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Date : 20160906


Dossier : A-21-16

Référence : 2016 CAF 221

[TRADUCTION FRANÇAISE]

CORAM :

LA JUGE TRUDEL

LE JUGE NEAR

LE JUGE RENNIE

 

ENTRE :

KELLY O’GRADY

appelante

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

intimé

Audience tenue à Ottawa (Ontario), le 6 septembre 2016.

Jugement prononcé à l’audience à Ottawa (Ontario), le 6 septembre 2016.

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :

LE JUGE RENNIE

 


Date : 20160906


Dossier : A-21-16

Référence : 2016 CAF 221

CORAM :

LA JUGE TRUDEL

LE JUGE NEAR

LE JUGE RENNIE

 

ENTRE :

KELLY O’GRADY

appelante

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

intimé

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

(Jugement prononcé à l’audience à Ottawa (Ontario), le 6 septembre 2016.)

LE JUGE RENNIE

[1]               L’appelante interjette appel de l’ordonnance rendue par la Cour fédérale le 5 janvier 2016 (2016 CF 9) par laquelle le juge a rejeté la requête de l’appelante en vue d’obtenir qu’une conclusion défavorable soit tirée de la preuve par affidavit déposée par l’intimé dans le cadre de la demande de contrôle judiciaire. Le juge a également refusé de prendre en considération l’affidavit présenté en réponse par l’appelante dans le cadre de la requête, il a refusé d’entendre ses arguments relatifs à la partialité et il a rejeté sa requête visant à obliger l’auteur de l’affidavit de l’intimé à témoigner, présentée en application de l’article 371 des Règles.

[2]               L’admissibilité d’une preuve par affidavit est une question de droit à laquelle il faut appliquer la norme de la décision correcte. Les questions qu’il reste à trancher, à savoir les décisions discrétionnaires d’un juge des requêtes, donnent matière à révision uniquement si une erreur manifeste et dominante est établie (Corporation de soins de la santé Hospira c. Kennedy Institute of Rheumatology, 2016 CAF 215).

[3]               Le présent appel intervient dans le cadre d’une demande de contrôle judiciaire visant une décision du commissaire à la protection de la vie privée du Canada ayant rejeté la plainte de l’appelante en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels, L.R.C. 1985, ch. P-21. Sa plainte porte sur une étude de Statistique Canada qui rattachait les actes de naissance aux données de recensement pendant une période précisée. L’appelante a accouché en Ontario au cours de l’une des périodes précisées, et sa plainte porte particulièrement sur le fait que l’information figurant sur les actes de naissance la concernant a été intentionnellement utilisée sans son consentement. L’intimé soutient que les actes concernant l’appelante n’ont pas été utilisés dans cette étude et, pour étayer sa position, il a déposé deux affidavits de la directrice générale responsable à Statistique Canada.

[4]               L’appelante interjette appel au motif que sa requête devait être traitée dans le respect de l’équité procédurale. Il y a eu manquement à l’équité procédurale, selon elle, car le juge a fait fi de l’affidavit qu’elle avait déposé en réponse et de sa thèse quant à la partialité. Elle affirme avoir subi un préjudice de l’omission d’examiner l’affidavit. Selon elle, le juge n’était pas en mesure de décider s’il fallait ou non tirer une conclusion défavorable. Qui plus est, l’appelante prétend que le juge a commis une erreur de droit en appliquant le mauvais critère juridique : il aurait ajouté à l’analyse une condition liée à la recevabilité, aurait confondu l’analyse de la conclusion défavorable avec le critère applicable à une requête en radiation et aurait mal interprété et mal appliqué les principes juridiques et les précédents pertinents, entre autres.

[5]               Il est possible de trancher rapidement trois de ces motifs d’appel.

[6]               Le juge a conclu que l’appelante n’avait soulevé aucune circonstance particulière justifiant d’obliger l’auteur de l’affidavit à témoigner, comme l’exige l’article 371 des Règles. Il s’agit d’une requête écrite qui doit être tranchée sans audience, et l’appelante a déjà soumis l’auteur de l’affidavit à un contre-interrogatoire. L’appelante n’a fait ressortir aucune erreur susceptible de révision dans cette décision.

[7]               En outre, la décision du juge de ne pas tenir compte de l’affidavit déposé par l’appelante, conformément au paragraphe 369(3) des Règles, est inattaquable. Le paragraphe 369(3) indique clairement que la partie requérante peut uniquement signifier et déposer des prétentions écrites en réponse. Pour contourner cette règle, il faudrait obtenir une autorisation. Cette autorisation n’a pas été demandée. Le juge n’a commis aucune erreur en exerçant son pouvoir discrétionnaire.

[8]               Enfin, en ce qui concerne la prétention de partialité avancée par l’appelante, le juge a bien reconnu qu’il s’agit d’une question de fond qui doit être tranchée par le juge de première instance.

[9]               Dans sa requête, l’appelante demandait au juge, sur le fondement du paragraphe 81(2) des Règles, de tirer une conclusion défavorable du fait que les affidavits déposés par l’intimé reposaient sur sa connaissance et sa croyance.

[10]           Même si, dans la présente instance, l’appelante avait demandé qu’une conclusion défavorable soit tirée, le juge a en fait effectué une analyse de la recevabilité au regard de la connaissance personnelle de l’auteur de l’affidavit. À notre avis, la décision selon laquelle les affidavits étaient recevables n’est nullement erronée. Le juge a correctement conclu que l’auteur de l’affidavit était, en raison de ses responsabilités au sein de la fonction publique fédérale, en mesure de faire une déposition relativement à la question en litige sans nécessairement avoir une connaissance personnelle (Twentieth Century Fox Home Entertainment Canada Limited c. Canada (Procureur général), 2012 CF 823).

[11]           Que l’auteur ait ou non une connaissance personnelle des faits, comme l’exige le paragraphe 81(1) des Règles, a une incidence sur la recevabilité de l’affidavit. Cependant, il convient de laisser au juge de première instance le soin de décider de l’opportunité de tirer une conclusion défavorable à partir d’éléments de preuve par ailleurs recevables, car il dispose du dossier complet et des arguments des avocats. À cette fin, une clarification des motifs du juge s’impose. La question de la conclusion, défavorable ou non, qu’il y a lieu de tirer relève du juge de première instance qui entend l’affaire sur le fond.

[12]           La présente demande d’appel est rejetée.

[13]           Vu le succès partiel de l’appelante, nous n’adjugeons aucuns dépens.

« Donald J. Rennie »

j.c.a.

Traduction certifiée conforme

Marie- Luc Simoneau, jurilinguiste


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


APPEL D’UNE ORDONNANCE DE LA COUR FÉDÉRALE, DATÉE DU 5 JANVIER 2016, DOSSIER NO T-2587-14 (2016 CF 9)

DOSSIER :

A-21-16

 

INTITULÉ :

KELLY O’GRADY c. PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Ottawa (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 6 septembre 2016

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :

LA JUGE TRUDEL

LE JUGE NEAR

LE JUGE RENNIE

PRONONCÉS À L’AUDIENCE PAR :

LE JUGE RENNIE

COMPARUTIONS :

Kelly O’Grady

appelante

Me Sarah J. Sherhols

Pour l’intimé

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

Pour l’intimé

 

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