A-616-96
MONTRÉAL (QUÉBEC), LE 30 JANVIER 1997.
CORAM : MONSIEUR LE JUGE MARCEAU
MADAME LE JUGE DESJARDINS
MONSIEUR LE JUGE CHEVALIER
AFFAIRE INTÉRESSANT LE CODE CANADIEN DU TRAVAIL,
L.R.C. (1985), ch. L-2, modifié
et
UNE DEMANDE D"ACCRÉDITATION À TITRE D"AGENT NÉGOCIATEUR AUX TERMES DE L"ARTICLE 24 DU CODE
ENTRE : REDERIET A.P. MOLLER A/S,
partie requérante,
ET
SYNDICAT INTERNATIONAL DES MARINS CANADIENS,
partie intimée.
J U G E M E N T
La présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.
Louis Marceau
J.C.A.
Traduction certifiée conforme ____________________
Bernard Olivier, LL. B.
A-616-96
CORAM : LE JUGE MARCEAU
LE JUGE DESJARDINS
LE JUGE SUPPLÉANT CHEVALIER
AFFAIRE INTÉRESSANT LE CODE CANADIEN DU TRAVAIL, L.R.C. (1985), ch. L- 2, modifié, |
ET UNE DEMANDE D"ACCRÉDITATION À TITRE D"AGENT NÉGOCIATEUR AUX TERMES DE L"ARTICLE 24 DU CODE |
ENTRE :
REDERIET A.P. MOLLER A/S,
partie requérante,
et
SYNDICAT INTERNATIONAL DES MARINS CANADIENS,
partie intimée.
Audience tenue à Montréal (Québec), le jeudi 30 janvier 1997.
Jugement rendu à l"audience le jeudi 30 janvier 1997.
MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR PRONONCÉS PAR LE JUGE MARCEAU
A-616-96
CORAM : LE JUGE MARCEAU
LE JUGE DESJARDINS
LE JUGE SUPPLÉANT CHEVALIER
AFFAIRE INTÉRESSANT LE CODE CANADIEN DU TRAVAIL, L.R.C. (1985), ch. L- 2, modifié,
ET UNE DEMANDE D"ACCRÉDITATION À TITRE D"AGENT NÉGOCIATEUR AUX TERMES DE L"ARTICLE 24 DU CODE |
ENTRE :
REDERIET A.P. MOLLER A/S,
partie requérante,
et
SYNDICAT INTERNATIONAL DES MARINS CANADIENS,
partie intimée.
MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR
(Prononcés à l"audience à Montréal (Québec),
le jeudi 30 janvier 1997.)
LE JUGE MARCEAU
Malgré leur excellente plaidoirie, les avocats de la partie requérante n"ont pas réussi à nous convaincre du bien-fondé de la demande.
Le Conseil canadien des relations du travail a conclu qu"il avait la compétence pour délivrer l"ordonnance d"accréditation visant les marins non brevetés embauchés par la partie requérante pour travailler à bord des navires "Maersk Chignecto" et "Maersk Gabarus", suite à un raisonnement sans doute discutable. Dans son analyse, le Conseil s"est d"abord demandé si les activités de la partie requérante relevaient de la compétence fédérale ou provinciale. Après avoir déterminé qu"elles relevaient de la compétence fédérale comme elles ne pouvaient manifestement pas être de nature provinciale, vu leur envergure internationale, le Conseil s"est demandé si le droit international écartait cette compétence. Ce raisonnement nous paraît aller à rebours. À notre avis, il faut d"abord déterminer si le Parlement a la compétence, reconnue en droit international, pour promulguer une mesure législative touchant les activités de la partie requérante bien qu"elles soient d"envergure internationale et que la partie requérante soit une société étrangère. Dans l"affirmative, il faut ensuite déterminer si le Parlement a, de fait, adopté une telle mesure législative et accordé au Conseil le pouvoir de remplir son mandat relativement à ces activités.
Nous n"avons pas à analyser la question de savoir si le Parlement a la compétence législative pour réglementer les activités internes de navires battant pavillon canadien au-delà des limites territoriales du Canada. L"article 94 de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer impose même à l"État du pavillon l"obligation positive d"exercer cette compétence. En effet, il serait absurde qu"un navire puisse se soustraire à l"application du droit de l"État de son pavillon, sanctionnée au plan international, en évitant simplement de naviguer dans les eaux territoriales de ce dernier. Rendons justice à la partie requérante : elle ne conteste nullement cette première proposition. Elle prétend plutôt que le Parlement aurait très bien pu conférer au Conseil une compétence englobant des activités comme celles de la partie requérante mais qu"il ne l"a pas fait. Dans ses observations, elle affirme qu"une saine interprétation des articles 2 et 4 du Code canadien du travail , qui doivent servir de fondement en vue de déterminer la compétence du Conseil, ne permet pas de conclure que le champ d"application du Code avait la même portée que le champ de compétence fédérale. Le Code ne s"applique pas aux activités visées en l"espèce car la partie requérante n"est pas un employeur canadien et ses activités ne se déroulent pas en territoire canadien, même si le navire utilisé pour mener ces activités bat pavillon canadien. En somme, la partie requérante prétend que le Code ne s"applique pas vu l"absence totale de lien avec le Canada.
Nous ne sommes pas d"accord. Examinons de nouveau les articles 2 et 4 du Code :
2. Les définitions qui suivent s'appliquent à la présente loi. |
"entreprises fédérales" Les installations, ouvrages, entreprises ou secteurs d'activité qui relèvent de la compétence législative du Parlement, notamment : |
a) ceux qui se rapportent à la navigation et aux transports par eau, entre autres à ce qui touche l'exploitation de navires et le transport par navire partout au Canada; |
[...] |
c) les lignes de transport par bateaux à vapeur ou autres navires, reliant une province à une ou plusieurs autres, ou débordant les limites d'une province; |
[...] |
i) les installations, ouvrages, entreprises ou secteurs d'activité ne ressortissant pas au pouvoir législatif exclusif des législatures provinciales; |
j) les entreprises auxquelles les lois fédérales au sens de la Loi sur l'application extracôtière des lois canadiennes s'appliquent en vertu de cette loi et de ses règlements d'application. [...] |
4. La présente partie s'applique aux employés dans le cadre d'une entreprise fédérale et à leurs syndicats, ainsi qu'à leurs employeurs et aux organisations patronales regroupant ceux-ci. |
À notre avis, rien dans ces dispositions ne limite explicitement l"application du Code de la façon suggérée par la partie requérante, et nous n"y voyons rien qui forcerait celui qui en fait l"interprétation à considérer qu"elles contiennent pareille limite. Pour que la Partie I s"applique, il suffit que l"activité visée soit liée à des "installations, ouvrages, entreprises ou secteurs d'activité" qui relèvent de la compétence législative du Parlement. La partie requérante soutient que les autorités canadiennes ne peuvent intervenir que s"il existe un lien entre l"activité visée et le Canada. En ce qui concerne le lien, qui doit être examiné à la lumière de toutes les circonstances, on peut difficilement nier son existence car les navires appartiennent à une société canadienne, battent pavillon canadien et ont un équipage formé de citoyens canadiens recrutés au Canada et jouissant de tous les avantages que confèrent les lois canadiennes. En ce qui concerne la question de l"intervention des autorités canadiennes, nous estimons que le fait que tous les employés visés soient des citoyens canadiens dont les conditions d"emploi sont régies, en principe, par le droit canadien, justifie en soi une telle intervention.
Nous ajoutons que le résultat nous paraît tout à fait naturel et équitable : quiconque se réclame de la protection du pavillon canadien et profite des avantages des lois canadiennes doit remplir les obligations et assumer les responsabilités que ces lois, de même que toute disposition législative applicable en vertu de celles-ci, lui imposent.
Pour conclure, nous estimons que la décision du Conseil était bien fondée en droit et que celui-ci est compétent, en l"espèce. La demande sera rejetée.
"Louis Marceau"
J.C.A.
Traduction certifiée conforme ________________
Bernard Olivier, LL. B.
COUR D"APPEL FÉDÉRALE
A-616-96
AFFAIRE INTÉRESSANT LE CODE CANADIEN DU TRAVAIL, L.R.C. (1985), ch. L-2, modifié,
ET UNE DEMANDE D"ACCRÉDITATION À TITRE D"AGENT NÉGOCIATEUR AUX TERMES DE L"ARTICLE 24 DU CODE
ENTRE :
REDERIET A.P. MOLLER A/S,
partie requérante,
et
SYNDICAT INTERNATIONAL DES MARINS CANADIENS,
partie intimée.
MOTIFS DU JUGEMENT
DE LA COUR
COUR D"APPEL FÉDÉRALE
AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER
NO DU GREFFE : A-616-96 |
INTITULÉ DE LA CAUSE : Rederiet A.P. Moller A/S
- c. - |
Syndicat international des marins canadiens
LIEU DE L"AUDIENCE : Montréal (Québec)
DATE DE L"AUDIENCE : le jeudi 30 janvier 1997
MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR PAR : le juge Marceau
le juge Desjardins
le juge suppléant Chevalier
MOTIFS PRONONCÉS À L"AUDIENCE PAR : le juge Marceau
ONT COMPARU :
Mme Patricia J. Wilson pour la partie requérante
M. François Lemieux
M. Gary Waxman pour la partie intimée |
PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :
Osler, Hoskin & Harcourt
Ottawa (Ontario) pour la partie requérante
Syndicat international des marins canadiens
Montréal (Québec) pour la partie intimée