Décisions de la Cour d'appel fédérale

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     Date : 19980702

     Dossier : A-391-96

Ottawa (Ontario), le jeudi 2 juillet 1998

CORAM :      LE JUGE STONE

         LE JUGE DENAULT

         LE JUGE DÉCARY

Entre :

     LA BANDE INDIENNE DE MATSQUI et

     LE CONSEIL DE LA BANDE INDIENNE DE MATSQUI,

     appelants

     (intimés),

ET :

     LA COMPAGNIE DES CHEMINS DE FER NATIONAUX DU CANADA,

     intimée

     (requérante),

ET :

     CANADIEN PACIFIQUE LIMITÉE et

     AT & T LONG DISTANCE SERVICES COMPANY et

     LA COMMISSION CONSULTATIVE DE LA FISCALITÉ INDIENNE et

     LA BANDE INDIENNE DE LITTLE SHUSWAP et

     LE CONSEIL DE LA BANDE INDIENNE DE LITTLE SHUSWAP,

     intervenants.

     JUGEMENT

     L'appel est rejeté et une seule série de dépens est accordée pour le présent appel et l'appel déposé dans le dossier A-404-96.

     " A.J. Stone "

     Juge

Traduction certifiée conforme

Laurier Parenteau, LL.L.

     Date : 19980702

     Dossier : A-404-96

Ottawa (Ontario), le jeudi 2 juillet 1998

CORAM :      LE JUGE STONE

         LE JUGE DENAULT

         LE JUGE DÉCARY

Entre :

     LA BANDE INDIENNE DE KAMLOOPS et

     LE CONSEIL DE LA BANDE INDIENNE DE KAMLOOPS,

     appelants

     (intimés),

ET :

     LA COMPAGNIE DES CHEMINS DE FER NATIONAUX DU CANADA,

     intimée

     (requérante),

ET :

     CANADIEN PACIFIQUE LIMITÉE et

     AT & T LONG DISTANCE SERVICES COMPANY et

     LA COMMISSION CONSULTATIVE DE LA FISCALITÉ INDIENNE et

     LA BANDE INDIENNE DE LITTLE SHUSWAP et

     LE CONSEIL DE LA BANDE INDIENNE DE LITTLE SHUSWAP,

     intervenants.

     JUGEMENT

     L'appel est rejeté et une seule série de dépens est accordée pour le présent appel et l'appel déposé dans le dossier A-391-96.

     " A.J. Stone "

     Juge

Traduction certifiée conforme

Laurier Parenteau, LL.L.

     Date : 19980702

     Dossiers : A-391-96

     A-404-96

CORAM :      LE JUGE STONE

         LE JUGE DENAULT

         LE JUGE DÉCARY

     A-391-96

Entre :

     LA BANDE INDIENNE DE MATSQUI et

     LE CONSEIL DE LA BANDE INDIENNE DE MATSQUI,

     appelants

     (intimés),

ET :

     LA COMPAGNIE DES CHEMINS DE FER NATIONAUX DU CANADA,

     intimée

     (requérante),

ET :

     CANADIEN PACIFIQUE LIMITÉE et

     AT & T LONG DISTANCE SERVICES COMPANY et

     LA COMMISSION CONSULTATIVE DE LA FISCALITÉ INDIENNE et

     LA BANDE INDIENNE DE LITTLE SHUSWAP et

     LE CONSEIL DE LA BANDE INDIENNE DE LITTLE SHUSWAP,

     intervenants.

     A-404-96

Entre :

     LA BANDE INDIENNE DE KAMLOOPS et

     LE CONSEIL DE LA BANDE INDIENNE DE KAMLOOPS,

     appelants

     (intimés),

ET :

     LA COMPAGNIE DES CHEMINS DE FER NATIONAUX DU CANADA,

     intimée

     (requérante),

ET :

     CANADIEN PACIFIQUE LIMITÉE et

     AT & T LONG DISTANCE SERVICES COMPANY et

     LA COMMISSION CONSULTATIVE DE LA FISCALITÉ INDIENNE et

     LA BANDE INDIENNE DE LITTLE SHUSWAP et

     LE CONSEIL DE LA BANDE INDIENNE DE LITTLE SHUSWAP,

     intervenants.

Audience tenue à Vancouver (C.-B.) les mardi, mercredi et jeudi, 26, 27 et 28 mai 1998.

Jugement prononcé à Ottawa le jeudi 2 juillet 1998.

MOTIFS DU JUGEMENT PRONONCÉS PAR :      LE JUGE DÉCARY

SOUSCRIVENT À CES MOTIFS :      LE JUGE STONE

     LE JUGE DENAULT

     Date : 19980702

     Dossiers : A-391-96

     A-404-96

CORAM :      LE JUGE STONE

         LE JUGE DENAULT

         LE JUGE DÉCARY

     A-391-96

Entre :

     LA BANDE INDIENNE DE MATSQUI et

     LE CONSEIL DE LA BANDE INDIENNE DE MATSQUI,

     appelants

     (intimés),

ET :

     LA COMPAGNIE DES CHEMINS DE FER NATIONAUX DU CANADA,

     intimée

     (requérante),

ET :

     CANADIEN PACIFIQUE LIMITÉE et

     AT & T LONG DISTANCE SERVICES COMPANY et

     LA COMMISSION CONSULTATIVE DE LA FISCALITÉ INDIENNE et

     LA BANDE INDIENNE DE LITTLE SHUSWAP et

     LE CONSEIL DE LA BANDE INDIENNE DE LITTLE SHUSWAP,

     intervenants.

     A-404-96

Entre :

     LA BANDE INDIENNE DE KAMLOOPS et

     LE CONSEIL DE LA BANDE INDIENNE DE KAMLOOPS,

     appelants

     (intimés),

ET :

     LA COMPAGNIE DES CHEMINS DE FER NATIONAUX DU CANADA,

     intimée

     (requérante),

ET :

     CANADIEN PACIFIQUE LIMITÉE et

     AT & T LONG DISTANCE SERVICES COMPANY et

     COMMISSION CONSULTATIVE DE LA FISCALITÉ INDIENNE et

     LA BANDE INDIENNE DE LITTLE SHUSWAP et

     LE CONSEIL DE LA BANDE INDIENNE DE LITTLE SHUSWAP,

     intervenants.

     MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE DÉCARY

[1]      Ces appels font suite à deux demandes faisant partie d'une série de procédures, intentées par des compagnies de chemin de fer en vertu des articles 18 et 18.1 de la Loi sur la Cour fédérale, contestant la validité d'avis d'évaluation de taxes foncières délivrés au nom de diverses bandes indiennes au sujet des terres détenues par ces entreprises et comprenant les plate-formes de chemins de fer, les gares et d'autres terres. Les demandes soulevaient une question commune : les terres en cause sont-elles situées " dans la réserve " au sens de la Loi sur les Indiens , L.R.C. (1985), ch. I-5, et ses modifications, et par conséquent peuvent-elles être imposées par le conseil de bande aux termes de l'alinéa 83(1)a) de la Loi sur les Indiens.

[2]      Le juge des requêtes a entendu simultanément six demandes de contrôle judiciaire1. Les motifs de l'ordonnance déposés dans le dossier T-639-92 s'appliquent à toutes ces demandes. Nous sommes saisis des appels déposés dans les dossiers T-269-95 (A-391-96) et T-1638-93 (A-404-96), mettant tous deux en cause la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (le " CN "). Des appels ont également été formés dans les dossiers T-639-92 (A-389-96), T-2780-93 (A-403-96), T-2790-93 (A-386-96) et T-2986-93 (A-390-96). Trois de ces appels ont été suspendus en attendant le règlement des appels dont nous sommes saisis ; il y a eu désistement dans l'appel formé par la bande indienne de Nanaimo et le conseil de la bande indienne de Nanaimo dans le dossier A-390-96.

[3]      Dans l'ordonnance en date du 15 avril 1996, le juge Teitelbaum a accueilli les demandes et annulé les avis d'évaluation concernant les biens immeubles des compagnies de chemins de fer au motif qu'ils " outrepassent le pouvoir de taxation " conféré aux bandes indiennes intimées. Dans les motifs modifiés qu'il a rendu le 25 juillet 1996, le juge des requêtes a énoncé la conclusion subsidiaire suivante (précité, note 1 à la page 420) :

     Subsidiairement, si j'ai tort d'accueillir les présentes demandes, j'annule les aspects contestés des avis d'évaluation susmentionnés des bandes indiennes taxant les biens immeubles des requérantes qui établissent des distinctions entre les personnes.         

[4]      Ces deux appels ont été entendus ensemble. Même si certains des faits et une partie de la législation pertinente peuvent présenter des différences, la présente série de motifs s'appliquera au dossier A-391-96 comme au dossier A-404-96.

[5]      Il convient d'abord de reprendre les dispositions pertinentes de la Loi sur les Indiens :

     INTERPRETATION

2. (1) In this Act,

[...]

"designated lands" means a tract of land or any interest therein the legal title to which remains vested in Her Majesty and in which the band for whose use and benefit it was set apart as a reserve has, otherwise than absolutely, released or surrendered its rights or interests, whether before or after the coming into force of this definition;

[...]

"reserve"

     (a) means a tract of land, the legal title to which is vested in Her Majesty, that has been set apart by Her Majesty for the use and benefit of a band, and
     (b) except in subsection 18(2), sections 20 to 25, 28, 36 to 38, 42, 44, 46, 48 to 51, 58 to 60 and the regulations made under any of those provisions, includes designated lands;

[...]

"surrendered lands" means a reserve or part of a reserve or any interest therein, the legal title to which remains vested in Her Majesty, that has been released or surrendered by the band for whose use and benefit it was set apart.

[...]

     LANDS TAKEN FOR PUBLIC PURPOSES

35. (1) Where by an Act of Parliament or a provincial legislature Her Majesty in right of a province, a municipal or local authority or a corporation is empowered to take or to use lands or any interest therein without the consent of the owner, the power may, with the consent of the Governor in Council and subject to any terms that may be prescribed by the Governor in Council, be exercised in relation to lands in a reserve or any interest therein.

(2) Unless the Governor in Council otherwise directs, all matters relating to compulsory taking or using of lands in a reserve under subsection (1) are governed by the statute by which the powers are conferred.

[...]

     SURRENDERS AND DESIGNATIONS

37. (1) Lands in a reserve shall not be sold nor title to them conveyed until they have been absolutely surrendered to Her Majesty pursuant to subsection 38(1) by the band for whose use and benefit in common the reserve was set apart.

(2) Except where this Act otherwise provides, lands in a reserve shall not be leased nor an interest in them granted until they have been surrendered to Her Majesty pursuant to subsection 38(2) by the band for whose use and benefit in common the reserve was set apart.

38. (1) A band may absolutely surrender to Her Majesty, conditionally or unconditionally, all of the rights and interests of the band and its members in all or part of a reserve.

(2) A band may, conditionally or unconditionally, designate, by way of a surrender to Her Majesty that is not absolute, any right or interest of the band and its members in all or part of a reserve, for the purpose of its being leased or a right or interest therein being granted.

[...]

     POWERS OF THE COUNCIL

81. (1) The Council of a band may make by-laws not inconsistent with this Act or with any regulation made by the Governor in Council or the Minister, for any or all of the following purposes, namely,

     (a) to provide for the health of residents on the reserve and to prevent the spreading of contagious and infectious diseases;
     (b) the regulation of traffic;
     (c) the observance of law and order;
     (d) the prevention of disorderly conduct and nuisances;
     (e) the protection against and prevention of trespass by cattle and other domestic animals, the establishment of pounds, the appointment of pound-keepers, the regulation of their duties and the provision for fees and charges for their services;
     (f) the construction and maintenance of watercourses, roads, bridges, ditches, fences and other local works;

[...]

83. (1) Without prejudice to the powers conferred by section 81, the council of a band may, subject to the approval of the Minister, make by-laws for any or all of the following purposes, namely,

     (a) subject to subsection (2) and (3), taxation for local purposes of land, or interests in land, in the reserve, including rights to occupy, possess or use land in the reserve;

[...]

     DÉFINITIONS

2. (1) Les définitions qui suivent s'appliquent à la présente loi.

[...]

"terres désignées" Parcelle de terrain, ou tout droit sur celle-ci, propriété de Sa Majesté et relativement à laquelle la bande à l'usage et au profit de laquelle elle a été mise de côté à titre de réserve a cédé, avant ou après l'entrée en vigueur de la présente définition, ses droits autrement qu'à titre absolu.

[...]

"réserve" Parcelle de terrain dont sa Majesté est propriétaire et qu'elle a mise de côté à l'usage et au profit d'une bande; y sont assimilées les terres désignées, sauf pour l'application du paragraphe 18(2), des articles 20 à 25, 28, 36 à 38, 42, 44, 46, 48 à 51, 58 et 60, ou des règlements pris sous leur régime.

[...]

"terres cédées" Réserve ou partie d'une réserve, ou tout droit sur celle-ci, propriété de Sa Majesté et que la bande à l'usage et au profit de laquelle il avait été mis de côté a abandonné ou cédé.

[...]

     TERRES PRISES POUR CAUSE

     D'UTILITÉ PUBLIQUE

35. (1) Lorsque, par une loi fédérale ou provinciale, Sa Majesté du chef d'une province, une autorité municipale ou locale, ou une personne morale, a le pouvoir de prendre ou d'utiliser des terres ou tout droit sur celles-ci sans le consentement du propriétaire, ce pouvoir peut, avec le consentement du gouverneur en conseil et aux conditions qu'il peut prescrire, être exercé relativement aux terres dans une réserve ou à tout droit sur celles-ci.

(2) À moins que le gouverneur en conseil n'en ordonne autrement, toutes les questions concernant la prise ou l'utilisation obligatoire de terres dans une réserve, aux termes du paragraphe (1), doivent être régies par la loi qui confère les pouvoirs.

[...]

     CESSION ET DÉSIGNATION

37. (1) Les terres dans une réserve ne peuvent être vendues ou aliénées que si elles sont cédées à titre absolu conformément au paragraphe 38(1) à Sa Majesté par la bande à l'usage et au profit communs de laquelle la réserve a été mise de côté.

(2) Sauf disposition contraire de la présente loi, les terres dans une réserve ne peuvent être données à bail ou faire l'objet d'un démembrement que si elles sont cédées conformément au paragraphe 38(2) à Sa Majesté par la bande à l'usage et au profit communs de laquelle la réserve a été mise de côté.

38. (1) Une bande peut céder à titre absolu à Sa Majesté, avec ou sans conditions, tous ses droits, et ceux de ses membres, portant sur tout ou partie d'une réserve.

(2) Aux fins de les donner à bail ou de les démembrer, une bande peut désigner par voie de cession à Sa Majesté, avec ou sans conditions, autre qu'à titre absolu, tous droits de la bande, et ceux de ses membres, sur tout ou partie d'une réserve.

[...]

     POUVOIRS DU CONSEIL

81. (1) Le Conseil d'une bande peut prendre des règlements administratifs, non incompatibles avec la présente loi ou avec un règlement pris par le gouverneur en conseil ou par le ministre, pour l'une ou l'ensemble des fins suivantes:

     a) l'adoption de mesures relatives à la santé des habitants de la réserve et les précautions à prendre contre la propagation des maladies contagieuses et infectieuses;
     b) la réglementation de la circulation;
     c) l'observation de la loi et le maintien de l'ordre;
     d) la répression de l'inconduite et des incommodités;
     e) la protection et les précautions à prendre contre les empiétements des bestiaux et autres animaux domestiques, l'établissement de fourrières, la nomination de gardes-fourrières, la réglementation de leurs fonctions et la constitution de droits et redevances pour leurs services;
     f) l'établissement et l'entretien de cours d'eau, routes, ponts, fossés, clôtures et autres ouvrages locaux;

[...]

83. (1) Sans préjudice des pouvoirs que confère l'article 81, le conseil de la bande peut, sous réserve de l'approbation du ministre, prendre des règlements administratifs dans les domaines suivants:

     a) sous réserve des paragraphe (2) et (3), l'imposition de taxes à des fins locales, sur les immeubles situés dans la réserve, ainsi que sur les droits sur ceux-ci, et notamment sur les droits d'occupation, de possession et d'usage;

[...]

[6]      Ces extraits renvoient aux dispositions actuellement en vigueur. Il n'est pas nécessaire de reproduire le texte des dispositions qui s'appliquaient dans le passé. Il pourrait cependant être utile de noter que les articles 35, 37 et 38 sont en vigueur depuis la codification des statuts révisés de 1952, chapitre 149, et que les articles 35 et 37 correspondent aux articles 48 et 50 des statuts révisés de 1927, chapitre 98. Les " modifications de Kamloops ", adoptées en 1988 (Loi modifiant la Loi sur les Indiens (terres désignées) , L.C. 1988, ch. 23), ont introduit la notion de " terres désignées ". Avant ces modifications, la définition du terme " réserve " était restreinte à la première partie de l'alinéa a ) et les pouvoirs de taxation n'étaient conférés qu'aux bandes qui, de l'avis du gouverneur en conseil, avaient atteint un " haut degré d'avancement ".

[7]      Dans l'appel Matsqui, les avis d'évaluation foncière ont été délivrés par la bande indienne de Matsqui (Matsqui), au sujet de cinq parcelles de terrain détenues par la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada ou la Canadian Northern Pacific Railway Company, qui ont depuis fusionné (le CN). Le CN détient des certificats de titre incontestable sur ces terres, et ces certificats provinciaux se fondent sur les lettres patentes délivrées par la Couronne du chef du Canada. Les lettres patentes ont été délivrées après que le gouverneur en conseil eut approuvé la cession des terres (les parcelles 1 et 2)2 ou la prise obligatoire des terres autorisée par des ordonnances rendues de temps à autre aux termes de la Loi sur les Indiens (les parcelles 3 à 5)3. Pour chacune des trois parcelles de terrain prises, il semble d'après les termes des arrêtés en conseil que l'approbation du conseil de la bande avait été demandée et obtenue. (J'utiliserai dans les présents motifs les expressions " prise obligatoire " ou " terres prises " plutôt que le terme " expropriation " ; en effet, en vertu de l'article 35, la Couronne n'exproprie pas à proprement parler les terres dont le droit de propriété légal lui a été conféré.)

[8]      Dans l'arrêt Kamloops, les avis d'évaluation foncière ont été délivrés par la bande indienne de Kamloops (Kamloops) à l'égard de sept parcelles de terrain (les parcelles 1 à 7) pour lesquelles le CN détient des certificats de titre incontestable. Ces certificats provinciaux se fondent sur les lettres patentes délivrées par la Couronne du chef du Canada après que le gouverneur en conseil eut autorisé la prise obligatoire des terres au moyen d'ordonnances rendues en vertu de la Loi sur les Indiens4. Il semble d'après la preuve documentaire produite concernant chacune de ces sept parcelles de terrain prises que l'approbation du conseil ou celle des membres de la bande avait été demandée et obtenue même si une telle approbation n'était pas obligatoire d'après la loi.

I - Observations préliminaires

[9]      a) Les conseils de bande n'essaient pas d'imposer des biens immeubles qui ne pourraient pas autrement l'être, et les sociétés ferroviaires n'essaient pas non plus d'éviter de payer les taxes sur les biens immeubles prétendument situés dans une réserve. Si la présente Cour décide que les biens en question ne sont pas situés " dans la réserve " au sens de l'alinéa 83(1)a ) de la Loi sur les Indiens, les sociétés ferroviaires continueront de payer les taxes foncières à la municipalité et à la province, comme par le passé. Le dossier n'indique pas si les biens immeubles sont évalués et imposés à un taux supérieur ou inférieur selon que les autorités fiscales sont la municipalité et la province ou les conseils de bande.

     * * *

[10]      b) Ces causes ont été débattues par toutes les parties en partant du postulat que les mots " dans la réserve ", utilisés à l'alinéa 83(1)a ) de la Loi sur les Indiens, signifient que seules les terres qui satisfont aux conditions de la définition restreinte du mot " réserve " utilisé dans la Loi sur les Indiens peuvent être imposées par une bande. On n'a pas laissé entendre que les mots " les immeubles situés dans la réserve " (" in the reserve ") pourraient, pour les fins strictes de l'alinéa 83(1)a ), être interprétés dans un sens géographique plutôt que juridique et inclure toutes les terres qui sont situées dans les limites géographiques de la réserve, qu'il s'agisse ou non légalement de " terres situées dans la réserve ". Il ne serait pas impensable, pour les fins fiscales, de considérer la " réserve " comme une entité physique et globale - en fait, c'est une " parcelle de terrain " - plutôt que comme un casse-tête juridique dont il manque quelques pièces.

[11]      Une démarche aussi pratique pourrait convenir à des situations où, comme en l'espèce, les terres des compagnies de chemin de fer, si la Cour conclut que celles-ci ne sont pas légalement " situées dans la réserve ", coupent la réserve en deux et transforment dans une certaine mesure une " parcelle de terrain " en deux ou plusieurs parcelles de terrain. Toutefois, cet argument n'a pas été soulevé et il se pourrait fort bien, compte tenu des modifications de Kamloops apportées en 1988, qu'il soit trop tard pour le faire.

     * * *

[12]      c) Aucune ordonnance n'est recherchée contre la Couronne. La Couronne n'est pas partie à la présente instance. La Couronne a choisi de ne pas participer à l'instance et aucune inférence ne peut être tirée, dans un sens ou dans l'autre, de sa décision. Toutefois, cette absence de la Couronne ne prive aucunement la Cour de sa capacité de trancher les appels en s'appuyant sur la loi et les principes juridiques applicables.

     * * *

[13]      d) La présente instance est de la nature une procédure de contrôle judiciaire concernant des mesures administratives prises par les conseils des bandes indiennes. Aucune question de portée constitutionnelle n'a été soulevée et même si la Cour, en interprétant les dispositions pertinentes de la Loi sur les Indiens et les textes réglementaires en cause, doit tenir compte des principes spécialement élaborés relativement à des questions concernant les droits des autochtones, et appliquer ces principes, la présente affaire ne porte pas sur le titre autochtone.

     * * *

[14]      e) Les procédures intentées ne sont pas non plus des réclamations contre la Couronne pour manquement à son obligation de fiduciaire. Bien que je sois d'accord avec l'avocat des appelants qui affirme que le concept de l'obligation de fiduciaire devrait imprégner toute interprétation de la Loi sur les Indiens et que la Cour doit supposer, quand elle interprète les textes en cause, que la Couronne n'a pas manqué à cette obligation, la Cour ne peut accepter une allégation, examiner des éléments de preuve ou en venir à des conclusions de fait ou de droit qu'il serait plus approprié de débattre dans des instances où seraient recherchés des redressements contre un manquement à l'obligation de fiduciaire de la Couronne.

     * * *

[15]      f) Ces causes ont aussi été entendues en partant du postulat que les terres ont été prises par le CN pour des raisons valides, c'est-à-dire pour les besoins du chemin de fer, que la somme versée par le CN pour les terres qui ont été prises a été évaluée à la valeur marchande des terres au moment de leur prise de possession, que les textes réglementaires accordant ou reconnaissant le titre de propriété sur les terres prises sont valides et que les droits fonciers que le CN a acquis, quels qu'ils soient, étaient nécessaires pour la construction du chemin de fer. On demande à la Cour de déterminer quels étaient les droits de propriété au moment où les terres ont été cédées, et non pas ce qu'ils auraient pu être à l'époque ni ce qu'ils pourraient être aujourd'hui.

     * * *

[16]      g) De plus, ces causes ont été entendues en partant du fondement que les " terres " dont il est question n'incluent pas les droits miniers. Les questions concernant les droits miniers comme celles qui ont été débattues dans l'arrêt Bande indienne de la rivière Blueberry c. Canada (Ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien) , [1995] 4 R.C.S. 344 ne se posent tout simplement pas en l'espèce. Quoi qu'il en soit, je fais observer, que l'article 140 de la Loi sur les chemins de fer (L.R.C. (1985) ch. R-3) stipule expressément que les compagnies de chemin de fer n'ont pas droit aux minéraux à moins que ceux-ci n'aient été expressément mentionnés dans l'acte de cession et conséquemment cédés. (Voir également l'article 136, S.R.C. 1970, ch. R-2, l'article 198, S.R.C. 1952, ch. 234 et l'article 195, S.R.C. 1927, ch. 170).

[17]      Il est intéressant de noter que la Couronne a expressément réservé les droits miniers, et par conséquent qu'ils n'ont pas été cédés au CN, dans les textes réglementaires concernant les parcelles 3, 4 et 5 dans l'appel Matsqui. Cela illustre la politique de longue date du ministère des Affaires indiennes qui, comme le notait la Cour suprême du Canada dans Bande indienne de la rivière Blueberry, précité au paragraphe 16, page 364, réservait les droits miniers au profit des peuples autochtones au moment de la cession des droits de superficie.

     * * *

[18]      h) Le fait que les terres ont été prises " pour les besoins du chemin de fer " est un facteur neutre. Pour être valides, ces prises de possession obligatoires en vertu de la Loi sur les Indiens doivent être faites, comme l'indique le titre de l'article 35, " pour cause d'utilité publique " et les expropriations effectuées en vertu de la Loi sur les chemins de fer , selon les dispositions qui se sont succédé (alinéa 151(1)c,) S.R.C. 1906, ch. 37 ; alinéa 162(1)(c) S.R.C. 1927, ch. 170 ; alinéa 164(1)(c) S.R.C. 1952, ch. 234 ; alinéa 102(1)(c) S.R.C. 1970, ch. R-2), devaient être faites pour " la construction, l'entretien et la mise en service du chemin de fer ". Les différentes Lois sur les chemins de fer accordaient également aux compagnies ferroviaires le pouvoir exprès de " s'approprier ou occuper " (" take possession of or occupy ") toute partie des réserves ou des terres indiennes avec le consentement du gouverneur en conseil (par. 175 en 1906 ; art. 192 en 1927 ; par. 195(1) en 1952 ; par. 133(1) en 1970). Le but général à l'origine de la prise obligatoire des terres nous éclaire peu sur la nature du droit ainsi obtenu: aussi bien la prise d'un simple droit de passage que la prise de l'ensemble des droits de superficie sont des mesures destinées à satisfaire les "besoins du chemin de fer".

[19]      Dans le même ordre d'idée, le fait que dans certains cas on ait expressément indiqué que les terres étaient prises pour aussi longtemps qu'elles seraient utilisées " pour les besoins du chemin de fer " ne porte aucunement

atteinte au caractère absolu de la prise de possession. Dans l'arrêt Bande indienne de St. Mary's c. Cranbrook, [1997] 2 R.C.S. 657, à la page 670, le juge en chef Lamer déclare :

     Les mots " absolu " et " conditionnel " ne sont pas incompatibles, ni sur le plan des concepts, ni sous le régime de la Loi sur les Indiens [...]         

     * * *

[20]      i) Bien que l'expression " pour les besoins du chemin de fer " n'ait pas été définie dans les différentes Lois sur les chemins de fer , l'expression " chemin de fer " a été définie et a reçu un sens très large qui a subi peu de modifications au fil des ans. Dans la version de 1970 de la Loi sur les chemins de fer , par exemple, (S.R.C. 1970, ch. R-2), l'expression " chemin de fer " est définie de la façon suivante :

     [...] tout chemin de fer que la compagnie est autorisée à construire ou à exploiter, et comprend tous les embranchements et prolongements, toutes les voies de garage et d'évitement, toutes les gares et stations, tous les dépôts et quais, tout le matériel roulant, tout l'équipement, toutes les fournitures, tous les biens meubles ou immeubles, et tous les ouvrages qui en dépendent, et aussi tout pont de chemin de fer, tout tunnel ou toute autre construction que la compagnie est autorisée à ériger [...]         

Par ailleurs, les termes " terrains " ou " immeubles " sont définis de façon très large dans le sens suivant :

     [...] les biens immobiliers dont la présente loi ou la loi spéciale autorise l'acquisition, la prise de possession ou l'usage, et comprend les biens-fonds, domaines, terres, tènements et héritages de toute tenure, ainsi que toute servitude active ou passive, tout droit, privilège ou intérêt existant dans, sous, ou sur les biens immobiliers, ou à leur égard ;         

[21]      Les appelants laissent entendre que le gouverneur en conseil aurait outrepassé son pouvoir légal s'il avait autorisé la prise de possession des terrains en fief simple. Manifestement, les lois pertinentes lui donnaient le pouvoir de le faire. L'obligation de fiduciaire du gouverneur en conseil à l'égard des appellants exigeait-elle qu'il cède un droit moindre que celui qu'il a cédé? Cette question, pour les raisons que j'ai déjà exposées, ne peut être soulevée dans les présents appels.

     * * *

[22]      j) Comme le notait le juge Gonthier dans l'arrêt Bande indienne de la rivière de Blueberry, précité au paragraphe 16, aux pages 358 et 359 :

     [...] dans l'examen des effets juridiques des opérations conclues par les peuples autochtones et la Couronne relativement à des terres faisant partie de réserves, il ne faut pas oublier que, compte tenu du caractère sui generis du titre autochtone, les tribunaux doivent faire abstraction des restrictions habituelles imposées par la common law afin de donner effet à l'objet véritable de ces opérations.         

Par conséquent, l'accent devrait être placé non pas sur les termes mêmes qui sont utilisés ou sur les concepts qui sont habituellement associés à ces mots en common law, mais sur ce qui était, dans le contexte des opérations considérées dans leur ensemble, l'objet véritable de ce que recherchaient les bandes et la Couronne à l'époque. L'arrêt Rivière de Blueberry établit tout à fait clairement, selon le juge en chef dans l'arrêt Bande indienne de St. Mary's, (précité au paragraphe 19, page 668) que :

     [...] nous ne nous en remettons pas aux distinctions traditionnelles entre fief résoluble et fief sous condition résolutoire pour trancher les litiges relatifs aux droits fonciers des autochtones.         

[23]      Le fait que la raison pour laquelle les concepts du droit des biens en common law ne s'appliquent pas aux bandes indiennes est qu'il faille " empêcher que l'intention des autochtones ne soit frustrée par l'application des règles formalistes de la common law qui, pourrait-on soutenir, leur sont étrangères " (Bande indienne de St. Mary's , précité au paragraphe 19, page 668), ne signifie pas que la règle est une règle unilatérale qui peut être invoquée uniquement en faveur des bandes. Dans l'arrêt Bande indienne de St. Mary's, la bande a été déboutée parce que ce qui aurait pu être considéré comme une condition résolutoire en common law ne l'était pas dans les circonstances.

[24]      Devant nous, les avocats ont longuement débattu de la question de savoir si le droit du CN sur les terres était un fief simple ou une servitude. Dans la mesure où les avocats invitent la Cour à appliquer les principes de common law de fief simple et de servitude, c'est précisément la démarche qui a été condamnée dans les arrêts Rivière de Blueberry et Bande indienne de St. Mary's et qui nous mène inévitablement à des discussions techniques et interminables. La Cour est plutôt intéressée à découvrir " l'objet de l'opération " (Bande indienne de St. Mary's , précité au paragraphe 19, page 669), de quelque façon que cette intention ait pu être exprimée.

[25]      En outre, le concept de la " servitude " peut être en lui-même trompeur. Dans l'arrêt Bande indienne des Opetchesaht c. Canada , [1997] 2 R.C.S. 119 à la page 133, le juge Major, s'exprimant au nom de la majorité, a statué que les droits conférés par un permis d'occupation, qu'il a jugés analogues à une servitude, étaient :

     [...] d'origine législative et, en tant que tels, pourraient bien être inconnus en common law [...]         

La conclusion selon laquelle un droit foncier est analogue à une servitude n'implique pas en soi que le terrain se trouve " dans la réserve ". Même si la Cour suprême du Canada, dans l'arrêt Canadien Pacifique Ltée c. Paul , [1988] 2 R.C.S. 654, a déclaré, dans une opinion incidente et d'après les circonstances de cette affaire, que le droit concédé était " une servitude légale qui participe d'un droit de passage " (p. 671), elle a ajouté que la nature et l'étendue d'un droit de passage dépendait de " l'interprétation qu'il faut donner au texte de l'instrument qui le crée " (p. 671). Ce qu'il reste pour l'usage, l'occupation et le profit d'une bande, lorsqu'une " servitude légale qui participe d'un droit de passage " est concédée, dépend beaucoup des circonstances de l'espèce.

     * * *

[26]      k) Lorsque la cession d'une partie d'une réserve est en cause, la Cour doit déterminer si la nature de la cession et le contexte dans lequel elle a été faite " montrent bien que l'intention véritable [de la bande] était de se départir des terres en cause de façon absolue " (Bande indienne de St. Mary's , précité au paragraphe 19, page 666).

[27]      Lorsque la prise de possession obligatoire d'une partie d'une réserve est en cause, la Cour doit être convaincue que l'intention de la Couronne d'éteindre le titre indien dans la parcelle prise est " claire et expresse " (voir R. c. Sparrow , [1990] 1 R.C.S. 1075, page 1099). Quand l'approbation de la bande a été demandée et obtenue avant la prise de possession, à mon avis, la Cour doit être convaincue que la bande comprenait bien l'étendue du droit auquel elle acceptait de renoncer.

     * * *

[28]      l) En examinant les différents documents déposés à la Cour, j'ai accordé peu d'importance aux certificats de titre incontestable qui décrivent tous le CN comme [TRADUCTION] " ayant un droit en fief simple absolu et incontestable ". Ces certificats ont été délivrés après le fait par les autorités provinciales et ils peuvent difficilement être invoqués contre les bandes indiennes pour déterminer quelle était leur intention véritable au moment des prises de possession.

[29]      Par ailleurs, j'ai accordé de l'importance aux lettres patentes qui ont été délivrées malgré l'argument de l'avocat des appelants qui soutient que les lettres patentes ne peuvent être que le miroir ou le reflet des conditions des arrêtés en conseil et qu'elles ne peuvent y ajouter d'autres conditions. Les lettres patentes renferment certains détails (par exemple le prix versé) qui complètent les arrêtés en conseil et qui reflètent les discussions qui ont eu lieu et les ententes qui ont été conclues entre la Couronne, le CN et les bandes indiennes dans le processus qui a mené aux cessions ou aux prises de possession.

     * * *

[30]      m) Même s'il y a douze parcelles de terre en cause, chacune présentant sa propre série de circonstances et de textes d'origine législative, les deux appels ont été débattus à partir du postulat que dans chaque appel la Cour doit s'efforcer de parvenir à une conclusion qui s'applique également à toutes les parcelles de terrain en cause. Il n'est pas dans l'intérêt des parties, en l'absence de raisons qui nous obligeraient à décider du contraire, de statuer que certaines parcelles se trouvent dans la réserve et d'autres non. Toutes les parties ont débattu de cette cause selon la loi du tout ou rien et c'est de cette façon qu'elle doit être décidée dans chaque appel.

II - Les droits de la Couronne et du CN sur les terres

[31]      Comme il est noté au paragraphe 18, les compagnies de chemin de fer avaient droit à toutes les époques pertinentes d'avoir ou de posséder les terres de la réserve pour la construction, l'entretien et la mise en service d'un chemin de fer. Il est vrai, comme le fait observer l'avocat des appelants, que le pouvoir de procéder à une prise de possession obligatoire pour cause d'utilité publique doit être interprétée de façon à ce que la compagnie ne puisse s'approprier que les terres ou les titres sur les terres qui sont nécessaires à la réalisation de ces fins. Toutefois, comme je l'ai noté précédemment, les besoins du " chemin de fer " et les " terres " du chemin de fer ont été définis comme englobant les immeubles dans le sens le plus large du terme et il ne convient pas dans la présente instance de soutenir que la Couronne a pris plus que ce dont avait besoin le CN pour la construction de son chemin de fer.

[32]      Afin de déterminer la nature et l'étendue du droit d'une compagnie de chemin de fer sur les terres des réserves - et, de la même façon, la nature et l'étendue de ce qui a été retiré à une bande -, il faut examiner " le texte des lois, toutes les ententes conclues entre les parties initiales, ainsi que les actions et déclarations subséquentes des parties " (Canadien Pacifique Ltée c. Paul, précité au paragraphe 25, page 665).

         A - Le texte des lois

[33]      La disposition la plus pertinente dans ces appels est l'alinéa 83(1)a) de la Loi sur les Indiens. Il s'agit de la disposition ajoutée à la Loi en 1988 sur laquelle les appelants s'appuient pour évaluer les immeubles de l'intimé.

[34]      Deux décisions récentes de la Cour suprême du Canada ont énoncé les objectifs que visait le législateur quand il a investi les autochtones de leurs nouveaux pouvoirs de taxation. Dans l'arrêt Canadien Pacifique Ltée c. Bande indienne de Matsqui, [1995] 1 R.C.S. 3, page 24, le juge en chef Lamer décrit l'objectif dans les termes suivants :

     [...] Le régime qui est entré en vigueur en 1988 est destiné à faciliter le développement de l'autonomie gouvernementale des autochtones en permettant aux bandes d'exercer sur leurs réserves le pouvoir proprement gouvernemental de taxation [...]         

[35]      Dans l'arrêt Bande indienne de St. Mary's, précité au paragraphe 19, le juge en chef a pleinement analysé les modifications de Kamloops dont l'objet déclaré, dit-il à la page 672, ne laisse place " à aucune équivoque ". Il poursuit dans ces termes :

     [...] Lorsqu'il a présenté les nouvelles modifications au Parlement, le gouvernement a bien précisé que ces modifications visaient à clarifier le statut des terres cédées et à inclure les terres cédées aux fins de les donner à bail dans la définition de réserve, principalement pour fins de taxation.         

                                     [p. 672]

     [...] Il est évident, toutefois, que le législateur n'a pas inclus toutes les terres cédées par une bande indienne dans la définition légale de " réserve ". Si telle avait été la fin recherchée, les moyens employés auraient été carrément moins complexes. Au contraire, conscient de la nécessité d'exclure de la définition de " réserve " les terres cédées afin d'être vendues, le législateur a créé un régime de cessions à deux niveaux. La condition préalable énoncée au par. 37(1), savoir que les terres doivent être cédées à titre absolu avant d'être vendues, montre que le législateur entendait exclure les terres cédées à cette fin de la définition de réserve. Plusieurs éléments des modifications de Kamloops, dont le plus manifeste est l'emploi du verbe " désigner " au par. 38(2), montrent qu'on entendait que les terres cédées pour être données à bail soient visées par la définition de " terres désignées ".         
     Pourquoi le législateur a-t-il employé l'expression générale " autrement qu'à titre absolu "? Si son intention expresse était d'exclure des terres faisant partie de la réserve les terres cédées à des fins de vente, pourquoi n'a-t-il pas défini l'expression " terres désignées " d'une manière plus explicite? J'ai une réponse convaincante à offrir : le législateur doit avoir choisi l'expression générale " autrement qu'à titre absolu " afin de parer à d'autres éventualités - d'une part, pour permettre que des terres faisant l'objet d'autres formes limitées de cession, comme un droit de passage, soient considérées comme des terres désignées, et, d'autre part, pour faire en sorte que les terres faisant l'objet d'autres formes de cessions permanentes, comme l'échange ou le don, demeurent en dehors de nos conceptions de terres faisant partie d'une réserve. Le législateur aurait pu formuler sa définition de " terres désignées " en fonction de la distinction spécifique entre la location et la vente. S'il l'avait fait, le présent litige aurait probablement été évité. Mais cette distinction est purement une distinction préliminaire, et une réponse législative aussi limitée aurait donné lieu à bien d'autres litiges qui auraient probablement été plus difficiles à trancher.         
     La dualité dans les modifications de Kamloops fournit des indications claires pour définir l'expression " autrement qu'à titre absolu ". Compte tenu de l'arrêt Leonard , le législateur a voulu inclure les terres qui sont cédées pour être données à bail (ou à d'autres fins n'allant pas jusqu'à la location) dans la définition légale de " réserve ". Par ailleurs, il a voulu en même temps confirmer que les terres cédées pour être vendues (ou à des fins similaires à la vente) continuent d'être exclues de la définition de réserve. C'est donc sans hésitation que je conclus que l'expression " autrement qu'à titre absolu " exclut expressément toutes les terres cédées à des fins de vente, que ce soit avec ou sans conditions.         

                                 [p. 675-676]

[36]      Par suite des modifications de Kamloops, par conséquent, les terres cédées sont demeurées dans la réserve lorsque la cession était analogue à un bail ou à " d'autres formes limitées de cession, comme un droit de passage " (" right of way "), et elles ne faisaient plus partie de la réserve lorsque la cession était analogue à une vente ou à " d'autres formes de cessions permanentes, comme l'échange ou le don ".

[37]      Les modifications de Kamloops ne traitaient que des cessions faites en vertu des articles 37 et 38 de la Loi sur les Indiens ; elles ne traitaient pas des prises de possession obligatoires faites en vertu de l'article 35. Il est étonnant de constater que nulle part dans les débats parlementaires qui nous ont été cités ni dans le long affidavit du chef Jules qui a été déposé par Kamloops pour les fins de son appel, il n'est fait référence à la taxation possible par les bandes indiennes des terres utilisées pour le chemin de fer qui ont été prises par la Couronne et qui sont détenues par les compagnies de chemin de fer5.

[38]      En fait, il ressort clairement que la principale préoccupation des bandes et du gouvernement était de s'assurer que les pouvoirs de gouvernement local des conseils de bandes seraient étendus aux " terres louées ". Dans une publication intitulée Modifications proposées à la Loi sur les Indiens concernant les terres cédées sous condition et les pouvoirs d'imposition des bandes indiennes que le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien a fait parvenir à tous les conseils de bandes en septembre 1987 et qui est jointe à l'affidavit du chef Jules, le ministre explique ce qui suit :

     [...]         
     L'avantage premier de la cession sous condition est clair : elle permet aux Indiens de louer leurs terres sans que celles-ci perdent leur statut de terres indiennes. Cela devrait vouloir dire que les bandes indiennes peuvent exploiter leurs terres dans le cadre d'ententes de location sans céder les titres de propriété sous-jacents s'y rapportant, les pouvoirs de gouvernement local à cet égard, ou leurs droits spéciaux, tous bénéfices inhérents au statut de terres de réserve. Les seuls droits que perdent les bandes sont ceux qui sont essentiels à l'objet et aux conditions de la cession, ainsi qu'aux modalités du bail.         
     Rien de ceci n'est énoncé clairement dans la Loi sur les Indiens. Il n'est donc pas établi avec certitude si et quand les divers articles de la Loi se rapportant aux réserves devraient faire mention des terres cédées sous condition. En effet, les tribunaux ont décrété récemment que les Indiens vivant sur des terres cédées sous condition ne pouvaient pas voter aux élections des bandes, et que l'exemption personnelle d'impôt des Indiens ne s'appliquait pas à ceux qui résident sur les terres cédées.         
     Ironiquement, les terres de réserve qui appartiennent à des particuliers indiens peuvent être louées à bail sans être cédées et conserver leur plein statut de terres de réserve. Ce type de location à bail est communément appelé bail d'un titulaire d'un billet de location, et il existe un nombre important de terres indiennes qui sont louées de cette façon. Afin d'éviter les cessions et les risques qu'elles entraînent en raison des lacunes dans la Loi sur les Indiens, les bandes peuvent être de plus en plus tentées d'assurer la gestion de l'ensemble de leurs activités de location au moyen de baux individuels de titulaires de billets de location. Ceci pourrait entraîner beaucoup de confusion étant donné que des particuliers seraient placés dans une situation fiduciaire compliquée dans leur rapport avec les bandes.         
     QUELLES SONT LES MESURES À PRENDRE ?         
     Les cessions aux fins de location permettent aux Indiens d'utiliser leurs terres à des fins d'exploitation économique, tout en maintenant le statut de terres indiennes de celles-ci, ce qui accroît de façon importante les possibilités économiques des collectivités indiennes établies dans les réserves. Avec le temps, ce type de cession est venu au premier plan, mais les cessions de terres pour vente ou tout autre retrait définitif de ces terres des réserves ont presque disparu.         
     Pour demeurer terres indiennes, dans tous les sens du terme, les terres cédées sous condition doivent être assujetties de façon claire aux dispositions de la Loi sur les Indiens, du fait qu'elles font partie de la réserve. Les conseils de bande doivent être en mesure de les gérer et de les taxer, par la voie de leurs statuts administratifs (articles 81 et 83). Les membres des bandes qui vivent sur ces terres devraient pouvoir voter aux élections (article 77). Les biens culturels des Indiens devraient y être protégés (article 91). L'exemption traditionnelle d'impôts touchant les propriétés des Indiens sur les terres appartenant à des Indiens, qui fait partie des lois canadiennes depuis la Confédération et même avant, devrait s'appliquer (article 87), et ainsi de suite.         
     Sans les dispositions précitées et d'autres dispositions de la Loi sur les Indiens, les terres cédées sous condition demeurent terres indiennes de nom seulement.         
     En outre, les dispositions de la Loi sur les Indiens doivent être appliquées aux terres cédées sous condition pour que celles-ci puissent être effectivement gérées. La gestion des terres indiennes se fait au moyen de statuts administratifs du conseil de bande, pour une large part, ou de règlements fédéraux, étant donné que de tels pouvoirs sont prévus dans la Loi sur les Indiens.         
     C'est pourquoi il est essentiel que la Loi sur les Indiens reconnaisse de façon explicite que les terres cédées sous condition font partie des réserves, et traite de celles-ci de façon détaillée. Cela supprimera la double norme qui rend le fait de louer une terre plus problématique pour une bande que pour un particulier. Et, de façon plus générale, cela permettra que les terres cédées sous condition demeurent des terres de réserve dans toute l'acception du terme.         

    

     *Dans la présente brochure, afin de faciliter la compréhension et à moins d'indications contraires, le terme " cession conditionnelle " est utilisé pour " cession aux fins de location à bail ".         

                                 [Dossier p. 2]

[39]      Il est donc clair et manifeste, à mon avis, que, comme les bandes indiennes ne peuvent pas à toutes fins pratiques " gérer effectivement " les parcelles de terre qui ont été prises et qui sont utilisées par les compagnies de chemin de fer, elles n'ont pas prévu, au moment des modifications de Kamloops en 1988, la possibilité d'exercer au regard de ces terres des pouvoirs de gouvernement local, notamment le pouvoir de taxation, dont il est question aux articles 81 et 83 de la Loi sur les Indiens . En résumé, il est clair et manifeste que les bandes indiennes ne s'attendaient véritablement pas à ce que le nouveau régime fiscal leur permette de taxer les terres du chemin de fer.

[40]      Toutefois, cette conclusion ne règle pas définitivement les appels. Dans l'appel Matsqui, deux des parcelles de terre contestées ont été cédées par la bande et ces cessions doivent être examinées dans le contexte des modifications. En outre, comme l'alinéa 83(1)(a) autorise l'imposition de taxes " sur les immeubles situés dans la réserve, ainsi que sur les droits sur ceux-ci ", la question demeure de savoir si, malgré le fait que tel n'était pas le but des modifications de 1988, les terres du CN peuvent être considérées comme se trouvant " dans la réserve " et par conséquent être assujetties à la taxation.

         B - Les ententes de Matsqui

         a)      Les cessions de Matsqui : les parcelles 1 et 2

[41]      Le CN s'appuie sur l'arrêt Bande indienne de St. Mary's pour soutenir que la cession des parcelles 1 et 2, dans l'appel de Matsqui, sont des cessions à titre absolu.

[42]      Dans l'arrêt Bande indienne de St. Mary's, précité au paragraphe 19, une bande avait cédé à la Couronne fédérale une partie de sa réserve en contrepartie de la pleine valeur marchande du bien-fonds pour qu'il soit utilisé comme aéroport municipal. La Cour a statué que " la nature de la cession " et " le contexte dans lequel elle a été faite " " montrent bien que l'intention véritable [de la bande] était de se départir des terres en cause de façon absolue " (p. 666). Le juge en chef a expliqué dans les termes suivants comment il était parvenu à la conclusion que la bande " avait l'intention de se départir des terres de l'aéroport de façon absolue " :

     Premièrement, la bande a cédé les terres en question pour qu'elles soient vendues. La bande a sérieusement envisagé la possibilité de consentir un bail à long terme, mais elle a finalement préféré demander à la Couronne de vendre à un tiers les terres cédées. Deuxièmement, les appelants ont entamé des négociations, avec la Couronne en sachant parfaitement que les terres en cause seraient vendues afin d'y construire un aéroport pour la ville de Cranbrook. Nous ne parlons pas ici d'une installation ou d'une entreprise ayant une courte durée de vie. Une vente suppose un degré élevé de permanence, et un aéroport requiert une infrastructure complexe et durable. Troisièmement, en contrepartie de la cession, la Couronne a versé aux appelants la pleine valeur marchande des terres (35 880 $). Ce paiement confirme également la permanence de l'arrangement. De fait, compte tenu du régime établi par la Loi sur les Indiens, c'est pratiquement le plus loin où une bande indienne peut aller sans vendre elle-même des terres faisant partie d'une réserve.         

                                     [p. 669]

[43]      L'" intention véritable ", dans l'arrêt Bande indienne de St. Mary's , a donc été révélée par le fait que les terres ont été cédées pour être vendues plutôt que pour être louées, que l'usage pour lequel elles l'ont été était la construction d'un aéroport permanent exigeant une infrastructure complexe et durable et que la Couronne a payé la pleine valeur marchande des terres.

[44]      La preuve de l'" intention véritable " dans cette affaire est décrite de façon plus exhaustive dans les motifs du jugement de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique qui sont publiés à (1995), 126 D.L.R. (4th) 539. S'exprimant au nom de la Cour, le juge Hutcheon a d'abord essayé de [TRADUCTION] " déterminer l'objet de la cession, faire l'historique des négociations et dégager le contexte dans lequel les parties à la cession ont négocié " (p. 544). Il a conclu, d'après le procès-verbal des négociations, que les avantages d'un bail à long terme avaient été discutés et expliqués plus d'une fois et que le conseil de bande avait finalement décidé de vendre le bien-fonds.

[45]      Dans la cession Matsqui, bien qu'il n'y ait pas de preuve qu'une option autre que la vente ait été discutée, " l'intention véritable des parties " était clairement de céder les terres à la Couronne pour les vendre au CN. Les termes utilisés (par exemple, transporte, transfère, cède, renonce [...] à perpétuité, tous et chacun des lots suivants, ces parcelles ou bandes de terres et tènements, situés et se trouvant dans la [...] réserve " et " l'aliénation desdites terres ") dans la cession, ainsi que les termes " la vente et l'aliénation des terres ", " l'achat à titre absolu pour le prix de [...] les terres et tènements [...] ", nous " cédons, vendons, aliénons et transférons [...] à perpétuité " et " composé de tous les droits ", dans les lettres patentes, le prix versé, le caractère durable du chemin de fer pour la construction duquel la cession a été consentie, font manifestement foi d'une intention de se départir des terres utilisées pour le chemin de fer de façon absolue.

[46]      Il est vrai que ce qui avait été demandé au nom du CN était [TRADUCTION] " un droit de passage à travers la réserve ", que les terres prises étaient décrites dans la cession comme [TRADUCTION] " étant composées du droit de passage du [CN] à travers [...] la réserve " et que l'expression " droit de passage " n'était pas expressément définie et pouvait techniquement faire référence à une servitude plutôt qu'à une vente. Pourtant, à mon avis, l'expression " droit de passage ", dans le contexte dans lequel elle a été utilisée, décrit simplement les terres prises et ne qualifie pas le droit consenti sur les terres qui ont été cédées. Autrement dit, l'expression a été utilisée pour définir précisément quelles terres étaient prises ; elle n'a pas été utilisée pour décrire à quel droit la bande consentait à renoncer sur cette terre. Finalement, l'expression a été utilisée dans tous les documents dans le contexte d'une vente ferme.

[47]      L'effet de la cession a été, à toutes fins pratiques, de couper la réserve en deux, créant ainsi toutes sortes d'inconvénients pour les membres de la bande. Mais ces inconvénients étaient bien connus du conseil de bande, qui était au courant que les immeubles cédés seraient clôturés et qui avait, dans une résolution datée du 7 novembre 1910 (D.A., vol. 2, p. 260), approuvé la vente à la condition que [TRADUCTION] " la compagnie [...] installe trois passages à niveau avec les barrages nécessaires à l'endroit qui nous conviendra le mieux ".

[48]      Le fait que la couronne ait eu recours à l'article 35 de la Loi sur les Indiens (" les terres prises pour cause d'utilité publique ") plutôt qu'à l'article 28 (" possession de terres dans la réserve " au moyen de la délivrance d'un permis d'occuper ou d'utiliser) appuie également la conclusion que ce qui était envisagé par la Couronne, par la bande et par le CN participait davantage de la nature d'une vente que de la nature d'une servitude. La décision récente de la Cour suprême du Canada dans Bande indienne des Opetchesaht (précité au paragraphe 25) fournit une analyse utile des différents buts poursuivis par les articles 35 et 28.

[49]      Dans cette affaire, on contestait un permis délivré en vertu de l'article 28 qui accordait à B.C. Hydro :

     [...] le droit de construire, d'exploiter et d'entretenir une ligne de transmission d'énergie électrique sur les terres visées [...]         

                                     [p. 128]

     Le permis accordait à Hydro [TRADUCTION] " le droit de construire, d'exploiter et d'entretenir une ligne de transmission d'énergie électrique ", le droit exclusif d'occuper les parties de la surface de la réserve où des pylônes étaient érigés ainsi que la partie de l'espace aérien où les fils étaient tendus. La Bande conservait le droit d'utiliser et d'occuper le reste de la superficie visée par le " droit de passage ", sous réserve de certaines restrictions touchant l'érection, l'exploitation, l'entretien et l'inspection des structures installées par Hydro. Hydro était autorisée à utiliser les terres pour construire, exploiter, entretenir et inspecter la ligne de transmission d'énergie électrique. Le droit de passage conféré par le permis était valide [TRADUCTION] " pendant la période où le droit de passage [était] requis pour les fins de la ligne de transmission d'énergie électrique ". Les droits conférés par le permis ne pouvaient pas être cédés sans le consentement écrit de la Couronne.         

     [...]                              [p. 129-30]

[50]      Dans un jugement majoritaire, la Cour a statué que les droits concédés étaient analogues à une servitude, ce qui n'est pas surprenant étant donné que les droits de B.C. Hydro sur les terres n'étaient manifestement " pas exclusifs " et que la " seule restriction imposée à la bande dans l'utilisation des terres visées [était] qu'elle ne [pouvait] y ériger de constructions ou entraver l'usage de la servitude de l'intimé Hydro " (p. 134), et elle a donc décidé qu'une telle servitude était visée par l'article 28 de la Loi sur les Indiens . Dans ses motifs dissidents, Mme le juge McLachlin exprime l'opinion suivante :

     [...] un intérêt dans les terres de la bande, tel celui dont il est question en l'espèce, qui est susceptible d'exister à perpétuité, ne peut être enlevé à la bande que par la procédure formelle d'expropriation prévue à l'art. 35 ou par voie de cession et d'aliénation accomplies avec le consentement de l'ensemble des membres de la bande en vertu de l'art. 37 de la Loi sur les Indiens.         

                                     [p. 148-49]

Plus loin, à la page 159, elle ajoute ce qui suit :

     Le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien a reconnu que l'application de l'art. 28 devait être limitée aux utilisations temporaires des terres indiennes. Dans son Guide de la gestion foncière et des procédures (1990), le ministère indique qu'une expropriation faite en conformité avec l'art. 35 est le moyen approprié de réaliser des ouvrages comme " [l]es grandes artères de circulation, les chemins de fer et les installations pour la transmission à distance de combustible et d'électricité " étant donné que, [TRADUCTION] " dans le cas de telles utilisations, l'organisme expropriant doit obtenir le droit exclusif d'utiliser et d'occuper des terres de la réserve " (p. 5 (le second passage correspond à une phrase du texte anglais du Guide qui n'a pas été rendue dans sa version française)). On y reconnaît ensuite que l'art. 28 a été utilisé à tort dans le passé pour l'aménagement de structures permanentes (à la p. 5) :         
         Dans le passé, on a eu recours au paragraphe 28(2) pour accorder des droits de passage aux divers services d'utilité publique traversant des réserves pour rejoindre des terres non indiennes. Vu que des installations ou améliorations permanentes comme des routes, des pipelines, des lignes électriques et de téléphone et des ouvrages de support sont alors fixées à demeure sur des terres de réserve, la formule qui convient dans les circonstances n'est pas l'octroi d'un permis, sauf si le service d'utilité publique est destiné uniquement à la réserve et qu'il n'exige pas l'usage exclusif des terres visées. [Souligné dans l'original.]                 

[51]      La décision dans l'arrêt Bande indienne des Opetchesaht illustre clairement, à mon avis, les statuts différents qui doivent être reconnus en droit aux " droits de passage " qui exigent le droit exclusif d'utiliser et d'occuper les terres des réserves, par exemple pour les chemins de fer, et les " droits de passage " où l'usage exclusif des terres n'est pas exigé, par exemple pour les services d'utilité publique. En l'espèce, le droit de passage appartient manifestement à la première catégorie.

[52]      Je suis donc convaincu que la bande de Matsqui, en cédant la parcelle 1 comprenait pleinement qu'elle ne pourrait plus utiliser et occuper cette partie de sa réserve.

[53]      J'en viens à la même conclusion pour ce qui a trait à la cession de la parcelle 2, qui est un complément mineur à la cession de la parcelle 1 et qui a été cédée dans les mêmes circonstances.

         b)      Les prises de possession obligatoires des terres de Matsqui : les parcelles 3, 4 et 5

[54]      Il y a peu à dire au sujet de ces trois parcelles. Ce sont des adjonctions de dimensions relativement réduites (à peu près 5,203 acres) aux 20 acres cédés par la bande quelque cinquante ans auparavant. Même si les terres ont été obligatoirement prises plutôt que cédées, il ne fait pas de doute, si l'on examine les textes d'origine législative et la preuve documentaire, que toutes les parties comprenaient que le résultat final serait le même que s'il s'était agi d'une cession.

[55]      La seule différence qui présente un certain intérêt est l'inclusion dans les trois lettres patentes d'une clause en vertu de laquelle la Couronne a soustrait de la cession au CN toutes les mines et tous les minéraux pouvant exister ou être découverts " à la surface ou dans le sous-sol de ces terres ". Cette clause, à mon avis, est une preuve additionnelle que le CN a obtenu à titre absolu la propriété des droits de superficie et que les terres ne peuvent plus être utilisées et occupées par la bande.

         C - Les ententes de Kamloops : les parcelles 1 à 7

[56]      La bande a clairement cédé tous les droits qu'elle avait sur les parcelles 1 à 7. Les textes d'origine législative, lus de concert avec la preuve documentaire, ne peuvent que mener à la conclusion ferme que la Couronne avait l'intention et que la bande a compris que les terres allaient être vendues au CN et que la bande ne pourrait plus avoir l'usage des terres ainsi prises à leur profit.

[57]      Je suis particulièrement impressionné par les longues négociations qui ont précédé chacune des prises de possession, par l'insistance remarquable qui a chaque fois permis à la bande d'obtenir le prix le plus élevé possible en contrepartie des terres cédées, par le montant de l'indemnité qui a été versé et qui indique clairement qu'il s'agissait d'une vente ferme, et par la connaissance qu'avait la bande de l'effet des prises de possession au niveau des inconvénients et de la dissociation physique et, finalement, par la conscience qu'elle avait du caractère absolu de ces ententes qui est attesté, notamment, par le refus qu'a opposé à un moment donné le CN à qui on proposait un simple permis de droit de passage et par la demande de la bande, dans la toute dernière prise de possession qui a eu lieu aussi récemment qu'en 1983, d'avoir accès à ce qu'elle appelait les terres du CN.

[58]      Je fais référence en particulier aux documents suivants :

[59]      - Concernant la parcelle 6, la lettre envoyée au CN par l'agent local des Indiens le 2 mai 1947 :

     [TRADUCTION]         
     Vous indiquez dans votre lettre que mon prédécesseur a mentionné un prix de 100 $ l'acre ; je ne sais pas comment l'agent indien Taylor est arrivé à ce taux étant donné que les terres sur lesquelles votre chemin de fer passe étaient il n'y a pas si longtemps irriguées. Dans le district de Kamloops, les terres qui peuvent être irriguées commandent un très haut prix et les Indiens ont le privilège d'établir le prix des terres sur leur propre réserve, et en ma qualité d'agent agissant pour leur compte, je n'ai d'autre choix que de vous mentionner l'offre faite par la bande.         
     [...]                          [D.A., vol. 3, p. 331]         

[60]      - Concernant la parcelle 2, la lettre envoyée au secrétaire des Affaires indiennes par l'agent local des Indiens le 25 février 1926 :

     [TRADUCTION]         
     Les chemins de fer nationaux du Canada m'ont fait savoir par écrit, le 5 janvier 1926, qu'ils sont disposés à régler avec les Indiens sur la base de 25 $ l'acre. Les membres de la bande de Kamloops n'accepteront absolument pas ce prix. Personnellement, je suis d'avis que 125 $ l'acre est un prix un peu élevé, étant donné que, moi-même, j'évaluerais le prix dans les environs de 60 $ à 75 $ l'acre. Toutefois, si la compagnie de chemins de fer a payé antérieurement 125 $ l'acre pour des terres situées dans la même localité, je ne vois pas comment les terres peuvent avoir perdu de la valeur depuis que le droit de passage a été acheté, aux environs de 1910 ou de 1911.         
     [...]                          [D.A., vol. 2, p. 215]         

et la lettre datée du 5 mars 1926 qui a été envoyée au CN par le sous-ministre et secrétaire des Affaires indiennes :

     [TRADUCTION]         
     Si vous souhaitez faire l'acquisition de cette terre, je vous prie d'en faire la demande officielle au ministère, et de l'accompagner d'un plan certifié, sur toile d'architecte, ainsi que du paiement de la terre au prix de 125 $ l'acre.         
     [...]                          [D.A., vol. 2, p. 217]         

[61]      - Concernant la parcelle 6, la lettre datée du 12 août 1947, par le surintendant des réserves et fiducies des Affaires indiennes au commissaire indien de la Colombie-Britannique :

     [TRADUCTION]         
     [...] Le lot de 3,16 acres est apparemment destiné à la construction d'une route et non d'un chemin de fer. La compagnie a demandé des lettres patentes lui concédant le terrain. Si ces lettres patentes étaient délivrées, les parcelles nord et sud de la réserve seraient séparées par les terres ainsi aliénées.         
     Estimez-vous approprié d'essayer de persuader la compagnie d'accepter un permis pour l'utilisation des terres tant et aussi longtemps qu'elle en aura besoin pour une route d'accès. La présente offre est fixée à 500 $ l'acre (ce qui fait une somme totale de 1 580 $) pour une acquisition définitive.         
     [...]                          [D.A., vol. 3, p. 337]         

et la réponse du commissaire aux Affaires indiennes le 20 septembre 1947 :

     [TRADUCTION]         
     [...] À mon avis, le prix de 500 $ l'acre que la compagnie semble disposée à payer pour les terres qu'elle demande est très généreux, même si l'on tient compte de la question de la dissociation, qui existe depuis que le droit de passage a été utilisé pour la première fois par le requérant. Dans les circonstances, je n'estime pas approprié d'essayer de persuader la compagnie d'accepter uniquement un permis pour l'utilisation des terres tant et aussi longtemps qu'elle en aura besoin.         
     [...]                          [D.A., vol. 3, p. 338-39]         

[62]      - Concernant la parcelle 7, ou parmi les [TRADUCTION] " conditions qui ont été négociées entre la bande indienne de Kamloops et le CN " décrites dans la lettre qui a été envoyée par le CN au ministre le 26 novembre 1982, on trouve ce qui suit :

     [TRADUCTION]         
     3.      Le CN accordera aux membres de la bande indienne de Kamloops un droit de préemption pour la coupe, l'enlèvement et la vente, à leur propre profit, de bois en grumes à New Kamloops Junction [...]         
     4.      Le CN donnera aux membres de la bande, à leurs préposés, mandataires, invités et concessionnaires, un accès par les terres du CN à Kamloops [...]         
     5.      Le CN conservera et agrandira les deux passages à bétail inférieurs qui traversent les terres actuelles du CN et qui sont adjacentes à New Kamloops Junction [...]         
     6.      Le CN reconnaît que les membres de la bande souhaitent obtenir l'accès ou la propriété des terres longeant le fleuve Fraser entre Lytton et Yale, dans la province de Colombie-Britannique, aux fins d'y établir des entreprises de pêche. Le CN accepte de collaborer avec la bande pour évaluer la faisabilité d'utiliser les terres qui appartiennent au CN dans cette région, à des fins de pêche sur le fleuve Fraser. Sans s'imposer d'obligation légale, le CN accepte d'examiner favorablement une demande présentée par la bande pour avoir accès au fleuve Fraser en passant par les terres du CN, ou la vente des terres du CN comme site de pêche le long du fleuve Fraser, aux conditions dont le CN et la bande conviendront mutuellement.         
     [...]                          [D.A., vol. 3, p. 358-61]         

[63]      - Concernant la parcelle 1, une lettre interne de l'agent des droits de passage du CNCP en date du 25 mars 1913 :

     [TRADUCTION]         
     Que la compagnie accepte d'installer des passages à niveau pour les Indiens là où ceux-ci sont raisonnables et nécessaires, et également d'entretenir des fossés de drainage qui sont utilisés sur les terres que la compagnie a achetées. Il va sans dire que la compagnie a l'obligation de clôturer son droit de passage des deux côtés.         
     [...]                          [D.A., vol. 2, p. 191]         

[64]      Le seul argument troublant de la bande réside dans l'usage abondant, particulièrement pour ce qui a trait à la parcelle 1, qui a été fait des termes " droit de passage sur la réserve " qui laissent entendre, à son avis, que la bande n'a jamais accepté de se départir des terres, à l'exception de consentir une servitude.

[65]      Toutefois, cet argument ne peut être maintenu pour les raisons que j'ai déjà exprimées au sujet de l'appel Matsqui, ni résister à un examen minutieux de ce qui s'est réellement dit et de ce qui a réellement été fait.

III - Conclusion

[66]      J'en viens donc à la conclusion que la bande de Matsqui autant que la bande de Kamloops savait, comprenait et a accepté qu'elle n'aurait plus " l'usage ou le profit " des terres cédées ou qui leur ont été prises pour la construction du chemin de fer, que ces terres ne faisaient plus partie de leur réserve, qu'à toutes fins pratiques elles ne pouvaient plus effectivement exercer leurs pouvoirs de gouvernement local sur ces terres ni prendre des règlements administratifs, y compris des règlements de taxation, au sujet de ces terres.

[67]      Étant arrivé à la conclusion, comme l'a fait le juge des requêtes, que les avis d'évaluation des immeubles taxant les compagnies de chemin de fer au sujet des terres contestées devraient être annulés étant donné qu'ils outrepassent les pouvoirs de taxation des bandes, je n'ai pas à discuter de la conclusion subsidiaire à laquelle il est parvenu selon laquelle les bandes en taxant le CN comme elles l'ont fait, se sont rendues coupables de discrimination.

[68]      Je suis d'avis de rejeter les deux appels en accordant une seule série de dépens.

     " Robert Décary "

     Juge

" Je souscris à ces motifs,

     A.J. Stone, juge"

" Je souscris à ces motifs,

     Pierre Denault, juge "

Traduction certifiée conforme

Laurier Parenteau, LL.L.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     DIVISION D'APPEL

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

NE DE DOSSIER : A-404-96

APPEL D'UN JUGEMENT DE LA SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE DE LA COUR FÉDÉRALE DU CANADA PRONONCÉ LE 15 AVRIL 1996 DANS LE DOSSIER T-1638-93.

INTITULÉ DE LA CAUSE :          Bande indienne de Kamloops et al. c. CN et al.

LIEU DE L'AUDIENCE :              VANCOUVER (C.-B.)

DATE DE L'AUDIENCE :              les 26, 27 et 28 mai 1998

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :          le juge Décary

SOUSCRIVENT À CES MOTIFS :      le juge Stone

                         le juge Denault

ONT COMPARU :

Leslie Pinder                          POUR L'APPELANTE

Ann Gilmour

Patrick G. Foy                      POUR L'INTIMÉ

J.E. Gouge                          POUR L'INTERVENANTE

M.P. Grace                          (Canadien Pacifique Ltée)

Art Grant                          POUR L'INTERVENANTE

                             (Bande indienne de Little Shuswap)

W.H. Scott Macfarlane                  POUR L'INTERVENANTE ((A T & T)

Leslie Pinder                          POUR L'INTERVENANTE

Ann Gilmour                          (Commission consultative de la fiscalité indienne)

     .../2


     Page 2

     Dossier : A-404-96

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

Mandell Pinder                      POUR L'APPELANTE

Vancouver (C.-B.)

Ladner Downs                      POUR L'INTIMÉ

Vancouver (C.-B.)

Lawson Lundell Lawson & McIntosh          POUR L'INTERVENANTE

Vancouver (C.-B.)                      (Canadien Pacifique Ltée)

Grant Kovacs Norell                      POUR L'INTERVENANTE

Vancouver (C.-B.)                      (La bande indienne de Little Shuswap)

Lawson Lundell Lawson & McIntosh          POUR L'INTERVENANTE ( A T & T)

Vancouver (C.-B.)

Mandell Pinder                      POUR L'INTERVENANTE

Vancouver (C.-B.)                      (Commission consultative de la fiscalité indienne)

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     DIVISION D'APPEL

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

NE DE DOSSIER : A-391-96

APPEL D'UN JUGEMENT DE LA SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE DE LA COUR FÉDÉRALE DU CANADA PRONONCÉ LE 15 AVRIL 1996 DANS LE DOSSIER T-1638-93.

INTITULÉ DE LA CAUSE :          Bande indienne de Matsqui et al. c. CN et al.

LIEU DE L'AUDIENCE :              VANCOUVER (C.-B.)

DATE DE L'AUDIENCE :              les 26, 27 et 28 mai 1998

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :          le juge Décary

SOUSCRIVENT À CES MOTIFS :      le juge Stone

                         le juge Denault

ONT COMPARU :

Arthur Pape                          POUR L'APPELANTE

Patrick G. Foy                      POUR L'INTIMÉ

J.E. Gouge                          POUR L'INTERVENANTE

M.P. Grace                          (Canadien Pacifique Ltée)

Art Grant                          POUR L'INTERVENANTE

                             (Bande indienne de Little Shuswap)

W.H. Scott Macfarlane                  POUR L'INTERVENANTE ((A T & T)

Leslie Pinder                          POUR L'INTERVENANTE

Ann Gilmour                          (Commission consultative de la fiscalité indienne)

     .../2


     Page 2

     Dossier : A-391-96

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

Pape & Salter                      POUR L'APPELANTE

Vancouver (C.-B.)

Ladner Downs                      POUR L'INTIMÉ

Vancouver (C.-B.)

Lawson Lundell Lawson & McIntosh          POUR L'INTERVENANTE

Vancouver (C.-B.)                      (Canadien Pacifique Ltée)

Grant Kovacs Norell                      POUR L'INTERVENANTE

Vancouver (C.-B.)                      (La bande indienne de Little Shuswap)

Lawson Lundell Lawson & McIntosh          POUR L'INTERVENANTE ( A T & T)

Vancouver (C.-B.)

Mandell Pinder                      POUR L'INTERVENANTE

Vancouver (C.-B.)                      (Commission consultative de la fiscalité indienne)
__________________

1      Canadien Pacifique Limitée et Unitel Communications Inc. c. La bande indienne de Matsqui et le conseil de la bande indienne de Matsqui (T-639-92, A-389-96), [1996] 3 C.F. 373 (C.F. 1re inst.) ;
     La Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada c. La bande indienne de Kamloops et le conseil de la bande indienne de Kamloops (T-1638-93, A-404-96) ;
     Canadien Pacifique Limitée c. La bande indienne de Boothroyd et le conseil de la bande indienne de Boothroyd (T-2780-93, A-403-96) ;
     Canadien Pacifique Limitée c. La bande indienne de l'île Seabird et le conseil de la bande indienne de l'île Seabird (T-2790-93, A-386-96) ;
     Esquimalt and Nanaimo Railway Company c. La bande indienne de Nanaimo et le conseil de la bande indienne de Nanaimo (T-2986-93, A-390-96) ;
     La Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada c. La bande indienne de Matsqui et le conseil de la bande indienne de Matsqui ( T-269-95, A-391-96).

2      Parcelle 1 : 13,91 acres, cession nE R12154, le 5 janvier 1911 ; arrêté en conseil OCPC 1911-126, le 24 janvier 1911 ; lettres patentes nE 16236, le 13 février 1911 ; certificat de titre incontestable nE 5783E, le 28 octobre 1913. Prix versé : 2 428 $.
     Parcelle 2 : 0,09 acre, cession nE H38287, le 8 juin 1911 ; arrêté en conseil OCPC 1911-1489, le 5 juillet 1911 ; lettres patentes nE 16403, le 12 octobre 1911 ; certificat de titre incontestable nE 5785E, le 28 octobre 1913. Prix versé : 68 $.

3      Parcelle 3 : 2,83 acres, arrêté en conseil 1963-589, le 12 avril 1963 ; lettres patentes nE 172278, le 30 mai 1963 et certificat de titre incontestable nE 518366E, le 3 juillet 1963. Prix versé : 715 $.
     Parcelle 4 : 0,083 acre, arrêté en conseil OCPC 1973-2738, le 18 septembre 1973 ; lettres patentes nE X20272, le 23 novembre 1973, et certificat de titre incontestable nE K8881E, le 11 février 1974. Prix versé : 500 $.
     Parcelle 5 : 2,29 acres, arrêté en conseil OCPC 1978-2473, le 9 août 1978 ; lettres patentes nE 78791, le 8 septembre 1981, et certificat de titre incontestable nE T121238E, le 22 décembre 1981. Prix versé : 9 701,18 $.

4      Parcelle 1 : 160,83 acres ; arrêté en conseil OCPC 1912-3259, le 21 novembre 1912 ; lettres patentes nE 22790, le 5 novembre 1935 ; certificat de titre incontestable nE 176600F, le 13 octobre 1955. Prix versé : 17 636,25 $.
     Parcelle 2 : 10,29 acres ; arrêté en conseil OCPC 1933-211, le 6 février 1933 ; lettres patentes nE 22483, le 1er mars 1933 ; certificat de titre incontestable nE 176600F, le 13 octobre 1955. Prix versé : 1 142,50 $.
     Parcelle 3 : 3,93 acres ; arrêté en conseil OCPC 1927-750, le 27 avril 1927 ; lettres patentes nE 20949, le 23 juin 1927 ; certificat de titre incontestable nE 176597F, le 7 octobre 1955. Prix versé : 494,25 $.
     Parcelle 4 : 6,89 acres ; arrêté en conseil OCPC 1929-662, le 16 avril 1929 ; lettres patentes nE 21633, le 20 mai 1929 ; certificat de titre incontestable nE 176600F, le 13 octobre 1955. Prix versé : 861,25 $.
     Parcelle 5 : 1,29 acre ; arrêté en conseil OCPC 1936-1358, le 6 juin 1936 ; lettres patentes nE 22861, le 10 septembre 1936 ; certificat de titre incontestable nE 176600F, le 13 octobre 1955. Prix versé : 150 $.
     Parcelle 6 : 3,16 acres ; arrêté en conseil OCPC 1948-297, le 30 janvier 1948 ; lettres patentes nE 24138, le 6 avril 1948 ; certificat de titre incontestable nE 126263F, le 20 mai 1948. Prix versé : 1 580 $.
     Parcelle 7 : 164,64 acres ; arrêté en conseil OCPC 1984-515, le 16 février 1984 ; lettres patentes nE 94594, le 29 mars 1984 ; certificat de titre incontestable nE W26841F, le 23 mai 1984. Prix versé : 4 219 600 $.

5      Je note pour les fins du dossier que le chef Jules, en tant que chef de la bande de Kamloops, a mené au nom des bandes indiennes les négociations et les consultations qui ont abouti aux modifications de Kamloops.

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