Décisions de la Cour d'appel fédérale

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Date : 20161017


Dossier : A-82-16

Référence : 2016 CAF 252

[TRADUCTION FRANÇAISE]

CORAM :

LA JUGE GAUTHIER

LE JUGE DE MONTIGNY

LA JUGE GLEASON

 

ENTRE :

RICK HORSEMAN

appelant

et

SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA ET SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA REPRÉSENTÉE PAR L’AGENCE DU REVENU DU CANADA

intimées

Audience tenue à Edmonton (Alberta), le 17 octobre 2016.

Jugement rendu à l’audience à Edmonton (Alberta), le 17 octobre 2016.

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :

LE JUGE DE MONTIGNY

 


Date : 20161017


Dossier : A-82-16

Référence : 2016 CAF 252

CORAM :

LA JUGE GAUTHIER

LE JUGE DE MONTIGNY

LA JUGE GLEASON

 

ENTRE :

RICK HORSEMAN

appelant

et

SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA ET SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA REPRÉSENTÉE PAR L’AGENCE DU REVENU DU CANADA

intimées

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

(Jugement rendu à l’audience à Edmonton (Alberta), le 17 octobre 2016).

LE JUGE DE MONTIGNY

[1]               La Cour est saisie de l’appel d’une décision rendue par la juge Hansen de la Cour fédérale, ordonnant la radiation de la déclaration de l’appelant sans autorisation de modification au motif qu’elle ne présentait aucune cause d’action valable. Après un examen minutieux du dossier et de l’argumentation des parties, la Cour est d’avis que le présent appel doit être rejeté.

[2]               En 2011, le ministre du Revenu national a fait parvenir à l’appelant un avis de cotisation établissant un montant de 59 000,06 $ à payer au titre de la TPS, en vertu de la Loi sur la taxe d’accise. En juillet 2015, l’Agence du revenu du Canada lui a adressé une Demande formelle de paiement. En septembre 2015, l’appelant affirme avoir déposé un avis d’opposition. Plus tard, en octobre 2015, l’appelant a déposé une déclaration dans le cadre d’une action simplifiée conformément aux Règles des Cours fédérales en vue d’obtenir un jugement déclarant la Demande formelle de paiement nulle et non avenue et contraire à la Loi sur les Indiens, au Traité no 8 et à l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 ainsi que des dommages-intérêts pour les fonds saisis en application de la Demande formelle de paiement.

[3]               Les deux questions dont notre Cour est saisie sont : 1) la qualification de la demande de l’appelant; 2) la compétence de la Cour de l’impôt à statuer au fond sur les demandes. Dans le premier cas, c’est la norme de « l’erreur manifeste et dominante » qui s’applique, car il s’agit d’une question mixte de droit et de fait, tandis que dans le deuxième cas, c’est celle de la décision correcte qui s’applique, car il s’agit d’une question de droit (voir Housen c. Nikolaisen, 2002 CSC 33, [2002] 2 R.C.S. 235).

[4]               Aux termes de l’article 18.5 de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. (1985), ch. F-7, la Cour fédérale n’a pas compétence dans les cas où une loi fédérale prévoit expressément un droit d’appel à la Cour canadienne de l’impôt. Dans l’arrêt Canada (Revenu national) c. JP Morgan Asset Management (Canada) Inc., 2013 CAF 250, notre Cour a examiné des exemples de situations qui relevaient manifestement de la compétence exclusive de la Cour de l’impôt et a conclu que les affaires qui soulevaient essentiellement la validité d’une cotisation fiscale relevaient manifestement de la compétence de la Cour canadienne de l’impôt. La Cour, sous la plume du juge Stratas, a expliqué que « [l]es articles 165 et 169 de la Loi de l’impôt sur le revenu établissent une procédure d’appel complète qui permet au contribuable de soulever devant la Cour canadienne de l’impôt toutes les questions relatives au bien-fondé des cotisations [...] » (par. 82). Suivant l’arrêt Johnson c. Canada, 2015 CAF 51, il en va de même des questions découlant de la Loi sur la taxe d’accise (par. 21).

[5]               Pour décider si, au fond, la demande vise à contester la validité d’une cotisation établie, le tribunal « doit faire une “appréciation réaliste” de la “nature essentielle” de la demande en s’employant à en faire une lecture globale et pratique, sans s’attacher aux questions de forme [...] » (JP Morgan, par. 50). Pour ce faire, une cour « doit aller audelà des termes employés, des faits allégués et de la réparation demandée » pour conclure que la demande ne constitue pas une tentative déguisée visant à obtenir indirectement ce qui peut l’être directement par une autre voie de droit, plus appropriée (voir la décision Canada c. Roitman, 2006 CAF 266, par. 16).

[6]               En l’espèce, la Cour fédérale a conclu que la « nature essentielle » de la demande de l’appelant correspondait à une contestation indirecte de la validité de sa nouvelle cotisation pour l’année 2011. À la lumière de ces faits et de la jurisprudence pertinente, la Cour en est venue à la conclusion qu’une telle qualification ne constitue pas une erreur manifeste et dominante. Même si la demande de l’appelant est présentée comme une action en dommages-intérêts, les seuls dommages-intérêts qu’il demande découlent directement de la nouvelle cotisation, et il ne sollicite que le remboursement des fonds versés pour satisfaire à cette nouvelle cotisation. La demande de l’appelant, comme il l’a présentée, n’est rien de plus qu’une contestation de la validité de la nouvelle cotisation. Le volet constitutionnel de la demande ne change rien à cette conclusion et n’a pas eu pour effet d’écarter la compétence de la Cour de l’impôt.

[7]               En vertu de l’article 19.2 de la Loi sur la Cour canadienne de l’impôt, L.R.C. (1985), ch. T-2, la Cour de l’impôt a compétence pour examiner la validité, l’applicabilité ou l’effet sur le plan constitutionnel des lois fédérales ou de leurs textes d’application, et peut ordonner une réparation lorsqu’un avis de question constitutionnelle lui est dûment signifié (voir Guindon c. Canada, 2015 CSC 41; Grenon c. Canada, 2016 CAF 4). De plus, il est bien établi que la Cour de l’impôt peut connaître des demandes fondées sur l’article 87 de la Loi sur les Indiens en matière de taxation et des questions sur l’application du Traité no 8, notamment celle de savoir si ce dernier prévoit une exemption fiscale (voir, par exemple, Succession Bastien c. Canada, 2011 CSC 38; Pictou c. Canada, 2003 CAF 9). Les questions de cette nature peuvent valablement être soumises à la Cour de l’impôt, et la jurisprudence qu’invoque l’appelant n’étaye pas la thèse contraire. En fait, une grande partie de la jurisprudence citée par l’appelant vient confirmer que les questions relatives à la validité des cotisations fiscales doivent être jugées par la Cour de l’impôt, peu importe la manière dont la demande est formulée. En effet, la Cour suprême du Canada a souligné la nécessité de protéger l’intégrité et l’efficacité du système de cotisation et d’appel en matière fiscale ainsi que l’intention du législateur d’édifier une structure complexe, pour assurer le traitement d’une multitude de revendications se rapportant au fisc, qu’étaye un tribunal spécialisé et indépendant (voir Canada c. Addison & Leyen Ltd., 2007 CSC 33, par. 11).

[8]               Pour les motifs qui précèdent, la Cour conclut que le juge des requêtes a qualifié à bon droit la demande de l’appelant de contestation indirecte d’une cotisation et qu’il est évident et manifeste que la Cour de l’impôt avait compétence exclusive sur une telle question. Par conséquent, l’appel sera rejeté avec dépens.

« Yves de Montigny »

j.c.a.

Traduction certifiée conforme

Marie-Luc Simoneau, jurilinguiste


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


Dossier :

A-82-16

APPEL D’UNE ORDONNANCE RENDUE PAR LA JUGE HANSEN DE LA COUR FÉDÉRALE LE 7 MARS 2016, DOSSIER No T-1846-15

INTITULÉ :

RICK HORSEMAN c. SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA ET SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA REPRÉSENTÉE PAR L’AGENCE DU REVENU DU CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

EDMONTON (ALBERTA)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 17 OCTOBRE 2016

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :

LA JUGE GAUTHIER

LE JUGE DE MONTIGNY

LA JUGE GLEASON

RENDUS À L’AUDIENCE PAR :

LE JUGE DE MONTIGNY

COMPARUTIONS :

Me Priscilla Kennedy

POUR L’APPELLANT

Me Donna Tomljanovic

POUR LES INTIMÉES

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

DLA Piper (Canada) S.E.N.C.R.L.

Avocats

Edmonton (Alberta)

POUR L’APPELLANT

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Edmonton (Alberta)

POUR LES INTIMÉES

 

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