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Date : 20160429


Dossier : A-32-15

Référence : 2016 CAF 135

[TRADUCTION FRANÇAISE]

CORAM :

LA JUGE DAWSON

LE JUGE NEAR

LE JUGE DE MONTIGNY

 

ENTRE :

BSH HOME APPLIANCES LTD.

appelante

et

LE PRÉSIDENT DE L'AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA

intimé

Audience tenue à Ottawa (Ontario), le 20 avril 2016.

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 29 avril 2016.

MOTIFS DU JUGEMENT :

LA JUGE DAWSON

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE NEAR

LE JUGE DE MONTIGNY

 


Date : 20160429


Dossier : A-32-15

Référence : 2016 CAF 135

CORAM :

LA JUGE DAWSON

LE JUGE NEAR

LE JUGE DE MONTIGNY

 

ENTRE :

BSH HOME APPLIANCES LTD.

appelante

et

LE PRÉSIDENT DE L'AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA

intimé

MOTIFS DU JUGEMENT

LA JUGE DAWSON

[1]               Pour les motifs rendus dans l'appel no AP‑2013‑057, le Tribunal canadien du commerce extérieur a conclu que les marchandises en cause, sept modèles de laveuses et de sécheuses de marque Bosch, n'étaient pas admissibles au traitement en franchise de droits en vertu du numéro tarifaire 9979.00.00 parce qu'elles n'étaient pas des marchandises conçues spécifiquement pour assister les personnes handicapées en allégeant les effets de leurs handicaps.

[2]               Le numéro tarifaire 9979.00.00 prévoit ce qui suit :

Marchandises conçues spécifiquement pour assister les personnes handicapées en allégeant les effets de leurs handicaps, et articles et matières devant servir dans ces marchandises.

[3]               Lors du présent appel de la décision du Tribunal, l'appelante soulève un certain nombre d'erreurs présumées commises par le Tribunal.

[4]               L'appelante soutient d'abord que l'interprétation par le Tribunal du numéro tarifaire 9979.00.00 est [TRADUCTION] « sans justification » et déraisonnable parce que, en tenant compte des normes énoncées dans la loi américaine intitulée Americans with Disabilities Act (Loi sur les Américains handicapés) (ADA), le Tribunal a adopté un critère non autorisé par la loi. Plus précisément, l'appelante soutient que le Tribunal a commis une erreur lorsqu'il a adopté un critère qui l'a conduit à comparer les caractéristiques de conception précises des marchandises aux normes d'accessibilité de l'ADA.

[5]               Je ne suis pas d'accord. Le Tribunal a renvoyé aux normes de l'ADA parce que le gestionnaire des services techniques de l'appelante avait témoigné et que l'appelante avait fait valoir que les normes étaient pertinentes pour l'évaluation par le Tribunal des caractéristiques de conception des marchandises (motifs, au paragraphe 56). Les motifs du Tribunal démontrent qu'il ne substituait pas les normes de l'ADA au critère des marchandises « conçues spécifiquement » du tarif. Le Tribunal a plutôt accepté la preuve et les observations de l'appelante selon lesquelles les normes de l'ADA, qui sont des normes d'accessibilité généralement reconnues, étaient pertinentes pour « les fins du présent appel » lors de l'évaluation des caractéristiques de conception des marchandises (motifs, au paragraphe 56).

[6]               L'appelante n'a pas démontré qu'il était déraisonnable pour le Tribunal de juger pertinentes des normes qui permettent de s'assurer que des personnes handicapées puissent utiliser des articles ménagers.

[7]               Ensuite, l'appelante fait valoir que le Tribunal a commis une erreur manifeste et dominante quand il a tiré la conclusion que, sans un socle, les marchandises n'étaient pas conformes à l'ADA « en ce qui concerne la hauteur inférieure de la porte, l'accessibilité avant et sur les côtés ayant trait à la hauteur » (motifs, au paragraphe 67). L'appelante reconnaît que sans un socle, les marchandises ne respectent pas la norme de la hauteur de la porte inférieure, mais soutient que les marchandises satisfont aux deux autres normes.

[8]               En supposant, sans se prononcer sur ce point, que le Tribunal ait commis une erreur dans son interprétation des normes de l'accessibilité avant et sur les côtés ayant trait à la hauteur, cela ne rend pas sa décision déraisonnable. Sans le socle, la norme de la hauteur de la porte inférieure n'était pas respectée. Par conséquent, même si les deux autres normes ont été satisfaites, l'une des normes de l'ADA n'a pas été satisfaite et les marchandises n'étaient pas conformes à celle‑ci. Ainsi, toute conclusion erronée tirée par le Tribunal n'a pas porté atteinte à son analyse selon laquelle les marchandises n'étaient pas conformes à l'ADA.

[9]               En outre, le paragraphe 68(1) de la Loi sur les douanes, L.R.C. 1985, ch. 1 (2e suppl.), limite les appels des décisions du Tribunal à notre Cour aux questions de droit. Une inférence erronée ne constitue pas une erreur de droit.

[10]           L'appelante soutient également que le Tribunal a restreint son pouvoir discrétionnaire en interprétant le critère des marchandises « conçues spécifiquement » comme dépendant uniquement du respect des normes pertinentes de l'ADA.

[11]           Là encore, je ne suis pas d'accord. Un décideur qui a un pouvoir discrétionnaire entrave ce pouvoir discrétionnaire quand il crée une pratique habituelle et adhère à cette pratique plutôt que d'évaluer chaque exercice du pouvoir discrétionnaire au cas par cas, compte tenu de la preuve pertinente. En l'espèce, le Tribunal n'a pas fondé sa décision sur une pratique habituelle sans tenir compte des faits. C'est l'appelante qui a fait valoir au Tribunal que les normes de l'ADA étaient pertinentes. Comme il est mentionné précédemment, le Tribunal avait explicitement fait savoir qu'il avait accepté les normes de l'ADA comme étant pertinentes uniquement pour « les fins du présent appel ».

[12]           En outre, le Tribunal a rejeté, sans renvoyer aux normes de l'ADA, l'affirmation de l'appelante selon laquelle les marchandises étaient conçues pour aider « les personnes ayant une déficience visuelle », au motif qu'il n'y avait pas de preuve à l'appui. Cela démontre que le Tribunal n'a pas assimilé les normes de l'ADA au critère des marchandises « conçues spécifiquement ».

[13]           L'appelante a ensuite fait valoir que le Tribunal avait commis une erreur en ne précisant pas si toutes les normes pertinentes de l'ADA doivent être respectées ou s'il suffit de respecter une seule norme. Toutefois, l'appelante a invoqué une conformité intégrale, et non partielle, aux normes pertinentes de l'ADA comme fondement de sa demande (voir les paragraphes 34 à 36 du mémoire que l'appelante a présenté au Tribunal et l'interrogatoire principal du gestionnaire des services techniques de l'appelante aux pages 448 à 452 du dossier d'appel). Lorsque l'appelante n'avait pas réussi à démontrer la conformité intégrale, le Tribunal n'était pas tenu d'examiner une conformité partielle.

[14]           Quoi qu'il en soit, la norme qui n'a pas été respectée en l'espèce, soit l'exigence relative à la hauteur de la porte inférieure, était un facteur important et pertinent pour le Tribunal parce qu'elle influence la capacité qu'ont les personnes handicapées en fauteuil roulant d'utiliser les marchandises. Le non-respect de cette norme est un facteur pertinent pour déterminer si les marchandises étaient des « marchandises conçues spécifiquement pour assister les personnes handicapées en allégeant les effets de leurs handicaps ».

[15]           Enfin, l'appelante soutient que le Tribunal n'a pas tenu compte de la preuve des caractéristiques de conception qui, selon le Tribunal, visaient à aider les personnes handicapées et n'a donné aucun motif pour ne pas en tenir compte.

[16]           Je ne suis pas d'accord que le Tribunal a ainsi commis une erreur. Si le Tribunal n'a pas abordé une caractéristique de conception précise dans ses motifs, la jurisprudence établit clairement qu'un décideur administratif n'est pas tenu d'aborder tous les arguments soulevés par les parties (Newfoundland and Labrador Nurses' Union c. Terre‑Neuve‑et‑Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, [2011] 3 R.C.S. 708, aux paragraphes 16 et 25).

[17]           En somme, les motifs du Tribunal sont transparents, intelligibles et justifiés compte tenu du dossier dont il disposait. La décision appartient aux issues possibles acceptables pouvant se justifier à la lumière de la preuve et du droit.

[18]           Il s'ensuit que je suis d'avis de rejeter l'appel, avec dépens.

« Eleanor R. Dawson »

j.c.a.

« Je suis d'accord.

D.G. Near, j.c.a. »

« Je suis d'accord.

Yves de Montigny, j.c.a. »


COUR D'APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


APPEL D'UNE DÉCISION DU TRIBUNAL CANADIEN DU COMMERCE EXTÉRIEUR DU 27 OCTOBRE 2014, NO AP-2013-057

DOSSIER :

A-32-15

 

 

INTITULÉ :

BSH HOME APPLIANCES LTD. c. LE PRÉSIDENT DE L'AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA

 

 

LIEU DE L'AUDIENCE :

Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L'AUDIENCE :

Le 20 avril 2016

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

LA JUGE DAWSON

 

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE NEAR

LE JUGE DE MONTIGNY

 

DATE DES MOTIFS :

Le 29 avril 2016

 

COMPARUTIONS :

Michael Taylor

 

Pour l'appelante

 

Max Binnie

 

Pour l'intimé

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Lapointe Rosenstein Marchand Melançon S.E.N.C.R.L.

Montréal (Québec)

 

Pour l'appelante

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Pour l'intimé

 

 

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