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Date : 20010611

Dossier : A-837-00

OTTAWA (ONTARIO), LE LUNDI 11 JUIN 2001.

CORAM :       LE JUGE EN CHEF RICHARD

LE JUGE ROTHSTEIN

LE JUGE SEXTON

ENTRE :

LLOYD D. HILLIER

                                                                                                                                                         appelant

                                                                                   et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                                                                                                            intimé

JUGEMENT

L'appel est accueilli avec dépens. L'affaire est renvoyée au ministre du Revenu national pour réexamen de la demande que l'appelant a faite en vue de l'annulation des intérêts ou de la renonciation aux intérêts, conformément aux présents motifs.

« J. Richard »

Juge en chef

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad.a.


Date : 20010611

Dossier : A-837-00

Référence neutre : 2001 CAF 197

CORAM:        LE JUGE EN CHEF RICHARD

LE JUGE ROTHSTEIN

LE JUGE SEXTON

ENTRE :

LLOYD D. HILLIER

                                                                                                                                                         appelant

                                                                                   et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                                                                                                            intimé

Audience tenue à St. John's (Terre-Neuve), le jeudi 31 mai 2001.

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le lundi 11 juin 2001.

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :                                                                             LE JUGE SEXTON

Y ONT SOUSCRIT :                                                                             LE JUGE EN CHEF RICHARD

                                                                                                                                LE JUGE ROTHSTEIN


Date : 20010611

Dossier : A-837-00

Référence neutre : 2001 CAF 197

CORAM :       LE JUGE EN CHEF RICHARD

LE JUGE ROTHSTEIN

LE JUGE SEXTON

ENTRE :

LLOYD D. HILLIER

                                                                                                                                                         appelant

                                                                                   et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                                                                                                            intimé

                                                                                   

MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE SEXTON


[1]                 Il s'agit d'un appel d'une ordonnance de la Section de première instance rejetant la demande de contrôle judiciaire que l'appelant avait présentée contre la décision d'un agent, à Revenu Canada, de ne pas annuler les intérêts et pénalités dont il faisait l'objet et de ne pas y renoncer. L'appelant avait allégué qu'il y avait eu retard excessif de la part du ministre du Revenu national lorsqu'il s'était agi d'établir une nouvelle cotisation à son égard.

Les faits

[2]                 À l'automne 1993, Revenu Canada a entrepris une vérification des déclarations de revenu de l'appelant pour les années 1989 à 1992. La vérification a permis de déceler certains revenus qui n'avaient pas été déclarés. De nouvelles cotisations relatives à ces années d'imposition ont donc été établies le 28 avril 1995. L'appelant s'est également vu imposer des pénalités et des intérêts pour chacune des années ayant fait l'objet d'une vérification. Le 29 juin 1995, l'appelant a déposé des avis d'opposition à l'égard des nouvelles cotisations. L'affaire a été confiée à la Division des appels de Revenu Canada, à St. John's (Terre-Neuve). Le 31 octobre 1995, l'appelant a transmis certains renseignements demandés à Revenu Canada. Toutefois, par suite de changements de personnel et de réaffectations, c'est le 23 janvier 1998 seulement, soit près de 31 mois après le dépôt des avis, qu'un examen approfondi des oppositions a été entamé. L'examen a pris fin le 31 juillet 1998.

[3]                 Le 27 août 1998, des avis de nouvelle cotisation pour les années d'imposition 1990, 1991 et 1992 ont été délivrés. Le montant du revenu total qui avait été fixé par suite de la vérification effectuée entre 1993 et 1995 a été réduit, mais pas au point d'éliminer l'obligation fiscale additionnelle de l'appelant. La nouvelle cotisation établie en 1995 pour l'année d'imposition 1989 a été ratifiée.


[4]                 Le 23 novembre 1998, l'appelant a demandé au ministre, conformément au paragraphe 220(3.1) de la Loi de l'impôt sur le revenu, d'annuler les pénalités et les intérêts qui lui avaient été imposés ou d'y renoncer pour les années d'imposition 1989 à 1992. L'appelant a allégué que Revenu Canada avait prolongé le traitement de ses avis d'opposition [TRADUCTION] « pour une période déraisonnable et excessive » .

[5]                 Par une lettre en date du 4 juin 1999, le chef des appels, Bureau des services fiscaux de Terre-Neuve et du Labrador, a refusé la demande de l'appelant. Voici un extrait de la lettre :

[TRADUCTION]

[...]

Un examen détaillé du processus de vérification révèle qu'il n'y a eu aucun délai excessif durant la vérification, puisque plusieurs discussions ont eu lieu entre vos représentants et les fonctionnaires de la section de la vérification tout au long de cette période.

Lorsque vous avez reçu vos avis de nouvelle cotisation, vous avez alors eu connaissance du solde exigible. Vous avez choisi de ne pas payer la somme due et avez exercé votre droit en application de la Loi de l'impôt sur le revenu en produisant un avis d'opposition. Malgré cette mesure, les intérêts ont continué de courir sur le solde à recouvrer. Le Ministère n'a pas exigé le paiement de ce solde, en raison de l'avis d'opposition déposé par vous, mais vous aviez quand même la possibilité de vous acquitter de ce solde en attendant l'issue de l'avis d'opposition, afin d'éviter l'accumulation des intérêts.

Il convient de noter que le temps requis pour traiter l'avis d'opposition n'a eu aucune incidence sur le montant des pénalités établi pour chaque année. En conséquence, l'annulation des pénalités ne serait pas justifiée ici.


[6]                 Par suite d'une enquête ministérielle, un deuxième examen de la demande a été effectué par le directeur, Bureau des services fiscaux de Terre-Neuve et du Labrador. Le directeur a lui aussi rejeté la demande en informant l'appelant de ce qui suit, au moyen d'une lettre en date du 16 juillet 1999 :

[TRADUCTION]

[...]

Nous avons examiné les faits de ce dossier et étudié les points soulevés dans la lettre de votre représentant en date du 23 novembre 1998. Comme il n'apparaît pas que de telles conditions existaient dans votre cas, je dois confirmer que les intérêts et pénalités qui vous sont demandés ont été valablement établis. D'après notre examen, il n'y a eu aucun retard excessif durant le processus de vérification. Quant à la période de temps qu'a duré la présente affaire au stade de l'opposition, la position du Ministère est que, après communication d'un avis de nouvelle cotisation, le contribuable devient informé des soldes impayés et a la possibilité, après qu'un avis d'opposition a été produit, de payer lesdits soldes et d'éviter que les intérêts ne s'accumulent. À ce stade, le paiement de ces soldes relève de la volonté du contribuable.

[7]                 Dans le cadre du contrôle judiciaire de la décision du directeur, le juge des requêtes a statué que le temps qu'il avait fallu pour mener à bonne fin la vérification et établir la nouvelle cotisation initiale (soit de l'automne 1993 au printemps 1995) n'était pas déraisonnable.


[8]                 Le juge des requêtes a ensuite examiné le refus du directeur de faire droit à la demande que l'appelant avait présentée en vue de l'annulation des pénalités et des intérêts ou de la renonciation aux pénalités et intérêts, demande qui était fondée sur le fait qu'il y avait eu un retard excessif dans le traitement des avis d'opposition. Le juge a souligné que, dès le mois de mai 1995, l'appelant était au courant du montant des impôts et intérêts à payer, sous réserve de tout rajustement résultant des avis d'opposition; à son avis, l'appelant aurait pu payer ces impôts et intérêts à ce moment-là. Le juge des requêtes a examiné la procédure et les facteurs dont le directeur avait tenu compte en prenant sa décision. Il a conclu que la décision était raisonnable, qu'il n'y avait aucune indication de mauvaise foi de la part du ministre ou de son délégué, le directeur, ni aucune transgression des principes de justice naturelle et que l'on ne s'était pas fondé sur des considérations étrangères aux dispositions législatives.

Les points litigieux

[9]                 Les parties ont convenu devant nous qu'étant donné que les pénalités fixées contre l'appelant se rapportaient à des revenus non déclarés dont le montant n'avait pas été modifié par la nouvelle cotisation de 1998, la Cour n'avait pas à se demander s'il devait y avoir annulation ou renonciation. Par conséquent, le reste des présents motifs sera uniquement axé sur la décision de ne pas renoncer aux intérêts dûs par l'appelant ou de ne pas annuler ces intérêts. Je me propose d'examiner les points ci-après énoncés :

1.              Le ministre et ses délégués ont-ils agi « avec diligence » en examinant la question de l'obligation fiscale de l'appelant pour les années 1989 à 1992?

2.              La disposition en matière d'équité figurant au paragraphe 220(3.1) s'applique-t-elle aux intérêts courus du fait que l'on a tardé à traiter les avis d'opposition de l'appelant?

3.              Le délégué du ministre a-t-il tenu compte de toutes les considérations pertinentes en déterminant s'il convenait d'appliquer les dispositions en matière d'équité de la Loi de l'impôt sur le revenu?


Dispositions législatives pertinentes

[10]            Loi de l'impôt sur le revenu

152. (1) Le ministre, avec diligence, examine la déclaration de revenu d'un contribuable pour une année d'imposition, fixe l'impôt pour l'année, ainsi que les intérêts et les pénalités éventuels payables et détermine:

a) le montant du remboursement éventuel auquel il a droit en vertu des articles 129, 131, 132 ou 133, pour l'année;

b) le montant d'impôt qui est réputé par les paragraphes 120(2), 122.5(3), 122.51(2), 125.4(3), 125.5(3), 127.1(1), 127.41(3) ou 210.2(3) ou (4) avoir été payé au titre de l'impôt payable par le contribuable en vertu de la présente partie pour l'année.

152. (1) The Ministre shall, with all due dispatch, examine a taxpayer's return of income for a taxation year, assess the tax for the year, the interest and penalties, if any, payable and determine

(a) the amount of refund, if any, to which the taxpayer may be entitled by virtue of section 129, 131, 132 or 133 for the year; or

(b) the amount of tax, if any, deemed by subsection 120(2), 122.5(3), 122.51(2), 125.4(3), 125.5(3), 127.1(1), 127.41(3) or 210.2(3) or 210.2(4) to be paid on account of the taxpayer's tax payable under this Part for the year.

165. (3) Sur réception de l'avis d'opposition, le ministre, avec diligence, examine de nouveau la cotisation et l'annule, la ratifie ou la modifie ou établit une nouvelle cotisation. Dès lors, il avise le contribuable de sa décision par écrit.

165. (3) On receipt of a notice of objection under this section, the Minister shall, with all due dispatch, reconsider the assessment and vacate, confirm or vary the assessment or reassess, and shall thereupon notify the taxpayer in writing of the Minister's action.

220. (3.1) Le ministre peut, à tout moment, renoncer à tout ou partie de quelque pénalité ou intérêt payable par ailleurs par un contribuable ou une société de personnes en application de la présente loi, ou l'annuler en tout ou en partie. Malgré les paragraphes 152(4) à (5), le ministre établit les cotisations voulues concernant les intérêts et pénalités payables par le contribuable ou la société de personnes pour tenir compte de pareille annulation.

220. (3.1) The Minister may at any time waive or cancel all or any portion of any penalty or interest otherwise payable under this Act by a taxpayer or partnership and, notwithstanding subsections 152(4) to 152(5), such assessment of the interest and penalties payable by the taxpayer or partnership shall be made as is necessary to take into account the cancellation of the penalty or interest.

Analyse

Le ministre et ses délégués ont-ils agi « avec diligence » ?


[11]            La demande que l'appelant avait initialement faite aux fins de la renonciation ou de l'annulation était uniquement fondée sur l'allégation selon laquelle on avait tardé à traiter les avis d'opposition. Néanmoins, le juge des requêtes a tenu compte du temps qu'il avait fallu pour procéder à la vérification et établir la nouvelle cotisation initiale. Eu égard aux circonstances dans leur ensemble, je suis d'accord avec le juge pour dire qu'il n'y a pas eu retard excessif de la part de l'intimé au cours de cette période.

[12]            J'examinerai donc la question relative au temps qui s'est écoulé entre la date du dépôt de l'avis d'opposition et la date de la nouvelle cotisation finale. Le paragraphe 165(3) de la Loi de l'impôt sur le revenu exige que le ministre agisse « avec diligence » sur réception d'un avis d'opposition.

[13]            Le sens de l'expression « avec diligence » a été examiné par la Cour canadienne de l'impôt et par la présente cour. Dans la décision J. Stollar Construction Ltd. c. le ministre du Revenu national, 89 D.T.C. 134, Monsieur le juge Bonner, de la Cour canadienne de l'impôt, a statué, à la page 136, que l'exigence selon laquelle le ministre devait agir « avec toute la diligence possible » visait à « protéger l'individu en lui permettant d'être fixé au sujet de sa situation financière le plus rapidement possible » . En ce qui concerne ce qui constituait une période raisonnable, le juge a dit ce qui suit :

L'expression anglaise « with all due dispatch » et l'expression française « avec toute la diligence possible » expriment une intention manifeste du législateur d'exiger que le ministre agisse dans un délai raisonnable dont la durée variera selon les circonstances de chaque cas. Le libellé des lois ne permet pas que soient formulés des délais rigides.


Eu égard aux circonstances de l'affaire dont il était saisi (dans laquelle il avait fallu six ans pour traiter une déclaration de revenu), le juge a conclu qu'il importait de noter que le ministre n'avait pas présenté de preuve en vue d'expliquer un retard qui, à première vue, était injustifiable. Le juge a conclu ce qui suit :

Il n'est ni désirable, ni possible d'identifier la dernière journée de la période raisonnable requise pour fixer une cotisation dans les circonstances de cette affaire. Qu'il suffise de dire que l'expression « avec toute la diligence possible » signifie encore quelque chose et qu'il faut conclure que la période à laquelle elle fait allusion a expiré bien avant que la cotisation faisant l'objet de l'appel ne soit fixée.

[14]            Une approche similaire a été adoptée par Monsieur le juge en chef adjoint Christie, de la Cour canadienne de l'impôt, dans la décision Ginsberg c. La Reine, 94 D.T.C. 1430, à la page 1437 :

Je crois que, en cas de retard qui, à première vue, indique l'omission de la part du ministre d'examiner la déclaration de revenus et de fixer l'impôt avec toute la diligence possible au sens du paragraphe 152(1) de la Loi, il incombe à l'intimé d'établir, en présentant des éléments de preuve relatifs à la façon dont la déclaration a été traitée, que le retard n'était pas déraisonnable. [...]

En l'espèce, un an et demi s'est écoulé entre le moment de la réception des déclarations et celui de l'établissement des cotisations. À première vue, cela me paraît ne pas répondre aux exigences du paragraphe 152(1) selon lesquelles les déclarations de revenus doivent être examinées et l'impôt fixé avec toute la diligence possible. Si on avait prouvé que les déclarations de l'appelant présentaient des caractéristiques particulières qui justifiaient le retard de 18 mois, alors les exigences de la loi auraient été respectées. Mais aucun élément de preuve à cet effet n'a été soumis à la Cour en l'espèce.

Tout en accueillant l'appel à l'égard de l'effet de l'omission du ministre d'agir avec toute la diligence possible, la présente cour souscrivait néanmoins à l'approche que le juge de la Cour de l'impôt avait adoptée en déterminant si le ministre avait ainsi agi. Voir R. c. Ginsberg, 96 D.T.C. 6372, au paragraphe 7.


[15]            Les décisions précitées se rapportaient à l'emploi de l'expression « avec toute la diligence possible » figurant à l'article 152, mais j'estime que le raisonnement de la Cour s'applique également à l'emploi d'une expression similaire au paragraphe 165(3).

[16]            En l'espèce, j'estime qu'une fois que l'examen du dossier de l'appelant avait commencé au mois de janvier 1998, cet examen a été mené à bonne fin dans un délai raisonnable. Par conséquent, j'axerai mon examen sur la période de 31 mois qui s'est écoulée avant le début de l'examen complet du dossier de l'appelant. Quant aux 27 autres mois, il n'y a pas eu de communications entre Revenu Canada et l'appelant.

[17]            À mon avis, ce retard est à première vue injustifiable, en particulier s'il est tenu compte du fait qu'une fois que les oppositions ont commencé à être examinées, l'examen a été mené à bonne fin en un peu plus de six mois. La seule explication que le ministre a donnée pour justifier le retard est qu'il y avait eu des changements de personnel dans son bureau. À mon avis, cela est insuffisant pour satisfaire à l'obligation qui incombe au ministre de démontrer que le retard n'était pas déraisonnable. Je conclus donc qu'en laissant une période déraisonnable s'écouler avant d'établir la nouvelle cotisation de l'appelant et d'informer celui-ci du résultat, le ministre n'a pas agi avec diligence comme l'exige la Loi.

[18]            Le retard du ministre a entraîné l'accumulation de frais d'intérêt additionnels élevés. J'examinerai maintenant la question de savoir si la réparation demandée par l'appelant est fondée.


Le paragraphe 220(3.1) permet-il au ministre de renoncer aux intérêts courus pendant le traitement des avis d'opposition ou de les annuler?

[19]            Au cours des plaidoiries, l'intimé a soutenu que les dispositions en matière d'équité de l'article 220 s'appliquent uniquement en vue de remédier aux iniquités qui se sont produites au cours de la période qui a précédé le moment où le contribuable fait initialement l'objet d'une cotisation en vertu de l'article 152 de la Loi. Il a été soutenu que si cette cotisation ne plaît pas au contribuable et si celui-ci ne veut pas payer le montant exigé, il peut interjeter appel devant la Cour de l'impôt.

[20]            À mon avis, il ne peut en être ainsi. Tout d'abord, rien ne montre expressément que le législateur ait voulu que le paragraphe 220(3.1) s'applique uniquement aux mesures prises en vertu de l'article 152. Même si la disposition en matière d'équité fait mention de deux paragraphes de l'article 152, elle le fait dans le contexte de son application expresse, malgré ces paragraphes. Fait plus important, si la position de l'intimé était retenue, le contribuable serait privé de tout recours dans le cas où son avis d'opposition ne serait pas examiné dans un délai raisonnable. La procédure d'opposition est en fait un mécanisme visant au règlement des litiges entre le contribuable et Revenu Canada. À mon avis, la présente cour doit hésiter à priver les contribuables de l'avantage de cette procédure de règlement, qui est le résultat obtenu si le paragraphe 220(3.1) est jugé inapplicable au stade de l'opposition.


[21]            Je déterminerai maintenant s'il était raisonnable pour le directeur de refuser d'accorder une réparation à l'appelant.

Le délégué du ministre a-t-il tenu compte de toutes les considérations pertinentes?

[22]            Le juge des requêtes a énoncé les facteurs que le décideur prend en considération dans sa décision :

Le décideur [...] a tenu compte de ce qui suit dans sa décision :

a) la requête présentée par le demandeur et les raisons de cette requête;

b) le demandeur est un important actionnaire des sociétés Hillier's Trades Limited et Northern Home Products Limited;

c) lorsqu'il a produit sa déclaration de revenus pour l'année d'imposition 1989, le demandeur n'a pas, dans le calcul de son revenu total, inclus un revenu de 37 836 $;

d) lorsqu'il a produit sa déclaration de revenus pour l'année d'imposition 1990, le demandeur n'a pas, dans le calcul de son revenu total, inclus un revenu de 34 632 $;

e) lorsqu'il a produit sa déclaration de revenus pour l'année d'imposition 1991, le demandeur n'a pas, dans le calcul de son revenu total, inclus un revenu de 40 386 $;

f) lorsqu'il a produit sa déclaration de revenus pour l'année d'imposition 1992, le demandeur n'a pas, dans le calcul de son revenu total, inclus un revenu de 17 615 $;

g) le demandeur ne conteste pas son obligation;

h) le système d'autocotisation fiscale fait obligation au contribuable de déclarer son revenu comme il se doit;

i) les lignes directrices établies dans la circulaire d'information no 92-2 et dans la Directive interne ARD-92-01 en date du 16 avril 1992 n'ont pas dans ces conditions été respectées.


[23]            À mon avis, cette liste démontre qu'en prenant sa décision, le délégué du ministre a tenu compte de facteurs non pertinents tout en omettant de tenir compte d'au moins un facteur fort important et pertinent. Les éléments c) à f) figurant sur la liste se rapportent à l'omission de l'appelant de déclarer tout son revenu dans chacune des années d'imposition. Toutefois, ces montants ont été découverts dans le cadre de la vérification initiale et de l'établissement de la nouvelle cotisation et les pénalités et intérêts ont été fixés à ce moment-là. Ils ne peuvent pas se rapporter à l'iniquité alléguée par l'appelant - à savoir le temps qu'il a fallu pour examiner les avis d'opposition.

[24]            Selon l'élément g), « le demandeur ne conteste pas son obligation » . En déposant des avis d'opposition, l'appelant a de fait contesté le montant de son obligation. Par conséquent, entre le moment où les avis ont été déposés au mois de juin 1995 et celui où la nouvelle cotisation finale a été établie, au mois d'août 1998, l'appelant ne savait pas quelle était son obligation réelle. En fin de compte, le montant total de l'obligation a été réduit de beaucoup.

[25]            Toutefois, l'erreur cruciale que le décideur a commise se rapportait à l'omission de tenir compte des retards de traitement, ce qui, comme je l'ai déjà dit, a eu pour effet que le contribuable n'a pas été informé dans un délai raisonnable, de l'existence d'une somme en souffrance. Revenu Canada reconnaît lui-même que pareils retards entrent en ligne de compte aux fins de la renonciation aux intérêts ou de l'annulation de ces intérêts. La circulaire d'information 92-2, intitulée : Lignes directrices concernant l'annulation des intérêts et pénalités, renferme des lignes directrices à l'intention des décideurs qui examinent les demandes de renonciation ou d'annulation. Le paragraphe 6 prévoit notamment ce qui suit :

6. L'annulation des intérêts ou des pénalités ou la renonciation à ceux-ci peuvent également être justifiées si ces intérêts ou pénalités découlent principalement d'actions attribuables au Ministère comme dans les cas suivants :

6. Cancelling or waiving interest or penalties may also be appropriate if the interest or penalty arose primarily because of actions of the Department, such as:

a) des retards de traitement, ce qui a eu pour effet que le contribuable n'a pas été informé, dans un délai raisonnable, de l'existence d'une somme en souffrance; [...]

(a) processing delays which result in the taxpayer not being informed, within a reasonable time, that an amount was owing; ...

[26]            Dans la lettre qu'il a envoyée à l'appelant, le directeur a mentionné le retard du ministère comme raison possible de renoncer aux intérêts, mais dans la lettre rien n'indique qu'il se soit de fait demandé si pareil retard s'était produit. De fait, dans l'affidavit qu'il a souscrit aux fins de la procédure engagée devant le tribunal d'instance inférieure, que le juge des requêtes a cité et qui est également cité au paragraphe 22 ci-dessus, le directeur ne mentionne pas le retard parmi les facteurs dont il a tenu compte. L'omission du directeur de tenir compte du retard lorsqu'il s'est agi de prendre sa décision était déraisonnable.


Conclusion

[27]            J'accueillerais l'appel avec dépens. L'affaire est renvoyée au ministre du Revenu national pour réexamen de la demande que l'appelant a présentée en vue de la renonciation aux intérêts ou de l'annulation des intérêts, conformément aux présents motifs.

« J. Edgar Sexton »

Juge

« Je souscris à cet avis.

Le juge en chef J. Richard. »

« Je souscris à cet avis.

Le juge Marshall Rothstein. »

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad.a.


COUR D'APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

NO DU DOSSIER :                                                         A-837-00

INTITULÉ DE LA CAUSE :                                       LLOYD D. HILLIER

c.

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

LIEU DE L'AUDIENCE :                                             St. John's (Terre-Neuve)

DATE DE L'AUDIENCE :                                           le 31 mai 201

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :                              Monsieur le juge Sexton

MOTIFS CONCOURANTS PAR :                           Monsieur le juge en chef Richard

Monsieur le juge Rothstein

DATE DES MOTIFS :                                                  le 11 juin 2001

ONT COMPARU

M. Edward P. Noonan, c.r.                                              POUR L'APPELANT

M. John P. Bodurtha                                                         POUR L'INTIMÉ

M. Marcel Prevost

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

Noonan Oakley                                                                 POUR L'APPELANT

St. John's (Terre-Neuve)

M. Morris Rosenberg                                                        POUR L'INTIMÉ

Sous-procureur général du Canada                                 

Halifax (Nouvelle-Écosse)

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