Décisions de la Cour d'appel fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision





Date : 20001013


Dossier : A-166-99



CORAM :      LE JUGE DESJARDINS, J.C.A.

         LE JUGE ROTHSTEIN, J.C.A.

         LE JUGE NOËL, J.C.A.

    

ENTRE :

    

FRANK IAN LAING


appelant



- et -



BOREAL PACIFIC, UNE DIVISION DE

BOREAL PROPERTY AND CASUALTY INSURANCE COMPANY

    

     intimée




Audience tenue à Vancouver (Colombie-Britannique), le jeudi 5 octobre 2000.

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le vendredi 13 octobre 2000.



MOTIFS DU JUGEMENT :      LE JUGE DESJARDINS, J.C.A.

Y ONT SOUSCRIT :      LE JUGE ROTHSTEIN, J.C.A.

     LE JUGE NOËL, J.C.A.





Date : 20001013


Dossier : A-166-99


CORAM :      LE JUGE DESJARDINS, J.C.A.

         LE JUGE ROTHSTEIN, J.C.A.

         LE JUGE NOËL, J.C.A.

    

ENTRE :

    

FRANK IAN LAING


appelant



- et -



BOREAL PACIFIC, UNE DIVISION DE

BOREAL PROPERTY AND CASUALTY INSURANCE COMPANY

     intimée


     MOTIFS DU JUGEMENT


LE JUGE DESJARDINS, J.C.A.


[1]      Il s'agit d'un appel d'une décision dans laquelle la Section de première instance1 a rejeté la réclamation que l'appelant a faite en vertu d'une police d'assurance maritime à la suite de la perte d'une excavatrice occasionnée par un accident en mer. L'intimée a refusé de payer quoi que ce soit pour le motif que le navire de l'appelant (le Palaquin) n'était pas en bon état de navigabilité pour le voyage qui était effectué et que l'appelant le savait.

[2]      Les paragraphes 37(4) et (5) de la Loi sur l'assurance maritime2, qui sont applicables en l'espèce, sont rédigés comme suit :

37. (4) There is no implied warranty in any time policy that the ship will be seaworthy at any stage of the marine adventure, but where, with the privity of the insured, the ship is sent to sea in an unseaworthy state, the insurer is not liable for any loss attributable to unseaworthiness.



(5) A ship is deemed to be seaworthy if it is reasonably fit in all respects to encounter the ordinary perils of the seas of the marine adventure insured.

     [Emphasis added.]


37. (4) Il n'y a aucun engagement implicite dans la police à temps quant au fait que le navire est en bon état de navigabilité à toute étape de l'opération maritime; cependant, si, avec l'assentiment de l'assuré, le navire prend la mer en état d'innavigabilité, l'assureur n'est pas responsable des pertes qui en résultent.


(5) Le navire est réputé en bon état de navigabilité lorsqu'il est, à tous égards, raisonnablement paré contre les fortunes de mer ordinaires de l'opération maritime assurée.

     [Non souligné dans l'original.]

    


[3]      Les parties ne contestent pas la définition de navigabilité qu'a adoptée le juge de première instance3 :

La navigabilité est un terme relatif qui varie selon la nature du voyage qui doit être effectué; le lieu où il est effectué, à savoir, une rivière, un canal ou l'océan; le type de temps prévu pendant le voyage, l'évolution des conditions météorologiques en été et les tempêtes en hiver. La cargaison qui n'est pas arrimée de la façon appropriée rendra le navire inapte à prendre la mer, si le mauvais arrimage met en danger la sécurité du navire. Toutefois, lorsque la police couvre tant le navire que la cargaison, le navire ne sera pas en état de navigabilité si, pour le sauver, il faut jeter la cargaison à la mer. Si le navire est surchargé, il n'est pas en état de navigabilité.

[4]      Après avoir fait un exposé détaillé des faits, le juge de première instance a conclu que deux facteurs avaient rendu le « Palaquin » inapte à prendre la mer : (1) le navire était trop chargé compte tenu de l'état de la mer auquel on pouvait raisonnablement s'attendre, et (2) l'excavatrice, qui n'était pas immobilisée, n'avait pas été arrimée d'une façon sûre compte tenu de l'état de la mer auquel il était raisonnablement possible de s'attendre.

[5]      Compte tenu des décisions de la Cour d'appel d'Angleterre dans Compania Maritima San Basilio S.A. v. The Oceanus Mutual Underwriting Association (Bermuda) Ltd. (The « Eurysthenes » )4 et Manifest Shipping & Co. Ltd. v. Uni-Polaris Insurance Co. Ltd. And La Réunion Européenne (The « Star Sea » )5, le juge de première instance a conclu que l'appelant savait que le « Palaquin » n'était pas en bon état de navigabilité. Elle a dit6 :

Je me vois obligée de conclure que M. Laing avait connaissance non seulement des faits qui ont rendu le navire inapte à prendre la mer, mais aussi qu'il a aussi « fait l'aveugle » à ce sujet. Comme il en a ci-dessus été fait mention, il a témoigné qu'à son avis, il était dangereux d'effectuer un voyage lorsqu'il y avait des vents de 20 noeuds. Le matin en question, les renseignements météorologiques montrent que lorsqu'il a entrepris le voyage, il y avait des vents de 20 noeuds. Ces vents venaient du sud-est et l'on prévoyait que les vents de cette direction iraient en augmentant et que le temps se détériorerait. M. Laing savait que les conditions météorologiques dans le détroit étaient imprévisibles, surtout en novembre. Lorsqu'on lui a demandé pourquoi il n'avait pas arrimé l'excavatrice à la barge, il a dit au capitaine Vale (et rien ne me permet de douter de ce témoignage) que si un problème s'était posé, l'excavatrice aurait entraîné la barge au fond avec elle. Je me vois obligée de conclure que M. Laing savait que le navire n'était pas apte à prendre la mer tel que ce concept est décrit dans la jurisprudence que j'ai citée.

[6]      Dans la décision The « Eurysthenes » , lord Denning, M.R., pour sa part,7 énonce le critère de l'assentiment de la façon suivante8 :

[TRADUCTION] Pour que le propriétaire perde son droit, il doit à mon avis avoir connaissance non seulement de l'état de non-navigabilité, mais aussi avoir connaissance des faits qui font que le navire n'est pas apte à prendre la mer, c'est-à-dire qu'il n'est pas raisonnablement apte à faire face aux périls ordinaires de la mer. Par connaissance, j'entends non seulement une connaissance positive, mais aussi le genre de connaissance dont on parle lorsque l'on dit qu'une personne fait l'aveugle. La personne qui ferme les yeux sur la vérité malgré ses soupçons et omet de se renseigner -- de sorte qu'elle ne sait pas vraiment de quoi il en ressort -- doit être considérée comme connaissant la vérité. Il est beaucoup plus répréhensible de se fermer les yeux que de se montrer simplement négligent. Faire preuve de négligence n'équivaut pas à connaître la vérité.

[7]      Pour conclure comme elle l'a fait, le juge de première instance devait être convaincue que l'appelant avait fait l'aveugle quant aux faits qui ont rendu le « Palaquin » inapte à prendre la mer.

[8]      À mon avis, elle a correctement appliqué le critère de l'assentiment établi dans les décisions anglaises. Elle a examiné le facteur du vent et la détérioration des conditions météorologiques dont avait connaissance l'appelant, et également le fait que l'appelant savait que les conditions météorologiques dans le détroit de Georgia étaient imprévisibles durant ce mois de l'année. Elle a également noté qu'en omettant d'arrimer l'excavatrice à son navire, l'appelant avait accepté la possibilité d'avoir à sacrifier sa cargaison. Elle a inféré de ces facteurs que l'appelant avait décidé délibérément de ne tenir aucun compte d'un risque connu contrairement à son souci habituel en matière de sécurité.

[9]      Eu égard à sa déclaration, il n'y a aucun doute que le juge de première instance a analysé l'état d'esprit de l'appelant, et qu'elle l'a fait conformément à la norme élevée qu'établit le droit à cet égard. Il y avait des éléments de preuve à l'appui de sa conclusion.

[10]      Je suis d'avis de rejeter le présent appel avec dépens.



     « Alice Desjardins »

    

     J.C.A.

« Je souscris aux présents motifs

     Marshall Rothstein J.C.A. »

« Je souscris aux présents motifs

     Marc Noël J.C.A. »

Traduction certifiée conforme



Julie Boulanger, LL.M.




Date : 20001013


Dossier : A-166-99

     OTTAWA (ONTARIO), LE VENDREDI 13 OCTOBRE 2000


CORAM :      LE JUGE DESJARDINS, J.C.A.

         LE JUGE ROTHSTEIN, J.C.A.

         LE JUGE NOËL, J.C.A.

    

ENTRE :

    

FRANK IAN LAING

appelant



- et -



BOREAL PACIFIC, UNE DIVISION DE

BOREAL PROPERTY AND CASUALTY INSURANCE COMPANY

     intimée


     JUGEMENT

     Le présent appel est rejeté avec dépens.


     « Alice Desjardins »

     J.C.A.


Traduction certifiée conforme



Julie Boulanger, LL.M.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION D'APPEL


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


NO DU GREFFE :              A-166-99

APPEL DU JUGEMENT QUE LA SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE DE LA COUR FÉDÉRALE DU CANADA A RENDU LE 17 FÉVRIER 1999 DANS LE DOSSIER T-1713-96.

INTITULÉ DE LA CAUSE :      Frank Ian Laing c. Boreal Pacific, une division de
                     Boreal property and casualty insurance company
LIEU DE L'AUDIENCE :          VANCOUVER (COLOMBIE-BRITANNIQUE)
DATE DE L'AUDIENCE :          le 5 octobre 2000
DATE DES MOTIFS :          le 13 octobre 2000
MOTIFS DU JUGEMENT :      le juge Desjardins, J.C.A.
Y ONT SOUSCRIT :          les juges Rothstein et Noël, J.C.A.

ONT COMPARU :

M. Aengus RM Fogarty                      POUR L'APPELANT
M. Richard C.C. Twining                      POUR L'INTIMÉE

M. Kim Wigmore


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Aengus RM Fogarty                          POUR L'APPELANT

Victoria (Colombie-Britannique)

Killam, Whitelaw & Twining                      POUR L'INTIMÉE

Vancouver (Colombie-Britannique)

__________________

1Laing c. Boreal Pacific et autre (1999), 163 F.T.R. 226 (C.F. 1re inst.), le juge Reed.

2L.C. 1993, ch. 22.

3Laing c. Boreal Pacific et autre (1999), 163 F.T.R. 226, page 227, paragraphe 3 (C.F. 1re inst.), le juge Reed.

4[1976] 2 Lloyd's Law Reports 171.

5[1997] 1 Lloyd's Law Reports 360.

6(1999), 163 F.T.R. 226, page 239, paragraphe 48.

7Voir également Roskill, L.J., [1976] 2 Lloyd's Law Reports 171, page 183; et Geoffrey Lane, L.J., page 187.

8[1976] 2 Lloyd's Law Reports 171, page 179.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.