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Cour fédérale

 

Federal Court

 

Date : 2012-02-15


Dossiers : IMM-1726-10

IMM-2002-10

 

Référence : 2012 CF 215

[traduction française certifiée, non révisée]

Toronto (Ontario), le 15 février 2012

En présence de monsieur le juge Beaudry

 

ENTRE :

Dossier : IMM-1726-10

 

LUC GJOKAJ

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

Dossier : IMM-2002-10

 

LUC GJOKAJ

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE

ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

 

 

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire, présentée en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 26 (la Loi), à l’encontre de la décision défavorable d’une agente d’examen des risques avant renvoi (l’agente), datée du 10 février 2010 (IMM-1726-10). Le demandeur sollicite également le contrôle judiciaire de la décision rendue le 12 avril 2010 par un agent d’exécution (l’agent d’exécution) (IMM-2002-10), de ne pas reporter le renvoi du demandeur en attendant l’issue du contrôle judiciaire demandé par celui-ci dans le dossier IMM-1726-10. Ces affaires ont été entendues le même jour à Toronto.

 

[2]               Pour les motifs énoncés ci-après, les demandes seront rejetées.

 

Le contexte

[3]               Le demandeur est citoyen de l’Albanie. Il craint que, s’il est renvoyé, il serait exposé à un risque en raison d’une vendetta familiale.

 

[4]               Il soutient que son cousin, Rrok Gjokaj, a assassiné un certain Ndue Rakaj (M. Rakaj) en 2001. En conséquence, la famille Rakaj a juré de tuer tous les membres masculins de la famille Gjokaj. Le demandeur déclare qu’il a été obligé de vivre dans la clandestinité pendant sept ans. Au cours de cette période, de multiples comités de réconciliation ont vainement essayé de régler la question de la vendetta.

 

[5]               Le demandeur est entré au Canada à l’aide de faux documents en octobre 2008; une mesure d’exclusion a été prise contre lui, le rendant non admissible à présenter une demande d’asile. Il a présenté ultérieurement une demande d’examen des risques avant renvoi (ERAR). Le demandeur affirme que cinq de ses cousins se sont également enfuis d’Albanie pour venir au Canada en raison de cette vendetta. Tous ont présenté une demande d’asile qui a été acceptée par la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission). Le demandeur a inclus dans ses observations relatives à l’ERAR les formulaires de renseignements personnels (FRP) de trois de ses cousins et la preuve des décisions favorables à l’égard de leurs demandes.

 

La décision de l’agente

[6]               L’agente a admis l’existence d’une vendetta, mais n’a pas relevé suffisamment d’éléments de preuve que le demandeur ferait lui-même face à plus qu’une simple possibilité de persécution. Elle a souligné que les cousins du demandeur avaient été considérés comme étant des réfugiés au sens de la Convention, mais a estimé que ces décisions favorables, par elles-mêmes, ne suffisaient pas pour accorder l’asile au demandeur. L’agente a déclaré que, sans les motifs écrits de ces décisions favorables, il lui était impossible de savoir quels éléments de preuve avaient été pris en considération par la Commission pour rendre sa décision.

 

[7]               L’agente a relevé les facteurs dont il faut tenir compte pour apprécier une allégation de risque dû à une vendetta, notamment :

a)      si la vendetta correspond aux principes classiques des vendettas;

b)      l’historique de la vendetta, y compris le nombre de personnes assassinées;

c)      l’attitude antérieure et l’attitude future probable des autorités concernant la vendetta;

d)     le degré d’engagement de la famille antagoniste à poursuivre la vendetta;

e)      le temps écoulé depuis le dernier assassinat;

f)       la position qu’occupe la personne au sein de la famille en tant que cible éventuelle;

g)      la perspective qu’on puisse mettre fin à la vendetta, notamment par l’entremise d’un organisme de réconciliation.

 

[8]               Elle a conclu que le demandeur n’avait pas fourni de précisions sur ce qui était arrivé à son cousin Rrok (celui qui a déclenché la vendetta) et à sa famille ou à plusieurs autres membres de la famille qui seraient des cibles de la vendetta, ni le moindre élément de preuve concernant toute tentative d’agression depuis le début de la vendetta en 2001.

 

[9]               L’agente a souligné que le demandeur avait produit une lettre d’un organisme de réconciliation appelé The Peace Missionaries Union of Albania (la PMUA), mais elle n’a accordé à cette lettre que peu de poids, car celle-ci ne contenait que peu de précisions sur ce qui avait transpiré au cours des neuf dernières années. Elle a mentionné qu’il n’y avait que peu d’éléments de preuve de la fonctionnalité de la PMUA depuis l’assassinat de son leader et que l’organisme n’avait ni bureau établi, ni numéro de téléphone.

 

[10]           L’agente a aussi constaté que la PMUA n’avait été créée qu’en 2005 et qu’il n’y avait pas d’éléments de preuve témoignant d’efforts de réconciliation entre 2001 et 2005. Elle a tiré une conclusion défavorable du fait qu’une seule lettre avait été produite, tandis que de multiples organismes de réconciliation étaient censément à l’œuvre.

 

[11]           Elle a en outre conclu que le demandeur n’avait pas produit d’élément de preuve de la réaction policière à la vendetta et qu’il serait raisonnable de s’attendre à certains éléments de preuve de ce type, puisque M. Rakaj avait été assassiné et qu’un des cousins du demandeur avait allégué dans son FRP que son frère avait été assassiné.

 

[12]           Enfin, l’agente a examiné la preuve documentaire, où il était mentionné que les meurtres dus à des vendettas avaient diminué considérablement ces dernières années en Albanie.

 

La demande de report du renvoi

[13]           Il a été signifié au demandeur de se présenter le 7 avril 2010. Il a présenté une demande de report de son renvoi au motif que, s’il était renvoyé en Albanie, il serait exposé à un risque et, de plus, qu’il avait en instance une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire de la décision défavorable de l’ERAR.

 

[14]           Dans la lettre de refus, l’agent d’exécution a fait remarquer que l’Agence des services frontaliers du Canada avait l’obligation, aux termes de l’article 48 de la Loi, d’exécuter les mesures de renvoi dès que cela était raisonnablement possible. Il précisait dans sa lettre que, dans ce cas, il estimait que le report n’était pas approprié.

 

[15]           L’agent d’exécution a aussi observé qu’une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire d’une décision d’ERAR n’était pas en soi un obstacle au renvoi. L’agent d’exécution s’est appuyé sur les sections 11.1 et 11.2 du Guide d’exécution de la loi ENF 10, affirmant qu’il n’y avait, ni dans la Loi ni dans les règlements, aucun sursis à une mesure de renvoi en cas d’ERAR défavorable ou de décision défavorable en matière de considérations d’ordre humanitaire.

 

[16]           Le demandeur a par la suite sollicité de la Cour un sursis à la mesure de renvoi en attendant l’issue de la demande de contrôle judiciaire de la décision d’ERAR et du refus de reporter le renvoi. Le 14 avril 2010, le juge Hughes a accordé un sursis à la mesure de renvoi. Le juge Hughes a pris acte de la décision rendue dans Shpati c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 367, qui portait sur des questions analogues à la présente demande, et a donc conclu qu’il y avait une question sérieuse à trancher.

 

[17]           Les demandes ont par la suite été ajournées à l’instigation du demandeur en attendant le résultat de l’appel dans Shpati.

 

Les questions en litige

[18]           Les demandes dont la Cour est saisie soulèvent les questions suivantes :

a)      La décision de l’agente était-elle raisonnable en ce qui a trait à la demande d’ERAR du demandeur?

b)      L’agent d’exécution a-t-il commis une erreur en refusant de reporter le renvoi en attendant l’issue de la demande de contrôle judiciaire du demandeur à l’encontre de la décision d’ERAR?

 

La norme de contrôle

[19]           Le demandeur n’a formulé aucune observation concernant la norme de contrôle.

 

[20]           Le défendeur soutient que la décision de l’agente doit être examinée selon la norme de la raisonnabilité et qu’il doit être fait preuve de déférence à l’égard de l’agente pour le poids accordé aux éléments de preuve dont elle disposait (Cabral De Medeiros c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 386, au paragraphe 15). La Cour en convient et la décision de l’agente sera donc maintenue tant qu’elle satisfait aux exigences de justification, de transparence et d’intelligibilité et qu’elle appartient aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit (Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, au paragraphe 47).

 

Analyse

La décision de l’agente était-elle raisonnable en ce qui a trait à la demande d’ERAR du demandeur?

Les arguments du demandeur

[21]           Le demandeur soutient que l’agente a commis une erreur en reconnaissant l’existence d’une vendetta, mais en décidant ensuite que les décisions favorables concernant les demandes d’asile des cousins du demandeur ne suffisaient pas pour conclure que le demandeur était une personne à protéger. Puisque l’agente a admis qu’il existait une vendetta, le demandeur soutient que les décisions favorables dans les demandes de ses cousins auraient dû suffire pour conclure qu’il était également une personne à protéger.

 

[22]           Le demandeur s’appuie sur la décision de la Cour dans Maimba c Canada (Ministre de la citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 226, pour soutenir que, lors de l’examen du risque objectif de préjudice, il faut tenir compte de la preuve documentaire, même si on conclut qu’un demandeur n’est pas crédible.

 

[23]           Le demandeur fait valoir que les préoccupations soulevées par l’agente concernant le degré d’engagement de la famille Rakaj dans la vendetta, le temps écoulé depuis le dernier assassinat et la situation de Rrok étaient toutes non pertinentes, compte tenu des décisions favorables concernant ses cousins. Le demandeur souligne également qu’elle a commis une erreur en supposant que les demandes d’asile de ses cousins pouvaient reposer sur leur appartenance au Parti démocratique – il fait remarquer que, dans leurs demandes, ils précisaient clairement que leur plainte reposait sur leur appartenance à un groupe social, et non sur leur opinion politique.

 

[24]           Le demandeur affirme que l’agente a commis une erreur en tirant des conclusions ne s’appuyant pas sur les éléments de preuve : Abarajithan c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1992] ACF 54 (QL) (CA). Il fait valoir que c’était une erreur que de se concentrer sur le temps écoulé depuis le dernier assassinat, puisqu’il ressortait de la preuve documentaire que les membres masculins de la famille se mettaient à couvert au cours d’une vendetta et que, de la sorte, celle-ci pouvait se poursuivre, malgré l’absence d’incidents. Le demandeur conteste aussi l’importance que l’agente accorde à sa situation dans sa famille, car rien ne prouve qu’il serait davantage exposé à un risque s’il avait un lien étroit avec Rrok, et le demandeur a précisé qu’il serait l’un des rares membres de la famille demeurés au pays, ce qui ferait de lui une cible.

 

[25]           Le demandeur a de plus souligné que l’agente avait exagérément tenu compte de menus détails dans son appréciation de la lettre de la PMUA, n’y accordant que peu de poids parce qu’elle ne contenait pas suffisamment de précisions. Il attaque également sa conclusion selon laquelle il n’y avait pas suffisamment d’éléments de preuve de sa relation avec Rrok ou du fait que la police ne pourrait pas l’aider. Il affirme que l’agente disposait d’éléments de preuve sur ces deux points. Il fait également valoir qu’elle a confondu la volonté de l’Albanie de s’attaquer au problème de la vendetta avec sa capacité de protéger ses citoyens.

 

[26]           Aux dires du demandeur, les motifs de l’agente ne sont pas adéquats, et il n’est pas possible de discerner le fondement de sa décision défavorable.

 

Les arguments du défendeur

[27]           Le défendeur soutient que l’agente a dégagé et appliqué les facteurs appropriés à prendre en compte lors de l’appréciation d’une allégation de risque découlant d’une vendetta. D’après ces facteurs, l’agente a conclu qu’il n’y avait pas suffisamment d’éléments de preuve que le demandeur faisait face à plus qu’une simple possibilité de persécution. Elle pouvait raisonnablement tirer cette conclusion, et la décision devrait être maintenue.

 

[28]           Le défendeur souligne que chaque demande d’asile doit être tranchée selon son propre fondement et que, par conséquent, une décision favorable dans une autre demande, même au sujet d’un parent, n’est pas décisive (Bakary c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 1111; Mantilla Cortes c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 254; Noha c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’immigration), 2009 CF 683). Puisque l’agente ne disposait pas des motifs écrits de ces décisions et que les faits sous‑tendant les demandes des cousins étaient différents de ceux relatifs à la demande du demandeur, le défendeur affirme qu’il était raisonnable que l’agente apprécie la demande du demandeur en fonction de son propre fondement.

 

[29]           Le défendeur ajoute que l’agente a dûment pris en considération les éléments de preuve concernant le fait que la famille Rakaj s’intéressait encore à la famille du demandeur, les éléments de preuve concernant les tentatives de réconciliation ainsi que la preuve documentaire concernant la réaction de la police aux vendettas. Ainsi, fait valoir le défendeur, la décision de l’agente reposait sur l’examen des éléments de preuve pertinents, et il lui était raisonnablement loisible de tirer des inférences en fonction de ceux-ci.

 

[30]           Le défendeur fait en outre valoir que les motifs de l’agente exposent ses conclusions de fait ainsi que les principaux éléments de preuve sur lesquels reposent ces conclusions et que, par conséquent, ils suffisent à comprendre le fondement de sa décision (Townsend c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CFPI 371.

 

Analyse

[31]           Après avoir soigneusement examiné la preuve dans le présent dossier ainsi que les observations écrites et orales des parties, la Cour conclut que la décision de l’agente ne peut être qualifiée de déraisonnable. Les conclusions de l’agente appartiennent aux issues acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit (Dunsmuir, au paragraphe 47).

 

[32]           Le simple fait que des parents du demandeur aient obtenu l’asile n’entraîne pas en soi une décision favorable sur sa demande d’ERAR. Chaque demande doit être examinée sur le fond individuellement (Noha c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’immigration), 2009 CF 683), au paragraphe 102. Puisque le demandeur n’a pas fourni les motifs écrits des décisions, il était loisible à l’agente de ne pas traiter celles-ci comme déterminantes, devant l’impossibilité de connaître le fondement de ces décisions favorables.

 

[33]           Les faits, dans les demandes des cousins, étaient différents de ceux invoqués par le demandeur et, contrairement à ce qu’affirme ce dernier, les exposés circonstanciés de ses cousins, dans leurs FRP, indiquent qu’ils ont bel et bien allégué une crainte fondée sur leur opinion politique, en plus de la crainte fondée sur la vendetta. Il était donc tout à fait raisonnable que l’agente ne rende pas de décision favorable en se fondant uniquement sur ces autres décisions, mais qu’elle apprécie plutôt individuellement sur le fond la demande du demandeur.

 

[34]           Puisque, pour la plupart, les autres arguments du demandeur découlent de son argument à propos des demandes de ses cousins, ils ne peuvent non plus être acceptés. Il a affirmé que les facteurs pris en considération par l’agente – le temps écoulé depuis le dernier assassinat; l’absence de renseignements sur la situation des autres membres de la famille ou sur l’intérêt soutenu de la famille Rakaj pour la vendetta – ne sont pas pertinents, parce que l’agente a accepté l’existence d’une vendetta et que les cousins ont été admis comme réfugiés en raison de cette même vendetta.

 

[35]           Toutefois, selon le document du HCR sur lequel l’agente s’est fondée dans son analyse, la simple présence d’une vendetta dans une famille ne suffit pas pour conclure qu’une personne de cette famille a besoin de protection; cela dépendra plutôt d’un certain nombre de facteurs. L’agente a tenu compte de ces facteurs et lorsque ceux-ci on tété appliqués au contexte du demandeur, pour la majorité, ils portaient à conclure que celui-ci ne faisait pas face à plus qu’une simple possibilité de persécution. Ainsi, la Cour ne peut conclure que l’agente a tenu compte de facteurs non pertinents ou tiré des conclusions déraisonnables d’après la preuve.

 

[36]           Les autres arguments du demandeur touchent le poids accordé aux éléments de preuve et ne constituent donc pas des motifs valables pour annuler la décision. L’agente pouvait raisonnablement n’attribuer que peu de poids à la lettre de la PMUA, étant donné qu’elle disposait d’éléments de preuve selon lesquels la fonctionnalité de cette organisation était douteuse. Elle pouvait aussi tenir compte du fait que le demandeur avait allégué que plusieurs organismes de réconciliation s’étaient impliqués dans la vendetta, mais aucun élément de preuve n’a été produit, sauf cette simple lettre de la PMUA.

 

[37]           Par conséquent, la Cour conclut que l’agente a rendu une décision raisonnable et que, de plus, ses motifs précisaient adéquatement le fondement de ses conclusions.

 

L’agent d’exécution a-t-il commis une erreur en refusant de reporter le renvoi en attendant l’issue de la demande de contrôle judiciaire du demandeur à l’encontre de la décision d’ERAR?

 

[38]           Dans le dossier IMM-2002-10, le demandeur sollicite l’annulation de la décision de l’agent d’exécution de ne pas reporter le renvoi en attendant l’issue de la demande de contrôle judiciaire à l’encontre de la décision d’ERAR défavorable (IMM-1726-10).

 

[39]           L’observation du demandeur selon laquelle un agent d’exécution a le devoir de reporter le renvoi en attendant l’issue d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision d’ERAR défavorable a désormais été rejetée irréfutablement par la Cour d’appel fédérale dans Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile) c Shpati, 2011 CAF 286, où le juge Evans a rejeté l’argument selon lequel le caractère théorique potentiel d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision d’ERAR justifiait le report d’un renvoi :

[34]      […] pour tenter d’atténuer toute incertitude juridique, il convient d’aborder le problème soulevé dans la question certifiée, en l’occurrence celle de savoir si le caractère théorique potentiel du litige relatif à une décision d’ERAR justifie le report d’un renvoi.

 

[35]      À mon avis, il faut répondre à cette question par la négative. S’il en était autrement, le report serait pratiquement automatique chaque fois qu’une personne qui risque d’être renvoyée introduit une instance en contrôle judiciaire relativement à une décision d’ERAR défavorable, ce qui, contrairement à l’économie de la loi, reviendrait à conclure à l’existence d’un sursis légal en plus de ceux qui sont expressément prévus par la LIPR,

 

[40]           Le demandeur laisse entendre que les faits, dans la présente affaire, se distinguent de ceux dans Shpati, parce que, dans ce dernier cas, le demandeur avait la possibilité d’être entendu par une commission.

 

[41]           La Cour fait remarquer que, dans l’affaire qui nous occupe, une mesure d’exclusion a été prise contre le demandeur, parce qu’il est entré au Canada à l’aide de faux documents.

 

[42]           La Cour convient avec le défendeur que le paragraphe 51 et la réponse à la première question certifiée dans Shpati confirment la raisonnabilité de la décision de l’agent d’exécution de ne pas reporter le renvoi en attendant l’issue de la demande de contrôle judiciaire du demandeur à l’encontre de la décision d’ERAR défavorable.

 

[43]           Par conséquent, l’intervention de la Cour n’est pas justifiée.

 

[44]           Les parties n’ont pas proposé de question à certifier et aucune n’est soulevée.


JUGEMENT

LA COUR STATUE que les demandes dans les dossiers IMM-1726-10 et IMM-2002-10 sont rejetées. Aucune question n’est certifiée.

« Michel Beaudry »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

 

C. Laroche

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIERS :                                      IMM-1726-10 et IMM-2002-10

 

INTITULÉ :                         

DOSSIER : IMM-1726-10                 LUC GJOKAJ c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

DOSSIER : IMM-2002-10                 LUC GJOKAJ c LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :             LE 15 FÉVRIER 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT :           LE JUGE BEAUDRY

 

DATE DES MOTIFS

ET DU JUGEMENT :                     LE 15 FÉVRIER 2012

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Dov Maierovitz

 

POUR LE DEMANDEUR

Nadine Silverman

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Gertler, Etienne LLP

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉEFENDEUR

 

 

 

 

 

 

 

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