Décisions de la Cour d'appel fédérale

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Date : 20171011


Dossier : A-110-15

Référence : 2017 CAF 205

[TRADUCTION FRANÇAISE]

CORAM :

LE JUGE PELLETIER

LE JUGE BOIVIN

LA JUGE GLEASON

 

ENTRE :

JIM BRASSARD

appelant

et

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

Audience tenue à Vancouver (Colombie-Britannique), le 12 septembre 2017.

Jugement prononcé à Ottawa (Ontario), le 11 octobre 2017.

MOTIFS DU JUGEMENT :  

LE JUGE PELLETIER

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE BOIVIN

LA JUGE GLEASON

 


Date : 20171011


Dossier : A-110-15

Référence : 2017 CAF 205

[TRADUCTION FRANÇAISE]

CORAM :

LE JUGE PELLETIER

LE JUGE BOIVIN

LA JUGE GLEASON

 

ENTRE :

JIM BRASSARD

appelant

et

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE PELLETIER

[1]  M. Jim Brassard fait appel de la décision (2015 CCI 29) par laquelle la Cour canadienne de l’impôt a rejeté l’appel qu’il avait interjeté à l’encontre de la cotisation établie par le ministre en vertu de l’article 160 de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. 1985, ch. 1 (5e suppl.) (la Loi), laquelle cotisation rendait M. Brassard responsable, conjointement avec son frère, de la dette fiscale de celui-ci, qui s’élevait à 66 264,37 $. Selon le ministre, le frère de M. Brassard, Victor Brassard, alors qu’il était débiteur fiscal, avait transféré un bien immeuble à M. Brassard pour un montant inférieur à la juste valeur marchande, ce qui a entraîné l’application de l’article 160 de la Loi.

[2]  À l’audience, M. Brassard, qui plaidait sa propre cause, a contesté l’évaluation faite par le ministre de la juste valeur marchande du bien à la date où il lui a été transféré. Il s’y est pris en attaquant l’évaluation préparée par une évaluatrice de l’Agence du revenu du Canada. Cette évaluatrice avait fondé son évaluation sur des documents obtenus de la British Columbia Assessment Authority, sur cinq ventes comparables de propriétés voisines faites à l’époque pertinente, ou vers cette époque, et sur une inspection qu’elle avait effectuée en passant devant la propriété en auto. Selon l’évaluatrice, le bien valait 175 000 $ en octobre 2005, soit la date à laquelle il a été transféré d’un frère à l’autre. Quand l’évaluatrice a fait son inspection en auto, elle a vu deux maisons mobiles sur le terrain et a inclus leur valeur dans son évaluation de la propriété. Une enquête subséquente a révélé que l’une des maisons mobiles n’appartenait pas au propriétaire du terrain, soit Victor Brassard, à l’époque pertinente. Le ministre a donc déduit la valeur de cette maison mobile (54 400 $) de la valeur établie par l’évaluatrice. Au final, le ministre a procédé en tenant pour acquis que la valeur du bien à la date du transfert, en octobre 2005, s’élevait à 120 600 $.

[3]  En calculant l’avantage reçu par M. Brassard au moment du transfert, le ministre a tenu pour acquis que ce dernier avait payé le bien 50 000 $.

[4]  À l’audience, M. Brassard a tenté de démontrer qu’il avait en fait payé plus de 50 000 $ pour le bien. Il a été en mesure de prouver qu’il avait versé 27 000 $ à son frère par voie de traites bancaires. Cependant, il n’a pas été en mesure d’établir qu’il avait obtenu la mainlevée de l’hypothèque grevant la propriété. Il n’a pas non plus été en mesure de démontrer la valeur des améliorations apportées à la propriété pendant qu’elle était inscrite au nom de son frère. Par conséquent, M. Brassard n’a pas pu prouver qu’il avait payé plus de 50 000 $ pour le bien.

[5]  Il en résulte que, aux fins de l’article 160, M. Brassard a acquis de son frère, qui était alors débiteur fiscal, un bien d’une valeur de 120 600 $ pour moins que sa juste valeur marchande. À la date du transfert, soit le 20 octobre 2005, le montant de la dette fiscale de Victor Brassard s’élevait à 49 703,36 $, et à la date de la cotisation fondée sur l’article 160, soit le 17 novembre 2009, la dette s’élevait à 66 264,37 $. Comme M. Brassard a reçu un avantage dont le montant était supérieur au montant de la dette fiscale de son frère, il a fait l’objet d’une cotisation dont le montant correspondait à celui de la dette fiscale de son frère à la date de la cotisation.

[6]  À l’audition de l’appel devant notre Cour, M. Brassard, agissant toujours pour lui-même, voulait contester la détermination par le ministre de la valeur du bien au moment du transfert en produisant des éléments de preuve relatifs à des ventes de propriétés comparables. M. Brassard avait précédemment présenté une requête en vertu de l’article 351 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106, afin d’obtenir l’autorisation de présenter de nouveaux éléments de preuve en appel. Cette requête a été rejetée. M. Brassard a ensuite inclus ces éléments de preuve dans son dossier de requête déposé en réponse à l’avis d’examen de l’état de l’instance. Il a demandé que ces éléments soient introduits en preuve dans le cadre de l’appel. La Cour a refusé d’admettre les éléments de preuve en question, mais a permis à M. Brassard de s’y référer, après lui avoir fait savoir qu’elle ne pouvait pas les prendre en considération.

[7]  La preuve d’autres ventes présentée par M. Brassard a ceci de problématique que la juste valeur marchande d’un bien à un moment donné est une question qui requiert une opinion. Pour ce genre de questions, les tribunaux ne se fondent pas sur leur propre opinion, mais se fient plutôt à la preuve présentée par des personnes qui ont la formation et l’expérience nécessaires pour donner une telle opinion. En l’espèce, le ministre a présenté le témoignage d’une évaluatrice de l’Agence du revenu du Canada, qui a expliqué comment elle était parvenue à sa conclusion. M. Brassard a contre-interrogé ce témoin. Au final, le juge de première instance a accepté l’opinion de l’évaluatrice, modifiée par le ministre pour tenir compte de la propriété de la maison mobile située sur le terrain.

[8]  La preuve de ventes comparables sur laquelle M. Brassard cherchait à attirer l’attention de notre Cour ne nous permettrait pas de substituer à la conclusion du juge de la Cour de l’impôt notre opinion quant à la juste valeur marchande du bien. Nous ne sommes pas mieux placés que le juge de première instance pour substituer notre opinion quant à la juste valeur marchande à celle d’une personne qui possède une formation et de l’expérience dans ce domaine. De plus, la Cour suprême du Canada a dit qu’une fois que le juge de première instance a tiré une conclusion sur une question de fait, comme celle de la juste valeur marchande d’une propriété, la cour d’appel ne peut substituer son opinion à celle du juge de première instance que si ce dernier a commis une erreur manifeste et dominante : voir Housen c. Nikolaisen, 2002 CSC 33 au paragraphe 10, [2002] 2 R.C.S. 235. Une erreur manifeste est une erreur tout à fait évidente alors que l’erreur dominante est celle qui a un effet déterminant sur l’issue de l’affaire.

[9]  La Cour a écouté attentivement M. Brassard pendant deux heures alors qu’il soulignait les diverses préoccupations qu’il avait concernant les motifs de la Cour de l’impôt, l’évaluation du ministre et la conduite des fonctionnaires de l’ARC. En fin de compte, eu égard aux contraintes que nous impose la norme de contrôle énoncée dans l’arrêt Housen c. Nikolaisen, je ne vois aucune erreur dans la décision de la Cour de l’impôt qui justifierait notre intervention.

[10]  Par conséquent, je rejetterais l’appel avec dépens.

« J.D. Denis Pelletier »

j.c.a.

« Je suis d’accord

Richard Boivin, j.c.a. »

« Je suis d’accord

Mary J.L. Gleason, j.c.a. »



COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


 

DOSSIER :

 

A-110-15

 

INTITULÉ :

JIM BRASSARD c. SA MAJESTÉ LA REINE

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Vancouver (COLOMBIE-BRITANNIQUE)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 12 SEPTEMBRE 2017

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

LE JUGE PELLETIER

 

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE BOIVIN

LA JUGE GLEASON

 

DATE DES MOTIFS :

LE 11 OCTOBRE 2017

 

COMPARUTIONS :

Jim Brassard

Pour son propre compte

 

POUR L’APPELANT

Gergely Hegedus

 

POUR L’INTIMÉE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Nathalie G. Drouin

Sous-procureur général du Canada

 

POUR L’INTIMÉE

 

 

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