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Date : 20170711


Dossier : A-124-17

Référence : 2017 CAF 150

[TRADUCTION FRANÇAISE]

CORAM :

LE JUGE WEBB

LE JUGE NEAR

LE JUGE RENNIE

 

 

ENTRE :

LINDA CARDIN

demanderesse

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

intimé

Requête jugée sur dossier sans comparution des parties.

Ordonnance rendue à Ottawa (Ontario), le 11 juillet 2017.

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :

 

LE JUGE NEAR

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE WEBB

LE JUGE RENNIE

 


Date : 20170711


Dossier : A-124-17

Référence : 2017 CAF 150

CORAM :

LE JUGE WEBB

LE JUGE NEAR

LE JUGE RENNIE

 

 

ENTRE :

LINDA CARDIN

demanderesse

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

intimé

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

LE JUGE NEAR

I.  Introduction

[1]  La Couronne, intimée en l’espèce, présente une requête en vertu de l’article 369 des Règles des Cours fédérales afin que soit radiée la demande de contrôle judiciaire de la demanderesse, Mme Cardin, à l’égard d’une décision rendue par la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale (la division d’appel) le 7 mars 2017 (la décision).


II.  Contexte

[2]  Mme Cardin a demandé l’autorisation d’interjeter appel d’une décision rendue par la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (la division générale) selon laquelle elle n’était pas admissible au bénéfice des prestations d’invalidité au titre du Régime de pension du Canada (RPC).

[3]  Aux termes du paragraphe 56(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, L.C. 2005, ch. 34 (la Loi), un appel ne peut être interjeté devant la division d’appel que si l’autorisation d’interjeter appel est accordée. Sous le régime du paragraphe 58(1) de la Loi, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;

b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;

c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Au terme du paragraphe 58(2) de la Loi, la division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

[4]  Dans sa demande d’autorisation, Mme Cardin a fait valoir que la division générale avait commis cinq erreurs de droit et avait tiré une conclusion de fait erronée. Elle a également tenté d’avancer de nouveaux éléments de preuve. Le 22 novembre 2016, la division d’appel a accordé l’autorisation d’interjeter appel « selon les cinq motifs présentés par [Mme Cardin] selon lesquels la [division générale] a commis une erreur de droit. » (Non souligné dans l’original.) Dans sa décision d’accorder l’autorisation, la division d’appel a décidé que l’appel n’avait aucune chance raisonnable de succès et a précisé que la division d’appel ne pouvait examiner de nouveaux éléments de preuve, puisqu’ils avaient été préparés après la tenue de l’audience devant la division générale.

[5]  En appel, Mme Cardin a soutenu que, comme elle avait conclu que l’appel avait une chance raisonnable de succès, la division d’appel était tenue d’instruire un appel complet relativement à l’ensemble de la preuve présentée devant la division générale. Le membre de la division d’appel (le même qui avait rendu la décision d’accorder l’autorisation d’interjeter appel) n’était pas de cet avis et a dit que la décision d’accorder l’autorisation avait « explicitement et délibérément limité les motifs d’appel » aux cinq erreurs de droit. La division d’appel a finalement conclu que l’appel de Mme Cardin était accueilli au motif que la division générale avait commis une erreur de droit. Le 7 mars 2017, la division d’appel a décidé ainsi : « il convient [...] de renvoyer l’affaire à la division générale pour qu’une nouvelle audience soit tenue devant un membre différent de la division générale. » (Non souligné dans l’original.)

[6]  Mme Cardin demande le contrôle judiciaire de l’analyse de la portée de l’appel effectuée par la division d’appel, et non pas de la décision finale en appel. Elle demande que soit rendue une ordonnance selon laquelle la division d’appel n’est pas habilitée à limiter la portée de l’appel une fois que celui-ci a été autorisé pour l’un des trois motifs visés au paragraphe 58(1) de la Loi.

III.  Requête

[7]  La Couronne soutient que la demande de contrôle judiciaire de Mme Cardin devrait être rejetée en raison de son caractère théorique.

A.  Critère relatif à une requête en radiation

[8]  Dans l’arrêt Canada (Revenu national) c. JP Morgan Asset Management (Canada) Inc., 2013 CAF 250, [2014] 2 R.C.F 557, Cour a conclu qu’elle n’accepterait de radier un avis de demande de contrôle judiciaire que s’il était « manifestement irrégulier au point de n’avoir aucune chance d’être accueilli ». Elle doit être en présence d’« un vice fondamental et manifeste qui se classe parmi les moyens exceptionnels qui infirmeraient à la base sa capacité à instruire la demande » (paragraphe 47). Il peut être satisfait à ce critère strict lorsque la demande est devenue théorique : Lukács c. Canada (Office des transports), 2016 CAF 227, au paragraphe 6.

B.  Critère du caractère théorique

[9]  Le tribunal peut refuser de juger une affaire qui ne soulève qu’une question hypothétique qui n’aura aucune conséquence concrète sur les droits des parties : Borowski c. Canada (Procureur général), [1989] 1 R.C.S. 342. L’application du critère du caractère théorique comporte une analyse en deux temps. Le tribunal doit tout d’abord décider si le litige concret entre les parties a disparu et si la question est devenue théorique. Si c’est le cas, le tribunal doit alors décider s’il devrait exercer son pouvoir discrétionnaire et entendre l’affaire à caractère théorique.

C.  La demande de Mme Cardin devrait-elle être radiée en raison de son caractère théorique?

[10]  À mon avis, la requête en radiation devrait être accueillie. La question de savoir si l’appel de Mme Cardin a été indûment limité n’aura aucune incidence sur l’admissibilité ultime de celle-ci au bénéfice des prestations au titre du RPC, puisque la demanderesse s’est vu accorder la tenue d’une nouvelle audience devant la division générale. La question de savoir si la division d’appel était habilitée à limiter la portée de l’appel de Mme Cardin est purement théorique. Même si cette question pourrait être de nouveau en litige, j’estime qu’il serait préférable de statuer à son égard dans le cadre d’un véritable contexte contradictoire. Compte tenu du renvoi de l’affaire à la division générale, de l’absence de litige réel entre les parties qui nuirait à l’admissibilité de Mme Cardin au bénéfice des prestations et de la nature théorique de la mesure de réparation demandée, je suis d’avis que l’affaire est théorique et que le fait d’autoriser la demande de contrôle judiciaire de Mme Cardin représenterait une utilisation peu judicieuse des ressources judiciaires.

IV.  Conclusion

[11]  Pour ces motifs, j’accueillerais la requête de l’intimé visant la radiation de la demande de contrôle judiciaire, et la demande de contrôle judiciaire de l’appelante devrait être rejetée. Dans les circonstances, aucuns dépens ne seront adjugés.

« David G. Near »

j.c.a.

« Je suis d’accord.

Wyman W. Webb, j.c.a. »

« Je suis d’accord.

Donald J. Rennie, j.c.a. »

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

A-124-17

 

 

INTITULÉ :

LINDA CARDIN c.

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

 

REQUÊTE JUGÉE SUR DOSSIER SANS COMPARUTION DES PARTIES

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :

LE JUGE NEAR

 

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE WEBB

LE JUGE RENNIE

 

DATE DES MOTIFS :

Le 11 juillet 2017

 

OBSERVATIONS ÉCRITES :

Bozena K. Kordaisiewicz

 

Pour la demanderesse

 

Vanessa Luna

 

Pour l’intimé

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Dietrich Law Office

Kitchener (Ontario)

 

Pour la demanderesse

 

Nathalie G. Drouin

Sous-procureure générale du Canada

Pour l’intimé

 

 

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