Décisions de la Cour d'appel fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20011017

Dossier : A-139-00

Référence neutre: 2001 CAF 264

CORAM :       LE JUGE DESJARDINS

LE JUGE DÉCARY

LE JUGE NOËL

ENTRE :

COMMISSION SCOLAIRE DES CHÊNES

                                                                                                                                                      Appelante

                                                                                   et

                                                            SA MAJESTÉ LA REINE

                                                                                                                                                          Intimée

                                  Audience tenue à Montréal (Québec), le 12 septembre 2001

                                     Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 17 octobre 2001.

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :                                                                                    LE JUGE NOËL

Y ONT SOUSCRIT :                                                                                          LE JUGE DESJARDINS

                                                                                                                                       LE JUGE DÉCARY


Date : 20011017

Dossier : A-139-00

Référence neutre : 2001 CAF 264

CORAM :       LE JUGE DESJARDINS

LE JUGE DÉCARY

LE JUGE NOËL

ENTRE :

                                            COMMISSION SCOLAIRE DES CHÊNES

                                                                                                                                                      Appelante

                                                                                   et

                                                            SA MAJESTÉ LA REINE

                                                                                                                                                          Intimée

                                                           MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE NOËL

[1]                 Il s'agit d'un appel à l'encontre de la décision de Madame la juge Lamarre Proulx (répertoriée à [2000] A.C.I. n ° 71 (Q.L.)) par laquelle elle confirma un avis de cotisation émis par le Ministre du Revenu national (le "Ministre") en vertu de la partie IX de la Loi sur la taxe d'accise, L.R.C. 1985, c. E-15 (la "Loi") pour la période du 1er mai 1992 au 31 mai 1996. Par cet avis de cotisation, le Ministre refusa les crédits de taxe sur les intrants ("CTI") réclamés par l'appelante pour la taxe sur les produits et services ("TPS") payés relativement à ses activités de transport scolaire.


Les faits

[2]                 Les faits pertinents sont étayés dans l'entente sur les faits déposée devant la juge Lamarre Proulx et reproduite dans ses motifs. En résumé, l'appelante comme nombre d'autres commissions scolaires organise le transport scolaire de ses élèves par le biais de contrats négociés avec des transporteurs indépendants. Les fonds servant à payer la considération prévue aux contrats de transports proviennent d'une subvention versée à l'appelante par le Ministre des Transports du Québec, les élèves ne payant aucune contrepartie pour le service régulier.

[3]                 Cette subvention est octroyée sous autorité législative suivant des "Règles budgétaires des transports concernant le transport des élèves" (les "Règles budgétaires") qui prévoient que le Ministre des Transports fixe une enveloppe budgétaire pour une période de trois ans. Les enveloppes budgétaires sont communiquées à l'appelante qui signe alors des contrats avec les transporteurs scolaires.

[4]                 Tout surplus ou déficit éventuel résultant de la différence entre le montant de la subvention et celui de la considération prévue au contrat de transport est conservé ou assumé, selon le cas, par l'appelante sauf pour la période qui précède l'exercice 1994-1995 pendant laquelle les surplus devaient être partagés avec le Ministre des Transports selon une formule préétablie. Dans la mesure où un surplus est réalisé, l'appelante est libre d'affecter le montant à d'autres postes budgétaires.


[5]                 L'appelante a versé la TPS exigible en vertu de la Loi à même les paiements effectués aux compagnies de transport scolaire. Depuis le 1er juillet 1992, elle a réclamé et reçu, en tant qu'organisme public, le remboursement partiel de la TPS qu'elle a payée aux transporteurs indépendants. Dans sa déclaration de TPS pour la période se terminant le 31 mai 1996, l'appelante a réclamé des CTI de 505 273, 42 $ représentant la différence entre la TPS payée aux transporteurs depuis le 1er juillet 1992 et les montants qui lui furent remboursés en tant qu'organisme public en vertu de l'article 259 de la Loi.

[6]                 Le Ministre a refusé de verser les CTI additionnels réclamés par l'appelante au motif que c'est l'appelante qui fournit le service de transport scolaire et que ce sont ses élèves qui en sont les acquéreurs, au sens de l'article 123, qualifiant ainsi la fourniture de ce service de "fourniture exonérée" en vertu de l'article 5 de la partie III de l'annexe V de la Loi.

[7]                 Ces dispositions se lisent comme suit :

Loi sur la taxe d'accise

123(1) "acquéreur"

a)    Personne qui est tenue, aux termes d'une convention portant sur une fourniture, de payer la contrepartie de la fourniture;

b)    personne qui est tenue, autrement qu'aux termes d'une convention portant sur une fourniture, de payer la contrepartie de la fourniture;

123(1) "recipient" of a supply of property or a service means

(a) where consideration for the supply is payable under an agreement for the supply, the person who is liable under the agreement to pay that consideration,

(b) where paragraph (a) does not apply and consideration is payable for the supply, the person who is liable to pay that consideration, and


c)    si nulle contrepartie n'est payable pour une fourniture:

(i) personne à qui un bien, fourni par vente, est livré ou mis à sa disposition,

(ii) personne à qui la possession ou l'utilisation d'un bien, fourni autrement que par vente, est transférée ou à la disposition de qui le bien est mis,

(iii) personne à qui un service est rendu

Par ailleurs, la mention d'une personne au profit de laquelle une fourniture est effectuée vaut mention de l'acquéreur de la fourniture.

(c) where no consideration is payable for the supply,

(i) in the case of a supply of property by way of sale, the person to whom the property is delivered or made available,

(ii) in the case of a supply of property otherwise than by way of sale, the person to whom made available, and

(iii) in the case of a supply of a service, the person to whom the service is rendered, and any reference to a person to whom a supply is made shall be read as a reference to the recipient of the supply.

123(1) "Fourniture exonérée". - Fourniture figurant à l'annexe V.

123(1) "Exempt supply" means a supply included in Schedule V.

Annexe V.                                                                     Schedule V.

5. La fourniture, effectuée par une administration scolaire au profit d'un élève du primaire ou du secondaire, d'un service consistant à assurer le transport de l'élève entre un point donné et une école administrée par une administration scolaire.

5. A supply made by a school authority to elementary or secondary school students of a service of transporting the students to or from a school that is operated by a school authority.

(Mon souligné.)

[8]                 Il convient aussi de reproduire les définitions suivantes :

123(1) "Contrepartie" Est assimilé à une contrepartie tout montant qui, par effet de la loi, est payable pour une fourniture.

123(1) "Consideration" includes any amount that is payable for a supply by operation of law;

123(1) "Fourniture taxable" fourniture effectuée dans le cadre d'une activité commerciale.

123(1) "Taxable supply" means a supply that is made in the course of a commercial activity;

123(1) "Activité commerciale" constitue des activités commerciales exercées par une personne :

a) l'exploitation d'une entreprise (à l'exception d'une entreprise exploitée sans attente raisonnable de profit par un particulier, une fiducie personnelle ou une société de personnes dont l'ensemble des associés sont des particuliers), sauf dans la mesure ou l'entreprise comporte la réalisation par la personne de fournitures exonérées;

b) les projets à risque et les affaires de caractère commercial (à l'exception de quelque projet ou affaire qu'entreprend, sans attente raisonnable de profit, un particulier, une fiducie personnelle ou une société de personnes dont l'ensemble des associés sont des particuliers), sauf dans la mesure ou le projet ou l'affaire comporte la réalisation par la personne de fournitures exonérées;

123 (1) "Commercial activity" of a person means

(a) a business carried on by the person (other than a business carried on without a reasonable expectation of profit by an individual, a personal trust or a partnership, all of the members of which are individuals), except to the extent to which the business involves the making of exempt supplies by the person,

(b) an adventure or concern of the person in the nature of trade (other than an adventure or concern engaged in without a reasonable expectation of profit by an individual, a personal trust or a partnership, all of the members of which are individuals), except to the extent to which the adventure or concern involves the making of exempt supplies by the person, and

(Mon souligné.)


La décision sous appel

[9]                 La juge de la Cour canadienne de l'impôt a conclu que la subvention versée à l'appelante pour le transport des élèves ne constitue pas la contrepartie de ce service car il n'y a pas de lien direct entre le paiement de la subvention et la fourniture du service de transport. Par conséquent, les élèves sont les acquéreurs du service au sens du paragraphe 123(1) de la Loi puisqu'ils sont ceux à qui le service est rendu et qu'aucune contrepartie n'est payable pour la fourniture du service.

[10]            L'essentiel des motifs du jugement sous appel se retrouve au paragraphe 32 :

La contrepartie de la fourniture de service est le prix que le client s'est obligé de payer. (En cela on revient à ce qui est exprimé dans le Vat Monitor ci-avant cité). La preuve n'a pas révélé que la subvention fournie par le ministère de l'Éducation était liée au prix du service du transport. Au contraire, la preuve a révélé que le Ministère n'avait aucune obligation quant au coût réel du service du transport des élèves, que les commissions scolaires conservaient une grande latitude quant à l'usage des fonds attribués pour ce transport et qu'il n'y avait aucun lien entre le paiement de la subvention et le coût réel du service. La subvention est de la nature d'une assistance financière mise à la disposition de la commission scolaire pour lui permettre d'accomplir la prestation d'une de ses tâches, soit le service de transport des élèves. Elle n'est pas de la nature d'un paiement pour le prix d'un service. Aucune contrepartie n'est donc payée pour ce service. L'acquéreur de la fourniture du service est donc l'étudiant du primaire ou du secondaire au profit duquel le service est rendu tel que décrit à l'article 5 de la Partie III de l'Annexe V de la Loi.

[11]            Il est acquis de part et d'autre que dans la mesure où la subvention ne constitue pas une contrepartie au sens de la Loi, ce sont les élèves qui sont les acquéreurs du service de transport en vertu du sous-alinéa 123(1)c)(iii) et cette fourniture est donc exonérée en vertu de l'article 5 de l'annexe V de la Loi. Puisqu'une fourniture exonérée est exclue de la définition d'activité commerciale et que seule une fourniture effectuée dans le cadre d'une activité commerciale peut donner droit à un CTI, l'appelante n'aurait pas droit aux CTI réclamés.


[12]            Par contre, dans la mesure où la subvention constitue une contrepartie, c'est le Ministre des Transports qui est l'acquéreur du service de transport au sens de l'alinéa 123(1)b), de sorte que la fourniture de ce service s'inscrit dans les activités commerciales de l'appelante, et elle a droit aux CTI. Incidemment, hormis l'exclusion visant les fournitures exonérées sur laquelle elle se fonde, l'intimée n'a pas mis en question le fait que la fourniture du service de transport par l'appelante puisse s'inscrire dans le cadre de ses activités commerciales.

[13]            La question en litige se limite donc à savoir si la première juge pouvait conclure que la subvention n'était pas une contrepartie au sens de la Loi.

Position des parties

[14]            Selon l'appelante, la preuve révèle que le Ministre des Transports avait l'obligation de verser la subvention et qu'elle devait, en retour, fournir le service de transport scolaire. À la lumière de cette preuve, la première juge ne pouvait faire autrement que de conclure à l'existence d'une contrepartie et elle a eu tort d'exiger un lien direct entre le coût réel du transport scolaire et le montant de la subvention. Cette exigence n'apparaît nulle part dans la Loi.


[15]            L'intimée pour sa part souligne le fait que les services offerts dans l'intérêt public, comme ceux ici en cause, ne sont généralement pas jumelés à une contrepartie. En l'occurrence, le Ministre des Transports n'a rien reçu en retour de la subvention et n'en tire aucun avantage. Au surplus, la subvention peut servir à des fins autres que le transport scolaire. L'intimée soutient que la première juge s'est bien dirigée en droit lorsqu'elle a conclu que la subvention ne constitue pas une contrepartie au sens de la Loi.

Analyse et décision

[16]            Avant d'aborder l'analyse comme telle, deux remarques s'imposent. Tout d'abord, la preuve devant la Cour canadienne de l'impôt a révélé que le financement du transport scolaire a été transféré du ministère des Transports au ministère de l'Éducation à un moment qui n'a pas été précisé (notes sténographiques, volume IV, page 59). La première juge en a déduit, comme en fait foi le paragraphe 32 de ses motifs, que c'est le Ministre de l'Éducation qui a versé la subvention. Or les textes législatifs pertinents révèlent que seul le Ministre des Transports avait le pouvoir de verser des subventions à des fins de transport et de gérer le financement du transport scolaire pendant la période en litige. Pour une raison que je ne puis m'expliquer, les avocats n'ont pas cru bon de placer devant la première juge (non plus que devant la Cour d'appel) les textes législatifs tels qu'ils se lisaient entre mai 1992 et mai 1996.


[17]            Deuxièmement, la première juge, au paragraphe 16 de ses motifs et sans se prononcer, réfère au témoignage d'un fonctionnaire du Ministère de l'Éducation qui pourrait laisser croire que l'appelante en tant que commission scolaire n'avait pas à respecter les exigences régissant l'attribution de la subvention. En réponse à une question précise à ce sujet, l'avocat de l'intimée a affirmé devant nous que la question en litige devait être analysée en tenant pour acquis que les prescriptions statutaires et réglementaires devaient être respectées. C'est ce que je me propose de faire.

[18]            La notion de contrepartie selon la Loi est facilement discernable lorsque l'obligation de payer découle d'un contrat. Elle est plus difficile à cerner lorsque l'obligation de payer découle d'une source autre qu'un contrat comme l'envisage le paragraphe b) de la définition du mot "acquéreur" à l'article 123. C'est cette difficulté qui a donné lieu à l'exigence du "lien direct"que préconise le Bulletin d'information technique B-067 portant sur le "traitement des subventions et des contributions sous le régime de la taxe sur les produits et services" (ci-après le "bulletin B-067"). En l'occurrence, la première juge a conclu à l'absence d'un tel lien.

[19]            Selon la Loi, un paiement pour constituer une contrepartie, doit découler d'une obligation juridique (contractuelle ou autre) et doit être suffisamment relié à une fourniture pour être considéré comme ayant été effectué "pour" cette fourniture (voir la définition du mot "contrepartie" à l'article 123). De là l'exigence du lien direct.


[20]            Un paiement découlant d'un contrat rencontrera inévitablement cette exigence puisque l'existence même de l'obligation de payer est conditionnelle à ce que la partie cocontractante remplisse l'obligation correspondante qui lui incombe. Mais lorsque le paiement s'inscrit à l'extérieur du cadre contractuel, le but visé par le paiement et les circonstances dans lesquelles il est effectué doivent être analysés minutieusement afin de déterminer s'il existe un lien direct avec la fourniture; un paiement aura la qualité de contrepartie seulement dans la mesure où il est effectué "pour" ou en retour de cette fourniture.

[21]            Dans le cas qui nous occupe, cette analyse doit avant tout s'effectuer à la lumière des dispositions législatives pertinentes puisque c'est sous autorité législative que la subvention fut versée et que le transport scolaire fut organisé. Les dispositions pertinentes alors applicables sont reproduites ci-après :

Loi sur les transports, L.R.Q. 1977, c. T-12 (ci-après la "Loi sur les transports")

4. Le ministre peut accorder des subventions pour fins de transport.

Il peut aussi faire vérifier par une personne qu'il désigne l'utilisation des subventions qu'il verse et la nature des dépenses reliées à ces subventions.

Il peut retenir, annuler ou diminuer le montant de tout ou partie des subventions d'un bénéficiaire qui ne respecte pas une condition ou une modalité établie pour l'attribution d'une subvention. 1972, c. 55, a. 4.;1981, c. 26, a. 1.;1986, c. 67, a. 2.;1989, c. 20, a. 6.

4. The Minister may grant subsidies for transport purposes.

He may also cause a person designated by him to examine the use made of the subsidies he pays and the nature of the expenses connected with those subsidies.

He may withhold, cancel or reduce the amount of all or part of the subsidies of a recipient who does not comply with a requirement or a condition established for the granting of subsidies. 1972, c. 55, s. 4.;1981, c. 26, s. 1.;1986, c. 67, s. 2.;1989, c. 20, s. 6.

Loi sur l'instruction publique, L.R.Q. 1977, c. I-14 (ci-après la "Loi sur l'instruction publique")

291. Une commission scolaire peut, avec l'autorisation du ministre des Transports, organiser le transport de tout ou partie de ses élèves. 1988, c. 84, a. 291.

292. Le transport des élèves organisé par une commission scolaire, pour l'entrée et la sortie quotidienne des classes, est gratuit. 1988, c. 84, a. 292.;1990, c. 78, a. 9.

291. A school board may, with the authorization of the Minister of Transport, provide transportation for all or part of its students. 1988, c. 84, s. 291

292. Student transportation provided by a school board before the beginning of classes and after the end of classes each day is free of charge.1988, c. 84, s. 292.;1990, c. 78, s. 9.


300. Le ministre des Transports établit annuellement, après consultation du ministre de l'Éducation, et soumet à l'approbation du Conseil du trésor des règles budgétaires pour déterminer les montants des subventions allouées aux commissions scolaires qui organisent le transport des élèves.

Les règles budgétaires peuvent prévoir que l'allocation d'une subvention peut être faite sur la base de normes générales visant tous les élèves transportés ou sur la base de normes particulières ne visant que certains d'entre eux.

300. Each year, the Minister of Transport shall establish, after consultation with the Minister of Education, and submit to the Conseil du trésor, for approval, budgetary rules to determine the amount of subsidies granted to school boards providing student transportation.

The budgetary rules may provide that subsidies may be granted on the basis of general standards applicable to all students using student transportation or on the basis of special rules applicable to certain students.

Les règles budgétaires peuvent prévoir que l'allocation d'une subvention peut être assujettie à des conditions générales applicables à toutes les commissions scolaires ou à des conditions particulières applicables à une ou à certaines d'entre elles.

Les règles budgétaires peuvent aussi prévoir que l'allocation d'une subvention peut être assujettie à l'autorisation du ministre des Transports ou qu'elle peut n'être faite qu'à une ou à certaines commissions scolaires.

The budgetary rules may provide that the grant of a subsidy may be subject to general conditions applicable to all school boards or to special conditions applicable to one school board or to certain school boards.

The budgetary rules may also provide that the grant of a subsidy may be subject to authorization by the Minister of Transport or that it can only be made to one school board or to certain school boards.

La commission scolaire fournit au ministre des Transports les renseignements qu'il demande aux fins des subventions, à l'époque et dans la forme qu'il détermine.

La commission scolaire qui confie le transport de ses élèves à une autre commission scolaire n'est pas réputée organiser le transport de ces élèves aux fins du présent article. 1988, c. 84, a. 300.;1990, c. 78, a. 10.;1991, c. 27, a. 8.;1993, c. 51, a. 72.;1994, c. 16, a. 50.

Every school board shall provide the Minister of Transport with any information he may request for purposes of subsidies at such time and in such form as he prescribes.

A school board which entrusts the transportation of its students to another school board is not deemed to provide student transportation for the purposes of this section. 1988, c. 84, s. 300.;1990, c. 78, s. 10.;1991, c. 27, s. 8.;1993, c. 51, s. 72.;1994, c. 16, s. 50.

301. Le ministre des Transports peut retenir ou annuler tout ou partie du montant de toute subvention au transport des élèves lorsque l'une des dispositions de la présente loi relativement au transport des élèves ou d'un règlement pris en vertu de l'article 453 ou 454 n'est pas respectée. 1988, c. 84, a. 301.

301. The Minister of Transport may withhold or cancel all or part of a subsidy for student transportation where a provision of this Act or of the regulation under section 453 or 454 is not complied with. 1988, c. 84, s. 301.

[22]            Il est aussi utile d'avoir recours aux Règles budgétaires établies en vertu de l'article 300 de la Loi sur l'instruction publique. Ces règles se lisent en partie comme suit :

1.2.1 L'allocation de base

L'allocation de base vise à couvrir les coûts de transport suivants:

-     le transport quotidien des élèves, c'est-à-dire le transport des élèves une fois à l'aller et au retour pour l'entrée et la sortie de l'école;


1.6       TRANSFÉRABILITÉ

Sous réserve des ajustements récurrents ou non récurrents des présentes règles budgétaires et plus particulièrement l'ajustement non-récurrent prévu à la sous-section 5.4.3, l'allocation de base et l'allocation supplémentaire versées par le ministre des Transports à une commission autorisée sont transférables entre elles et vers d'autres postes budgétaires que le transport scolaire des élèves.

5.2.3    Arrêt de service imputable à la commission autorisée ou à l'établissement subventionné

Lorsque le service de transport scolaire est interrompu, en tout ou en partie, suite à une cause imputable à une commission autorisée ou à un établissement subventionné, le ministre des Transports effectue un ajustement.

L'ajustement vise le montant total de l'allocation de base de la commission autorisée ou de l'établissement subventionné sauf en ce qui a trait à la partie de cette allocation attribuable au service de transport intégré.

[...]

D'autre part, lorsqu'il s'agit d'un arrêt partiel des services, le ministre des Transports effectue, selon les mêmes principes, un ajustement proportionnel aux services interrompus.

Toutefois, le ministre des Transports annule une partie ou la totalité d'un ajustement si la commission autorisée ou l'établissement subventionné récupère une partie ou la totalité de ses jours de classe.

[23]            Pour constituer une contrepartie, un paiement doit tout d'abord découler d'une obligation. C'est ce qu'indique la définition du mot "contrepartie" qui réfère à "... tout montant qui, par effet de la loi, est payable ..." ainsi que la définition du mot "acquéreur" qui fait référence à une "... personne qui est tenue, aux termes d'une convention [ou autrement] ... , de payer la contrepartie ....".


[24]            Selon moi, l'obligation du Ministre des Transports de payer la subvention ne fait aucun doute. En vertu de la Loi sur l'instruction publique, l'appelante, en tant que commission scolaire, pouvait avec l'autorisation du Ministre des Transports organiser le transport scolaire (article 291), auquel cas elle devait assurer l'entrée et la sortie quotidienne des enfants gratuitement (article 292). En l'occurrence, la preuve a révélé que l'appelante a organisé un tel transport, et elle devait donc voir à ce qu'il s'effectue gratuitement.

[25]            Par ailleurs, puisque le Ministre des Transports, en vertu de ses pouvoirs de verser des subventions (article 4 de la Loi sur les transports) et de calculer les montants destinés au transport scolaire (article 300 de la Loi sur l'instruction publique), a autorisé le transport scolaire et déterminé l'enveloppe budgétaire nécessaire à cette fin, il va de soi qu'il avait l'obligation de verser la subvention. (Voir à titre comparatif la décision de la Cour supérieure du Québec dans l'affaire Conseil scolaire de l'Ile de Montréal c.P.G. du Québec et al., C.S.M. 500-05-013489-800 à la page 35.) Le procureur de l'intimée a d'ailleurs concédé l'existence de cette obligation au cours de l'instance.

[26]            En ce qui a trait au but de la subvention, le pouvoir du Ministre des Transports de verser des subventions se limite à des fins de transport (article 4 de la Loi sur les transports). C'est donc que le Ministre des Transports ne pouvait verser une subvention dans un but autre que celui de permettre à l'appelante d'assurer le transport de ses élèves. L'article 1.2.1 des Règles budgétaires précise au surplus que la subvention "vise à couvrir les coûts de transport ... quotidien des élèves, ...." Le but de la subvention tout comme l'obligation de la verser ne laissent planer aucun doute.


[27]            Quant au lien entre le paiement de la subvention et la fourniture par l'appelante du service de transport scolaire, l'article 4 de la Loi sur les transports stipule dans un premier temps que le Ministre des Transports peut vérifier l'utilisation qui est faite de la subvention par la commission scolaire et l'annuler en tout ou en partie dans la mesure où elle ne respecte pas les modalités de son attribution. L'article 301 de la Loi sur l'instruction publique ajoute que le Ministre des Transports peut "retenir" ou "annuler" toute ou partie d'une subvention lorsque les dispositions de cette loi ou ses règlements ne sont pas respectés. De plus, l'article 5.2.3 des Règles budgétaires précise que : "Lorsque le service de transport scolaire est interrompu, en tout ou en partie, suite à une cause imputable à une commission autorisée ..., le Ministre effectue un ajustement." Cet ajustement vise la totalité de l'allocation si l'interruption est entière ou partie d'icelle si l'interruption est partielle.

[28]            Ainsi l'on constate que le but de la subvention est sans équivoque et que le lien avec la fourniture envisagée l'est tout aussi; le service doit être fourni sous peine de son annulation. Considérant que nous nous situons à l'extérieur du domaine contractuel, il est difficile de concevoir un lien plus direct entre le paiement et la fourniture du service de transport scolaire.


[29]            La preuve devant la Cour canadienne de l'impôt abonde dans ce sens. Elle révèle par exemple que la subvention est payée selon une cédule de versements qui correspond en gros avec le moment où l'appelante doit payer ses transporteurs (Voir l'article 4.1 des Règles budgétaires, ainsi que la clause 25 in fine du contrat-type, Dossier d'appel, volume I, page 282). La preuve révèle aussi que l'appelante rend compte en faisant parvenir au Ministre des Transports copie des contrats qu'elle signe avec ses transporteurs ainsi qu'un rapport annuel qui fait état de façon exhaustive de l'utilisation de la subvention (notes sténographiques, volume IV, pages 32-33 et rapports TE-104, volume 1, page 39). L'intimée a par ailleurs admis qu'en tout temps pertinent, l'appelante a utilisé la subvention pour effectuer la fourniture du service de transport scolaire (Mémoire de l'intimée, paragraphe 5).

[30]            La première juge semble avoir accordé une importance démesurée au fait que la subvention constitue une forme d'aide financière payée dans l'intérêt public. Même si les subventions versées dans l'intérêt public ne sont généralement pas liées à une obligation correspondante, ceci n'est pas toujours le cas. Quel que soit l'intérêt visé, un paiement sera considéré comme contrepartie dans la mesure où il est directement lié à la fourniture d'un bien ou d'un service par la personne qui a reçu le paiement (voir à cet égard le bulletin B-067 à la page 3). L'intimée ne remet pas en question cette proposition (Mémoire de l'intimée, paragraphe 40).

[31]            La première juge semble aussi avoir retenu le fait que la subvention ne coïncidait pas avec le coût réel du service offert par l'appelante. Cette dichotomie n'est pas surprenante puisque la subvention était calculée avant que soient encourus les frais qu'elle cherchait à défrayer. Mais de toute façon, une contrepartie n'a pas à être égale au coût du bien ou du service qu'elle procure et l'est d'ailleurs rarement. Il est plus important de constater que la subvention était calculée selon l'expérience des années passées afin que l'appelante puisse rencontrer ses obligations courantes en matière de transport scolaire.


[32]            Le droit de ré-affecter un surplus à d'autres postes budgétaires le cas échéant, ne met pas non plus en cause le but visé par la subvention non plus que son lien avec la fourniture envisagée. D'une part, la subvention ne pouvait être versée à des fins autres que le transport et ce n'est qu'en ce qui a trait à la différence entre les montants payés aux transporteurs indépendants et le montant de la subvention que cette ré-affectation pouvait avoir lieu (paragraphe 7 des motifs de la première juge). D'autre part, la preuve a révélé que cette différence n'a pas excédé 5% de la subvention pendant la période en cause (notes sténographiques, volume IV, pages 145-150). Une contrepartie ne perd évidemment pas sa nature parce qu'elle excède de 5% le coût du service qu'elle procure.

[33]            Finalement, il est inexact de dire que le Ministre des Transports n'a rien reçu en retour de la subvention. Même si plus souvent qu'autrement le payeur d'une contrepartie recherche un avantage qui lui est propre, il peut aussi chercher à avantager quelqu'un d'autre. Le cas échéant, le paiement conserve tout autant sa nature de contrepartie (bulletin B-067 aux pages 3 et 4). En l'occurrence, le Ministre des Transports a obtenu de l'appelante qu'elle fournisse à ses élèves le service de transport gratuit. Ceci suffit pour faire de la subvention une contrepartie au sens de la Loi.


[34]            Avant de conclure, je note que la première juge, après avoir décidé que la subvention ne constituait pas une contrepartie, s'est demandée si la fourniture pouvait tout de même être exonérée selon le libellé de l'article 5 de l'Annexe V (motifs du jugement, paragraphe 33). Reconnaissant qu'elle s'exprimait dans le cadre d'un obiter dictum, elle répondit à cette question par la négative essentiellement parce que l'expression "la fourniture, effectuée par une administration scolaire au profit d'un élève" (mon souligné) que l'on retrouve à l'article 5 de l'Annexe V ne vise que l'"acquéreur" d'une fourniture tel que défini au paragraphe 123(1). Je ne mentionne cette conclusion additionnelle de la première juge que pour préciser qu'elle n'a pas été remise en question par l'intimée dans le cadre du présent appel.

[35]            Pour ces motifs, j'accueillerais l'appel avec dépens devant notre Cour et devant la Cour canadienne de l'impôt, j'annulerais la décision sous appel, et je déférerais la cotisation au Ministre du Revenu pour qu'il émette une nouvelle cotisation en tenant pour acquis que la subvention constituait la contrepartie de la fourniture du service de transport scolaire, sujet au paragraphe 18 de l'entente conjointe sur les faits déposée devant la Cour canadienne de l'impôt qui réserve au Ministre du Revenu le droit de vérifier l'exactitude des montants réclamés.

                     "Marc Noël"                   

j.c.a.

"Je souscris à ces motifs.

Alice Desjardins j.c.a."

"Je suis d'accord.

Robert Décary j.c.a."

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.