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Date : 20020429

Dossier : A-27-00

Référence neutre : 2002 CAF 160

ENTRE :

                COLIN J. MURPHY, MARION MURPHY, RAYLYNN MURPHY,

WILSON MURPHY FILS, MYRTLE MURPHY-SMITH ET RONALD SMITH

                                                                                                                                      demandeurs

                                                                            et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL

                                                                                                                                         défendeur

                                     MOTIFS DE LA TAXATION DES DÉPENS

L'OFFICIER TAXATEUR FRANÇOIS PILON

[1]                 Cette demande de contrôle judiciaire a été rejetée avec dépens le 4 juin 2001. La taxation entre parties des dépens du défendeur a eu lieu le 16 avril 2002 par téléconférence, Me John Sinnott, c.r., agissant pour le compte des demandeurs et          Me John Bodurtha agissant pour le compte du défendeur.


[2]                 Me Sinnott ne s'oppose pas aux services taxables réclamés en vertu des articles 2, 14 et 25. Toutefois, il soutient qu'il convient d'accorder deux unités pour la taxation des dépens en vertu de l'article 26. Me Bodurtha accepte de réduire le nombre d'unités de trois à deux.

[3]                 Me Sinnott ne s'oppose pas aux débours suivants, qui sont tous étayés par des factures :

- 384,07 $ pour les services de photocopie;

- 14 $ pour les services d'un commissaire à l'assermentation;

- 39,68 $ pour les frais de poste prioritaire.


[4]                 Le montant de 541 $ pour les photocopies de l'affidavit du défendeur et du dossier de la demande n'est pas contesté, mais il est laissé à l'appréciation de l'officier taxateur. Il n'existe aucune pièce à l'appui de cette dépense. Dans la décision Diversified Products Corp. et al. c. Tye-Sil Corp., 34 C.P.R. (3d) 267, Monsieur le juge Teitelbaum a établi que les frais relatifs aux photocopies constituent un débours admissible uniquement s'ils sont essentiels à la conduite de l'instance. Ce critère a été satisfait en l'espèce, le défendeur ayant observé les dispositions des articles 307 et 310 des Règles. Toutefois, il n'existe aucun élément de preuve et aucune indication en ce qui concerne les frais qui ont réellement été engagés. L'examen du dossier de la Cour révèle qu'environ 2 500 copies ont été faites conformément aux dispositions susmentionnées des Règles. J'accorderai le montant discrétionnaire de 300 $, qui semble raisonnable eu égard aux circonstances. Ce faisant, je me fonde sur le raisonnement que l'officier taxateur Parent a fait, à la page 23 de ses motifs de taxation des dépens, dans l'affaire Inverhuron & District Ratepayers Association c. Ministre de l'Environnement et al. [2001] A.C.F. no 666. En l'absence de preuve des frais réellement engagés pour les photocopies, l'officier taxateur a accordé une somme globale bien inférieure au montant réclamé.

[5]                 Enfin, le défendeur réclame la somme de 1 849,20 $ se rapportant à l'obtention d'une copie de la transcription du contre-interrogatoire de F.G. Brown. Ces frais sont étayés par une facture en date du 7 mars 2000. Lors de la taxation, l'avocat a établi que ce débours ne se rapportait pas aux fins susmentionnées, mais plutôt à l'obtention d'une copie de la transcription complète de la preuve orale dont disposait la Cour de l'impôt. Me Sinnott s'oppose au remboursement de cette dépense, et ce, pour les motifs ci-après énoncés :

i)           après avoir interjeté appel contre la décision du juge de la Cour de l'impôt, l'avocat des demandeurs n'a pas déposé de transcription et il n'a pas demandé de transcription;

ii)          le défendeur n'a pas fourni une copie de la transcription aux demandeurs;

iii)          la transcription n'a pas été déposée devant la Cour; elle était uniquement réservée à l'usage personnel du défendeur;

iv)         les frais relatifs aux photocopies de certains extraits de la transcription sont déjà inclus dans le montant de 541 $;

v)          le défendeur aurait pu prendre des notes pendant l'audience qui a eu lieu devant la Cour de l'impôt de façon à éviter des dépenses additionnelles;

vi)         seuls certains extraits de la transcription ont été utilisés devant la Cour fédérale; les demandeurs ne devraient pas payer le document au complet;

vii)         l'avocat maintient qu'il est erroné en principe pour le défendeur d'avoir inclus ce débours dans son mémoire de frais.

[6]                 Me Bodurtha conteste les arguments de Me Sinnott. Sa position est résumée comme suit :

i)           certains extraits de la transcription figurent au dossier de la Cour;

ii)          le défendeur peut à bon droit se fonder sur la transcription complète de l'instance qui a eu lieu devant la Cour de l'impôt pour défendre sa position;

iii)          les questions dont le juge de la Cour de l'impôt était saisi étaient dans une large mesure fondées sur la crédibilité des demandeurs; la transcription complète était essentielle aux fins de l'examen de la décision visée par l'appel;

iv)         la Couronne ne doit pas être pénalisée pour avoir obtenu la documentation nécessaire et pertinente;

v)          en vertu des dispositions de l'alinéa 310(2)d) des Règles, le défendeur doit inclure les extraits de toute transcription d'un témoignage oral;

vi)         au moment où la transcription a été demandée, l'avocat ne pouvait pas savoir sur quels extraits on se fonderait à l'audience.

[7]                 Je suis d'accord avec les deux parties pour dire que cette question soulève des principes importants. Le paragraphe 310(2) des Règles de la Cour fédérale prévoit ce qui suit :

310.(2) Le dossier du défendeur contient [...]

d) les extraits de toute transcription des témoignages oraux recueillis par l'office fédéral qu'il entend utiliser à l'audition de la demande;


[8]                 Mes Sinnott et Bodurtha ont présenté d'excellents arguments à l'appui de leurs positions respectives. Selon moi, les principes invoqués par le défendeur sont plus importants que ceux que son adversaire a avancés. À mon avis, Me Bodurtha pouvait à bon droit obtenir une copie de la transcription des procédures qui avaient eu lieu devant la Cour de l'impôt en vue de préparer une défense adéquate. Les dispositions des Règles prévoient expressément que le défendeur doit inclure les extraits de la transcription sur lesquels il entend se fonder. Me Bodurtha a souligné que la transcription complète était nécessaire parce qu'on ne pouvait pas raisonnablement s'attendre à ce qu'il sache quel extrait était essentiel à sa preuve. Trois décisions de la Cour sont utiles aux fins de la détermination de ce point. Dans la décision Hanson c. Canada (MRN) [1987] A.C.F. no 729, Monsieur le juge Muldoon a dit ce qui suit à la page 2 des motifs de l'ordonnance :

Les contribuables canadiens ne doivent pas inconditionnellement au demandeur les frais d'une transcription de l'instance devant la Cour canadienne de l'impôt. [...]

Cependant, le demandeur doit, par n'importe quel moyen légal, payer les débours de l'action qu'il a introduite. Une transcription est un document accessible à tous et n'est pas à la seule disposition de la défenderesse. Par conséquent, si le demandeur désire une transcription, il doit la payer. Si le juge accorde plus tard les dépens de cette action au demandeur et si la Cour ou l'officier taxateur estime que la transcription était nécessaire et pertinente pour la poursuite de l'action du demandeur, les frais de la transcription peuvent être inclus comme débours dans les dépens accordés au demandeur. Mais le demandeur doit d'abord décider si une telle transcription est pertinente et nécessaire et, le cas échéant, il doit la payer à ce stade-ci de l'instance.

[9]                 Lors d'une taxation des dépens effectuée dans le cadre d'une demande de contrôle judiciaire dans l'affaire Succession Swanson c. Canada [1990] A.C.F. no 357, l'officier taxateur Stinson faisait face à une situation semblable à celle qui nous occupe. À la page 4, il a conclu ce qui suit :

J'hésite à utiliser comme critère ma réponse à la question de savoir si l'avocat des demandeurs aurait pu fonctionner sans la transcription, parce qu'il faudrait faire de la rétrospection plutôt que d'appliquer le critère beaucoup plus pertinent qu'est le caractère raisonnable de la décision d'engager la dépense lors des circonstances en question. En l'espèce, l'avocat des demandeurs ne pouvait ignorer la pertinence possible de cette preuve aux fins de la préparation de la cause et j'approuve le coût.


[10]            La même approche a été adoptée dans la décision Robert Pocha c. la Reine [1998] A.C.F. no 306, où l'officier taxateur Smith a dit ce qui suit, page 2 :

La défenderesse réclamait également des débours de 184,90 $ pour des transcriptions et de 12,94 $ pour des taxes sur les produits et services. Le demandeur s'est également opposé aux frais de transcription au motif qu'il s'était désisté de l'action avant la tenue des interrogatoires préalables, de sorte qu'aucune transcription n'avait été faite dans le cadre de l'instance engagée devant la Cour. L'avocat de la défenderesse a répondu que le montant réclamé et les taxes connexes étaient des dépenses engagées afin d'obtenir une transcription dans le cadre de l'instance engagée devant la Cour canadienne de l'impôt et qu'il s'était agi d'une mesure de prudence en l'espèce.

Une fois de plus, force m'est de souscrire au point de vue de la défenderesse. Il peut bien sembler maintenant qu'une transcription des débats de la Cour canadienne de l'impôt était inutile. La défenderesse se devait malgré tout d'agir prudemment pour contester l'action du demandeur. Dans les faits, une défense a été déposée le 6 juin 1990. Je conclus que les débours et les taxes connexes qui sont réclamés étaient raisonnables et nécessaires dans les circonstances.

  

[11]            Le mémoire de frais du défendeur sera donc taxé; un montant de 1 320 $ sera accordé pour les services taxables et un montant de 2 586,95 $ sera accordé pour les débours. Un certificat de taxation au montant de 3 906,95 $ sera délivré.

   

« François Pilon »

Officier taxateur

Halifax (Nouvelle-Écosse),

le 29 avril 2002.

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad.a., LL.L.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION D'APPEL

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

  

DOSSIER :                                                                      A-27-00

INTITULÉ :                                                                     COLIN J. MURPHY ET AUTRES

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL

TAXATION EFFECTUÉE PAR CONFÉRENCE TÉLÉPHONIQUE LE 16 AVRIL 2002

MOTIFS DE LA TAXATION DES DÉPENS : MONSIEUR FRANÇOIS PILION

DATE DES MOTIFS :                                                  le 29 avril 2002

  

COMPARUTIONS :

M. John Sinnott, c.r.                                                          pour les demandeurs

M. John Bodurtha                                                              pour le défendeur

  

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

M. Lewis Sinnott

St. John's (Terre-Neuve et Labrador)                              pour les demandeurs

M. Morris Rosenberg                                                        pour le défendeur

Sous-procureur général du Canada                                 

Ottawa (Ontario)

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