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                                         Date : 19991110

                                         Dossier : A-883-96


CORAM :      LE JUGE STRAYER

         LE JUGE ROBERTSON

         LE JUGE ROTHSTEIN


ENTRE :


WORLD RELIEF CANADA

     appelante



     - et -





     SA MAJESTÉ LA REINE


intimée



Audience tenue à Toronto (Ontario), le mercredi 10 novembre 1999

Jugement prononcé à l"audience à Toronto (Ontario), le mercredi 10 novembre 1999





MOTIFS DU JUGEMENT EXPOSÉS PAR :      LE JUGE ROTHSTEIN






                            


Date : 19991110


Dossier : A-883-96


CORAM :      LE JUGE STRAYER

         LE JUGE ROBERTSON

         LE JUGE ROTHSTEIN

ENTRE :

     WORLD RELIEF CANADA

     appelante



     - et -






SA MAJESTÉ LA REINE


intimée

     MOTIFS DU JUGEMENT

     (exposés à l"audience à Toronto (Ontario) le mercredi 10 novembre 1999)


LE JUGE ROTHSTEIN :

[1]      Le présent appel, de même que l"appel déposé dans le dossier A-882-96, fait suite au jugement du 18 octobre 1996 rendu par le juge Hamlyn de la Cour canadienne de l"impôt et porte sur l"interprétation de l"article 260 de la Loi sur la taxe d"accise. L"article 260 prévoit qu"un organisme de bienfaisance a le droit de réclamer le remboursement complet du montant de la taxe sur les produits et services (la TPS) qu"il a versée relativement à la fourniture d"un bien ou d"un service qu"il a reçu et qu"il a par la suite exporté pour qu"il serve à des oeuvres de bienfaisance.

[2]      L"article 260 prévoit :

260. (1) Where a charity

(a) has paid tax in respect of a supply of property or a service received by the charity,

(b) has not claimed and is not entitled to claim an input tax credit in respect of the property or service, and

(c) has exported the property or service for charitable purposes outside Canada,

subject to subsection (2), the Minister shall pay a rebate to the charity equal to the amount of tax paid in respect of the supply.

(2) A rebate shall not be paid under subsection (1) to a charity in respect of a supply unless the charity files an application for the rebate within four years after the end of the fiscal year of the charity in which tax in respect of the supply became payable.

260. (1) Le ministre verse un remboursement à un organisme de bienfaisance, égal au montant de la taxe payée par l"organisme relativement à la fourniture d"un bien ou d"un service qu"il a reçu si l"organisme:

a) d"une part, n"a pas demandé le crédit de taxe sur les intrants relatifs au bien ou au service, et n"y a pas droit;

b) d"autre part, a exporté le bien ou le service pour qu"il serve dans des oeuvres de bienfaisance à l"étranger.

(2) Le remboursement n"est versé que si l"organisme de bienfaisance en fait la demande dans les quatre ans suivant la fin de l"exercice au cours duquel la taxe relative à la fourniture est devenue payable.


Les appelantes soutiennent que, étant donné que toutes leurs oeuvres de bienfaisance contribuent à des causes à l"extérieur du Canada, elles devraient pouvoir se prévaloir de l"article 260 pour obtenir le remboursement complet du montant de la TPS qu"elles ont versée pour les services qu"elles ont reçus. Le ministre du Revenu national a rejeté leurs demandes par l"envoi d"un avis de cotisation.
[3]      Des avis d"opposition ont été déposés, mais le ministre a confirmé l"établissement des cotisations. Lorsque cette décision a été portée devant la Cour canadienne de l"impôt, le juge Hamlyn a rejeté les prétentions des appelantes pour le motif que l"interprétation selon laquelle la fourniture de services aux appelantes équivaut indirectement à de l"exportation allait au-delà des limites prescrites par la loi.
[4]      Devant la Cour, l"observation principale qu"avancent les appelantes porte qu"une interprétation littérale de l"article 260 a pour effet de rendre sa mise en application impossible en ce qu"il a trait à l"exportation des services que reçoit un organisme de bienfaisance. Elles plaident qu"une fois qu"un organisme de bienfaisance reçoit un service au Canada, il lui est impossible d"exporter ce service sous la même forme. Cela se distingue des biens qu"un organisme de bienfaisance peut recevoir puis exporter sous leur forme originale. Par conséquent, les appelantes font valoir que l"article 260 doit recevoir une interprétation plus large en ce qui concerne les services pour lui permettre d"être compatible avec le régime général instauré par la législation relative à la TPS; ce régime vise à imposer la consommation des biens et des services au Canada et non des biens et services destinés à l"exportation. Si cette thèse était acceptée, les appelantes auraient droit au remboursement complet du montant de la TPS qu"elles ont versée relativement à tous les services qu"elles ont reçus, y compris tous les services qui sont liés aux frais généraux engagés par les organismes de bienfaisance, par exemple les activités de financement.
[5]      Subsidiairement, les appelantes font valoir qu"elles devraient à tout le moins pouvoir invoquer l"article 260 pour réclamer le remboursement complet du montant de la TPS qu"elles ont versée relativement aux services qu"elles ont reçus et qui sont directement liés aux activités qu"elles mènent à l"étranger. Il s"agirait de la TPS payée au chapitre des frais d"affranchissement et d"expédition à des adresses à l"extérieur du Canada, des services téléphoniques interurbains quant aux appels dirigés à l"extérieur du Canada, des services reçus aux fins de l"obtention de visas pour les personnes affectées à l"extérieur du Canada, de la partie du transport au Canada des biens et des personnes dont la destination finale est à l"extérieur du Canada, des services fournis par les consultants au sujet de l"expédition de biens vers des pays étrangers, des services de messagerie et de courtiers en douane et des services d"experts-conseils fournis à l"extérieur du Canada.
[6]      Pour que les appelantes aient gain de cause grâce à soit leur argument principal soit leur argument subsidiaire, elles doivent démontrer que le libellé de l"article 260 est ambigu et que le renvoi à d"autres extraits de la Loi sur la taxe d"accise ou à d"autres outils d"interprétation justifie que l"article reçoive une interprétation plus large.
[7]      Malgré l"argument intéressant avancé par le procureur des appelantes, comme le juge Hamlyn de la Cour canadienne de l"impôt, nous ne sommes pas convaincus que le libellé de l"article 260 est ambigu ou qu"il est impossible de lui donner une interprétation littérale. Comme le juge Hamlyn l"a noté, l"interprétation que doit recevoir l"article 260 peut être restrictive à l"égard des services, mais elle n"est pas vide de sens ou impossible à appliquer. Un exemple d"application possible de cet article a été fourni lors des plaidoiries. Lorsqu"il y a prestation de services à l"extérieur du Canada, lesquels sont destinés à des oeuvres de bienfaisance, le fournisseur de services n"est pas tenu d"inclure la TPS sur la facture aux termes de l"article 142 de la Loi sur la taxe d"accise. Cependant, le procureur des appelantes soutient que lorsque les services fournis sont destinés à la fois à la consommation intérieure et à l"exportation et qu"il n"y a qu"une seule facture d"établie, la TPS est perçue sur le total de la facture. Dans un tel cas, l"organisme de bienfaisance aura versé la TPS à l"égard de la prestation de services qui ont été en partie exportés pour des oeuvres de bienfaisance à l"extérieur du Canada. Dans un tel cas, il apparaît que l"organisme de bienfaisance a droit au remboursement complet du montant de la TPS qu"il a versée relativement aux services qui ont été exportés. Il n"est pas par conséquent impossible de donner une interprétation littérale à l"article 260.
[8]      Comme les appelantes n"ont pu démontrer que le libellé de l"article 260 est ambigu, il ne leur est pas loisible de lui conférer l"interprétation large dont elles cherchent à se prévaloir. Par conséquent, en ce qui concerne l"argument principal des appelantes, le montant de la TPS qu"elles ont versée à l"égard de tous les services qu"elles ont reçus en territoire canadien n"est pas assujetti au remboursement prévu à l"article 260, malgré que leurs activités de bienfaisance aient lieu exclusivement à l"extérieur du Canada.
[9]      Les appelantes ne peuvent non plus avoir gain de cause au moyen de leur argument subsidiaire si l"on se fie aux éléments de preuve en l"espèce. Bien que le courrier, le téléphone et les autres services que les appelantes ont énumérés dans leur argument subsidiaire constituent des services que les appelantes ont reçus et pour lesquels elles ont versé la TPS, il reste que les appelantes n"ont pas elles-mêmes exporté ces services. Par conséquent, bien que les appelantes bénéficient par exemple de services téléphoniques relativement à des appels interurbains vers d"autres pays, ces services téléphoniques ne sont que des intrants et ne sont pas exportés par les organismes de charité eux-mêmes, comme le prescrit l"alinéa 260(1)c ).
[10]      Les services qui auraient pu être admissibles au remboursement du montant de la TPS sous le régime de l"article 260 sont les services d"experts-conseils pour lesquels la TPS a été versée parce que ces services ont été fournis à la fois au Canada et dans d"autres pays. Cependant, rien dans la preuve ne démontre en l"espèce que les services d"experts-conseils fournis à l"extérieur du Canada l"ont été dans le but de servir des oeuvres de bienfaisance à l"extérieur du Canada, comme l"exige l"alinéa 260(1)c ). Il semble au contraire que ces services aient été fournis pour passer en revue les activités menées à l"étranger et pour en faire un rapport aux organismes canadiens de bienfaisance.

[11]      Bien que nous soyons en sympathie avec les oeuvres de bienfaisance des appelantes, nous sommes tenus d"appliquer le droit tel qu"il est. Ce faisant, nous voudrions faire remarquer que, bien que l"article 260 de la Loi sur la taxe d"accise ne soit pas applicable à l"égard des services que les appelantes ont reçus en l"espèce, l"article 259 prévoit en revanche le remboursement de la moitié du montant de la TPS versée pour les services qu"elles ont reçus. Par conséquent, les appelantes peuvent ainsi se prévaloir d"une mesure d"allégement à l"égard de la TPS, même s"il ne s"agit pas d"un remboursement intégral.
[12]      Malgré les observations intéressantes avancées par le procureur des appelantes, le présent appel doit être rejeté.
                                 "Marshall Rothstein"
     J.C.A.
Traduction certifiée conforme

Thanh-Tram Dang, B.C.L., LL.B.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     Avocats inscrits au dossier

                            

NO DU GREFFE :                      A-883-96

INTITULÉ DE LA CAUSE :              WORLD RELIEF CANADA
                             - et -

                             SA MAJESTÉ LA REINE

DATE DE L"AUDIENCE :                  LE MERCREDI 10 NOVEMBRE 1999

LIEU DE L"AUDIENCE :                  TORONTO (ONTARIO)

MOTIFS DU JUGEMENT EXPOSÉS PAR :      LE JUGE ROTHSTEIN

Jugement prononcé à Toronto (Ontario)

le mercredi 10 novembre 1999

ONT COMPARU :                  Patrick Boyle

                         Grace Pereira

                             Pour l"appelante

                                    

                         Harry Erlichmann

                         Michael Esrey

                 Pour l"intimée
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :      Fraser Milner
                         Avocats
                         1 First Canadian Place

                         100 King Street West

                         Toronto (Ontario)
                         M5X 1B2
                             Pour l"appelante

                                    

                         Morris Rosenberg

                         Sous-procureur général du Canada

                        

                             Pour l"intimée

                         COUR D"APPEL FÉDÉRALE


Date : 19991110


Dossier : A-883-96

                        

                         ENTRE :

                         WORLD RELIEF CANADA

     appelante


                         - et -

                         SA MAJESTÉ LA REINE

                    

intimée



                        

                        

                         MOTIFS DU JUGEMENT

                             


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