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     Date: 20000628

     Dossier: A-538-98

EDMONTON (ALBERTA), LE MERCREDI 28 JUIN 2000

CORAM :      LE JUGE ROBERTSON

         LE JUGE McDONALD

         LE JUGE SEXTON

ENTRE :


FRED TURNER

     appelant


et


SA MAJESTÉ LA REINE

     intimée



Audience tenue à Edmonton (Alberta), le mardi 27 juin 2000

Jugement rendu à l'audience à Edmonton (Alberta), le mardi 27 juin 2000



MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :      LE JUGE ROBERTSON




     Date: 20000628

     Dossier: A-538-98

CORAM :      LE JUGE ROBERTSON

         LE JUGE McDONALD

         LE JUGE SEXTON

ENTRE :


FRED TURNER

     appelant


et


SA MAJESTÉ LA REINE

     intimée


MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE ROBERTSON :

[1]      Dans cet appel, il s'agit de savoir si le contribuable appelant a le droit de déduire une perte déductible au titre d'un placement d'entreprise conformément au sous-alinéa 50(1)b)(iii) de la Loi de l'impôt sur le revenu, qui se lit comme suit :

     50.(1)      Pour l'application de la présente sous-section, lorsque, selon le cas :
         [...]
         b) une action du capital-actions d'une société (autre qu'une action reçue par un contribuable en contrepartie de la disposition d'un bien à usage personnel) appartient au contribuable à la fin d'une année d'imposition et :
         [...]
             (iii) soit les conditions suivantes sont réunies à la fin de l'année :
                 (A) la société est insolvable,
                 (B) ni la société ni une société qu'elle contrôle n'exploite d'entreprise,
                 (C) la juste valeur marchande de l'action est nulle,
                 (D) il est raisonnable de s'attendre à ce que la société soit dissoute ou liquidée et ne commence pas à exploiter une entreprise,
             le contribuable est réputé avoir disposé de la créance ou de l'action à la fin de l'année pour un produit nul et l'avoir acquise de nouveau immédiatement après la fin de l'année à un coût nul, à condition qu'il fasse un choix, dans sa déclaration de revenu pour l'année, pour que le présent paragraphe s'applique à la créance ou à l'action.

         [Je souligne.]


[2]      Nous sommes tous d'avis que le juge de la Cour de l'impôt a commis une erreur en rendant une décision défavorable au contribuable. En ce qui concerne la question de savoir si la perte a été subie en 1984, comme le ministre du Revenu national l'a soutenu, ou en 1994 comme le contribuable l'a affirmé, nous estimons que le juge de la Cour de l'impôt a commis une erreur en retenant la première date. Dans sa déclaration de revenu de 1994, le contribuable a choisi de déduire la perte parce que c'était l'année au cours de laquelle sa société, Turn-Air Ltd., avait été liquidée. La position du ministre est fondée sur l'idée erronée selon laquelle, étant donné que cette société a cessé d'exploiter son entreprise en 1984, après que son permis d'exploitation eut été révoqué par les autorités fédérales, la perte aurait dû être déduite cette année-là. Cet argument pose un problème : en effet, le sous-alinéa 50(1)b)(iii) n'entre pas en jeu simplement parce qu'une société cesse d'exploiter son entreprise. De plus, il faut démontrer qu'il était raisonnable de s'attendre à ce que Turn-Air soit dissoute et à ce qu'elle ne commence pas à exploiter une entreprise dans l'avenir. Il est vrai que la société du contribuable a cessé d'exploiter son entreprise en 1984, mais il est également vrai que le permis a été rétabli en 1985 et que les poursuites que le contribuable et Turn-Air avaient engagées contre les autorités fédérales par suite de la présumée révocation illicite du permis n'ont été réglées qu'en 1994, soit l'année au cours de laquelle Turn-Air a été liquidée. Bref, il n'était pas raisonnablement loisible de conclure qu'en 1984, la société du contribuable serait dissoute et qu'elle n'exploiterait plus jamais d'entreprise dans l'avenir. À notre avis, le contribuable avait le droit de choisir, comme il l'a fait, de déduire la perte en question à l'égard de son année d'imposition 1994.

[3]      Il s'agit en second lieu de savoir si le contribuable a omis de présenter une preuve au sujet du prix de base rajusté des actions qu'il détenait dans Turn-Air et, par conséquent, s'il lui était impossible de déduire la perte pour ce seul motif. Le juge de la Cour de l'impôt a rendu une décision défavorable au contribuable en se fondant sur le fait que ce dernier avait omis de réfuter l'hypothèse du ministre selon laquelle [TRADUCTION] « les actions de Turn-Air ne valaient rien après 1984 » . Nous notons que les hypothèses qui sont énoncées dans la réponse que le ministre a déposée à la suite de l'avis d'appel du contribuable sont plutôt vagues, en particulier lorsqu'un plaideur agit pour son propre compte, comme le contribuable ici en cause, celui-ci devant déduire en se fondant sur ces hypothèses qu'en fait, le ministre lui demande d'établir le « prix de base rajusté » des actions détenues dans Turn-Air en 1984, puis en 1994. Indépendamment de cette question, il est évident selon nous que le juge de la Cour de l'impôt a commis une erreur en concluant qu'aucun élément de preuve n'avait été présenté en vue d'établir le montant de la contrepartie que le contribuable avait versée en échange des actions de Turn-Air. Selon la preuve non contredite fournie par le contribuable, celui-ci avait personnellement investi une somme de 55 000 $ sur les 75 000 $ nécessaires aux fins de l'achat du permis en vertu duquel Turn-Air devait exploiter son entreprise (voir les pages 13 et 40 de la transcription). Cet élément de preuve vient s'ajouter à l'affidavit fourni par l'ancien comptable du contribuable qui avait été chargé de préparer les états de Turn-air en 1981. Selon ces états, 5 500 actions privilégiées et 99 actions ordinaires avaient été émises en faveur du contribuable, au coût total de 55 090 $. À notre avis, il existait un nombre suffisant d'éléments de preuve permettant de croire que le contribuable est réputé avoir réfuté l'hypothèse émise par le ministre. Toutefois, pareil élément de preuve n'existe pas à l'égard de la somme de 3 161 $ que Turn-Air devait apparemment au contribuable et de la somme de 13 500 $ se rapportant aux dividendes déclarés qui n'ont censément jamais été payés. Pour ces motifs, nous sommes d'avis que le prix rajusté des actions ici en cause doit être limité à la somme de 55 090 $.

[4]      Pour ces motifs, nous accueillons l'appel, nous infirmons la décision que le juge de la Cour de l'impôt a rendue le 18 août 1998 et nous accueillons l'appel interjeté par le contribuable à l'égard de la déduction d'une perte déductible au titre d'un placement d'entreprise fondée sur le fait que le prix de base rajusté des actions était de 55 090 $. Étant donné qu'il a en bonne partie eu gain de cause dans cet appel, le contribuable a droit aux dépens.


                             « J. T. Robertson »

                                     J.C.A.

Traduction certifiée conforme


Martine Brunet, LL.B.


COUR D'APPEL FÉDÉRALE


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


No DU DOSSIER :      A-538-98

    

INTITULÉ DE LA CAUSE :      FRED TURNER

    

     et

     SA MAJESTÉ LA REINE


LIEU DE L'AUDIENCE :      Edmonton (Alberta)


DATE DE L'AUDIENCE :      le mardi 27 juin 2000

MOTIFS DU JUGEMENT du juge Robertson en date du 28 juin 2000


ONT COMPARU :

Fred Turner          POUR SON PROPRE COMPTE

Bonnie Moon          POUR L'INTIMÉE


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Morris Rosenberg     

Sous-procureur général du Canada

Ministère de la Justice

Ottawa (Ontario)          POUR L'INTIMÉE


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