Date : 20020130
Dossier : A-806-00
Ottawa (Ontario), le 30 janvier 2002
CORAM : LE JUGE STONE
LE JUGE DÉCARY
LE JUGE EVANS
ENTRE :
LE COMMISSAIRE DE L'AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU DU CANADA,
CI-DEVANT
SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL
POUR LES DOUANES ET L'ACCISE
appelant
et
GL & V / BLACK CLAWSON-KENNEDY
PULP AND PAPER MACHINE GROUP INC.
intimée
JUGEMENT
L'appel est rejeté, avec dépens.
« A.J. Stone »
Juge
Traduction certifiée conforme
Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad. a.
Date : 20020130
Dossier : A-806-00
Référence neutre : 2002 CAF 43
CORAM : LE JUGE STONE
LE JUGE DÉCARY
LE JUGE EVANS
ENTRE :
LE COMMISSAIRE DE L'AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU DU CANADA,
CI-DEVANT
SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL
POUR LES DOUANES ET L'ACCISE
appelant
et
GL & V / BLACK CLAWSON-KENNEDY
PULP AND PAPER MACHINE GROUP INC.
intimée
Audience tenue à Ottawa (Ontario), le 30 janvier 2002.
Jugement rendu à l'audience à Ottawa (Ontario), le 30 janvier 2002.
MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR : LE JUGE EVANS
Date : 20020130
Dossier : A-806-00
Référence neutre : 2002 CAF 43
CORAM : LE JUGE STONE
LE JUGE DÉCARY
LE JUGE EVANS
ENTRE :
LE COMMISSAIRE DE L'AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU DU CANADA,
CI-DEVANT
SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL
POUR LES DOUANES ET L'ACCISE
appelant
et
GL & V / BLACK CLAWSON-KENNEDY
PULP AND PAPER MACHINE GROUP INC.
intimée
MOTIFS DU JUGEMENT
(prononcés à l'audience à Ottawa (Ontario)
le 30 janvier 2002.)
[1] Le Commissaire de l'Agence des douanes et du revenu du Canada fait appel, en vertu de l'article 68 de la Loi sur les douanes, L.R.C. (1985), (2e suppl.), ch. 1, d'une décision du Tribunal canadien du commerce extérieur en date du 27 septembre 2000. Par cette décision, le Tribunal avait accueilli un appel interjeté par GL & V / Black Clawson-Kennedy Pulp and Paper Machine Group Inc. et jugé que certaines marchandises importées par l'entreprise devraient être classées dans le numéro tarifaire 8439.99.90, en tant que « autres parties de machines ou appareils pour la fabrication de la pâte de matières fibreuses cellulosiques » , plutôt que dans le numéro tarifaire 7610.90.00 en tant que « autres constructions en aluminium » .
[2] Selon le Commissaire, la décision devrait être infirmée parce que le Tribunal a commis une erreur de droit dans sa manière d'interpréter les mots des numéros tarifaires se rapportant à cette affaire. Les parties s'entendent pour dire que, pour avoir gain de cause, le Commissaire doit établir que la décision du Tribunal était déraisonnable : Canada (Sous-ministre du Revenu national, Douanes et accise - M.R.N.) c. Schrader Automotive Inc. (1999), 240 N.R. 381 (C.A.F.). Dans l'application de cette norme, une cour de justice doit se demander si la décision visée par le contrôle est « ... étayée par un motif capable de résister à un examen assez poussé » : Canada (Directeur des enquêtes et recherches) v. Southam Inc., [1997] 1 R.C.S. 748, à la page 751.
[3] Les marchandises en question dans cette affaire sont appelées systèmes de passerelle en aluminium et consistent en escaliers, échelles et passerelles avec rampe. Elles étaient expressément conçues pour être fixées à une machine à papier, avec les supports et écrous qui les accompagnaient. Afin de réduire leur volume, elles avaient été expédiées d'Italie désassemblées. À leur arrivée à l'usine de l'intimée au Canada, l'intimée les a assemblées puis testées avant de les expédier, désassemblées, au client pour lequel elles avaient été commandées. Finalement les marchandises furent fixées à demeure sur la machine à papier du client. Les activités de l'intimée consistent à concevoir et à fabriquer des pièces de machines à papier.
[4] La fonction des marchandises en question est de donner aux opérateurs d'une machine l'accès aux pièces de la machine pour qu'ils puissent ajuster au besoin la machine, et la réparer, pendant qu'elle est en fonctionnement. Chaque système de passerelle en aluminium est conçu pour la machine particulière à laquelle il doit être fixé et n'a aucune autre application; il est « intégré à la machine et conçu en tant qu'unité de la machine » . Des témoignages non contredits ont été produits selon lesquels les passerelles sont essentielles pour les opérations d'ajustement et de réparation des machines à papier, et que la production serait sans elles impossible.
[5] L'avocat du Commissaire affirme que le raisonnement du Tribunal était vicié juridiquement, au point de rendre déraisonnable sa décision.
[6] D'abord, le Tribunal ne s'est pas conformé aux Règles générales pour l'interprétation du Système harmonisé, lesquelles régissent l'interprétation du tarif douanier : le Tribunal ne pouvait considérer si les marchandises étaient des pièces d'une machine à papier qu'après avoir conclu qu'elles pouvaient être classées comme « autres constructions en aluminium » . L'argument de l'avocat du Commissaire était que le Tribunal doit dire qu'un numéro tarifaire désignant des marchandises entières ne s'applique pas aux marchandises en question avant de se demander si elles peuvent être classées dans un autre numéro tarifaire en tant que pièces de quelque chose. Il a aussi affirmé que la règle 1 des Règles générales oblige le Tribunal à se prononcer sur l'application d'une position tarifaire aux marchandises, avant de considérer une sous-position.
[7] Nous ne pouvons accepter cet argument. Après une lecture attentive des motifs du Tribunal, nous ne sommes pas convaincus que le Tribunal n'a pas examiné et décidé les points dans l'ordre selon lequel l'avocat affirme qu'il aurait dû les examiner et les décider. De l'aveu général, on ne saura pas toujours avec certitude quand le Tribunal ne fait que résumer les positions des parties et tirer des conclusions de fait, et quand il effectue sa propre analyse juridique. Néanmoins, considérés globalement, les motifs du Tribunal nous paraissent clairement indiquer qu'il a décidé que les marchandises n'étaient pas une structure, pour affirmer ensuite qu'elles étaient à juste titre classées comme pièces d'une machine à papier.
[8] Vu notre conclusion, il ne nous est pas nécessaire de nous étendre sur les conclusions de l'avocat relatives à la manière dont les Règles générales s'appliquent à la présente affaire.
[9] Deuxièmement, l'avocat du Commissaire a fait valoir que la conclusion du Tribunal selon laquelle les marchandises ne devraient pas être classées comme « autres constructions en aluminium » était déraisonnable parce que le fondement de sa conclusion était que ni les notes explicatives se rapportant à la position tarifaire 76.10 ( « constructions en aluminium » ), ni les exemples qui les accompagnent ne renferment « l'idée de matériel ou d'outillage » . Le Commissaire avance que la conclusion de fait du Tribunal selon laquelle les systèmes de passerelle faisaient partie intégrante de la machine à papier à laquelle ils étaient fixés a conduit le Tribunal à conclure erronément que les passerelles elles-mêmes constituaient des machines.
[10] À notre avis cependant, il ne s'agit pas là d'une interprétation exacte du raisonnement du Tribunal. Il nous semble que le Tribunal faisait simplement observer que les marchandises en question se distinguaient des exemples donnés de constructions en aluminium, parce qu'elles étaient conçues pour être utilisées sur des machines et qu'elles étaient un élément essentiel de ces machines, non qu'elles étaient elles-mêmes des machines. Nous ne voyons rien de déraisonnable dans cette conclusion. Nous ne sommes pas persuadés non plus que les définitions ordinaires de « passerelle » et de « walkway » auxquelles l'avocat du Commissaire nous a renvoyés sont décisives pour l'interprétation des mots du numéro tarifaire en question.
[11] L'avocat a aussi fait valoir que les marchandises doivent être classées dans l'état où elles sont lorsqu'elles sont importées et que le Tribunal n'avait donc pas le loisir de prendre en compte l'utilisation ultérieure du système de passerelle. À notre avis cependant, puisque le système de passerelle en aluminium était expressément conçu pour être fixé à demeure sur une machine à papier, afin que la machine puisse fonctionner adéquatement, on ne peut affirmer que le Tribunal a transgressé le principe selon lequel on doit classer les marchandises telles qu'elles sont à leur importation.
[12] Troisièmement, l'avocat a affirmé que le Tribunal a commis une erreur de droit parce qu'il aurait conclu à tort que le système de passerelle était une pièce d'une machine à papier. Il a fait observer que le Tribunal avait jugé qu'un système de passerelle constituait une « pièce » d'une machine à papier parce qu'il était « essentiel au fonctionnement de la machine » . Il a soutenu que cela ne saurait être un critère de définition d'une pièce parce que ce critère peut s'appliquer à des choses qui ne sont manifestement pas des pièces. Selon lui, le Tribunal aurait dû appliquer la définition de « pièce » donnée par les dictionnaires et se demander si les machines seraient incomplètes sans la passerelle. Par exemple, un ordinateur a besoin de courant électrique pour fonctionner, mais il n'a pas besoin de courant électrique pour être complet.
[13] Dans un cas comme celui-ci, qui intéresse des marchandises physiquement et en permanence fixées à une machine (même si par ailleurs elles pouvaient être facilement extraites en cas de bris), il n'était pas déraisonnable pour le Tribunal d'examiner si la passerelle était une pièce de la machine, en se demandant si cette pièce était essentielle à son fonctionnement. L'extraction des marchandises rendait la machine fonctionnellement incomplète.
[14] Il n'était pas non plus déraisonnable pour le Tribunal de conclure que la passerelle était essentielle au fonctionnement de la machine, quand bien même celle-ci fonctionnerait mécaniquement sans elle. Selon la preuve, lorsque la machine était en marche, des ajustements et réparations devenaient nécessaires pour qu'elle continue de fonctionner d'une manière satisfaisante. Puisque les passerelles sont essentielles pour permettre aux opérateurs d'exécuter ces tâches, il n'était pas déraisonnable pour le Tribunal de conclure qu'elles sont essentielles au fonctionnement de la machine.
[15] L'avocat du Commissaire avance aussi que le Tribunal a commis une erreur en concluant que le système de passerelle est une pièce d'une machine à papier parce qu'il est « intégré à la machine et conçu en tant qu'unité de la machine » . Cet argument s'appuie sur le fait que le système de passerelle n'est que boulonné sur la machine et peut, au besoin, en être extrait, et qu'il n'est pas fondu sur la machine au point de ne pouvoir en être extrait.
[16] À notre avis, cet argument ne démontre pas le caractère déraisonnable de la décision du Tribunal, eu égard aux autres éléments de preuve dont il disposait : en particulier, le fait que chaque système est conçu pour être utilisé avec une machine en particulier et n'a pas d'autre objet, qu'il n'est extrait que pour être réparé, enfin qu'il est nécessaire au bon fonctionnement de la machine. Nous croyons que la décision du Tribunal n'est pas incompatible avec le critère de la « destination par conception » , qui a été employé dans d'autre cas.
[17] Des dispositifs fixés à d'autres genres de marchandises ont été qualifiés d' « accessoires » plutôt que de « pièces » , mais cela ne signifie pas qu'un système de passerelle ne peut pas raisonnablement être considéré comme une pièce d'une machine à papier. Il appartient au Tribunal de décider, dans chaque cas d'espèce, si des marchandises forment une pièce d'un tout. Pour le savoir, il puisera à ses connaissances en la matière et appliquera aux faits particuliers dont il est saisi les divers critères permettant de dire si une chose est ou non une pièce.
[18] Pour ces motifs, et en dépit des arguments très habiles exposés au nom du Commissaire par M. Sébastien, l'appel sera rejeté, avec dépens.
« John M. Evans »
Juge
Traduction certifiée conforme
Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad. a.
COUR D'APPEL FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : A-806-00
INTITULÉ :
LE COMMISSAIRE DE L'AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU DU CANADA,
CI-DEVANT
SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL
POUR LES DOUANES ET L'ACCISE
et
GL & V / BLACK CLAWSON-KENNEDY
PULP AND PAPER MACHINE GROUP INC.
LIEU DE L'AUDIENCE : OTTAWA (ONTARIO)
DATE DE L'AUDIENCE : LE 30 JANVIER 2002
MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR : LE JUGE STONE
LE JUGE DÉCARY
LE JUGE EVANS
PRONONCÉS À L'AUDIENCE : LE 30 JANVIER 2002
ONT COMPARU:
Louis Sébastien
Étienne Trépanier POUR L'APPELANT
Michael Kaylor POUR L'INTIMÉE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Morris Rosenberg
Sous-procureur général du Canada
Ottawa (Ontario) POUR L'APPELANT
Lapointe Rosenstein
Montréal (Québec) POUR L'INTIMÉE