Date : 20030410
Dossier : A-223-02
Winnipeg (Manitoba), le 10 avril 2003
CORAM : LE JUGE DÉCARY
LE JUGE LINDEN
LE JUGE SHARLOW
ENTRE :
NORAC SYSTEMS INTERNATIONAL INC.
appelante
et
PRAIRIE SYSTEMS AND EQUIPMENT LTD.
intimée
JUGEMENT
L'appel est accueilli en partie, la conclusion d'invalidité fondée sur l'inutilité sera annulée et la conclusion d'absence de contrefaçon sera confirmée.
Les dépens de l'appel sont accordés à l'intimée, soit un montant de 5 000 $ ainsi que les débours, y compris les frais raisonnables de déplacement que l'avocat de l'intimée a engagés pour assister à l'audition de l'appel.
« Robert Décary »
Juge
Traduction certifiée conforme
Martine Guay, LL. L.
Date : 20030410
Dossier : A-223-02
Référence : 2003 CAF 187
CORAM : LE JUGE DÉCARY
LE JUGE SHARLOW
ENTRE :
NORAC SYSTEMS INTERNATIONAL INC.
appelante
et
PRAIRIE SYSTEMS AND EQUIP. LTD.
intimée
Audience tenue à Winnipeg (Manitoba), le 10 avril 2003.
Jugement rendu à l'audience à Winnipeg (Manitoba), le 10 avril 2003.
MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR PAR : LE JUGE DÉCARY
Date : 20030410
Dossier : A-223-02
Référence : 2003 CAF 187
CORAM : LE JUGE DÉCARY
LE JUGE LINDEN
LE JUGE SHARLOW
ENTRE :
NORAC SYSTEMS INTERNATIONAL INC.
appelante
et
PRAIRIE SYSTEMS AND EQUIP. LTD.
intimée
MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR
(Prononcés à l'audience à Winnipeg (Manitoba), le 10 avril 2003)
[1] Le juge de première instance a conclu à l'invalidité du brevet en litige (brevet n ° 2,096,761, délivré le 4 juillet 1995) pour cause d'inutilité, mais a précisé que « s'il est valide, ...il n'a pas été contrefait parce que le dispositif de la défenderesse ne comporte pas de cellule de pesée de traction et que la cellule de pesée n'est pas fixée par liaison pivotante à la tringlerie » ((2002) 19 C.P.R. (4th) 360; (2002) 218 F.T.R. 186, au paragraphe 75).
[2] En ce qui concerne la conclusion d'invalidité pour inutilité, l'appelante soutient d'abord que le juge de première instance n'aurait pas dû examiner l'argument concernant la question de l'inutilité, parce que cet argument n'a pas été soulevé en bonne et due forme dans les actes de procédure. Selon l'appelante, la question s'est posée uniquement au cours du contre-interrogatoire du professeur Schoenau, son témoin expert, en réponse à une [traduction] « question surprise sur un nouvel aspect que l'expert n'avait jamais examiné auparavant » . Étant donné que l'inutilité était la seule raison que le juge de première instance a acceptée comme fondement de l'invalidité du brevet, il s'agit là d'une conclusion essentielle au sujet de laquelle l'appelante n'a pu présenter aucun élément de preuve.
[3] L'intimée fait valoir que la question de l'utilité est soulevée implicitement dans l'allégation générale d'invalidité, qu'elle a formulée de façon explicite dans les actes de procédure. Elle ajoute que l'appelante a constaté dès le début de l'instruction que son dispositif n'était pas utile, mais qu'elle n'a invoqué aucun argument à ce sujet.
[4] Il n'est pas contesté que la défense originale et la défense modifiée de l'intimée ne comportent aucune mention explicite de l'argument de l'inutilité comme motif appuyant l'allégation d'invalidité. Il n'est pas contesté non plus que l'intimée n'a pas cherché, au cours de l'instruction, à obtenir l'autorisation de modifier à nouveau sa défense.
[5] Sur ce point, nous sommes d'accord avec l'appelante.
[6] Il est bien certain que les parties demanderesses ont droit à un avis équitable des attaques à l'encontre de la validité d'un brevet. Dans TRW Inc. c. Walbar of Can. Inc. (1991), 39 C.P.R. (3d) 176; 123 N.R. 161 (Walbar), le juge Stone a infirmé la conclusion de validité à laquelle le juge de première instance en était arrivé pour plusieurs motifs, dont l'un a été rejeté parce qu'il n'avait pas été expressément plaidé. Voici comment le juge Stone s'est exprimé aux pages 196-197 :
Je suis d'accord avec TRW sur le fait que Walbar ne peut invoquer cet argument parce que la prétendue "fausse piste" n'a pas été plaidée expressément. Puisqu'elle représentait une attaque majeure contre la validité du brevet, elle aurait dû être plaidée expressément. À mon avis, les principes énoncés par lord Normand en ce qui a trait à la valeur des plaidoiries dans Esso Petroleum Co. Ltd. v. Southport Corporation, [1956] A.C. 218 (H.L.), à la page 239, s'appliquent. Il a déclaré ce qui suit :
[TRADUCTION] Je désire reprendre les observations de mon noble et savant collègue, lord Radcliffe, sur la valeur de la plaidoirie. La condamnation d'une partie pour un motif à l'égard duquel aucun avis équitable n'a été donné peut constituer un déni de justice aussi grave que sa condamnation pour un motif à l'égard duquel on a incorrectement exclu sa preuve.
Voir aussi Glisic c. La Reine, [1988] 1 C.F. 731, 80 N.R. 39 (C.A.).
[7] Dans la même veine, dans Pengo Hydra-Pull of Can. Ltd. c. Leithiser, [1972] C.F. 1201, 7 C.P.R. (2d) 17 (Pengo), la Cour d'appel fédérale s'est penchée sur un appel d'une ordonnance dans laquelle le juge de première instance avait exigé des précisions à l'égard d'une allégation d'ambiguïté. Le juge en chef Jackett a statué que, lorsqu'une allégation d'invalidité n'est pas plaidée, la Cour doit donner à la partie défenderesse la possibilité de préparer une défense à ce sujet si cet argument est invoqué ultérieurement. Il a formulé les commentaires suivants aux paragraphes 2 à 4 :
Certes, il a toujours été loisible à la Cour de déclarer invalide une revendication d'un brevet pour cause d'ambiguïté, même si ce moyen n'était pas plaidé, et l'on ne saurait remettre cette pratique en question; mais il ne s'ensuit pas que l'on retiendra l'argument d'ambiguïté, alors qu'il n'a pas été invoqué, sans donner d'abord à l'adversaire une occasion suffisante de préparer sa réfutation de cet argument, aux conditions que la Cour jugera convenables quant aux dépens.
La Cour a toujours estimé que l'ambiguïté devrait normalement être soulevée par un plaidoyer, de façon à éviter de prendre l'adversaire par surprise, et qu'il était même nécessaire qu'elle le soit lorsque l'examen de la question exige l'apport de certaines preuves.
Le plaidoyer d'ambiguïté, comme tout autre moyen, doit être exposé avec une précision suffisante, ce qui, à notre avis, suppose que l'on indique quelles sont les ambiguïtés que l'on se propose d'invoquer.
[8] Le juge de première instance a donc décidé que le brevet était invalide en invoquant un motif, soit l'inutilité, qui n'a pas été allégué en bonne et due forme dans les actes de procédure. Cette conclusion ne peut être confirmée. Étant donné que le juge de première instance n'a pas retenu les autres motifs d'invalidité et que l'intimée n'a pas contesté les conclusions auxquelles il en est arrivé à cet égard, l'appel concernant l'invalidité sera accueilli et la conclusion d'invalidité pour inutilité sera annulée.
[9] En ce qui concerne la conclusion d'absence de contrefaçon, nous sommes d'avis que le juge de première instance n'a commis aucune erreur manifeste ou dominante lorsqu'il a statué que le dispositif de l'intimée ne constituait pas une contrefaçon de la revendication 6 du brevet. (L'intimée n'a pas contesté la conclusion du juge selon laquelle il n'y a pas eu contrefaçon de la revendication 7.)
[10] Il n'est pas contesté que les forces de traction sont des forces « d'allongement » ou des forces allant dans le sens contraire l'une de l'autre. Les deux dispositifs produisent un appel de sortie mettant en corrélation la force exercée vers le bas par la charge et la pression exercée vers le haut par le mécanisme de levage. Par souci de commodité, nous appelons ces forces les « forces de traction de la charge » . Il est donc évident que les deux cellules de pesée permettent de mesurer les forces de traction de la charge. L'appelante voudrait que nous terminions l'analyse ici et que nous en arrivions à la conclusion qu'une cellule de pesée de traction consiste en tout dispositif servant à mesurer les forces de traction de la charge. Le juge de première instance a rejeté cette description et est allé plus loin afin d'examiner comment chaque cellule de pesée permet de mesurer les forces de traction de la charge. Au cours de cette analyse, il a constaté une différence majeure entre les deux cellules de pesée. Dans celle de l'appelante, les forces de traction appliquées verticalement d'un bout à l'autre créent une tension à l'intérieur de la cellule afin de produire un signal de sortie qui représente une mesure directe des forces de traction de la charge. Par ailleurs, dans le dispositif de l'intimée, les forces de traction de la charge appliquées créent des forces de cisaillement (et non des forces de tension) qui sont ensuite mises en corrélation avec les forces de traction de la charge. Par conséquent, la mesure obtenue à l'aide du dispositif de l'intimée est une mesure indirecte; les forces de cisaillement produisent un signal de sortie qui varie de façon prévisible en fonction des forces de traction de la charge. Le juge de première instance a conclu qu'une différence réelle existait entre les deux dispositifs, d'après les éléments de preuve portés à son attention.
[11] Le juge de première instance a également conclu que le mémoire descriptif du brevet relatif à une « cellule de pesée de traction » ne faisait pas état d'une « cellule de pesée à fléau de cisaillement » . En utilisant l'expression « cellule de pesée de traction » plutôt que simplement « cellule de pesée » , l'auteur du brevet a désigné une sous-catégorie spécifique de cellules de pesée qui produisent un signal de sortie en fonction des forces de traction internes. Même s'il s'agit peut-être d'une interprétation restrictive du brevet, il était loisible au juge de première instance d'en arriver à cette conclusion à la lumière des faits du présent litige et il n'y a pas lieu de modifier cette conclusion.
[12] L'appel sera accueilli en partie, la conclusion d'invalidité pour inutilité sera infirmée et la conclusion d'absence de contrefaçon sera confirmée. Aucun changement ne sera apporté aux dépens adjugés en première instance.
[13] Bien que chacune des parties ait eu partiellement gain de cause, la principale question en litige, soit la question de la contrefaçon, a été tranchée en faveur de l'intimée. Dans ces circonstances, nous accorderons à l'intimée un montant de 5 000 $ au titre des dépens de l'appel, ainsi que ses débours, y compris les frais de déplacement raisonnables que son avocat a engagés pour assister à l'audience en l'espèce.
« Robert Décary »
Juge
Traduction certifiée conforme
Martine Guay, LL. L.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION D'APPEL
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : A-223-02
INTITULÉ : Norac Systems International Inc.c.
Prairie Systems and Equip. Ltd.
LIEU DE L'AUDIENCE : Winnipeg (Manitoba)
DATE DE L'AUDIENCE : le 10 avril 2003
MOTIFS DU JUGEMENT
DE LA COUR : les juges Décary, Linden et Sharlow
PRONONCÉS À L'AUDIENCE PAR : le juge Décary
COMPARUTIONS :
Lynn Cassan POUR L'APPELANTE
Grant Carson POUR L'INTIMÉE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Cassan Maclean
Ottawa (Ontario) POUR L'APPELANTE
Carson & Co.
Melfort (Saskatchewan) POUR L'INTIMÉE