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Date : 20130709

Dossier : IMM-9198-12

Référence : 2013 CF 763

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 9 juillet 2013

En présence de monsieur le juge Phelan

 

 

ENTRE :

 

BIRUINTHAPAN PATHMANAPAN

(alias Pathmanapan BIRUINTHAPAN)

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

           MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

I.          INTRODUCTION

[1]               Le présent contrôle judiciaire porte sur une décision d’un commissaire de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié [le commissaire] par laquelle celui-ci a rejeté la revendication du statut de réfugié et de personne à protéger présentée par le demandeur.

 

II.        CONTEXTE

[2]               Le demandeur est un Tamoul originaire du nord du Sri Lanka. Sa famille s’est enfuie à Colombo en 1995. En décembre 2008, les parents du demandeur ont été arrêtés puis libérés après qu’un voisin ait versé un pot-de-vin. En janvier 2009, les parents du demandeur ont été arrêtés de nouveau, puis ils ont été interrogés et battus. Le demandeur a également été interrogé et battu, mais il a été relâché. Il devait se présenter chaque semaine à la police.

 

[3]               Après cet incident, les parents du demandeur se sont rendus aux États‑Unis munis de visas de visiteur. Le demandeur, toutefois, s’est rendu à Singapour et y demeuré jusqu’en décembre 2009.

 

[4]               Comme les Tigres libérateurs de l'Eelam tamoul [LTTE] ont été défaits en mai 2009, le demandeur a estimé qu’il pouvait retourner à Colombo en toute sécurité. Il prétend qu’on a continué de le harceler en raison, comme auparavant, de présumés liens avec les TLET.

 

[5]               Le demandeur a quitté le Sri Lanka en juin 2011 et est arrivé aux États‑Unis. Il a été arrêté dans ce pays et a entrepris son processus de demande d’asile. Il a laissé tomber le processus de demande d’asile aux États-Unis et s’est rendu au Canada où il a demandé l’asile.

 

[6]               Le commissaire a conclu que la question la plus déterminante était la crédibilité. Le commissaire a conclu que le demandeur n’avait pas établi le bien-fondé de sa crainte de persécution parce qu’il avait toujours été relâché et qu’il avait même pu voyager à l’étranger. Le commissaire a conclu que ce traitement était incompatible avec l’idée qu’il était considéré comme étant un partisan des TLET.

 

[7]               Le commissaire a estimé que l’abandon par le demandeur de sa demande d’asile aux États‑Unis indiquait qu’il ne craignait pas vraiment d’être persécuté. Ce fait a grandement miné sa crédibilité.

 

[8]               Le commissaire s’est ensuite penché sur la question subsidiaire du changement de la situation au Sri Lanka et sur la question de savoir si ce changement étayait l’allégation de crainte fondée de persécution.

 

[9]               Dans son analyse, le commissaire a renvoyé au document intitulé Eligibility Guidelines for Assessing the International Protection Needs of Asylum-Seekers from Sri Lanka publié en 2010 par le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (5 juillet 2010) [rapport de l’UNHCR] et à d’autres documents qui démontraient que même si les renseignements étaient souvent contradictoires, les Tamouls, en tant que tels, n’étaient pas menacés de persécution. Le commissaire a conclu que les personnes qui étaient membres des TLET ou qui étaient liés aux TLET pouvaient être en danger. On a conclu que le demandeur n’était pas soupçonné d’avoir des liens avec les TLET.

 

[10]           Exception faite du rapport de l’UNHCR et du document intitulé Sri Lanka: Country Reports on Human Rights Practices for 2011 (24 mai 2012) publié par le Département d'État des États-Unis, le commissaire a examiné le Border Agency Operational Guidance Note – Sri Lanka (décembre 2011) du Royaume‑Uni et le document intitulé Human Rights and Security Issues Concerning Tamils in Sri Lanka: Report from Danish Immigration Service’s Fact Finding Mission to Colombo Sri Lanka, 19 June to 3 July 2010 (octobre 2010) publié par le Service de l’immigration du Danemark. Dans l’ensemble, le commissaire a conclu que les documents indiquaient que la situation des Tamouls au Sri Lanka s’était améliorée et que le demandeur ne serait exposé à aucun risque.  

 

[11]           Comme autre question subsidiaire, le commissaire a examiné la question du « risque généralisé » et a conclu que, à titre de personne riche ou perçue comme étant riche, il appartenait à un sous-groupe, mais n’était exposé qu’à un risque généralisé.

 

III.       ANALYSE

[12]           La norme de la « raisonnabilité» est la norme de contrôle généralement acceptée comme norme applicable. Le demandeur souligne que lorsque la conclusion en litige est une conclusion sur la vraisemblance, la Cour n’a pas à faire preuve d’une grande déférence à l’égard du décideur. Selon moi, il s’agit d’une déclaration trop générale. La retenue accordée à une conclusion portant sur la vraisemblance dépend de la  nature de la conclusion et à l’expertise qui va de pair avec la conclusion (Leung c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), 81 FTR 303, 1994 CarswellNat 673 (CFPI)).

 

[13]           Bon nombre des conclusions portant sur la vraisemblance tirées par le commissaire étaient fondées sur son expérience en matière de dossiers d’immigration. Plus important encore, les conclusions sont étayées par les motifs et elles sont raisonnables.

 

[14]           Il n’y avait rien de déraisonnable dans le fait que le commissaire mette en doute l’abandon par le demandeur de sa demande d’asile. En plus du principe voulant qu’un demandeur doive demander l’asile au premier point où il est sécuritaire de le faire, la preuve démontre que la demande que le demandeur a présentée aux États-Unis pourrait être accueillie. L’abandon et le retard qui en a résulté constituaient un facteur, mais il ne s’agissait pas du facteur qui a joué un rôle déterminant en ce qui concerne la conclusion relative à la crédibilité. Par conséquent, la conclusion est raisonnable.

 

[15]           Le demandeur a critiqué la méthode utilisée par le commissaire pour traiter les éléments de preuve contradictoires concernant les changements de situation. Le demandeur affirme qu’il a commis une erreur de droit et que l’analyse sélective qu’il a faite de la preuve documentaire pour en arriver à ses conclusions était déraisonnable.

 

[16]           Il n’y a pas eu d’analyse sélective ou de déséquilibre ni aucune omission de tenir compte de questions pertinentes. Le commissaire s’est servi de plusieurs sources de renseignements et a tiré une conclusion fondée sur celles-ci.

 

[17]           Dans la mesure où constituait une erreur le fait de ne pas se servir du rapport UNHCR, l’ensemble de la conclusion concernant le changement de situation constitue une décision de rechange. Comme la conclusion principale sur la crédibilité était raisonnable, les conclusions subsidiaires ne sont pas pertinentes même si elles sont erronées.

 

[18]           Là encore, la question du « risque généralisé » était une question subsidiaire à la question principale de la crédibilité. Comme la conclusion du commissaire sur la crédibilité est raisonnable, tout problème dans l’analyse du « risque généralisé » disparaît.

 

[19]           Le demandeur a prétendu qu’il a soumis à la Cour une gamme de possibilités lui permettant d’annuler la décision. Toutefois, il ne s’agit pas d’un exercice comme celui qui consiste à commander dans un restaurant et les choix ne sont pas faits en fonction des préférences personnelles. La Cour suprême du Canada nous enseigne que les tribunaux ne devraient pas chercher à annuler les décisions si on peut dire que les dossiers permettent de justifier le maintien de la décision (Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c Terre-Neuve-et-Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, [2011] 3 RCS 708).

 

IV.       DISPOSITIF

[20]           En conséquence, le  contrôle judiciaire sera rejeté. Il n’y a aucune question à certifier.

 

 

 


JUGEMENT

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

 

 

 

« Michael L. Phelan »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-9198-12

 

INTITULÉ :                                      BIRUINTHAPAN PATHMANAPAN

                                                            (alias Pathmanapan BIRUINTHAPAN)

 

                                                            et

 

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              Toronto (Ontario)

 

DATE DE L'AUDIENCE :             Le 24 juin 2013

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                            LE JUGE PHELAN

 

DATE DES MOTIFS :                     Le 9 juillet 2013

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Jacqueline Swaisland                                                              POUR LE DEMANDEUR

 

 

Julie Waldman                                                                        POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

WALDMAN & ASSOCIATES                                             POUR LE DEMANDEUR

Avocats

Toronto (Ontario)

 

WILLIAM F. PENTNEY

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)                                                                    POUR LE DÉFENDEUR

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