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Date : 19990310


Dossier : A-675-97

CORAM :      LE JUGE DÉCARY

         LE JUGE ROBERTSON

         LE JUGE ROTHSTEIN


(Dans l'affaire intéressant la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7, modifiée,

et la Loi sur les douanes, L.R.C. (1985), ch. 1, (2e suppl.))

ENTRE :

     SCHRADER AUTOMOTIVE INC.,

     appelante,

     - et -

     LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

     (DOUANES ET ACCISE),

     intimé.

     Audience tenue à Ottawa (Ontario),le mercredi 10 mars 1999.

     Jugement prononcé à l'audience le 10 mars 1999.

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

PRONONCÉS PAR :      LE JUGE DÉCARY


Date : 19990310


Dossier : A-675-97

CORAM :      LE JUGE DÉCARY

         LE JUGE ROBERTSON

         LE JUGE ROTHSTEIN


(Dans l'affaire intéressant la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7, modifiée,

et la Loi sur les douanes, L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.))

ENTRE :

     SCHRADER AUTOMOTIVE INC.,

     appelante,

     - et -

     LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL

     (DOUANES ET ACCISE),

     intimé.

     MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

     (Prononcés à l'audience à Ottawa (Ontario),

     le mercredi 10 mars 1999.)

LE JUGE DÉCARY

[1]      La question en litige dans le présent appel d'une décision de la Section de première instance 1 concerne le classement des valves à pneus et des mandrins à air sous la position 84 de l'annexe I du Tarif des douanes2 (la Loi).

[2]      Le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) est arrivé à la conclusion que les biens en question devaient être classés sous le numéro tarifaire 8481.30.90 à titre d'" autres clapets et soupapes de retenue ". Un juge de première instance a accordé à l'intimé l'autorisation d'interjeter appel sur un point de droit en vertu de la version alors en vigueur du paragraphe 68(1) de la Loi sur les douanes3. Le juge de première instance a accueilli l'appel. Il a statué que les valves à pneus et les mandrins à air devaient être classés sous le numéro tarifaire 8481.80.91 (" autres articles de robinetterie et organes similaires, autres, actionnés à la main "), et les mandrins à air, sous le numéro tarifaire 8481.80.99 (" autres articles de robinetterie et organes similaires, autres ").

[3]      Au cours des dernières années, la Cour n'a pas examiné clairement la question de la norme de contrôle applicable aux décisions rendues par le Tribunal canadien du commerce extérieur en vertu du Tarif des douanes4, malgré les nombreuses décisions que rend la Cour suprême du Canada concernant la norme de contrôle appropriée pour les décisions des tribunaux experts. Cette question a été clairement soulevée par les avocats et doit maintenant être tranchée.

[4] Nous sommes d'avis que la norme de contrôle applicable à l'appel sur un point de droit d'une décision du Tribunal canadien du commerce extérieur, dans lequel la question en litige consiste à déterminer l'interprétation appropriée d'un article décrit dans l'annexe I du Tarif des douanes, est la norme de la " décision raisonnable simpliciter " par opposition à celle du " caractère manifestement déraisonnable " ou à celle de la " décision correcte "5. Pour emprunter les mots du juge Iacobucci dans l'affaire Southam Inc., " la cour qui contrôle une conclusion en regard de la norme de la décision raisonnable doit se demander s'il existe quelque motif étayant cette conclusion " et " la norme de la décision raisonnable ne fait que dire aux cours chargées de contrôler les décisions des tribunaux administratifs d'accorder un poids considérable aux vues exprimées par ces tribunaux sur les questions à l'égard desquelles ceux-ci possèdent une grande expertise "6.

[5]      Il est clair que le Tribunal canadien du commerce extérieur est un tribunal spécialisé. Cela est d'autant plus vrai dans le cas d'une décision touchant le Tarif des douanes. Ce tarif est un texte législatif. Son interprétation constitue une question de droit. De là le droit d'interjeter appel à la Cour sur un point de droit d'une décision touchant le tarif. Or, si le Tarif des douanes est une loi, il s'agit d'une loi très technique. Elle porte sur un domaine tellement spécialisé et elle est rédigée dans des termes qui ont tellement peu à voir avec le libellé des lois traditionnelles, qu'à toutes fins pratiques, la demande faite à la Cour consiste à donner un sens juridique à des mots techniques qui débordent complètement son mandat habituel. De plus, il existe des règles d'interprétation canadiennes et internationales uniques, applicables au Tarif des douanes, qui sont fort différentes des règles d'interprétation traditionnelles. En conséquence, il faut faire preuve de beaucoup de retenue à l'égard des décisions du Tribunal. Les plaideurs qui interjettent appel devant la Cour d'une décision touchant le tarif doivent être conscients qu'ils devront surmonter des obstacles imposants.

[6]      En l'espèce, le Tribunal a tiré des conclusions qui étaient étayées par la preuve, il a donné une interprétation raisonnable du Tarif et il l'a appliquée aux biens en cause comme il était autorisé à le faire. La Cour ne peut substituer sa propre interprétation à celle du Tribunal, sauf si l'interprétation du Tribunal est jugée déraisonnable. En l'espèce, aucun motif ne permettait au juge de première instance de conclure que l'interprétation du Tribunal était déraisonnable.

[7]      L'appel sera accueilli. La décision de la Section de première instance sera annulée et la décision du Tribunal canadien du commerce extérieur sera rétablie. L'appelante aura droit à ses dépens devant les deux sections de la Cour.

     Robert Décary

                                             juge

Traduction certifiée conforme

Laurier Parenteau, LL.L.

     COUR D'APPEL FÉDÉRALE

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

NUMÉRO DU GREFFE :              A-675-97

APPEL D'UN JUGEMENT RENDU PAR LA SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE EN LE 26 SEPTEMBRE 1997, DANS LE DOSSIER T-799-95.

INTITULÉ DE LA CAUSE :          Schrader Automotive Inc. c.
                         Sous-ministre du Revenu national
LIEU DE L'AUDIENCE :              Ottawa (Ontario)
DATE DE L'AUDIENCE :          Le 10 mars 1999
MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR FORMÉE PAR :      Les juges Décary, Robertson
                                     et Rothstein, J.C.A.
PRONONCÉS À L'AUDIENCE PAR :      Le juge Décary, J.C.A.
DATE DES MOTIFS :              Le 10 mars 1999

ONT COMPARU :

Me Brian J. Barr                  pour l'appelante
Me Jan McCowan                  pour l'intimé

Me Elizabeth Richards

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

Maclaren Corlett                  pour l'appelante

Ottawa (Ontario)

Me Morris Rosenberg              pour l'intimé

Sous-procureur général

du Canada

Ottawa (Ontario)

__________________

1 Publiée sous l'intitulé Ministre du Revenu national (Douanes et accise) c. Schrader Automotive Inc. (1997), 136 F.T.R. 193 (C.F. 1re inst.).

2 L.C. (1987),ch.49, modifiée.

3      Depuis le 13 juin 1995, il existe un appel de droit à la Cour d'appel fédérale sur tout point de droit. (L.C. 1995, ch.41, art. 20).

4      Voir par exemple, Nalley's Canada Limited c. Sous-ministre du Revenu national (2 novembre 1998), A-47-97 (C.A.F.), Ministre du Revenu national (Douanes et accise) c. Sunbeam Corp. (Canada) Ltd. (1998), 225 N.R. 228 (C.A.F.) et Ministre du Revenu national (Douanes et accise) c. Pigmalion Services (1997), 221 N.R. 91 (C.A.F.).

5      Voir Canada (Directeur des enquêtes et recherches) c. Southam Inc., [1997] 1 R.C.S. 748.

6      Id. pages 776 et 779.

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