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Date : 20180328


Dossier : A-394-15

Référence : 2018 CAF 65

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Présent : LE JUGE WEBB

ENTRE :

ALEXANDER VAVILOV

appelant

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

intimé

Requête écrite décidée sans comparution des parties.

Ordonnance rendue à Ottawa (Ontario), le 28 mars 2018.

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :

LE JUGE WEBB

 


Date : 20180328


Dossier : A-394-15

Référence : 2018 CAF 65

Présent : LE JUGE WEBB

ENTRE :

ALEXANDER VAVILOV

appelant

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

intimé

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

LE JUGE WEBB

[1] Par une ordonnance (l’ordonnance de la CAF) en date du 19 janvier 2018 (2018 CAF 19), la requête présentée par le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration (le ministre) pour que soit rendue une ordonnance de suspension du jugement de notre Cour rendu le 21 juin 2017 (2017 CAF 132) en attendant la décision portant sur la demande d’autorisation d’interjeter appel à la Cour suprême du Canada présentée par le ministre, et, si l’autorisation est accordée, en attendant l’issue de l’appel, a été rejetée. Le ministre dépose maintenant une requête dans laquelle il me demande de réexaminer l’ordonnance de la CAF conformément à l’alinéa 397(1)b) des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106, ou d’annuler l’ordonnance aux termes de l’alinéa 399(2)a).

[2] En ce qui concerne ces deux alinéas des Règles, la question que j’ai prétendument « oubliée ou omise involontairement » ou qui a été soulevée par la suite était la décision de la Cour fédérale du 19 janvier 2018 (portant la même date à laquelle l’ordonnance de la CAF et les motifs connexes ont été signés) rejetant la requête du ministre en ajournement de l’audience de la demande de contrôle judiciaire présentée par le frère d’Alexander Vavilov, Timothy Vavilov.

I. L’article 397 des Règles

[3] L’article 397 des Règles prévoit que seuls des motifs limités peuvent justifier le réexamen d’une ordonnance qui a été accueillie :

397(1) Dans les 10 jours après qu’une ordonnance a été rendue ou dans tout autre délai accordé par la Cour, une partie peut signifier et déposer un avis de requête demandant à la Cour qui a rendu l’ordonnance, telle qu’elle était constituée à ce moment, d’en examiner de nouveau les termes, mais seulement pour l’une ou l’autre des raisons suivantes :

397(1) Within 10 days after the making of an order, or within such other time as the Court may allow, a party may serve and file a notice of motion to request that the Court, as constituted at the time the order was made, reconsider its terms on the ground that

a) l’ordonnance ne concorde pas avec les motifs qui, le cas échéant, ont été donnés pour la justifier;

(a) the order does not accord with any reasons given for it; or

b) une question qui aurait dû être traitée a été oubliée ou omise involontairement.

(b) a matter that should have been dealt with has been overlooked or accidentally omitted.

[4] Pour que l’alinéa b) s’applique, une question doit avoir été oubliée ou omise involontairement. Pour avoir été oubliée ou omise involontairement, la question doit en être une que la Cour devait connaître ou aurait dû connaître. En l’espèce toutefois, la question à laquelle le ministre a fait référence était une ordonnance émanant d’une autre cour, soit la Cour fédérale. Cette ordonnance de la Cour fédérale a été rendue le jour même où l’ordonnance et les motifs de la CAF ont été signés. La Cour fédérale et notre Cour sont deux cours distinctes. Il n’y a aucun processus par lequel un juge de notre Cour est immédiatement informé de la signature d’une ordonnance dès qu’un juge de la Cour fédérale signe une telle ordonnance. Quoi qu’il en soit, selon la copie de l’ordonnance de la Cour fédérale présentée par le ministre relativement à la présente requête, il semble que cette ordonnance ait été envoyée à l’avocat du ministre par télécopieur à 16 h 17, le 19 janvier 2018. L’ordonnance et les motifs de la CAF ont été signés avant ce moment.

[5] La requête en réexamen aux termes de l’article 397 est dénuée de fondement.

II. Le paragraphe 399(2)

[6] Le paragraphe 399(2) dispose qu’une ordonnance peut être annulée dans l’un ou l’autre des cas suivants :

(2) La Cour peut, sur requête, annuler ou modifier une ordonnance dans l’un ou l’autre des cas suivants :

(2) On motion, the Court may set aside or vary an order

a) des faits nouveaux sont survenus ou ont été découverts après que l’ordonnance a été rendue;

(a) by reason of a matter that arose or was discovered subsequent to the making of the order; or

b) l’ordonnance a été obtenue par fraude.

(b) where the order was obtained by fraud.

[7] En faisant valoir que le rejet de la requête du ministre en ajournement de la demande de contrôle judiciaire présentée par Timothy Vavilov devrait entraîner l’annulation de l’ordonnance de la CAF, au paragraphe 2 de son mémoire, le ministre soutient qu’en raison du fait que la demande de Timothy Vavilov sera entendue :

[TRADUCTION]

[cela] entraînera des complications procédurales (à savoir s’il y a lieu d’examiner l’argument fondé sur la Charte avancé par Timothy Vavilov);

le gaspillage de ressources dans des procédures potentiellement inutiles (si la Cour suprême rejette finalement la thèse du ministre);

l’incertitude entourant la préservation des droits d’appel (aucune conclusion prévisible selon laquelle la Cour fédérale certifiera une question à laquelle notre Cour a déjà répondu);

le risque de décisions contradictoires (si la demande de contrôle judiciaire présentée par Timothy Vavilov est accueillie et qu’il n’y a aucune question à certifier, mais que le ministre finit par avoir gain de cause dans la présente affaire devant la Cour suprême).

[8] Tous ces arguments constituent des observations qui seraient plus appropriées relativement à la requête en ajournement de la demande de Timothy Vavilov que dans la présente requête en réexamen de l’ordonnance de la CAF. Il semble que le ministre ait soulevé ces observations devant la Cour fédérale relativement à la requête en ajournement. Ces arguments n’ont pas suffi à obtenir un ajournement de la demande de contrôle judiciaire présentée par Timothy Vavilov et ils ont une moindre pertinence dans le contexte de la présente requête en annulation de l’ordonnance de la CAF.

[9] La question se rapportant à la demande de contrôle judiciaire présentée par Timothy Vavilov était abordée aux paragraphes 12 et 13 des motifs datés du 19 janvier 2018. Cette question faisait partie de l’analyse visant à déterminer si des dommages irréparables seraient causés au ministre si l’ordonnance de suspension n’était pas accordée. Comme la conclusion tirée au paragraphe 11 de ces motifs était que [TRADUCTION] « des dommages irréparables pourraient être causés au ministre s’il devait révoquer un certificat de citoyenneté et un passeport si le ministre réussit à faire annuler la décision de notre Cour », l’analyse s’est fondée sur la prépondérance des inconvénients, même si les arguments relatifs à la demande de Timothy Vavilov étaient hypothétiques à ce moment-là.

[10] Pour avoir gain de cause dans la présente requête, le ministre devra établir que le rejet de la demande d’ajournement dans l’affaire Timothy Vavilov donnerait lieu à une analyse de la prépondérance des inconvénients, comme l’a énoncé la Cour suprême du Canada dans l’arrêt RJR-Macdonald Inc. c. Canada (Procureur général), [1994] 1 RCS. 311, et causerait maintenant des dommages plus importants au ministre qu’à Alexander Vavilov.

[11] Les dommages causés à Alexander Vavilov abordés dans l’analyse sur la prépondérance des inconvénients dans les motifs datés du 19 janvier 2018 ne changent rien au refus d’ajournement dans la demande de Timothy Vavilov.

[12] Les autres dommages décrits par le ministre, indiqués au paragraphe 7 ci-dessus, concernent un autre litige relatif à Timothy Vavilov. Il s’agit simplement d’une conséquence du traitement des deux affaires instruites séparément. On ne peut pas ouvrir la porte à l’avalanche de personnes à qui la citoyenneté a été accordée ou pourrait être accordée, et qui n’auraient pas dû l’obtenir si le ministre obtient l’autorisation d’interjeter appel et a finalement gain de cause devant la Cour suprême. Le nombre de personnes pouvant se trouver dans la même situation qu’Alexander Vavilov augmenterait seulement de 1 à 2.

[13] Je suis d’avis que le refus d’ajournement de la demande de Timothy Vavilov ne justifie pas le réexamen de l’ordonnance de la CAF rejetant la requête en suspension du ministre dans l’affaire Alexander Vavilov.

[14] Par conséquent, la requête du ministre est rejetée, avec dépens.

« Wyman W. Webb »

j.c.a.

Traduction certifiée conforme.

Mario Lagacé, jurilinguiste


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

A-394-15

INTITULÉ :

ALEXANDER VAVILOV c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

REQUÊTE ÉCRITE DÉCIDÉE SANS COMPARUTION DES PARTIES

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :

LE JUGE WEBB

DATE DES MOTIFS :

Le 28 mars 2018

OBSERVATIONS ÉCRITES :

Hadayt Nazami

Pour l’appelant

ALEXANDER VAVILOV

John Provart

Tessa Cheer

Kevin Doyle

Pour l’intimé

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Jackman, Nazami & Associates

Toronto (Ontario)

Pour l’appelant

ALEXANDER VAVILOV

Nathalie G. Drouin

Sous-procureure générale du Canada

Pour l’intimé

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

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