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Date : 20170403


Dossier : A-109-16

Référence : 2017 CAF 69

[TRADUCTION FRANÇAISE]

 

CORAM :

LE JUGE EN CHEF NOËL

LE JUGE WEBB

LA JUGE WOODS

 

ENTRE :

 

 

HORST STRUCK

 

 

appelant

 

 

et

 

 

SA MAJESTÉ LA REINE

 

 

intimée

 

Audience tenue à Vancouver (Colombie-Britannique), le 22 mars 2017.

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 3 avril 2017.

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :

LE JUGE WEBB

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE EN CHEF NOËL

LA JUGE WOODS

 


Date : 20170403


Dossier : A-109-16

Référence : 2017 CAF 69

CORAM :

LE JUGE EN CHEF NOËL

LE JUGE WEBB

LA JUGE WOODS

 

ENTRE :

 

 

HORST STRUCK

 

 

appelant

 

 

et

 

 

SA MAJESTÉ LA REINE

 

 

intimée

 

MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE WEBB

[1]  M. Struck interjette appel du jugement de la Cour canadienne de l’impôt (la CCI) daté du 22 mars 2016 (dossier de la CCI : 2014‑2421(IT)I) par lequel le juge D’Arcy a fait droit à la requête de la Couronne et annulé l’appel qu’avait interjeté M. Struck au titre de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. 1985, ch. 1, (5e suppl.) (la LIR), relativement à son année d’imposition 2005.

I.  Le contexte

[2]  En 2005, M. Struck a transféré à son fils 150 actions de 468543 B.C. Ltd. ainsi qu’un droit sur la moitié d’un immeuble locatif. M. Struck et son fils ont conclu une entente sur le montant qui, selon eux, représentait la juste valeur marchande de ces biens ainsi que sur la manière dont son fils paierait ces biens. Dans sa déclaration de revenus pour 2005, M. Struck n’a déclaré aucun gain en capital imposable relativement à ces dispositions.

[3]  Le 26 février 2009, M. Struck a fait l’objet d’une nouvelle cotisation, en vue d’inclure un montant de gain en capital imposable de 163 000 $ relativement à ces dispositions. M. Struck a signifié un avis d’opposition au ministre du Revenu national (le ministre) et, le 2 juillet 2010, une nouvelle cotisation a été établie en vue de réduire le montant des gains en capital imposables à 110 500 $, répartis ainsi : un gain en capital imposable tiré de la disposition de l’immeuble résidentiel de 75 000 $ et un gain en capital imposable tiré de la disposition des actions de la société à numéro de 35 500 $.

[4]  M. Struck a interjeté appel auprès de la CCI. Par un jugement sur consentement daté du 8 janvier 2013, la CCI a souscrit au consentement proposé par les parties, soit de faire droit à l’appel de M. Struck et de réduire le montant total des gains en capital imposables à 72 100 $, gains qui seraient alors répartis ainsi : le gain en capital imposable attribuable à la disposition de l’immeuble résidentiel serait de 49 850 $ et le gain en capital imposable attribuable à la disposition des actions de la société à numéro serait de 22 250 $.

[5]  Quand la nouvelle cotisation tenant compte du jugement sur consentement a été établie, M. Struck a déposé un avis d’appel auprès de la CCI. La Couronne a déposé une requête en annulation de cet appel et, par jugement daté du 22 mars 2016, la requête a été accueillie et l’appel annulé.

II.  La question en litige

[6]  La question en litige dans le présent appel consiste à savoir si le juge de la CCI a commis une erreur en annulant l’appel de M. Struck.

III.  L’analyse

[7]  M. Struck soutient qu’il a consenti au montant du gain en capital imposable, mais pas au montant d’impôt à payer pour 2005. En particulier, il a soulevé trois points qui, s’ils étaient acceptés, réduiraient le montant d’impôt qu’il aurait à payer pour 2005 :

  • a) M. Strucka soutenu qu’il avait le droit de déduire une provision au titre de l’article 40 de la LIR;

  • b) M. Strucka soutenu qu’il avait des pertes en capital nettes d’autres années qu’il voulait appliquer en 2005;

  • c) M. Strucka soutenu que les actions de la société à numéro étaient des actions admissibles de petite entreprise au sens de la LIR et qu’il avait donc droit à une déduction au titre de l’article 110.6 de la LIR.

[8]  À l’audition du présent appel, le fils de M. Struck a confirmé que l’Agence du revenu du Canada avait autorisé la déduction pour l’année d’imposition 2005 des pertes en capital nettes d’autres années, de sorte que cette question n’était plus en litige. Il a également confirmé qu’en examinant de plus près la définition d’une action admissible de petite entreprise, il s’est rendu compte que les actions de la société à numéro ne correspondaient pas à cette définition, car la société détenait un bien locatif. M. Struck ne prétendait donc plus qu’il avait droit à une déduction au titre de l’article 110.6 de la LIR.

[9]  La seule question qui subsiste est donc la prétention de M. Struck selon laquelle il a encore le droit de porter en appel la question de savoir s’il devrait être autorisé ou non à déduire une provision en vertu de l’article 40 de la LIR.

[10]  Le droit de porter en appel une cotisation établie à la suite d’une ordonnance ou d’un jugement de la CCI est restreint par le paragraphe 169(2) de la LIR, dont les passages pertinents sont les suivants :

(2) Malgré le paragraphe (1), dans le cas où, à un moment donné, le ministre établit une cotisation concernant l’impôt, les intérêts, les pénalités ou d’autres montants payables par un contribuable en vertu de la présente partie ou détermine un montant à l’égard d’un contribuable :

(2) Notwithstanding subsection 169(1), where at any time the Minister assesses tax, interest, penalties or other amounts payable under this Part by, or makes a determination in respect of, a taxpayer

a) […] en conformité avec l’ordonnance d’un tribunal qui […] la renvoie au ministre pour nouvel examen et nouvelle cotisation;

(a) … in accordance with an order of a court … referring the assessment back to the Minister for reconsideration and reassessment,

[…]

le contribuable peut interjeter appel auprès de la Cour canadienne de l’impôt dans le délai précisé au paragraphe (1) seulement dans la mesure où il est raisonnable de considérer que les motifs d’appel sont liés à l’une des questions suivantes que la Cour n’a pas tranchée définitivement :

the taxpayer may appeal to the Tax Court of Canada within the time limit specified in subsection 169(1), but only to the extent that the reasons for the appeal can reasonably be regarded

[…]

e) dans les autres cas, une question qui a donné lieu à la cotisation ou au montant déterminé.

(e) in any other case, as relating to any matter that gave rise to the assessment or determination

and that was not conclusively determined by the Court …

[11]  Dans la présente affaire, la restriction applicable se trouve à la fin du passage qui suit l’alinéa 169(2)c), dans la version française de la LIR, qui prévoit que l’affaire portée en appel doit être liée à une question « que la Cour n’a pas tranchée définitivement ».

[12]  Pour régler la question que la Cour a « tranchée définitivement », il est nécessaire d’examiner le jugement que la CCI a signé. Ce jugement, qui fait référence au [traduction] « Consentement à jugement déposé le 31 décembre 2012 », fait droit à l’appel et renvoie l’affaire au [traduction] « ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation, conformément aux conditions du consentement à jugement ci-joint ». Les dispositions du consentement à jugement ont donc été intégrées par renvoi au jugement.

[13]  Le consentement à jugement prévoyait ce qui suit :

[traduction]

L’appelant et l’intimé consentent à un jugement faisant droit à l’appel relatif à l’année d’imposition 2005 de l’appelant, sans dépens, et renvoyant l’affaire au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation compte tenu de ce qui suit :

1.  Les gains en capital imposables visés par la cotisation seront réduits à 72 100 $, répartis ainsi :

a)  49 850 $, soit 50 p. 100 d’un gain en capital de 99 700 $, tiré de la disposition d’un immeuble résidentiel situé au 2485, avenue Orchard, Sidney (Colombie-Britannique);

b)  22 250 $, soit 50 p. 100 d’un gain en capital de 44 500 $, tiré de la disposition de 150 actions ordinaires de 468543 B.C. Ltd.

[14]  C’est donc dire que la CCI a tranché de manière définitive la question du montant total du gain en capital imposable et celle du montant du gain en capital tirés de la disposition des biens en question. Comme l’a reconnu le fils de M. Struck au cours de l’appel, en consentant au montant du gain en capital imposable (ce qu’il ne conteste pas), il consentait à la totalité des conséquences qui découleraient de cette entente.

[15]  Un gain en capital imposable est défini à l’article 38 de la LIR, dont les passages pertinents sont les suivants :

38 Pour l’application de la présente loi :

38 For the purposes of this Act,

a) […] le gain en capital imposable d’un contribuable pour une année d’imposition, tiré de la disposition d’un bien, est égal à la moitié du gain en capital qu’il a réalisé pour l’année à la disposition du bien […].

(a) … a taxpayer’s taxable capital gain for a taxation year from the disposition of any property is ½ of the taxpayer’s capital gain for the year from the disposition of the property…

[16]  Le gain en capital imposable tiré de la disposition d’un bien est donc, simplement, la moitié du gain en capital qui est tiré de la disposition de ce bien. Le gain en capital est défini à l’article 39 de la LIR, dont les passages pertinents sont les suivants :

39 (1) Pour l’application de la présente loi :

39 (1) For the purposes of this Act,

a) un gain en capital d’un contribuable, tiré, pour une année d’imposition, de la disposition d’un bien quelconque, est le gain, déterminé conformément à la présente sous-section […] que ce contribuable a tiré, pour l’année, de la disposition d’un bien lui appartenant […].

(a) a taxpayer’s capital gain for a taxation year from the disposition of any property is the taxpayer’s gain for the year determined under this subdivision … from the disposition of any property of the taxpayer…

[17]  Cet article prévoit simplement que le gain en capital tiré de la disposition d’un bien donné est le gain déterminé conformément à la même sous-section de la LIR qui est tiré de la disposition de ce gain.

[18]  Le gain tiré de la disposition d’un bien est déterminé en fonction de l’article 40 (lequel fait partie de la même sous-section), dont les passages pertinents sont les suivants :

40 (1) Sauf indication contraire expresse de la présente partie :

40 (1) Except as otherwise expressly provided in this Part

a) le gain d’un contribuable tiré, pour une année d’imposition, de la disposition d’un bien est l’excédent éventuel :

(a) a taxpayer’s gain for a taxation year from the disposition of any property is the amount, if any, by which

(i) en cas de disposition du bien au cours de l’année, de l’excédent éventuel du produit de disposition sur le total du prix de base rajusté du bien, pour le contribuable, calculé immédiatement avant la disposition, et des dépenses dans la mesure où celles-ci ont été engagées ou effectuées par lui en vue de réaliser la disposition,

(i) if the property was disposed of in the year, the amount, if any, by which the taxpayer’s proceeds of disposition exceed the total of the adjusted cost base to the taxpayer of the property immediately before the disposition and any outlays and expenses to the extent that they were made or incurred by the taxpayer for the purpose of making the disposition, or

[…]

sur :

exceeds

(iii) sous réserve du paragraphe (1.1), le montant dont il peut demander la déduction, dans le cas d’un particulier […] sur le formulaire prescrit présenté avec la déclaration de revenu prévue à la présente partie pour l’année […] jusqu’à concurrence du moins élevé des montants suivants :

(iii) subject to subsection 40(1.1), such amount as the taxpayer may claim

(A) un montant raisonnable à titre de provision à l’égard de toute partie du produit de disposition du bien qui lui est payable après la fin de l’année et qu’il est raisonnable de considérer comme une partie du montant déterminé en vertu du sous-alinéa (i) pour ce bien,

(A) in the case of an individual … in prescribed form filed with the taxpayer’s return of income under this Part for the year, and

(B) le produit de 1/5 de l’excédent déterminé en vertu du sous-alinéa (i) pour ce bien et de l’excédent éventuel de 4 sur le nombre d’années d’imposition antérieures du contribuable qui se terminent après la disposition du bien […].

as a deduction, not exceeding the lesser of

(C) a reasonable amount as a reserve in respect of such of the proceeds of disposition of the property that are payable to the taxpayer after the end of the year as can reasonably be regarded as a portion of the amount determined under subparagraph 40(1)(a)(i) in respect of the property, and

(D) an amount equal to the product obtained when 1/5 of the amount determined under subparagraph 40(1)(a)(i) in respect of the property is multiplied by the amount, if any, by which 4 exceeds the number of preceding taxation years of the taxpayer ending after the disposition of the property…

[19]  Du fait de cet article, le gain qui est tiré de la disposition d’un bien, pour l’application de la LIR, tient compte de toute provision qu’un contribuable donné est en droit de déduire et qu’il décide de déduire. L’effet conjugué des articles 38, 39 et 40 de la LIR est le suivant : en consentant à un montant particulier à titre de gain en capital imposable, M. Struck consentait également au montant du gain en capital (qui équivaut tout simplement au double du montant du gain en capital imposable, et qui a aussi été mentionné dans le consentement à jugement), mais, par-dessus tout, pour les besoins du présent appel, il consentait également au montant du gain, lequel a été déterminé sans une déduction pour provision. Si une provision était déduite, le montant du gain réalisé en 2005 sur la disposition des biens serait réduit, ce qui réduirait également le gain en capital et le gain en capital imposable pour 2005, puisque ces montants sont simplement le montant du gain et la moitié de ce montant, respectivement. Comme la CCI a fixé de manière définitive le montant du gain en capital imposable, M. Struck ne peut interjeter un appel qui aurait pour effet de changer ce montant, et le juge de la CCI n’a pas commis d’erreur en annulant l’appel relativement à cette déduction pour provision.

[20]  Je rejetterais donc l’appel avec dépens.

« Wyman W. Webb »

j.c.a.

« Je suis d’accord.

Marc Noël juge en chef »

« Je suis d’accord.

J. Woods j.c.a. »

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


APPEL D’UN JUGEMENT RENDU LE 22 MARS 2016 PAR LA COUR CANADIENNE DE L’IMPÔT, DOSSIER NO 2014-2421(IT)I

DOSSIER :

A-109-16

 

INTITULÉ :

HORST STRUCK c. Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

VANCOUVER (Colombie‑Britannique)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 22 mars 2017

MOTIFS DU JUGEMENT :

LE JUGE WEBB

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE EN CHEF NOËL

LA JUGE WOODS

DATE DES MOTIFS :

LE 3 AVRIL 2017

COMPARUTIONS :

Horst Struck

Bernie Struck

POUR L’appelant

Whitney Dunn

Lisa Macdonell

POUR L’INTIMÉE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

POUR L’INTIMÉE

 

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