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Date : 20170131


Dossier : A‑216‑16

Référence 2017 CAF 19

[TRADUCTION FRANÇAISE]

CORAM :

LE JUGE STRATAS

LE JUGE WEBB

LE JUGE SCOTT

 

ENTRE :

RALPH MATHIAS

appelant

et

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

Audience tenue à Calgary (Alberta), le 31 janvier 2017.

Jugement rendu à l’audience à Calgary (Alberta), le 31 janvier 2017.

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :

LE JUGE STRATAS

 


Date : 20170131


Dossier : A‑216‑16

Référence : 2017 CAF 19

CORAM :

LE JUGE STRATAS

LE JUGE WEBB

LE JUGE SCOTT

 

ENTRE :

RALPH MATHIAS

appelant

et

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

(Prononcés à l’audience à Calgary (Alberta), le 31 janvier 2017.)

LE JUGE STRATAS

[1]  Selon l’article 160 des Règles de la Cour canadienne de l’impôt (procédure générale), DORS/90‑688a, « [s]’il semble que l’appelant réside à l’étranger », la Cour canadienne de l’impôt peut « donner des directives appropriées portant sur le cautionnement pour dépens ». Comme l’appelant à la présente instance réside à l’étranger, l’intimée a formé contre lui une requête en cautionnement pour dépens. Par ordonnance en date du 6 juin 2016, la Cour canadienne de l’impôt (le juge en chef Rossiter) a accueilli cette requête et a enjoint à l’appelant de consigner à la Cour la somme de 9 000 $ en cautionnement pour dépens. L’appelant interjette appel de cette ordonnance devant notre Cour.

[2]  La Cour de l’impôt n’a prononcé qu’une ordonnance non motivée. On ne peut espérer en discerner les motifs qu’en examinant son libellé à la lumière du dossier produit devant ladite Cour. Voici le texte entier de cette ordonnance laconique :

[traduction]

VU la requête de l’intimée visant à obtenir une ordonnance qui enjoindrait à l’appelant de consigner à la Cour la somme de 13 850 $ en cautionnement pour dépens, ainsi qu’une ordonnance adjugeant les dépens de cette même requête;

ET VU les conclusions des avocats des deux parties,

LA COUR ORDONNE :

1. L’appelant consignera à la Cour canadienne de l’impôt, au plus tard le 4 août 2016, la somme de 9 000 $CAN en cautionnement pour les frais de justice.

2. Les dépens de la présente requête sont établis à 750 $, payables à l’intimée dans le même délai.

[3]  L’appelant soutient devant notre Cour que cette ordonnance doit être annulée en raison de l’insuffisance de ses motifs. Il ne sait pas, fait‑il valoir, pourquoi la Cour de l’impôt lui a ordonné de verser un cautionnement pour dépens malgré son opposition, pourquoi le montant de ce cautionnement a été fixé à 9 000 $, ni pourquoi on lui a ordonné de le consigner en un versement unique plutôt que par tranches, comme il l’avait demandé.

[4]  Nous pensons comme l’appelant. Les motifs de la Cour de l’impôt sont loin d’atteindre les normes fixées dans des arrêts tels que les suivants : R. c. Sheppard, 2002 CSC 26, [2002] 1 R.C.S. 869; R. c. Gagnon, 2006 CSC 17, [2006] 1 R.C.S. 621; Hill c. Commission des services policiers de la municipalité régionale de Hamilton‑Wentworth, 2007 CSC 41, [2007] 3 R.C.S. 129; R. c. R.E.M., 2008 CSC 51, [2008] 3 R.C.S. 3; R. c. Walker, 2008 CSC 34, [2008] 2 R.C.S. 245; et R. c. Dinardo, 2008 CSC 24, [2008] 1 R.C.S. 788. On trouve un résumé utile de ces décisions au paragraphe 143 de l’arrêt Canada c. Première nation de Long Plain, 2015 CAF 177. L’examen de l’ordonnance à la lumière du dossier produit devant la Cour de l’impôt ne nous permet pas d’en discerner les motifs.

[5]  Dans les cas où, comme en l’espèce, les motifs se révèlent légalement insuffisants, notre Cour statue normalement sur l’affaire de novo; voir Canada (Procureur général) c. Larkman, 2012 CAF 204, au paragraphe 60; Plante c. McLung, 2005 CAF 120, au paragraphe 2; Infonet Services Corp. c. Matrox Electronic Services Ltd., 2004 CAF 162, au paragraphe 6; et Jukutavicius c. Canada (Procureur général), 2004 CAF 289, au paragraphe 24. Telle est la voie que nous suivrons.

[6]  Comme l’appelant réside à l’étranger, il serait difficile pour l’intimée, le cas échéant, d’assurer l’exécution d’une adjudication de dépens en sa faveur. Aucun élément du dossier ne donne à penser le contraire. La preuve produite par l’appelant au sujet de sa situation pécuniaire est trop restreinte et de nature trop générale pour qu’on puisse lui donner grand poids. Par conséquent, l’intimée est fondée à obtenir contre l’appelant une ordonnance de cautionnement pour dépens.

[7]  Dans sa requête en cautionnement pour dépens, l’intimée a proposé un mémoire estimatif de frais. Le montant en cause dans l’instance s’élève à 105 000 $, de sorte que, aux fins du calcul des dépens auxquels l’appelant pourrait être condamné, nous avons ici affaire à un appel de catégorie B; voir l’alinéa 1b) du tarif A des Règles. Les chiffres applicables aux appels de catégorie B sont donnés à l’article premier du tarif B. Appliquant cette méthode, l’intimée réclame un montant tout compris de 13 850 $ sur la base de son mémoire de frais. Ses prévisions selon lesquelles les interrogatoires préalables et l’audience dureront chacun trois jours forment l’élément central de sa position. L’intimée soutient aussi qu’une décision juste sur cette question relevant de l’article 160 des Règles permettrait à l’appelant de verser ce montant en trois tranches : la première, de 4 725 $, à consigner 45 jours après le jugement de notre Cour; la deuxième, de 4 000 $, à consigner 90 jours après la date du même jugement; et la dernière, fixée à 5 125 $, à verser au moment du dépôt de la demande d’audience devant la Cour de l’impôt.

[8]  Selon l’appelant, la fixation d’un montant moins élevé, soit de 7 000 $, serait juste dans les circonstances. Il invoque sa situation pécuniaire, telle qu’elle est exposée dans l’affidavit déposé devant la Cour de l’impôt. Il ajoute, concernant la durée de la procédure, qu’on pourrait plus raisonnablement l’estimer à deux jours pour les interrogatoires préalables et à une journée pour l’audience. La justice exigerait, soutient‑il enfin, qu’il puisse verser le cautionnement de 7 000 $ en deux tranches, respectivement de 3 000 $ et de 4 000 $.

[9]  Après avoir examiné l’avis d’appel et la réponse, et après avoir entendu les conclusions des avocats, nous nous rangeons du côté de l’intimée. Nous considérons comme raisonnable l’estimation prévoyant trois jours pour les interrogatoires préalables et trois jours pour l’audience, étant donné la nature, le nombre et la complexité des questions en litige. Nous pensons aussi que la division du montant en trois tranches plutôt qu’en deux et la chronologie des versements proposée par l’intimée tiennent dûment compte de la situation pécuniaire de l’appelant. Il convient d’ajouter que l’affidavit déposé par ce dernier devant la Cour de l’impôt ne contient que des éléments de nature très générale concernant sa capacité de paiement. Vu la preuve, nous sommes d’avis qu’un cautionnement de 13 850 $ tout compris ne serait pas injuste en l’espèce.

[10]  Cette somme, on l’aura remarqué, est plus élevée que celle que la Cour de l’impôt a fixée dans son ordonnance. Chose exceptionnelle, la situation de l’appelant à la présente instance aura empiré par suite de son appel. C’est là une conséquence du fait que, conformément à notre jurisprudence, nous avons dû instruire l’affaire de novo, c’est‑à‑dire réexaminer complètement au fond la requête en cautionnement pour dépens portée devant la Cour de l’impôt.

[11]  En conséquence, nous accueillerons l’appel, annulerons l’ordonnance de la Cour de l’impôt, ferons droit à la requête en cautionnement pour dépens et ordonnerons à l’appelant de consigner à ladite Cour, à titre de cautionnement de cette nature, la somme de 13 850 $ en trois tranches : la première, de 4 725 $, dans les 45 jours suivant le jugement de notre Cour; la deuxième, de 4 000 $, dans les 90 jours suivant le même jugement; et la troisième, fixée à 5 125 $, dans les sept jours suivant la demande d’audience visée à l’article 123 des Règles.

[12]  L’intimée ayant eu globalement gain de cause dans sa requête, nous lui accorderons un montant tout compris de 1 000 $ au titre de ses dépens devant notre Cour et devant la Cour de l’impôt.

« David Stratas »

j.c.a.

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DoSSIER :

A‑216‑16

APPEL D’UNE ORDONNANCE RENDUE PAR LE JUGE EN CHEF ROSSITER LE 6 JUIN 2016 DANS LE DOSSIER NO 2015‑4411(IT)G

INTITULÉ :

RALPH MATHIAS c. SA MAJESTÉ LA REINE

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Calgary (Alberta)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 31 JANVIER 2017

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :

LE JUGE STRATAS

LE JUGE WEBB

LE JUGE SCOTT

 

PRONONCÉS À L’AUDIENCE PAR :

LE JUGE STRATAS

COMPARUTIONS :

Jonathan N. Garbutt

 

POUR L’APPELANT

Valerie Meier

 

POUR L’INTIMÉE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Dominion Tax Law

Calgary (Alberta)

 

POUR L’APPELANT

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

 

POUR L’INTIMÉE

 

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