indépendamment de l’endroit où se situe le décideur le long du continuum quant aux exigences en matière d’équité procédurale.

 

[51]           Suivant les demandeurs, en l’espèce, la preuve indique clairement que le comité avait rendu sa décision avant que certaines parties des observations des demandeurs n’aient été reçues ou examinées par le comité. Les demandeurs citent des extraits du rapport qui révèlent que le comité avait déjà rendu sa décision sur le fond du grief avant d’avoir reçu ou examiné la réponse des demandeurs aux renseignements fournis par la direction de l’ASFC. Voici le passage précis invoqué par les demandeurs :

 

[traduction

À la suite de la réponse du 11 février 2010 du syndicat, les membres du comité se sont réunis à nouveau le 26 février pour examiner la réponse du syndicat. Après avoir examiné attentivement les éléments de preuve soumis, les membres du comité sont parvenus à un consensus et ont conclu que les nouveaux renseignements reçus ne changeraient rien à leur décision quant au poste faisant l’objet du grief.

 

[Souligné par les demandeurs.]

 

 

[52]           Les demandeurs signalent également des notes prises lors de l’audience du 14 décembre 2009 au cours de laquelle le comité a entendu des représentants de la direction de l’ASFC. Les notes indiquent, sous la rubrique [traduction] « Évaluation », que les membres du comité ont discuté de l’attribution des points et qu’ils se sont tous entendus sur les points attribués. La discussion était axée sur le facteur relatif à la [traduction] « prise de décisions ».

 

[53]           Les demandeurs affirment que, malgré le fait que le comité ait expressément reconnu qu’l avait l’obligation de fournir au demandeur une copie des réponses de la direction et d’examiner toute observation formulée en réponse, il ressortait clairement du libellé du rapport du comité que ce dernier avait déjà délibéré sur le fond du grief avant d’avoir reçu les observations formulées par les demandeurs en réponse, et qu’il était déjà parvenu à sa décision.

 

[54]           Les demandeurs soutiennent que, dans ces conditions, le comité a violé ses obligations en matière d’équité procédurale en préjugeant de façon injustifiable le fond du grief avant d’avoir entendu toutes leurs observations. Suivant les demandeurs, ce défaut constitue une erreur susceptible de révision.

 

[55]           Pour débuter, le défendeur fait valoir que l’instance se déroulant devant le comité n’est pas fondée sur le principe du débat contradictoire. Il s’agit d’une « procédure administrative qui ne fait pas intervenir les droits ou les privilèges qui caractérisent les instances judiciaires ou quasi judiciaires » (Utovac c Canada (Conseil du Trésor), [2006] ACF no 833, au paragraphe 16 (Utovac). Le défendeur invoque la décision rendue par notre Cour dans l’affaire Groulx, au paragraphe 19, où le juge Blais (alors juge à la Cour fédérale) déclare :

 

[19] Le défendeur a donc raison d’affirmer que la jurisprudence, à l’effet que la nature du processus devant le Comité pointe vers un degré moindre dans l’échelle des garanties procédurales, est bien établie. Ces garanties sont limitées au droit du demandeur de voir ses principaux arguments considérés par le Comité, et d’être mis au courant des informations cruciales au litige dont il ne pouvait raisonnablement avoir connaissance.

 

 

[56]           Le défendeur affirme également qu’en l’espèce, le comité n’a pas préjugé le fond du grief, contrairement à ce que prétendent les demandeurs. Le défendeur affirme que le comité a examiné tous les renseignements présentés par les demandeurs ainsi que toutes les observations formulées par les demandeurs avant de formuler sa recommandation.

 

[57]           Le défendeur affirme qu’après avoir reçu les éclaircissements réclamés des représentants de la direction de l’ASFC au sujet du travail effectué par les agents d’exécution de la loi, le comité a transmis ces renseignements aux demandeurs pour leur accorder la possibilité d’y répondre. Le défendeur souligne que les membres du comité se sont ensuite réunis pour délibérer le 26 février 2010, deux semaines après avoir reçu les observations écrites des demandeurs.

 

[58]           Le défendeur affirme en outre qu’il incombe à celui qui allègue la partialité d’établir que l’affaire a été préjugée, ainsi que la Cour suprême du Canada l’a déclaré dans l’arrêt Assoc. des résidents du Vieux St-Boniface Inc. c Winnipeg (Ville), [1990] 3 RCS 1170 (Assoc. des résidents du Vieux St-Boniface inc), la partie qui allègue la partialité entraînant l’inhabilité doit « établir que laffaire a en fait été préjugée, de sorte qu’il ne servirait à rien de présenter des arguments contredisant le point de vue adopté » (Assoc. des résidents du Vieux St-Boniface Inc, au paragraphe 57).

 

[59]           Le défendeur affirme que, bien que le comité ait procédé à une évaluation du poste faisant l’objet du grief avant d’avoir reçu les réponses données par les demandeurs aux renseignements fournis par la direction, l’évaluation pouvait être qualifiée de conclusion provisoire, ainsi que le confirme l’affidavit souscrit par l’un des membres du comité, M. Myles. Cette qualification de conclusion provisoire est également appuyée par le passage reproduit précédemment invoqué par les demandeurs. Le défendeur signale que le comité a tiré cette conclusion provisoire au terme de l’audience initiale au cours de laquelle les demandeurs et les représentants syndicaux ont été en mesure de soumettre des éléments de preuve détaillés.

 

[60]           M. Myles faisait partie du comité dont la décision est contestée dans le cadre du présent contrôle judiciaire. Je ne trouve rien à redire au sujet d’un affidavit qui relate des faits, des événements et des dates. Toutefois, lorsque l’affidavit d’un décideur intervient dans la décision, un problème se pose. Dans son affidavit complémentaire, M. Myles déclare en effet :

[traduction

11.  L’Évaluation du comité (voir la pièce E, jointe à l’affidavit complémentaire de Patrick McEvoy, page 50) était une évaluation provisoire plutôt qu’une évaluation définitive. L’évaluation et la recommandation définitives n’ont été faites par le comité qu’après avoir examiné les observations écrites des demandeurs soumises au comité le 11 février 2010 (voir l’affidavit de James Myles déjà soumis en réponse à la présente demande de contrôle judiciaire, dossier de la demande des demandeurs, vol. V. aux paragraphes 14, 16 et 17, page 1871).

 

[Non souligné dans l’original.]

 

 

[61]           Le défendeur se fonde sur l’affidavit du membre du comité James Myles, en soulignant que l’évaluation initiale n’était que provisoire, et poursuit en citant les propos suivants de M. Myles : [traduction] « L’évaluation et la recommandation définitives n’ont été faites par le comité qu’après avoir examiné les observations écrites des demandeurs soumises au comité le 11 février 2010 ».

 

[62]           Dans l’arrêt Stemijon Investments Ltd. c Canada (Procureur général), 2011 CAF 299, la Cour d’appel fédérale déclare :

 

[40] Au cours des plaidoiries dans le présent appel, l’intimé a renvoyé la Cour à un affidavit qui a été déposé devant la Cour fédérale. Il s’agit d’un affidavit du délégué du ministre qui a rendu la décision qui fait l’objet du contrôle judiciaire en l’espèce. Dans cet affidavit, de même que dans le contre‑interrogatoire sur cet affidavit, le délégué a déclaré qu’il s’est appuyé sur d’autres éléments lorsqu’il a pris sa décision, y compris [traduction] « les dispositions pertinentes de la Loi de l’impôt sur le revenu ». L’intimé fait valoir que cet affidavit montre que le ministre a pris en compte toute l’étendue de son pouvoir discrétionnaire en vertu du paragraphe 220(3.1) de la Loi et qu’il s’est appuyé sur cette disposition, en tant que source de son pouvoir.

 

 

[63]           J’estime ne devoir accorder aucune valeur à l’affirmation de M. Myles, étant donné qu’il s’aventure à se prononcer sur la question de savoir si le comité avait déjà rendu sa décision au sujet de la classification avant de recevoir la réponse des demandeurs.

 

[64]           Malgré ce qui précède, la question de savoir si l’affaire avait été préjugée demeure. Il s’agit d’une décision administrative pour laquelle la norme de l’équité procédurale confère au décideur une plus grande souplesse en ce qui concerne le déroulement de la procédure. À mon avis, il serait étonnant que le comité n’ait pas procédé à une évaluation quelconque des facteurs de classification au fur et à mesure qu’il recevait des éléments de preuve et des observations. La question qui se pose est celle de savoir si le comité avait préjugé l’affaire avant d’avoir reçu toutes les observations.

 

[65]           La Cour suprême du Canada a déclaré qu’il incombe à la partie qui allègue la partialité entraînant l’inhabilité d’« établir que laffaire a en fait été préjugée, de sorte qu’il ne servirait à rien de présenter des arguments contredisant le point de vue adopté » (Assoc. des résidents du Vieux St-Boniface).

 

[66]           Le comité déclare expressément dans son rapport qu’il a examiné attentivement les nouveaux renseignements soumis par les demandeurs. De plus, le comité mentionne la réponse des demandeurs aux observations de la direction avant de présenter son évaluation du poste et son examen des quatre facteurs. Il convient d’accorder une certaine valeur au rapport du comité et à son choix de mots.

 

[67]           Enfin, les renseignements complémentaires des demandeurs consistent surtout en une contestation des allégations de Mme Kramer et en une réfutation détaillée de son témoignage qui, selon les demandeurs, est vague et incohérent. Toutefois, les demandeurs n’ont pas réussi à démontrer que les membres du comité avaient fermé leur esprit au sujet du fond de l’affaire avant d’avoir reçu les observations supplémentaires des demandeurs.

 

[68]           Je conclus que les demandeurs n’ont pas démontré que le comité avait arrêté une décision définitive avant d’avoir entendu l’ensemble des éléments de preuve et des observations des demandeurs.

 

Le comité a‑t‑il fait défaut d’exposer des motifs suffisants pour justifier son analyse des arguments et de la preuve et a‑t‑il manqué aux exigences en matière d’équité procédurale?

 

[69]           Les demandeurs affirment que l’obligation de fournir des motifs est un autre aspect bien établi de l’équité procédurale. Les demandeurs soutiennent que les motifs doivent non seulement être fournis, mais qu’ils doivent être également suffisamment adéquats (Via Rail Canada Inc. c Office des transports du Canada, [2001] 2 CF 25 (CAF) au paragraphe 22).

 

[70]           Les demandeurs affirment qu’en l’espèce, le comité n’a pas respecté son obligation de fournir des motifs suffisants. Les demandeurs soutiennent que le comité a retenu la comparaison que Mme Kramer avait faite avec le poste d’agent des services frontaliers malgré les nombreuses différences relevées par les demandeurs, et écarté les comparaisons que les demandeurs avaient établies avec certains autres postes. Selon les demandeurs, le comité semble avoir agi de la sorte sans avoir entrepris une analyse fouillée en vue de faire ressortir les principales différences entre les postes en question.

 

[71]           Les demandeurs citent également plusieurs passages du rapport dans lesquels le comité se contente d’affirmer qu’il ne peut accepter les modifications proposées par les demandeurs aux points attribués pour le poste d’agent d’application de la loi. À titre d’exemple, ils signalent que le rapport affirme que [traduction] « les membres du comité ne peuvent accepter les points proposés par les demandeurs pour les connaissances » et que [traduction] « de même, le rapport déclare que “le comité ne peut justifier d’attribuer une cote plus élevée que C3” et qu’il ne pouvait “être d’accord” avec les objectifs repères proposés par les demandeurs en ce qui concerne la cotation ».

 

[72]           Les demandeurs affirment qu’à plusieurs endroits dans son rapport, le comité affirme qu’il ne peut accepter les changements proposés par les demandeurs aux cotes attribuées au poste d’agent d’application de la loi. Par exemple, les demandeurs signalent que le rapport indique que [traduction] « les membres du comité ne peuvent accepter » les points proposés par les demandeurs pour les connaissances. Bien que cela soit exact, les demandeurs ne tiennent pas compte de la phrase suivante : ([traduction] « voir le raisonnement suivi par le comité relativement à cet aspect dans la réfutation présentée par l’AFPC relativement à ce diplôme dans son évaluation »). On trouve dans ce renvoi le raisonnement suivi par le comité pour évaluer comme il l’a fait les connaissances et pour leur attribuer la cote finalement retenue.

 

[73]           Les demandeurs affirment que, comme les observations présentées par les demandeurs et par leur représentant syndical étaient longues et détaillées, l’analyse fournie par le comité dans son rapport ne rend tout simplement pas justice aux arguments des demandeurs. Les motifs qui ont été donnés ne sont pas suffisants.

 

[74]           Le défendeur soutient que le comité expose dans le rapport le fil de son raisonnement, ses conclusions, les principaux éléments sur lesquels ces conclusions étaient fondées ainsi que les principaux points en litige.

 

[75]           Le défendeur affirme également que le comité n’était pas obligé d’analyser chacun des éléments de preuve produits par les demandeurs. Il invoque à cet égard l’arrêt Ozdemir c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2001 CAF 331 (Ozdemir), dans lequel la Cour d’appel fédérale a fait observer ce qui suit :

 

[9] ... Un décideur n’est pas tenu d’expliquer, pour chaque preuve produite, les raisons pour lesquelles il n’a pas accepté telle ou telle d’entre elles. Il faut considérer l’importance relative de cette preuve par rapport aux autres éléments sur lesquels est fondée la décision : voir Cepeda-Gutierrez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), (1998), 157 F.T.R. 35.

 

[76]           Le défendeur soutient que le rapport révèle que les membres du comité avaient examiné : a) les renseignements reçus par les demandeurs; b) les renseignements reçus par les représentants de la direction, c) les observations faites par les demandeurs et en leur nom; d) les principaux éléments de preuve sur lesquels la recommandation du comité était fondée.

 

[77]           Le défendeur fait valoir que le comité était tenu uniquement d’aborder les principaux points en litige et que le fait que Mme Kramer avait participé à l’audience relative au grief n’était pas un point important méritant l’analyse du comité ou une attention particulière de sa part.

 

[78]           Le défendeur affirme que les motifs exposés par le comité dans son rapport sont adéquats et suffisants et qu’ils sont conformes aux exigences en matière d’équité procédurale.

 

[79]           Les décideurs ne sont pas obligés d’expliquer les raisons pour lesquelles ils n’acceptent pas chacun des éléments de preuve qui leur ont été soumis. Il n’est pas nécessaire que les motifs énumèrent chacun des facteurs imaginables qui ont pu influencer une décision. Dans la décision Kindler c Canada (Ministre de la Justice), [1987] 2 CF 145. au paragraphe 23. (Kindler), la Cour explique :

 

Cette obligation signifie qu’il faut fournir des motifs adéquats, mais cela ne règle pas la question de savoir comment on peut en déterminer la mesure. Si la décision en cause requiert l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire, les motifs donnés devraient indiquer deux choses : premièrement, que le décideur a reconnu qu’il était habilité à faire un choix et deuxièmement, quels sont les éléments dont il a tenu compte en exerçant son pouvoir discrétionnaire. Il faut toutefois tempérer ces exigences en tenant compte du fait que l’on imposerait un fardeau injustifiable à un décideur si on exigeait qu’il fournisse des motifs élaborés et trop précis. L’obligation de donner des motifs ne devrait pas être interprétée comme un moyen d’inciter le tribunal à analyser ces motifs d’une manière technique.

 

[Non souligné dans l’original.]

 

 

[80]           Il est toutefois nécessaire que le décideur énonce ses conclusions de fait ainsi que les principaux éléments de preuve sur lesquels reposent ces conclusions. Il doit également aborder dans ces motifs les principaux points en litige. On doit également pouvoir suivre le fil du raisonnement de l’auteur de la décision et être en mesure de constater qu’il a effectivement examiné les principaux facteurs pertinents.

 

[81]           Dans le cas qui nous occupe, on trouve dans le rapport un résumé de tous les éléments de preuve présentés. Le rapport résume expressément les observations présentées par les plaignants et en leur nom. Le comité a également abordé et examiné chacune des observations soumises par l’AFPC et les plaignants avant d’entreprendre son propre processus d’évaluation, comme il était chargé de le faire.

 

[82]           Dans l’arrêt Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c Terre-Neuve-et-Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62 (Newfoundland and Labrador Nurses’ Union), la Cour suprême du Canada a jugé que l’insuffisance des motifs ne pouvait être le seul fondement justifiant le contrôle judiciaire d’une décision. Les motifs doivent plutôt être examinés en corrélation avec le résultat pour déterminer si ce dernier fait partie des issues possibles.

 

[83]           Je conclus que les motifs exposés par le comité dans son rapport sont suffisants. Le rapport illustre clairement le processus de prise de décision suivi par le comité. Il résume aussi la preuve et traite des observations des parties, ce qui comprend les évaluations faites par les consultants qui ont été transmises aux demandeurs sous forme de pièces. Le rapport aborde les principaux points en litige et permet de suivre le fil du raisonnement et de constater que les principaux facteurs pertinents ont été pris en compte. Le rapport conclut avec une analyse détaillée de l’évaluation que le comité a faite de la classification au sujet de la description de travail contestée.

 

[84]           Les motifs que l’on trouve dans le rapport du comité sont directement liés à sa conclusion sur le niveau de classification de la description de travail contesté. La décision du comité appartient aux issues possibles, compte tenu des renseignements dont il disposait, des observations que le comité a entendues et des motifs qu’il énonce dans son rapport.

 

Le comité a‑t‑il négligé de tenir dûment compte de l’ensemble des arguments et des éléments de preuve soumis par les demandeurs?

 

[85]           Les demandeurs font valoir que, compte tenu des maigres motifs qu’il a fournis dans son rapport, force est de conclure que le comité n’a pas tenu compte de l’ensemble des arguments et des éléments de preuve qui avaient été portés à sa connaissance.

 

[86]           Selon les demandeurs, le défaut du comité de tenir compte des éléments de preuve qui lui avaient été soumis équivaut à un manquement à l’équité procédurale qui justifie l’intervention de notre Cour dans le cadre du présent contrôle judiciaire. Les demandeurs ont soumis des éléments de preuve précis dont ils estiment que le comité n’a pas tenu dûment compte. Parmi les exemples fournis par les demandeurs, mentionnons les quatre postes contenus dans « l’étude de relativité » portant sur le poste PM‑03 ainsi que l’imposante liasse d’observations écrites et d’éléments de preuve documentaires détaillés fournis en réponse au témoignage de Mme Kramer. Les demandeurs soutiennent qu’une grande partie de ces éléments n’ont été ni retenus ni rejetés par le comité, mais qu’à défaut de raisons expliquant leur rejet, il semble que le comité ait tout simplement carrément ignoré ces éléments.

 

[87]           Un aspect que le comité n’a pas abordé concerne les arguments des demandeurs quant au parti pris qu’aurait eu Mme Kramer avant son intervention en 2007 au sujet de la controverse relative à la description de travail contestée. Je constate toutefois qu’un des consultants dont le rapport a été soumis par les demandeurs était également intervenu auprès de la direction à ce propos vers 2007. À mon avis, le comité a correctement limité ses motifs à la question dont il était saisi, à savoir la classification des postes en cause.

 

[88]           Les demandeurs affirment qu’on ne peut conclure que le comité a sérieusement examiné les arguments et les éléments de preuve présentés par les demandeurs, compte tenu de l’insuffisance des motifs du comité et vu les observations détaillées et le dossier documentaire volumineux soumis par les demandeurs.

 

[89]           Les demandeurs ajoutent que la Cour doit conclure que le comité a manqué aux principes d’équité procédurale en ne tenant pas compte de l’ensemble des éléments de preuve dont il disposait en l’espèce.

 

[90]           Le défendeur soutient que le comité a expliqué dans son rapport de vingt‑et‑une pages les raisons pour lesquelles il recommandait que les postes faisant l’objet du grief devaient être classés dans le groupe et au niveau PM‑03. Le défendeur affirme que le qualificatif de [traduction] « maigres » que le demandeur accole aux motifs du comité est inexact, ajoutant que le comité n’avait pas l’obligation d’analyser chacun des éléments de preuve présentés par les demandeurs.

 

[91]           Les demandeurs affirment que, compte tenu des motifs fournis par le comité dans son rapport, force est de conclure que le comité n’a pas tenu compte de l’ensemble des arguments et des éléments de preuve qui avaient été portés à sa connaissance. Ils ajoutent que le défaut du comité d’examiner les éléments de preuve dont il disposait équivaut à un manquement à l’équité procédurale qui justifie l’intervention de la Cour dans le cadre du présent contrôle judiciaire.

 

[92]           L’argument des demandeurs à cet égard repose sur l’hypothèse que les motifs du comité sont insuffisants. Toutefois, comme j’ai déjà conclu que le rapport offre des motifs suffisants, je dois exprimer mon désaccord avec l’argument des demandeurs sur cette question. J’estime, au contraire, que le rapport démontre clairement que le comité a bel et bien tenu compte de l’ensemble des éléments de preuve et des observations présentées par les demandeurs. Comme je l’ai déjà déclaré, on trouve dans le rapport un résumé des observations présentées par les plaignants et par les personnes qui ont formulé les observations en leur nom. Il est évident que le comité a tenu compte de ces éléments de preuve. Bien que le comité n’ait pas l’obligation d’énumérer chacun des éléments de preuve qu’il a acceptés ou rejetés, je suis convaincu que le comité a bel et bien examiné les éléments de preuve relatifs aux principaux points en litige.

 

 

La déléguée a fondé sa décision sur des questions au sujet desquelles on n’a pas tenté d’obtenir une réponse des demandeurs.

 

[93]           Comme je l’ai déjà signalé, les demandeurs cherchent à obtenir le contrôle judiciaire de la décision de la déléguée. Toutefois, ils contestent essentiellement la décision du comité de recommander que le poste visé par le grief soit classifié au niveau PM‑03.

 

[94]           Ce qui différencie la présente affaire des autres est l’existence d’une note d’information écrite par la déléguée le 19 avril 2010. Il s’agissait d’une lettre interne adressée au président pour l’informer à l’avance de la décision de la déléguée d’accepter la recommandation du comité. Cette lettre n’était pas censée être envoyée aux plaignants et elle ne s’est retrouvée entre leurs mains qu’en réponse à leur demande d’accès à l’information.

 

[95]           Cette lettre soulève la question de l’identité du véritable auteur de la décision et en quoi consiste véritablement le rôle du comité et de la déléguée. On n’a porté à mon attention aucune décision dans laquelle les raisons invoquées par un délégué pour accepter la recommandation d’un comité de grief de classification avaient été soulevées ou contestées.

 

[96]           J’estime qu’il est utile d’examiner en quoi consiste respectivement le rôle du comité et celui du délégué. Le rôle et les fonctions du comité et du délégué sont définis dans la Procédure du règlement des griefs de classification du Conseil du Trésor.

 

[97]           La Procédure du règlement des griefs de classification définit comme suit le mandat du comité :

 

1. Le comité de règlement des griefs doit déterminer la classification appropriée du poste qui fait l’objet d’un grief en tenant compte des fonctions et responsabilités assignées par la gestion, et qui sont accomplies par l’employé; le comité doit aussi tenir compte de l’information présentée par le plaignant et/ou son représentant et par le représentant de la direction. L’information doit être examinée et analysée de façon non sexiste et la recommandation présentée à l’administrateur général ou à son délégué doit être juste, équitable et en accord avec les principes de classification.

 

 

[98]           La Procédure du règlement des griefs de classification prévoit clairement que le comité est chargé de recevoir des éléments de preuve et des observations et de déterminer la classification appropriée du poste qui fait l’objet d’un grief. C’est le comité qui a l’obligation de respecter toutes les exigences en matière d’équité procédurale auxquelles les plaignants ont droit. C’est le comité qui est le décideur de fait.

 

[99]           Dans le cas qui nous occupe, le comité a formulé une recommandation qui respectait toutes les exigences en matière d’équité procédurale auxquelles les plaignants avaient droit. Les plaignants ont eu la possibilité de faire valoir leur point de vue et de répondre aux renseignements communiqués par la direction de l’ASFC et ils ont obtenu de la part du comité des motifs adéquats expliquant les raisons pour lesquelles le comité avait formulé cette recommandation.

 

[100]       La Procédure du règlement des griefs de classification définit comme suit le mandat du délégué :

 

1. L’administrateur général ou son délégué pourra confirmer la recommandation du comité ou trancher en cas de décision partagée. Le délégué doit informer l’administrateur général en cas de décision partagée, si l’opinion minoritaire est retenue. Le délégué doit faire approuver une nouvelle décision par l’administrateur général s’il décide de rejeter une recommandation unanime du comité. En pareil cas, l’administrateur général doit communiquer les raisons du rejet de la décision au SCT en se basant sur les motifs invoqués par le comité pour formuler sa recommandation.

 

 

[101]       Il est évident que, lorsque la recommandation du comité est unanime, le rôle du délégué est limité. Le délégué doit soit confirmer la recommandation, soit la rejeter, auquel cas la nouvelle décision doit être personnellement approuvée par l’administrateur général.

 

[102]       Étant donné que la déléguée n’était pas expressément tenue de motiver sa décision de confirmer ou de rejeter la recommandation du comité, on ne pouvait légitimement s’attendre à ce qu’elle transmette ses motifs aux plaignants.

 

[103]       La note d’information de la déléguée expose quatre raisons pour lesquelles la déléguée estimait que la recommandation du comité était raisonnable. Ces raisons n’approuvaient ni ne contredisaient celles du comité. La note d’information de la déléguée précisait que les évaluations des deux consultants ne pouvaient être considérées comme faisant autorité.

 

[104]       La déléguée estimait que les évaluations du poste par les deux consultants ne pouvaient être considérées comme faisant autorité parce que l’un des consultants était considéré comme ayant un parti pris et que le second n’était pas qualifié. Cette évaluation de la déléguée va à l’encontre de l’avis du comité suivant lequel le rapport des deux consultants méritait d’être examiné, mais qu’à l’analyse, il avait été jugé déficient. On est en droit de se demander si la déléguée a estimé que le comité avait eu tort de tenir compte de l’évaluation des consultants.

 

[105]       Je constate que, lorsque le rapport unanime d’un comité est rejeté, l’administrateur général doit personnellement prendre une nouvelle décision et soumettre au Conseil du Trésor un rapport dans lequel il énonce des motifs de son rejet, lesquels doivent être liés directement à la justification donnée par le comité de classification du grief pour arriver à sa recommandation.

 

[106]       Il me semble que la Procédure du règlement des griefs de classification oblige le délégué à confirmer ou à rejeter le rapport. Le délégué n’est pas obligé de motiver sa décision lorsqu’il confirme le rapport, mais s’il décide de le faire, les motifs qu’il donne doivent se rapporter à ceux avancés par le comité. Lorsque le délégué énonce des motifs contraires qui vont à l’encontre de l’analyse du comité, formule des doutes au sujet de la décision du comité ou ne reprend pas à son compte le raisonnement suivi par le comité, sa décision peut être contestée.

 

[107]       Dans le cas qui nous occupe, compte tenu du degré de déférence dont il convient de faire preuve envers un tribunal administratif spécialisé comme le comité, de la latitude limitée dont dispose le délégué lorsqu’il confirme une recommandation, du fait que la confirmation a été signée par la déléguée le 17 avril, et du fait que la note d’information adressée au président a été signée le surlendemain, le 19 avril 2010, je conclus, vu l’ensemble des faits de la présente affaire, que la déléguée n’a pas affaibli la décision du comité en mentionnant deux évaluations contraires des consultants. J’estime que l’écart constaté entre la note d’information de la déléguée et les motifs donnés par le comité est sans incidence compte tenu de la confirmation de la recommandation du comité que la déléguée avait donnée l’avant-veille.

 

[108]       Par conséquent, je ne suis pas d’accord avec les demandeurs pour dire que la note d’information soulève des questions que les plaignants auraient dû avoir la possibilité d’examiner.

 

[109]       Il vaut la peine de répéter ce que le juge Blais (alors juge à la Cour fédérale) a déclaré dans la décision Groulx au sujet du degré approprié d’équité procédurale :

 

[19] Le défendeur a donc raison d’affirmer que la jurisprudence, à l’effet que la nature du processus devant le Comité pointe vers un degré moindre dans l’échelle des garanties procédurales, est bien établie. Ces garanties sont limitées au droit du demandeur de voir ses principaux arguments considérés par le Comité, et d’être mis au courant des informations cruciales au litige dont il ne pouvait raisonnablement avoir connaissance.

 

 

[110]       Les demandeurs ont eu pleinement l’occasion de faire examiner leurs principaux arguments par le comité. Les commentaires formulés par la déléguée dans la note d’information ne sauraient être considérés comme des informations cruciales pour le litige. Les garanties procédurales auxquelles les demandeurs avaient droit en l’espèce ont été amplement respectées par le comité. Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire du demandeur échoue sur tous les plans.

 

Conclusion

 

[111]       La demande de contrôle judiciaire n’est pas accueillie.

 

[112]       Les dépens sont adjugés au défendeur.

 


JUGEMENT

 

LA COUR :

  1. REJETTE la demande.
  2. ADJUGE les dépens au défendeur.

 

 

« Leonard S. Mandamin »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Sandra de Azevedo, LL.B.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        T-787-10

 

 

INTITULÉ :                                      PATRICK McEVOY et CLAUDIO PELLICORE c PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              OTTAWA (ONTARIO)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :             LE 12 OCTOBRE 2011

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                            LE JUGE MANDAMIN

 

 

DATE DES MOTIFS :                     LE 18 JUIN 2013

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

M. David Yazbeck

 

POUR LES DEMANDEURS

 

M. Neil McGraw

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Raven, Cameron, Ballantyne

et Yasbeck s.r.l.

Ottawa (Ontario)

 

POUR LES DEMANDEURS

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

 

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