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Date : 20140529


Dossier : IMM-1380-13

Référence : 2014 CF 515

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

 

Ottawa (Ontario), le 29 mai 2014

En présence de madame la juge Simpson

ENTRE :

MEHMET AYDEMIR

VEDAT AYDEMIR

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

(Motifs prononcés oralement à Toronto, le 14 avril 2014)

[1]               Les demandeurs, Mehmet Avdemir [Mehmet] et Vedat Avdemir [Vedat], sont des cousins [les demandeurs] qui ont présenté une demande de contrôle judiciaire d’une décision rendue par la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié [la Commission] datée du 9 janvier 2013. La Commission avait rejeté les demandes d’asile des demandeurs parce qu’aucun élément de preuve crédible n’étayait leurs demandes.

I.                   Faits

[2]               Mehmet n’était pas membre, mais partisan des partis politiques DTP et BDP en Turquie. Il participait aux célébrations du Nouvel An kurde, distribuait des brochures et servait le thé et le café aux invités qui venaient au bureau du parti. En 2002 et en 2005, Mehmet a été arrêté lors des célébrations du Nouvel An. Dans les deux cas, il ne manifestait pas, mais avait été arrêté par hasard parce qu’il se tenait près d’un groupe qui scandait des slogans en faveur du Parti des travailleurs du Kurdistan. En 2002, il a été arrêté avec de nombreux autres, détenu pendant trois jours, battu et libéré sans être inculpé. En 2005, il a été détenu toute la nuit, battu et encore une fois libéré sans être inculpé.

[3]               En 2006, Mehmet a été détenu à la suite d’une bagarre qui avait éclaté entre des employés kurdes et turcs à son lieu de travail. Tous les Kurdes ont été placés en détention. À ce moment‑là, la fausse identité dont Mehmet se servait pour éviter le service militaire obligatoire a été découverte. Il a donc été envoyé faire le service militaire obligatoire de 15 mois de la Turquie. Il n’a pas été poursuivi.

[4]               Vedat n’était pas membre d’un parti politique, mais il soutenait à l’occasion le BDP en distribuant des dépliants et en se rendant au bureau du parti. Il a également été arrêté lors des célébrations du Nouvel An, mais c’était en 2004. Il a été détenu toute la nuit et libéré indemne. En outre, en juillet 2007, des nationalistes turcs l’ont affronté pendant qu’il discutait en kurde avec des amis dans la rue. Les policiers ont empêché la bagarre, mais ils ont ensuite fait attendre Vedat et ses collègues plusieurs heures dans une voiture et leur ont demandé de quitter la ville. Vedat utilisait aussi une fausse identité pour éviter le service militaire, mais elle n’a pas été découverte pendant qu’il était en Turquie. Il a des frères dont la fausse identité a été découverte et qui ont été envoyés faire leur service militaire obligatoire. Ils n’ont pas été poursuivis.

II.                Décision

[5]               À mon avis, la Commission a tiré trois conclusions :

a)      bien que les éléments de preuve concernant les activités politiques des demandeurs soient dignes de foi, ils ne suffisent pas à montrer que la police de la Turquie s’intéresserait aux demandeurs;

b)      en raison des invraisemblances qu’ils contenaient, les éléments de preuve concernant les activités politiques des demandeurs ont été entièrement rejetés;

c)      si Vedat était poursuivi pour s’être soustrait au service militaire, la poursuite ne constituerait pas de la persécution.

III.             Questions en litige

[6]               Trois questions en litiges sont soulevées :

a)      Les conclusions sur la crédibilité sont-elles raisonnables, étant donné que certaines des explications des demandeurs n’ont pas été analysées dans la décision?

b)      Aurait-il fallu apprécier les risques, malgré la conclusion défavorable sur la crédibilité?

c)      Aurait-il fallu évaluer la peine qu’encourt Vedat à titre de conscrit réfractaire à la lumière de l’article 97 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la LIPR]?

A.                Question en litige 1 – Crédibilité

[7]               Selon moi, étant donné qu’il n’était membre d’aucun parti, il était raisonnable de conclure que Mehmet n’avait pas le profil d’un informateur potentiel. J’estime également qu’il était raisonnable pour la Commission de conclure que Mehmet n’aurait pas été le seul à être questionné par la police sur les allées et venues de son frère étant donné la possibilité que ses parents et ses autres frères aient aussi de l’information. En ce qui concerne les explications, je ne saurais conclure que la Commission en a fait abstraction, car une de ces explications était en fait mentionnée dans les motifs. Il semble donc raisonnable de supposer que les autres ont été examinées aussi.

B.                 Question en litige 2 – Risques

[8]               À mon avis, dès lors que la Commission a conclu qu’aucun élément de preuve concernant l’implication politique des demandeurs n’était crédible, il n’était pas nécessaire d’apprécier les risques.

C.                 Question en litige 3 – Poursuite pour insoumission

[9]               Aucune preuve documentaire n’a été produite sur des poursuites intentées contre des souscrits réfractaires, sauf lorsqu’il s’agissait d’objecteurs de conscience. Vedat ne correspondait pas à ce profil. Par conséquent, le seul élément de preuve porté à la connaissance de la Commission était que Mehmet et les frères de Vedat n’avaient pas été poursuivis et qu’aucune peine ne leur avait été imposée lorsque leurs fausses identités avaient été découvertes. Ils ont été envoyés faire leur service militaire obligatoire, mais aucune autre mesure n’a été prise contre eux. Dans ces circonstances, j’estime que la Commission n’était pas tenue d’examiner si la peine qu’encourait Vedat pour insoumission était visée par l’article 97 de la LIPR.

IV.             Certification

[10]           Aucune question à certifier n’a été proposée.


V.                Observation

[11]           Si j’ai pu comprendre la décision de la Commission, les motifs auraient néanmoins dû être rédigés plus clairement. La Commission aurait dû formuler des conclusions précises plutôt que de renvoyer à ce qu’un autre tribunal pourrait faire, et se prononcer clairement sur les allégations des parties.

 


JUGEMENT

LA COUR STATUE que la demande est rejetée.

« Sandra J. Simpson »

Juge

 

Traduction certifiée conforme

Johanne Brassard, trad. a.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-1380-13

 

INTITULÉ :

MEHMET AVDEMIR, VEDAT AVDEMIR c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 14 AVRIL 2014

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT :

LA JUGE SIMPSON

 

DATE DES MOTIFS :

LE 29 MAI 2014

 

COMPARUTIONS :

Clarissa Waldman

 

POUR LES DEMANDEURS

 

Alexsandra Lipska

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Waldman & Associates

Toronto (Ontario)

 

POUR LES DEMANDEURS

 

 

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

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